Syndrome d'Asperger

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Le syndrome d'Asperger est un trouble du développement situé dans la partie haute du spectre autistique. Il affecte la vie sociale de la personne, ses perceptions sensorielles, mais aussi sa motricité.

En tant que trouble envahissant du développement (TED), le syndrome d'Asperger a fait son entrée dans la classification internationale des maladies en 1993 puis dans le manuel diagnostique et statistique des maladies mentales (DSM-IV) en 1994.

Sa caractéristique la plus marquante sont les passions hors-norme dans leur type et leur intensité (« intérêts spéciaux ») de la personne avec le syndrome d'Asperger, relatives par exemple aux sciences et à l'informatique. La personne peut devenir experte d'un domaine restreint.

Le syndrome d'Asperger s'accompagne souvent de traits tels que : hypersensibilité à certains bruits ou aliments, dysgraphie, élocution très particulière (ton de la voix, prosodie, tendance au langage très formalisé même chez les enfants), propension aux routines répétitives.

Plusieurs représentations conceptuelles ont été récemment proposées pour rendre compte du syndrome d'Asperger. Parmi elles :

  • une anomalie de la Théorie de l'esprit : le syndrome d'Asperger serait une difficulté à se représenter les intentions d'autrui (Uta Frith et Simon Baron-Cohen).
  • un cerveau « hypermasculin » : le syndrome d'Asperger serait marqué par une forte amplification des traits habituels du cerveau masculin (Simon Baron-Cohen).

Par commodité de langage, une personne atteinte du syndrome d'Asperger est aussi désignée par le terme « Asperger » ou plus familièrement : un « Aspie ».

Sommaire

[modifier] Historique

L'histoire de la découverte du syndrome d'Asperger remonte aux travaux pionniers du psychiatre autrichien Hans Asperger. Contemporain de Léo Kanner, le père du deuxième grand type d'autisme, Hans Asperger a décrit le comportement particulier d'un groupe d'enfants de sa clinique à Vienne (ISBN 052138608X). Il a utilisé, indépendamment de Léo Kanner, le terme d'autisme pour qualifier leur comportement.

En 1981, un an après la mort de Hans Asperger, la psychiatre anglaise Lorna Wing a publié une étude de 34 cas d'enfants autistes de haut niveau. Elle a donné le nom de « syndrome d'Asperger » au trouble découvert quelques décennies auparavant. Depuis lors, les recherches sur l'autisme de haut niveau se multiplient notamment dans les pays anglophones, contribuant à faire connaître le syndrome d'Asperger au grand public.

Parallèlement, toute une « culture Aspie » s'est mise en place, à travers des sites internet, des associations, des publications autobiographiques.

Suite à un célèbre article de Steve Silberman dans Wired, The Geek Syndrome[1], le nom de « syndrome geek » est aussi employé de manière inappropriée en référence au syndrome d'Asperger.

[modifier] Diagnostic

Le syndrome d'Asperger est considéré comme se situant dans la partie haute du spectre des troubles autistiques, à la différence de l'autisme de Kanner, encore appelé autisme « classique ». La différence principale entre l'autisme de Kanner et le syndrome d'Asperger est l'absence de retard intellectuel, ce qui facilite les thérapies.

Au sein même de la partie haute du spectre autistique, il n'existe pas de consensus sur les critères qui distingueraient le syndrome d'Asperger de l'autisme de haut niveau, ni même sur la nécessité de distinguer autisme et syndrome d'Asperger. Dans un bon nombre de cas, il s'avère difficile de trancher entre l'autisme de haut niveau et le syndrome d'Asperger (ceci est par exemple le cas du conférencier et auteur de livres sur le syndrome d'Asperger Stephen Shore). Les critères de distinction entre l'autisme de haut niveau et le syndrome d'Asperger pourraient être :

  • un asperger présente un QI verbal supérieur au QI performance, à l'inverse d'un autiste de haut niveau ;
  • un asperger souffrirait moins de difficultés dans la vie quotidienne. Cette assertion est en réalité incorrecte.

La prévalence des TED (troubles envahissants du développement) est d'après les estimations les plus récentes de 1 sur 160. Le syndrome d'Asperger représenterait entre 15 et 20% des TED. Pour des raisons toujours discutées, le taux de prévalence des TED a tendance à augmenter au fil du temps. Diverses hypothèses explicatives sont actuellement étudiées (élargissement des critères de diagnostic, pesticides, influence du taux de testostérone pendant la grossesse, présence de traces de mercure, vaccinations, etc).

Le syndrome affecte plus de garçons que de filles, avec un ratio d'environ 8 contre 1. Simon Baron-Cohen soutient que le syndrome d'Asperger serait la manifestation d'un « cerveau hypermasculin », ce qui expliquerait la plus forte prévalence du syndrome d'Asperger chez les garçons. Des études récentes sur le taux de testostérone dans le sang de l'enfant à naître accréditent partiellement cette thèse.

