Armistice de Cassibile

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

L’armistice de Cassibile ou armistice court, signé secrètement le 3 septembre 1943, est l'acte par lequel le Royaume d'Italie cesse les hostilités contre les forces anglaises et américaines au cours de la Seconde Guerre mondiale.

L'armistice est même appelé de manière erronée « du 8 septembre », date à laquelle, à 18 h 30[1], est publiquement annoncé par le général Dwight D. Eisenhower depuis radio Alger et une heure plus tard , à 19 h 42, par le maréchal Pietro Badoglio depuis l'agence italienne d'auditions radiophoniques (Ente Italiano Audizioni Radiofoniche - EIAR) [2].

Sommaire

[modifier] Le contexte

Au printemps 1943, dans une situation de graves préoccupations sur le sort de la guerre, Benito Mussolini, chef du régime fasciste, opère à une série de remaniements parmi les hauts dignitaires du l'État, destituant des personnages réputés proches du Roi et non au régime. Selon de nombreux historiens, c'est à la suite de cet acte assez ouvertement hostile au Quirinal que Victor-Emmanuel III aurait rompu les atermoiements et débuté le projet de destitution du duce.

À cette fin, Dino Grandi est approché, c'est un des hiérarques les plus intelligents et prestigieux des dirigeants fascistes, qui s'était déjà mis en évidence comme le seul vrai rival potentiel de Mussolini au sein du parti national fasciste, et duquel il y avait motif à suspecter qu'il ait revu, de beaucoup, son idée sur le régime. À Grandi, au travers d'aimables et fiables médiateurs parmi lesquels le comte d'Acquarone, ministre de la maison royale, et Pietro Badoglio, ils hasardent à l'opportunité d'une alternance et on convient que la période du fascisme original, celle de l’« idée pure » des faisceaux de combat, est finie et que le régime est irrémédiablement enraciné dans un système de gestion du pouvoir, ayant perdu tout espoir de survivre à lui-même.

Grandi réussit à impliquer dans la fronde Giuseppe Bottai, autre hiérarque important qui soutient l'idée originale et "sociale" du fascisme et qui œuvre dans les domaines de la culture, et Galeazzo Ciano, qui en plus d'être ministre et un hiérarque de premier plan, est aussi le gendre du duce. Avec eux, il prépare à l'ordre du jour qu'il présente à la réunion du grand conseil du fascisme le 25 juillet 1943 et qui contient l'invitation destiné au roi à reprendre les rênes de la situation politique. Mussolini est arrêté et remplacé par Badoglio.

La nomination de Badoglio ouvre la route à un enthousiasme populaire qui dure peu car cela ne signifie par la fin de la guerre qui continue au côté des alliés allemands. Au travers de différents canaux, un contact avec les puissances alliées est recherché, cherchant à réactiver les négociations déjà réalisées par Marie-José de Belgique, épouse de Humbert II d'Italie qui peut cette fois bénéficier de l'aval du roi.

[modifier] Vers la signature

C'est à Lisbonne que Badoglio décide d'agir et le général Giuseppe Castellano y est envoyé pour prendre contact avec les forces armées alliées. Séparément l'un de l'autre, deux autres généraux sont envoyés au Portugal; les alliés, déconcertés, comprennent avec difficultés lequel doit être leur interlocuteur, les trois hommes s'abandonnent à une singulière discussion sur leur prétention de supériorité de grade. Castellano identifié comme le « vrai » envoyé, l'ambassadeur anglais Ronald Campbell et les deux généraux envoyés dans la capitale portugaise par le général Dwight David Eisenhower, l'américain Walter Bedell Smith et l'anglais Kenneth Strong, écoutent, sans bien sûr se compromettre, les propositions de reddition de Rome.

La proposition de reddition, en réalité, n'est pas considérée avec une grande euphorie de la part des alliés car le sort de la guerre est déjà engagé vers une probable défaite rapide des armées italiennes, dont Rome était déjà depuis longtemps convaincue, et donc la reddition limite les avantages que les forces alliées aurait pu obtenir par la conquête.

Le 30 août Badoglio convoque Castellano, rentré le 27 de Lisbonne avec quelques perspectives; le général informe d'une demande de rencontre en Sicile avec les alliés par l'intermédiaire de l’ambassadeur anglais au Vatican, D'Arcy Osborne qui collabore avec son homologue américain Myron Charles Taylor. Le choix de ce diplomate n'est pas le fait du hasard et signifie que le Vatican, au travers de monseigneur Montini (le futur pape Paul VI) est impliqué dans les négociations diplomatiques pour le futur après-guerre.

