Bobby Fischer

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Robert James Fischer
Bobby Fischer (g) et John Collins
Bobby Fischer (g) et John Collins
Surnom Bobby Fischer
Naissance 9 mars 1943
à Chicago, États-Unis
Décès 17 janvier 2008 (à 64 ans)
à Reykjavík, Islande
Nationalité Islande Islande
États-Unis États-Unis
Profession Joueur d'échecs

Robert James Fischer dit Bobby Fischer (né le 9 mars 1943 à Chicago et mort le 17 janvier 2008 à Reykjavík) est un joueur d'échecs américain devenu islandais en 2005. Champion du monde de 1972 à 1975, il est considéré par les connaisseurs comme l'un des (sinon le) plus grands joueurs d'échecs de tous les temps. Il est également vu comme celui qui a contribué de façon décisive à l'amélioration des conditions financières et matérielles des joueurs d'échecs professionnels de par ses revendications exubérantes.

Sommaire

[modifier] Les débuts

Son père, Gerhardt Fischer, biophysicien allemand, divorce de sa mère Regina Wender (1913 - 1997), américaine d'ascendance juive allemande, en 1945.

En 2002, une enquête menée par deux journalistes du Philadelphia Enquirer montre cependant qu'il est probable que le père biologique de Fischer soit en réalité le physicien juif hongrois Paul Nemenyi. Nemenyi a participé au projet Manhattan et le FBI a soupçonné Regina d'être une espionne russe[1].

C'est sa mère qui s'occupe de son éducation et de celle de sa sœur Joan, son aînée de six ans. Bobby ne verra plus son père. Regina et ses deux enfants déménagent à Mobile dans l'Arizona, puis s'installent deux ans plus tard à Brooklyn.

Un jour de 1949, Joan, pour distraire son petit frère, lui achète un jeu d'échecs au bazar du coin. Il apprend seul les règles à l'aide du feuillet joint au jeu. Ce n'est au début qu'un jeu comme les autres pour le petit Bobby. Néanmoins, la lecture d'un livre contenant des parties d'échecs change la donne. Regina, sa mère, raconte que lorsqu'il lisait ce livre, il était inutile d'essayer de lui adresser la parole.

Sa mère l'inscrit ensuite au Brooklyn Chess Club. Il participe à son premier tournoi à l'âge de dix ans.

En 1954, Bobby, n'ayant plus de rivaux dignes de ce nom dans le club de Brooklyn, s'inscrit alors au prestigieux Manhattan Chess Club, fréquenté par les meilleurs joueurs du pays.

Il s'essaye ensuite en 1956 au championnat open des États-Unis et se classe quatrième. Il remporte cependant, la même année, le championnat des États-Unis junior, ce qui constitue son premier réel succès.

[modifier] Grand-maître à 15 ans

En janvier 1958, Fischer devient champion des États-Unis à l'âge de 14 ans. Grâce à ce titre, il est qualifié pour participer au tournoi interzonal qui constitue la première marche vers le titre de champion du monde. Cependant, personne n'est prêt à parier sur la qualification du jeune Fischer (les six premiers des interzonaux étant qualifiés pour le championnat du monde). C'est donc une surprise lorsqu'il termine cinquième ex æquo de cette compétition, ce qui lui permet de se voir conférer le titre de grand-maître international.

[modifier] Le championnat du monde

Fischer est dès l'âge de 16 ans candidat au titre mondial, mais n'a pas la réussite escomptée. Lors du tournoi des candidats de 1962, il dénonce la collusion entre les trois premiers du tournoi, Tigran Petrossian, Paul Kérès et Efim Geller, qui auraient conclu de courtes parties nulles entre eux pour préserver leur énergie contre lui[2]. La FIDE change les règles du cycle de qualification en organisant des matches plutôt qu'un tournoi.

En 1967, Fischer se retire du tournoi de qualification de Sousse en Tunisie, qu'il domine largement, car il refuse d'affronter consécutivement plusieurs joueurs soviétiques sans avoir de jour de repos.

En 1970, il est repêché, grâce au désistement de dernière minute de son compatriote Pál Benkő, pour disputer le tournoi de qualification de Palma de Majorque qui se tient du 9 novembre au 12 décembre. Après un très bon départ, il subit une petite baisse de régime, mais se ressaisit sur la fin en remportant ses 7 dernières parties (dont l'ultime par forfait) pour gagner le tournoi avec 3,5 points d'avance sur ses plus proches poursuivants.