Carol Gray et Tony Attwood ont récemment émis des critères de diagnostic, non reconnus officiellement, tenant compte des découvertes récentes[2].

[modifier] Par régions

[modifier] Au Québec

A l'inverse de la situation qui prévaut en France, le syndrome d'Asperger est bien connu du grand public au Canada, ce qui fait dire à certains qu'il y a eu des diagnostics abusifs. Laurent Mottron écrit dans L'autisme, une intelligence différente : « Une épidémie de syndrome d'Asperger liée à la capacité du diagnostic de TED de générer des services, et à sa notoriété médiatique, s'est donc répandue au Québec ces dernières années ». D'après lui, cette hausse du nombre de diagnostics a conduit à réviser le dossier de nombreuses personnes, atteintes du syndrome, bénéficiant de prestations sociales.

[modifier] En France

Le syndrome a eu du mal à être reconnu, et ne l'est pas encore totalement. Il peut être ignoré par les professionnels ; de plus, émettre un tel diagnostic peut parfois être dangereux vis-à-vis des pairs. Il n'existait pas en tant qu'entité distincte dans les précédentes versions de la CFTMEA, et n'y a été individualisé que dans la dernière version (année 2000).

Cela est dû en partie à une approche des praticiens français différente de celle énoncée par l'OMS : l'approche française remet partiellement en cause l'existence de ce syndrome, du moins en tant qu'entité distincte de l'autisme[3].

L'avis N° 102 du Comité national d'éthique du 6 décembre 2007 a officiellement reconnu les chiffres de 350 000 à 600 000 autistes en France, soit entre 0,6% et 1% de la population, ainsi que les multiples difficultés et déficiences du système français de prise en charge.

[modifier] Définitions officielles

[modifier] Définition du CIM-10

La référence est celle du classement de l'OMS, le CIM-10 F84.5 SYNDROME D'ASPERGER : syndrome de validité nosologique incertaine, caractérisé par une altération qualitative des interactions sociales réciproques, semblable à celle observée dans l'autisme, associée à un répertoire d'intérêts et d'activités restreint, stéréotypé et répétitif. Il se différencie de l'autisme essentiellement par le fait qu'il ne s'accompagne pas d'un retard ou d'une déficience du langage ou du développement cognitif. La plupart des sujets présentant ce trouble ont une intelligence normale, mais ils sont habituellement très maladroits. Le trouble est beaucoup plus fréquent chez les garçons que chez les filles (environ 8 garçons pour 1 fille). Il est très probable qu'au moins certains cas de syndrome d'Asperger représentent en fait des formes atténuées d'autisme ; il n'est pas certain toutefois que ce soit toujours le cas. Les anomalies persistent souvent à l'adolescence et à l'âge adulte et ne semblent guère influencées par l'environnement. Au début de l'âge adulte, le trouble s'accompagne parfois d'épisodes psychotiques.

Le diagnostic repose sur la présence d'altérations qualitatives des interactions sociales et d'un aspect restreint, répétitif et stéréotypé du comportement, des intérêts et des activités (comme dans l'autisme), mais sans retard cliniquement significatif du langage ou du développement cognitif. Le trouble peut s'accompagner de difficultés de communication similaires à celles observées dans l'autisme, mais la présence d'un retard significatif du langage élimine le diagnostic.

Inclure : psychopathie autistique ; trouble schizoïde de l'enfance.

Exclure : Schizophrénie simple (F20.6) ; personnalité anankastique (F60.5) ; trouble de l'attachement de l'enfance (F94.1 et F94.2) ; trouble obsessionnel compulsif (F42) ; trouble schizotypique (F21)

[modifier] Définition du DSM-IV

Le DSM-IV est une classification très générale des troubles psychiatriques et apparentés, faite par l'Association américaine de psychiatrie. On utilise plus souvent le DSM-IV pour les statistiques (a posteriori) que pour les dépistages. C'est pourtant la référence la plus souvent désignée pour définir ce syndrome, DSM-IV F84.5 [299.80] Syndrome d'Asperger :