[modifier] Les négociations des conditions

Badoglio demande à Castellano de se faire le porte voix de certaines propositions auprès des alliés: en particulier Castellano doit insister sur le fait que l'Italie accepte l'armistice seulement à condition d'un important débarquement sur la péninsule. Badoglio pousse jusqu'à demander aux alliés de connaître leurs programmes militaires, oubliant peut-être que jusqu’à la signature de l'armistice, la guerre est en cours et personne ne révèle ses plans à l'adversaire.

Parmi les autres conditions qui sont demandés aux alliés celle d'envoyer 2 000 parachutistes sur Rome pour défendre la capitale, demande acceptée parce qu'en partie déjà prévue dans les plans alliés.

Le 31 août, le général Castellano arrive en avion à Termini Imerese et est emmené à Cassibile, dans les environs de Syracuse. Les réunions débutent avec des points de vue différents: Castellano demande des garanties aux alliés en raison de l'inévitable réaction allemande contre l'Italie à la nouvelle de la signature de l'armistice et en particulier un débarquement allié au nord de Rome avant l'annonce de l'armistice. Du coté des alliés, on répond qu'un débarquement en force et l'action d'une division parachutiste sur la capitale, qui est une autre revendication de Castellano, seraient simultanés et non avant la proclamation de l'armistice. En soirée, Castellano rentre à Rome pour en référer.

Le jour suivant, Castellano est reçu par Badoglio; à la rencontre participent le ministre Raffaele Guariglia et les généraux Vittorio Ambrosio et Carboni. Des positions divergentes apparaissent : Guariglia et Ambrosio indiquent que les conditions alliées ne peuvent être qu'acceptées alors que Carboni déclare que le corps d'armée qui dépend de lui, destiné à la défense de Rome, n'est pas en mesure de défendre la ville des allemands en raison du manque de munitions et de carburants. Badoglio, qui au cours de la réunion ne se prononce pas, est reçu par le roi Victor-Emmanuel III qui décide d'accepter les conditions de l'armistice.

[modifier] L'évolution de la situation

Un télégramme de confirmation est envoyé aux alliés; dans celui-ci est annoncé l'envoi du général Castellano. Le télégramme est intercepté par les forces allemandes en Italie déjà soupçonneux d'une telle éventualité et ils se mettent à harceler Badoglio, au travers du commandant de la place de Rome, sur le serment et la parole d'honneur du général le plus médaillé d'Italie pour démentir tous rapports avec les américains, mais en Allemagne, on commence à organiser des contre-mesures.

Le 2 septembre Castellano repart pour Cassibile, pour déclarer l'acceptation de la part des Italiens du texte de l'armistice. Badoglio, qui ne souhaite pas que son nom soit en aucune manière associée à la défaite, cherche à apparaître le moins possible et ne lui délivre pas de délégation de signature pensant de toute évidence que les alliés ne prétendront pas à d'autres documents écris que le télégramme expédié le jour précédent.

Castellano accepte le texte d'un télégramme à envoyer à Rome rédigé par le général Bedell Smith, dans lequel il est demandé les lettres de créance du général, à savoir l'autorisation de signer l'armistice pour le compte de Badoglio, qui ne pourrait ainsi éviter l'apparition de son nom. Le télégramme précise que sans de tels documents, les négociations seraient rompues, ceci naturellement, parce qu'en l'absence d'une accréditation officielle, la signature n'aurait engagé que Castellano et non le gouvernement italien. Aucune réponse n'arrive de Rome, après quoi, en début de matinée du 3 septembre, Castellano pour obtenir la délégation, envoie un second télégramme à Badoglio, lequel cette fois répond presque immédiatement dans lequel il précise que le texte du télégramme du 1er septembre était déjà une acceptation implicite des conditions d'armistice proposées par les alliés.

Mais de ce fait, il continue à manquer la délégation de signature, un nouveau télégramme est attendu de Badoglio qui est reçu à 16h30 qui contient finalement une explicite autorisation qui permet à Castellano de signer le texte de l'armistice pour le compte de Badoglio et qui informe que la déclaration d'autorisation est déposée auprès de l'ambassadeur anglais au Vatican, D'Arcy Osborne.

Ainsi est signé le texte de l'armistice "bref".

[modifier] La signature

La réunion débute à 17 heures : Castellano appose sa signature au nom de Badoglio, et Bedell Smith au nom de Eisenhower. La réunion se termine à 17h30 et le général Eisenhower suspend le départ de cinq cents avions destinés à une mission de bombardement sur Rome.

Harold Macmillan, le ministre anglais détaché auprès du quartier général de Eisenhower, informe immédiatement Winston Churchill que l'armistice est signé « […] sans amendement d'aucun genre ».

