Affaire de la Josacine empoisonnée

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La Josacine empoisonnée est le nom communément utilisé pour désigner une affaire criminelle française datant de 1994.

Le samedi 11 juin 1994, à Gruchet-le-Valasse (Seine-Maritime), Émilie Tanay, en garde chez Jean-Michel et Sylvie Tocqueville, meurt suite à l'ingestion de Josacine® empoisonnée au cyanure.

Jean-Marc Deperrois, accusé d'empoisonnement de la petite Émilie Tanay, fut reconnu coupable avec préméditation et a été condamné à vingt ans de réclusion criminelle sans possibilité d'appel, par la cour d'appel de Rouen.

Sommaire

[modifier] Rappel des faits

Le samedi 11 juin 1994, Émilie Tanay, 9 ans, est confiée par ses parents à la famille Tocqueville : Jean-Michel, Sylvie et leurs deux enfants, Jérôme et Bertrand. Émilie souffre d'une bronchiolite. Sa mère, Corinne Tanay, confie aux Tocqueville son médicament de la Josacine 500.

Ce jour là, les Tocqueville ont prévu d'assister à la fête médiévale de Gruchet-le-Valasse. En fin d'après-midi, après avoir défilé dans les rues, le couple Tocqueville et les trois enfants s'apprêtent à se rendre en voiture à l'abbaye de Valasse, à quelques kilomètres de leur domicile, pour participer au repas de clôture de la fête.

Avant de partir, J.-M. Tocqueville rappelle à Émilie de prendre son traitement - qu'elle trouve tellement mauvais qu'elle ira se rincer la bouche avec de l'eau du robinet.

En arrivant à la voiture la fillette s'effondre, elle bave, geint et perd connaissance. J.-M. Tocqueville tente de la ranimer, la prend dans ses bras et revient vers la maison distante de quelques mètres. Dans l'impossibilité de joindre les parents, sortis pour la soirée, J.-M. Tocqueville appelle le service des urgences ainsi que son ami Denis Lecointre. Le véhicule d'urgences médicales arrive rapidement, les secouristes diagnostiquent un état grave et demandent son transfert aux urgences de l'hôpital du Havre. Malgré les tentatives pour la sauver, Émilie décède à 22h30.

[modifier] L'enquête

Cinq jours plus tard, le 16 juin, la presse annonce qu'un médicament Josacine 500 a causé la mort d'une fillette de neuf ans. Ce médicament utilisé en pédiatrie est l'un des principaux sirops antibiotiques. Le lendemain, il est précisé par les médias qu'une substance toxique a été identifiée dans le flacon et qu'il s'agirait de cyanure. Par précaution, et craignant une erreur lors de la fabrication, le laboratoire Bayer Pharma fait rappeler tous les flacons de Josacine et les retire du marché. Des appels sont lancés pour qu'ils soient rapportés dans les pharmacies.

Une enquête est ouverte afin de découvrir comment le poison a pu se trouver dans le flacon, de la chaîne de fabrication jusqu'à la pharmacie qui a vendu le flacon à Corinne Tanay. Il paraît improbable que dans la chaîne de fabrication un produit puisse être ajouté dans un ou plusieurs flacons.

Logiquement, l'enquête se dirige vers un empoisonnement volontaire ou un accident domestique. En premier lieu huit personnes sont suspectées :

  • les parents d'Émilie - mais aucun mobile ne peut justifier que les parents puissent souhaiter la mort de leur fille,
  • ses grands-parents - qui ne s'entendent pas avec leur belle-fille, mais là encore le meurtre de leur petite-fille paraît improbable,
  • les époux Tocqueville - pas de mobile,
  • Denis Lecointre - pas de mobile.

Rien ne semble impliquer qui que ce soit dans cette liste.

Reste l'idée d'une tierce personne qui aurait voulu empoisonner quelqu'un d'autre qu'Émilie, et se serait tragiquement trompée. Lors de son interrogatoire, Sylvie Tocqueville (secrétaire de mairie) déclare avoir eu une relation passagère avec Jean-Marc Deperrois, chef d'entreprise et adjoint au maire du village. L'hypothèse de l'erreur sur la victime fait son chemin, et les enquêteurs interrogent Jean-Marc Deperrois.

Jean-Marc Deperrois a créé quelques années plus tôt sa propre entreprise, ITI (Imagerie Thermique Industrielle). Les enquêteurs lui demandent à plusieurs reprises s'il utilise du cyanure dans le cadre de son travail, Deperrois certifie formellement qu'il n'en utilise pas. Pourtant, Alain Bodson, une relation professionnelle de Deperrois, affirme aux enquêteurs qu'il a récemment procuré un kg de cyanure à Deperrois pour des expériences sur les métaux.

Deperrois devient le suspect numéro un. Par des écoutes téléphoniques, les enquêteurs savent déjà qu'il a menti et qu'il possédait bien ce produit dans son entreprise - produit qu'il se serait empressé de jeter dans la Seine à l'annonce de la découverte de cyanure dans la Josacine.

Des analyses chimiques montrent que le produit vendu à J.-M. Deperrois a la même composition que celui retrouvé dans le médicament. Deperrois nie toujours avoir empoisonné Émilie.

La presse rapporte des incohérences, semant le doute :

  • des écoutes téléphoniques douteuses et incompréhensibles entre J.-M. Tocqueville et Denis Lecointre - qui n'auraient pas fait l'objet de recherches suffisantes.
  • un flacon douteux aurait été retrouvé chez les Tocqueville, rangé avec les médicaments par la femme de ménage - mais personne ne sait si ce flacon, introuvable, a été inventé ou perdu.
  • une poudre blanche de nature inconnue aurait été trouvée sur une feuille de journal chez les époux Tocqueville, et une boite de mort-aux-rats aurait été retrouvée dans leur cave.
  • Corinne Tanay aurait confié à son médecin, le Dr Vue, que le médicament avait une drôle d'odeur et une petite effervescence lors de sa préparation - mais elle dément avoir tenu de tels propos.
  • plus généralement il est reproché aux enquêteurs d'avoir négligé certaines pistes.

C'est sans aveux, que Jean-Marc Deperrois est jugé et condamné à vingt ans de réclusion criminelle. L'avis des jurés peut, dans la loi française, se fonder sur de fortes convictions, même sans preuves évidentes.

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