Argumentation

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Une argumentation est composée d'une conclusion et d'un ou plusieurs « éléments de preuve », que l'on appelle des prémisses ou des arguments, et qui constituent des raisons d'accepter cette conclusion.

L'argumentation désigne également l'échange discursif effectif par lequel des interlocuteurs tentent de défendre une position ou de faire accepter un point de vue.

Plus largement, l'argumentation est un champ d'études à la fois descriptif et critique qui s'intéresse à la mise en forme des arguments (oralement ou par écrit) en vue, notamment, de la persuasion d'un auditoire. En ce sens, l'argumentation est une branche de la rhétorique.

Sommaire

[modifier] Evolution et définitions

On distinguait autrefois les argumentations des démonstrations, dans un cadre positiviste (qu'on trouve encore chez Chaïm Perelman) où étaient distingués le domaine des faits et des valeurs ou encore où des domaines entiers étaient considérés comme menant à des vérités absolues, prouvées pour l'éternité (par exemple les sciences qu'on appelle « exactes »). La distinction argumentation/démonstration mérite d'être nuancée car elle fait abstraction de la dimension interactive des échanges verbaux. S'il y a bien une différence entre argumentation et démonstration, on ne saurait nier toutefois que toute démonstration dépend nécessairement d'une argumentation pour être considérée et légitimée dans un champ disciplinaire scientifique.

Dans le contexte de l'épistémologie contemporaine, faillibiliste, c'est-à-dire pour laquelle de nouvelles données ou de nouvelles théories peuvent à tout moment remettre en question ce qui était jusque là considéré comme étant vrai, la distinction argumentation/démonstration n'a plus sa place. Dans leurs articles spécialisés, les chercheurs, qu'ils soient physiciens, biologistes ou historiens, argumentent en faveur de certaines conclusions lesquelles peuvent éventuellement être réfutées, comme l'ont montré Karl Popper et, dans une autre optique, Thomas Kuhn.

Une argumentation est jugée bonne ou mauvaise selon que les prémisses sont acceptables (logiquement ou consensuellement) et qu'elles sont jugées suffisantes pour soutenir la conclusion. Lorsqu'une argumentation n'est pas conforme à ce cadre normatif ou à certaines règles d'inférence logique, elle sera qualifiée de paralogisme ou de fallacy (pour employer un terme plus fréquent dans le monde anglo-saxon).

Une argumentation peut, par ailleurs, être convaincante ou non pour tel ou tel public (auditoire, selon l'ancienne rhétorique). Plusieurs facteurs peuvent faire en sorte qu'une bonne argumentation ne convainque pas quelqu'un (préjugés, intérêt personnel, manque de connaissance du domaine, aveuglement passionnel, impertinence, etc.). Ces mêmes facteurs peuvent également faire en sorte qu'une mauvaise argumentation convainque néanmoins quelqu'un ; c'est ce qu'avait déjà observé Aristote dans les Topiques et les Réfutations sophistiques.

Selon Chaïm Perelman (Traité de l'argumentation, écrit en collaboration avec Lucie Olbrecht-Tyteca, 1959), l'argumentation est la manière de présenter et de disposer des arguments (raisonnements ou raisons avancées n'ayant pas valeur de preuve mais qui s'imposent à tout être raisonnable) à l'appui d'une thèse ou contre celle-ci, en vue d'obtenir l'adhésion par consentement d'un auditoire. Elle suppose un contact intellectuel. Elle se démarque de la démonstration qui repose sur des faits, lesquels emportent l'adhésion par contrainte d'un auditoire (voir : discussion).

Cette perspective a donné lieu à de nombreuses recherches qui ont conduit à nuancer les positions de Perelman. Les travaux inspirés de Stephen Toulmin (The uses of argument, 1959) et ceux notamment de Kenneth Burke ont permis de donner un autre éclairage sur l'argumentation en ouvrant plusieurs voies novatrices à ce champ d'études.

Parmi les nombreuses contributions post-perelmaniennes à l'étude de l'argumentation, on retiendra notamment les travaux de :

  • Georges Vignaux (approche cognitive de l'argumentation) ;
  • Michel Meyer (approche philosophique, rhétorique) ;
  • Marc Angenot (rhétorique du pamphlet et approche historique des schémas argumentatifs) ;
  • Oswald Ducrot (approche linguistique et pragmatique) ;
  • Jean-Blaise Grize (logique « naturelle ») ;
  • Douglas Walton (logique informelle et étude des fallacies) ;
  • Frans Van Eemeren et Rob Grootendorst (pragma-dialectique)
  • Christian Plantin (approche linguistique) ;
  • Jean-Michel Adam (approche textuelle)
  • Ruth Amossy (approche littéraire de l'argumentation) ;
  • Philippe Breton (approche communicationnelle) ;

Des approches philosophiques ont également été proposées par Karl-Otto Apel et Jürgen Habermas dans le cadre d'une théorie de l'éthique de la discussion.

[modifier] Ouvrage

  • Christian Plantin, l'argumentation, Paris, « Que sais-je ? », PUF, 2005.
  • Gilbert Dispaux, La logique et le quotidien. Une analyse dialogique des mécanismes d'argumentation, Paris,Les Éditions de Minuit, « Arguments », 1984, 188p .

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[modifier] Liens connexes

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