Atrocités allemandes

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Les Atrocités allemandes sont les exactions exercées par l'armée impériale allemande au début de la Première Guerre mondiale tant en Flandre qu'en Wallonie et dans les départements de la Meuse des Ardennes et de Meurthe-et-Moselle. La question du droit de la guerre est traité dans l'Encyclopédie de la grande guerre (1914-1918), article qui renvoie lui-même à tous les problèmes posés notamment par les civils dans le droit de la guerre et, entre autres, le fait que la participation de non-belligérants est un acte illégal qui peut être librement sanctionné pénalement par la puissance qui les détiendrait[1]. Bien que ce droit ne semble pas devoir mener à leurs exécutions.

Sommaire

[modifier] Un ouvrage fondamental

C'est aussi le titre d'un ouvrage de deux historiens irlandais, John, Horne et Alan Kramer [2], German Atrocities paru à Dublin en 2001[3], qui se sont penchés sur les exactions commises par l'armée impériale allemande en août et septembre 1914 au début de la Première Guerre mondiale et qui en trois semaines firent des milliers de victimes parmi les civils, suspectés (à tort) d'être des francs-tireurs, amenés devant divers murs et fusillés par des pelotons d'exécution accomplissant de cette manière une justice expéditive au nom des lois de la guerre. 20 000 maisons furent également détruites, notamment 600 à Visé et 1 100 à Dinant en Wallonie, la contrée placée dans l'axe principal de l'invasion et qui subit le plus ces atrocités. L'étendue des massacres en pays wallon de même que la manière dont les faits y ont été vécus et commémorés sont à l'origine d'une mémoire différente de la Première Guerre mondiale en Flandre et en Wallonie, ce que John Horne a également étudié [4], pouvant expliquer (parmi de nombreux autres facteurs), le comportement très différent des régiments flamands et wallons à la Bataille de la Lys. Mais la leçon des événements dépasse le cadre wallon ou belge. Des milliers de victimes tombèrent également, dans les mêmes conditions, en France et en Flandre. En Angleterre et aux États-Unis, en particulier, l'opinion publique fut motivée à la guerre par l'évocation de cette barbarie allemande. Le souvenir des tueries de 1914 allait provoquer en mai 1940 l'Exode fameux qui entraîna vers le sud des populations belges et françaises par millions. Celui-ci est un des éléments d'explication - parmi de nombreux autres et pas le plus important - de la défaite française dans la Bataille de France, principalement lors du franchissement de la Meuse à Sedan les 13 et 14 mai 1940. En effet les routes encombrées par les fuyards gênèrent parfois la montée en ligne de divisions cuirassées.[5]

[modifier] La fausse croyance sincère des Allemands

Les deux historiens qui ont consulté longuement des archives tant françaises que belges et allemandes concluent que la conviction des Allemands selon laquelle des francs-tireurs firent feu sur les troupes allemandes dans les premiers jours de l'attaque d'août 1914 est une « fausse croyance sincère ».

[modifier] Les origines de la croyance dans les francs-tireurs

Les auteurs s'efforcent de comprendre aussi les racines de cette « fausse croyance sincère »:

  • dans un certain conservatisme des dirigeants (politiques et militaires) allemands méfiants à l'égard des insurrections populaires,
  • dans le sentiment confus que la résistance de l'armée belge, à laquelle ils ne s’attendaient pas, avait quelque chose d'illégitime, celle-ci faisant le jeu de la France. Cette croyance persista en 1940 et que 80 habitants de Vinkt en Flandre furent passés par les armes : les chasseurs ardennais venaient d'infliger une sévère défaite à un régiment allemand
  • dans certains éléments techniques de l'armement de l'époque ou certaines particularité des lieux (voyez par exemple Les Rivages (Dinant) )

Dans Apologie pour l'histoire, Marc Bloch écrit: « Beaucoup de maisons belges présentent, sur leurs façades, d'étroites ouvertures, destinées à faciliter aux recrépisseurs le placement de leurs échafaudages ; dans ces innocents artifices de maçons, les soldats allemands, en 1914, n'auraient jamais songé à voir autant de meurtrières, préparées pour les francs-tireurs, si leur imagination n'avait été hallucinée de longue date par la crainte des guérillas. »

[modifier] Les conséquences sur le plan international, l'histoire de la Wallonie, la Deuxième Guerre mondiale

Les massacres eurent lieu en Flandre, en Wallonie, en France, notamment dans le département des Ardennes et le département de la Meuse.

Le plan allemand ayant placé la Wallonie au centre de l'axe d'invasion, une majorité de ces massacres eurent lieu dans cette région : une centaine de localités touchées dans toutes les provinces de Wallonie avec au moins 10 civils fusillés et jusqu'à 674 à Dinant dont plusieurs quartiers furent entièrement incendiés. Il est à noter qu'en mai 2001 une cérémonie de réconciliation eut lieu dans cette localité sous la présidence notamment du secrétaire d'État allemand à l'Armée qui demanda pardon au nom de l'Allemagne dans un discours prononcé en face du pont Charles-de-Gaulle qui réunit les deux rives de la cité mosane et où, depuis les événements de 1914, le drapeau allemand ne flottait plus.