  • A. Altération qualitative des interactions sociales, comme en témoignent au moins deux des éléments suivants :
  1. altération marquée dans l'utilisation, pour réguler les interactions sociales, de comportements non verbaux multiples, tels que le contact oculaire, la mimique faciale, les postures corporelles, les gestes
  2. incapacité à établir des relations avec les pairs correspondant au niveau du développement
  3. le sujet ne cherche pas spontanément à partager ses plaisirs, ses intérêts ou ses réussites avec d'autres personnes (p.ex. il ne cherche pas à montrer, à désigner du doigt ou à apporter les objets qui l'intéressent)
  4. manque de réciprocité sociale ou émotionnelle
  • B. Caractère restreint, répétitif et stéréotypé, des comportements, des intérêts et des activités, comme en témoigne au moins un des éléments suivants :
  1. préoccupation circonscrite à un ou plusieurs centres d'intérêt stéréotypés et restreints, anormale soit dans son intensité, soit dans son orientation
  2. adhésion apparemment inflexible à des habitudes ou à des rituels spécifiques et non fonctionnels
  3. maniérismes moteurs stéréotypés et répétitifs (p.ex. battements ou torsions des mains ou des doigts, mouvements complexes de tout le corps)
  • C. La perturbation entraîne une altération cliniquement significative du fonctionnement social, professionnel, ou dans d'autres domaines importants.
  • D. Il n'existe pas de retard général du langage significatif sur le plan clinique (p.ex. le sujet a utilisé des mots isolés vers l'âge de 2 ans et des phrases à valeur de communication vers l'âge de 3 ans).
  • E. Au cours de l'enfance, il n'y a pas eu de retard significatif sur le plan clinique dans le développement cognitif ni dans le développement, en fonction de l'âge, des capacités d'autonomie, du comportement adaptatif (sauf dans le domaine de l'interaction sociale) et de la curiosité pour l'environnement.
  • F. Le trouble ne répond pas aux critères d'un autre Trouble envahissant du développement spécifique, ni à ceux d'une Schizophrénie.

Les critères de diagnostic du DSM-IV ont suscité quelques réserves techniques. En particulier, Tony Attwood formule deux critiques principales de ces critères[4]. Premièrement, le DSM-IV fait de l'autisme et du syndrome d'Asperger deux diagnostics incompatibles (avec une règle hiérarchique faisant qu'en cas de double diagnostic d'autisme et de syndrome d'Asperger, le diagnostic d'autisme l'emporte). Le DSM-IV distingue l'autisme du syndrome d'Asperger sur la base du retard du langage, un critère fragile et qui perd toute pertinence chez les adolescents et les adultes.

La deuxième réserve de Tony Attwood porte sur le point D, qui exclut les enfants ayant un retard du langage du diagnostic du syndrome d'Asperger. Dans les faits, beaucoup d'enfants avec le syndrome d'Asperger ont eu un retard du langage. De plus, l'exemple que donne le DSM-IV correspond bel et bien à un enfant ayant un retard du langage.

En tout cas, les critères du DSM sont régulièrement mis à jour, et la prochaine édition prendra sans doute en compte ces réserves techniques.

[modifier] Définition du CFTMEA

La référence française, 1.03 Syndrome d'Asperger :

Présence d'un syndrome autistique sans retard du développement cognitif et surtout du développement du langage. L'autonomie de ce syndrome par rapport à l'autisme infantile, et notamment aux formes d'autisme dites « de haut niveau » est discutée. C'est notamment dans de tels cas qu'ont été décrites des capacités particulières dans certains domaines (mémoire, calcul, etc.), isolées de l'ensemble du fonctionnement psychique.

Correspondance CIM 10 : F 84.5 - syndrome d'Asperger

[modifier] Références

  1. The Geek Syndrome.
  2. Critères de découverte des «Aspies ».
  3. Avis du Dr G. Macé.
  4. Attwood, The complete Guide to Asperger's Syndrome, JKP 2007 chapitre 2

[modifier] Bibliographie

[modifier] Ouvrages scientifiques

  • Le syndrome d'Asperger, et l'autisme de haut niveau de Tony Attwood,- ISBN 2100079182
  • L'autisme, une autre intelligence : Diagnostic, cognition et support des personnes autistes sans déficience intellectuelle, de Laurent Mottron, ISBN 2870098693
  • Sexualité et syndrome d'Asperger d'Isabelle Hénault, ISBN 2804148874
  • Les psychopathies autistiques pendant l'enfance de Hans Asperger, ISBN 2-84324-049-2 (traduction de l'ouvrage historique du « père » du syndrome)

[modifier] Autobiographies

  • Je suis né un jour bleu une autobiographie de Daniel Tammet, ISBN 978-2-35204-028-6
  • Vivre avec le syndrome d'Asperger de Liane Holliday, traduit en français par Josef Schovanec ISBN 2804153320 chez DeBoeck Université (16 novembre 2007)
  • Il était une fois le syndrome d'Asperger de Anne Isabelle ISBN 2-915680-05-1 (témoignage d'une mère)

[modifier] Romans

Millenium de Stieg Larsson

[modifier] Multimédia

  • Mind reading: the interactive guide to emotions DVD-ROM produit par le Centre de recherche sur l'autisme à l'université de Cambridge (le Cambridge University Autism Research Centre).

[modifier] Liens internes

[modifier] Liens externes