Les clauses du texte l'armistice "long" sont alors soumises à Castellano alors qu'elles ont déjà été présentées par l'ambassadeur Campbell au général Zanussi, lui aussi présent à Cassibile depuis le 31 août et qui, pour des raisons peu claires, n'a pas informé son collègue. Bedell Smith souligne que les clauses supplémentaires contenues dans le texte de l'armistice "long" ont une valeur qui dépend de la collaboration italienne à la guerre contre les Allemands.

Dans l'après-midi du 3 septembre Badoglio réunit les ministres de la marine, Raffaele De Courten, de l'aéronautique, Renato Sandalli, de la guerre, Antonio Sorice, et sont présents le général Ambrosio et le ministre de la maison royale Lorenzo Acquarone: il ne fait pas référence à la signature de l'armistice mais évoque simplement les négociations en cours. Il fournit par contre des indications sur les opérations prévues par les alliés; en particulier, il aurait évoqué le débarquement en Calabre, un débarquement plus important à proximité de Naples et l'intervention d'une division de parachutiste sur Rome qui serait associée aux divisions italiennes parce que désormais l'Italie aiderait les alliés.

Aux premières heures de la matinée, après un bombardement aéronaval allié sur les côtes calabraises, la 1re division canadienne et des troupes anglaises débarquent entre Villa San Giovanni et Reggio Calabria ; il s'agit d'une importante diversion pour concentrer l'attention des Allemands pendant que se déclenche l'opération Avalanche.

L'armistice est rendu publique à 19 h 15 le 8 septembre aux micro de l'agence italienne d'auditions radiophoniques (Ente Italiano Audizioni Radiofoniche - EIAR) qui interrompt les émissions pour transmettre l'annonce, précédemment enregistré, de la voix de Badoglio qui annonce l'armistice à la nation.

[modifier] Conséquences de l'armistice de Cassibile

Les troupes armées italiennes qui se trouvent sur tous les fronts ne sont pas préparées et privées de directives à l'annonce de l'armistice et la plus grande confusion règne dans l'armée italienne. Pour beaucoup de régiments, la nouvelle de l'armistice est une surprise, dans d'autres, ils ne savent quoi faire, dans d'autres encore, ils se préparent à combattre.

Le gouvernement, le roi, la cour et le haut commandement fuient le soir même Rome, s'embarquant sur la corvette Baionetta à Ortona, prête à se rendre à Brindisi au-delà des lignes alliés se mettant ainsi sous leur protection.

Ainsi, alors que se produit la débandade au sein de l'armée, les armées allemandes de la Wehrmacht et des SS présentes dans la péninsule lancent l'opération Achse (selon les plans prévues depuis le 25 juillet , date de la destitution de Mussolini) occupant tous les centres névralgiques du territoire septentrional et central de l'Italie, jusqu'à Rome et mettant en déroute l'armée italienne: une grande partie des troupes est faite prisonnière et internée en Allemagne et le reste tente de rentrer chez soi.

La marine de guerre italienne, qui est dans les ports depuis près d'un an, doit se mettre à disposition des alliés et c'est ainsi que le convoi parti de La Spezia est attaqué par des avions allemands. Vers 15 heures, le 9 septembre, un groupe de bombardiers allemands Dornier Do 217 s'attaquent à la flotte sans lui infliger de dommage et perdant un avion à cause du feu anti-aérien, mais quarante minutes après, un second groupe d'avions qui utilise un nouveau type de bombe radiocommandée, provoque la destruction du Roma, orgueil de la marine italienne.

Malgré quelques réactions sur les fronts extérieurs, un des plus célèbres se termine par le massacre de Céphalonie et la tentative d'improviser une résistance populaire surtout de la part des communistes, presque toute la péninsule tombe aux mains des Allemands, l'armée italienne est désarmée et les structures de l'État s'effondre. Rome est à son tour occupée.

Voir aussi : Quatre journées de Naples

[modifier] Notes

  1. à 17 h 30 d'Alger [1]
  2. Ruggero Zangrandi, dans L'Italia tradita, Mursia, 1971, reprenant le souvenir du speaker Giovan Battista Arista, raconte les détails de l'annonce transmise depuis auditorium "O"; le direct préparé, la chanson "Una strada nel bosco" est interrompue et après une brève interruption de Arista, Badoglio lit son communiqué immédiatement enregistré pour pouvoir être retransmis.".