Par la suite, au mois de mai 1971 à Vancouver au Canada, il écrase le Soviétique Mark Taimanov par le score de 6 à 0. En juillet 1971, à Denver aux États-Unis, il écrase également le Danois Bent Larsen 6 à 0, malgré la conviction du maître danois de sa victoire. À Buenos Aires au mois de septembre 1971, Fischer fait face à Tigran Petrossian, joueur réputé pour sa solidité en défense. Après une défaite de chaque côté et trois parties nulles, Fischer aligne quatre gains et vainc l'ancien champion du monde par 6,5 à 2,5. Avant de perdre une partie contre Petrossian, Fischer a établi une série de 20 victoires consécutives en partie officielle, un record à ce niveau.

Icône de détail Article détaillé : championnat du monde d'échecs 1972.

À l'issue d'un match mémorable en Islande, surnommé le match du siècle, qui tient le public en haleine, autant pour les parties que pour les péripéties hors compétition (menace de Fischer de ne pas participer, son forfait lors de la deuxième partie, ses exigences sur le placement des caméras ou le contact avec le public, etc.), il devient champion du monde à l'été 1972, en battant assez facilement le Russe Boris Spassky, champion du monde sortant. Ce succès, largement médiatisé, met temporairement fin à 24 ans d'hégémonie soviétique sur le monde des échecs, et est un tournant dans la compétition entre les États-Unis et l'URSS en pleine guerre froide.

Mais Fischer ne dispute plus aucune partie depuis qu'il a conquis ce titre mondial. En 1975, il perd donc son titre par forfait lorsqu'il refuse les conditions du match dont le but était de remettre en jeu son titre contre son adversaire désigné, le jeune Soviétique Anatoli Karpov (contre qui il n'a jamais disputé la moindre partie).

[modifier] Fin de carrière

Depuis 1975 et l'abandon de son titre, sa personnalité déjà fantasque bascule dans une paranoïa grandissante, notamment contre les juifs et les États-Unis qu'il accuse de comploter contre lui[3]. Certains attribuent son comportement à un désordre psychiatrique, le syndrome d'Asperger[4],[5] ou la schizophrénie paranoïaque[6].

Il disparaît complètement du monde échiquéen pour ne réapparaître qu'en 1992 pour un match revanche contre Boris Spassky, match que les organisateurs et Fischer qualifient abusivement de championnat du monde, Fischer prétextant ne jamais avoir perdu son titre de 1972 sur l'échiquier. Ce pseudo-match se tient en Yougoslavie alors en pleine guerre civile et sous embargo des États-Unis. Fischer remporte à nouveau le duel, et empoche la somme de 3,35 millions de dollars[7]. Il est alors poursuivi dans son propre pays pour violation de l'embargo et fraude fiscale ; il risque une peine de dix ans d'emprisonnement.

En 1989, il dépose un brevet pour une pendule d'échecs, qui ajoute un certain temps supplémentaire pour chaque coup joué afin d'éviter le Zeitnot. La « cadence Fischer » a été depuis adoptée par la Fédération internationale des échecs et est souvent pratiquée en tournoi dans la dernière phase de jeu. En 1996, il crée une variante du jeu d'échecs : les échecs aléatoires Fischer ; il refuse depuis de jouer une partie qui ne se déroulerait pas selon ses règles.

Il séjourne ensuite plus ou moins clandestinement dans divers pays, la Hongrie, les Philippines, l'Argentine et le Japon, aidé par des sympathisants. Il y fait quelques brèves apparitions médiatiques, notamment pour des déclarations antisémites très controversées. Le 11 septembre 2001, quelques heures après les attentats de New York et de Washington, interrogé par Pablo Mercado, il s'emporte sur les ondes de Radio Bombo aux Philippines : « C'est une formidable nouvelle, il est temps que ces putains de juifs se fassent casser la tête. Il est temps d'en finir avec les États-Unis une bonne fois pour toutes (...) Je dis : mort aux États-Unis ! Que les États-Unis aillent se faire foutre ! Que les juifs aillent se faire foutre ! Les juifs sont des criminels. (...) Ce sont les pires menteurs et salauds ! On récolte ce qu'on a semé. Ils ont enfin ce qu'ils méritent. C'est un jour merveilleux[3]. »

Le 13 juillet 2004, alors qu'il tente de s'envoler pour Manille, il est arrêté à l'aéroport de Tōkyō-Narita[8] car son passeport américain a été annulé à son insu, il est placé pendant neuf mois dans le centre de détention pour étrangers d'Ushiku au nord-est de Tokyo en attendant son extradition. En décembre 2004, devant l'émoi international causé par sa détention, il demande l'asile politique en Islande[9], lieu de la conquête de son titre de champion du monde. Il obtient finalement la citoyenneté islandaise le 22 février 2005[10] et il peut rejoindre ce pays le 24 mars[11]. Le département d'État américain se déclare alors déçu.