Ces massacres placèrent l'Allemagne dans une position délicate sur le plan international et contribuèrent à son discrédit moral qui put jouer par exemple dans la propagande en vue de l'entrée en guerre des États-Unis en 1917 et du recrutement de volontaires.

Ils expliquent à eux seuls tant la retenue des soldats allemands lors de l'invasion de mai 1940, que la fuite éperdue de millions de civils dès le franchissement de la frontière belge le 10 mai au matin, connu sous le nom d' Exode. Dans une certaine mesure le flux de ces réfugiés put gêner les contre-attaques de blindés français sur Sedan, notamment la 3e Division cuirassée de réserve .

[modifier] Liste des lieux de massacres et des unités allemandes responsables

(Dans l'ordre chronologique)

[modifier] En Belgique

[modifier] En Wallonie

  • Du 5 au 26 août 1914, l'armée impériale allemande passa par les armes plus de 5 000 civils dans une centaine de communes de Wallonie et y détruisit plus de 15 000 maisons, dont 600 à Visé et 1 100 à Dinant soit 70% des exactions commises au début de l'invasion en France et en Belgique.
  • La liste qui suit n'est pas exhaustive car on n'y retient que les localités qui eurent à subir 10 morts au moins.

Le 5 août Berneau Soumagne (118 victimes civiles) ,

le 6 août Battice, (33 victimes civiles) Blegny, Esneux, Sprimont, Magnée Olne, Hermée, Rétinne, Romsée,

le 7 août Warsage, Herstal, Lixhe, Louveigné,

le 8 août Baelen, Francorchamps, Herve, Mélen,

le 10 août Linsmeau,

le 14 août Barchon,

le 15 août Wandre,

le 16 août Visé,

le 18 août Haccourt, Heure-le-Romain ,

le 20 août, Liège, Érezée, Andenne (218 victimes civiles) , Franc-Waret, Somme-Leuze,

le 21 août Arsimont, Auvelais,

le 22 août Anloy, Mussy-la-ville, Neufchâteau, Tintigny (120 victimes civiles), Tamines (383 victimes civiles), Bouffioulx, Couillet, Farciennes, Monceau-sur-Sambre (63 victimes civiles), Montignies-sur-Sambre (35 vitimes civiles) , Charleroi;

le 23 août Ethe (218 victimes civiles), Bièvre, Bouge, Dinant (voir aussi les Rivages (Dinant) et Neffe (674 victimes civiles), Hastière-par-delà (19 victimes civiles), Spontin, Waulsort, Flénu, Jemappes, Nimy, Quaregnon, Ville-Pommerœul Saint-Léger, Virton,

le 24 août Bertrix, Houdemont, Izel, Offagne, Hermeton-sur-Meuse, Namur, Latour (71 victimes civiles),

le 25 août Anthée (13 victimes civiles), Romedenne, Surice,

le 26 août Arlon, et Frasnes-lez-Couvin, dernière localité wallonne touchée.


[modifier] En Flandre

Le 6 août Mouland, au moment des faits village de la provice de Liège

Le 9 août Saint-Trond, le 18 août Tongres, le 19 août Aerschot, Attenrode...

[Liste provisoire/incomplète]

[modifier] En France

Août 1914 : Haybes Le 10 août Jarny, le 11 août Bazailles, le 12 août Badonviller, le 20 août Nomeny

[modifier] Voir aussi

[modifier] Liens internes

Histoire de la Wallonie depuis 1914

Meuse (fleuve)

[modifier] Lien externe

[modifier] Notes

  1. Syméon Karagiannis, Conventions internationales et droit de la guerre in Encyclopédie de la grande guerre (1914-1918) Bayard, Paris, 2004, pp. 83-95, p.86 notamment et p. 95]]
  2. Le premier est Professeur d'histoire contemporaine à Trinity College et membre du comité directeur de l'Historial de Péronne, le second est également Professeur d'histoire contemporaine dans la même université
  3. tr.fr. Les atrocités allemandes, Tallandier, Paris, 2005, 640 pages
  4. Laurence Van Ypersele, La Belgique héroïque et martyre, une mémoire exclusivement francophone? in L. Courtois, JP Delville, F.Rosart, G.Zellis (directeurs) Images et paysages mentaux, des 19e et 20e siècles, de la Wallonie à l'Outremer, Hommage au professeur Jean Pirotte à l'occasion de son éméritat, Academia Bruylant, Louvain-la-neuve, 2007 pp. 130-144
  5. Paul Berben et Bernard Iserlin Les panzers passent la Meuse, Laffont Paris, 1967, ici repris par J'ai lu, pp.326-327