[modifier] Bibliographie

Les mémoires des protagonistes occupent une bonne part de la biographie:

  • Gianfranco Bianchi, 25 luglio, crollo di un regime, Milano, 1963
  • Guido Cassinelli, Appunti sul 25 luglio, Sappi, 1944
  • Giuseppe Castellano, Come firmai l'armistizio di Cassibile, Mondadori, 1945
  • Giacomo Zanussi, Guerra e catastrofe d'Italia, Corso, 1945
  • Christopher Buckley, Road to Rome, Hodden & Stoughton, Londra, 1945
  • Pietro Badoglio, L'Italia nella seconda guerra mondiale - memorie e documenti, Mondadori, 1946
  • Mario Roatta, Otto milioni di baionette - l'Esercito italiano in guerra dal 1940 al 1944, Mondadori, 1946
  • Carmine Senise, Quando ero capo della Polizia, Ruffolo, 1946
  • Agostino Degli Espinosa, Il Regno del Sud: 8 settembre 1943-4 giugno 1944, Migliaresi, 1946
  • Samuel Hoare, Ambassador on special mission, Collins, Londra, 1946
  • Joseph Goebbels, Diario intimo, Mondadori, 1947
  • Rodolfo Graziani, Ho difeso la patria, Garzanti, 1948
  • Attilio Tamaro, Due anni di storia: 1943-1945, Tosi, 1948
  • Dwight Eisenhower, Crusade in Europe, Doubleday, New York, 1948
  • Marcello Soleri, Memorie, Einaudi, 1949
  • Marc'Antonio Bragadin, Che ha fatto la Marina, Garzanti, 1949
  • Raffaele Guariglia, Ricordi: 1922-1944, S.E.I., 1949
  • Rudolph Rahn, Ambasciatore di Hitler a Vichy e a Salò, Garzanti, 1950
  • Ezio Galbiati, Il 25 luglio e la MVSN, Bernabò, 1950
  • Winston Churchill, La Campagna d'Italia, Mondadori, 1951
  • Enrico Caviglia, Diario: aprile 1925-marzo 1945, Casini, 1952
  • Giacomo Carboni, Più che il dovere, Danesi, 1952
  • Cesare Amé, Guerra segreta in Italia, 1940-1943, Casini, 1954
  • Amedeo Tosti (ps. Historicus), Da Versailles a Cassibile, Cappelli, 1954
  • Antonio Trizzino, Settembre nero, Longanesi, 1956
  • Alessandro Lessona, Memorie, Sansoni, 1958
  • Bernard Lawrence Montgomery, Memorie, Mondadori, 1959
  • Mario Torsiello, Settembre 1943, Cisalpino, 1963
  • Luigi Longo, Un popolo alla macchia. Milano, Mondadori, 1952
  • Oreste Lizzadri, Il regno di Badoglio. Milano, Edizioni Avanti!, 1963
  • Davide Lajolo, Il voltagabbana. 1963
  • Enzo Collotti, L'amministrazione tedesca dell'Italia occupata, Lerici, 1963
  • Mario Toscano, Pagine di storia diplomatica contemporanea, Giuffré, 1963
  • Giuseppe Castellano, La guerra continua, Rizzoli, 1963
  • Ruggero Zangrandi, 1943: 25 luglio-8 settembre. Milano, Feltrinelli, 1964
  • Silvio Bertoldi, I tedeschi in Italia, Rizzoli, 1964
  • AA.VV., Sicily and the surrender of Italy, Office of the Chief of Military History, Department of the Army, Washington D.C., 1965
  • Mario Toscano, Dal 25 luglio all'8 settembre, Le Monnier, 1966
  • Peter Tompkins, Italy betrayed, Simon & Schuster, New York, 1966
  • Giacomo Carboni, Le verità di un generale distratto sull'8 settembre, Beta, 1966
  • Luigi Federzoni, Italia di ieri per la storia di domani, Mondadori, 1967
  • Ivan Palermo, Storia di un armistizio, Mondadori, 1967
  • Carlo De Biase, L'otto settembre di Badoglio, Edizioni Il Borghese, 1968
  • Carlo Scorza, La notte del Gran Consiglio, Cappelli, 1969
  • Ruggero Zangrandi, Il lungo viaggio attraverso il fascismo. Milano, Feltrinelli, 1976
  • Ruggero Zangrandi, L'Italia tradita. 8 settembre 1943. Milano, Mursia, 1971
  • Paolo Monelli, Roma 1943. Torino, Einaudi, 1993
  • Silvio Bertoldi, Apocalisse italiana. Otto settembre 1943. Fine di una nazione. Milano, Rizzoli, 1998.
  • Elena Aga-Rossi, Una nazione allo sbando. L'armistizio italiano del settembre 1943 e le sue conseguenze. Bologna, Il Mulino, 2003

[modifier] Films

[modifier] Voir aussi

[modifier] Liens internes

[modifier] Liens externes

[modifier] Sources

  • (it) Cet article est partiellement ou en totalité issu d’une traduction de l’article de Wikipédia en italien intitulé « Armistizio di Cassibile ». du 21.11.2007