C'est durant cette période qu'il annonce son intention d'épouser Miyoko Watai[12], joueuse d'échecs et présidente de la fédération japonaise avec qui il vit depuis 2000, elle l'accompagnera en Islande.

Il décède en Islande, le jeudi 17 janvier 2008 des suites d'une défaillance rénale. Il avait 64 ans. À sa mort, l'ancien champion du monde Garry Kasparov a déclaré que « Fischer peut tout simplement être considéré comme le fondateur des échecs professionnels et sa domination, bien que de très courte durée, a fait de lui le plus grand de tous les temps[13] ».

Fischer a une fille, Jinky Ong (née en 2000) d'une liaison avec Marilyn Ong[5],[14].

[modifier] Parties

[modifier] Viktor Kortchnoï - Bobby Fischer

Tournoi blitz de Herceg Novi, 1970

1. d4 Cf6 2. c4 g6 3. Cc3 Fg7 4. e4 d6 5. Fe2 0-0 6. Cf3 e5 7. O-O Cc6 8. d5 Ce7 9. Cd2 c5 10. a3 Ce8 11. b4 b6 12. Tb1 f5 (les Noirs sont prêts pour lancer l'attaque côté roi) 13. f3 f4 14. a4 g5 15. a5 Tf6 ! 16. bxc5 ? bxc5 17. Cb3 Tg6 18. Fd2 Cf6 (ou ...h5!) 19. Rh1 g4 (ou 19...h5) 20. fxg4 (forcé à cause de la menace 20...g3 et si 21. h3 Fxh3 etc.) Cxg4 21. Tf3 ? (21. Ff3!) Th6 22. h3 Cg6 23. Rg1 Cf6 24. Fe1 Ch8 !! 25. Td3 Cf7 26. Ff3 Cg5 27. De2 Tg6 28. Rf1 (si 28 Rh2 Dd7 menace 29...Cxh3 etc.) Cxh3 29. gxh3 Fxh3+ 30. Rf2 Cg4+ 31. Fxg4 Fxg4 32. abandon (il n'y a rien à faire contre la menace double 31...Fxe2 et 32...Dh4+)

[modifier] Donald Byrne - Bobby Fischer

Icône de détail Article détaillé : Partie du siècle.

[modifier] Références

  1. (en) Nicholas, Peter, and Clea Benson. Files reveal how FBI hounded chess king. Philadelphia Inquirer. 17 novembre 2002
  2. Un arrangement admis bien plus tard par Youri Averbakh dans une interview au magazine néerlandais Schaaknieuws voir The legend of the Curaçao conspiracy : « The Soviet Union does not exist anymore, the sins can be admitted. "Of course it was rigged," Yuri Averbakh has recently said (in an interview with Jules Welling in the Dutch magazine Schaaknieuws). According to Averbakh, who was in Curaçao as a member of the Soviet delegation, it had been decided that Keres, being an Estonian, should not win, and neither should the Jewish Ukrainian Geller. It had to be the Armenian Petrosyan. Why an Estonian and a Jewish Ukrainian (and the Jewish Russian Korchnoi!) were not suitable and an Armenian was, Averbakh sadly fails to say, or Welling did not ask. »
  3. ab Pierre Barthélémy, « Bobby Fischer sur la diagonale du fou », Le Monde, 18 septembre 2004.
  4. Chess Incarnate Bobby Fischer on the Spectrum
  5. ab (en)Bobby Fischer's final manoeuvre Times Online, 20 avril 2008
  6. Dr Louis Morissette qui le cite en exemple de schizophrène paranoïde
  7. Erich Inciyan, « Le champion du monde d'échecs Bobby Fischer retrouve Reykjavik et la liberté », Le Monde, 25 mars 2005.
  8. (en) « Bobby Fischer detained in Japan (updated) », 16 juillet 2004.
  9. (en) « Fischer to get refuge in Iceland? », 16 décembre 2004.
  10. (en) « Fischer receives an Icelandic passport », 23 février 2005.
  11. (en) « Tumultuous welcome for Fischer in Iceland », 25 mars 2005.
  12. (en) « We want to live together forever », 1er septembre 2004.
  13. « Bobby Fischer sur la diagonale du fou », Le Monde, 18 janvier 2008.
  14. 206. 9 March 2003: How Jinky Ong came into the world

[modifier] Liens externes

[modifier] Sources



Précédé de :
Boris Spassky
Champion du monde d'échecs
1972–1975
Suivi de :
Anatoli Karpov