Hippocrate

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Hippocrate de Kos

Surnom Ἱπποκράτης (Grec)
Naissance 460 av. J.-C
à Kos, Grèce
Décès 370 av. J.-C (à 83 ans ans)
à Larissa(Grèce)
Profession médecin
Remarques Buste de Peter Paul Rubens, 1638

Hippocrate le grand ou Hippocrate de Cos (en grec:Ἱπποκράτης) (né vers 460 av. J.-C dans l’ île de Cos – décédé vers 370 av. J.-C à Larissa) est un médecin grec du siècle de Péricles, considéré comme l'une des grandes figures de l’histoire de la médecine.

Il est souvent reconnu comme le père de la médecine grâce à ses contributions notables dans la discipline et la fondation de l'école de médecine hippocratique. Cette école a révolutionné intellectuellement la médecine en Grèce antique, en l’établissant comme une discipline distincte des autres disciplines de la connaissance auxquelles elle avait traditionnellement été associée (notamment la théurgie et la philosophie), faisant ainsi de la médecine une profession à part entière[1],[2].

Cependant, les œuvres des écrivains du corpus, des praticiens de la médecine hippocratique et les actions d'Hippocrate lui-même sont souvent confondues. On sait très peu de chose sur la vie d'Hippocrate, sa pensée et ses écrits. Néanmoins, Hippocrate est couramment décrit comme le parangon du médecin de l’Antiquité. En particulier, il est souvent crédité d’avoir fait considérablement avancer l'étude systématique de la clinique médicale en compilant la somme des connaissances médicales des écoles précédentes et en instituant des pratiques de prescription pour les médecins à travers le serment d'Hippocrate et d'autres travaux[1],[3].

Sommaire

[modifier] Biographie

Asklepieion sur l’île de Kos
Asklepieion sur l’île de Kos

Il est admis par les historiens qu’Hippocrate est né vers l'an 460 av. J.-C sur l’île grecque de cos (Kos) et est devenu un médecin et un professeur de médecine célèbre.

D'autres renseignements biographiques sont quant à eux apocryphes et sujets à caution[4]. Soranos d'Ephèse, un gynécologue grec du IIe siècle[5] fut le premier biographe d’Hippocrate et est la source de la plupart des informations dont nous disposons sur sa personne. D'autres informations nous sont parvenues par les écrits d’Aristote, qui datent du IVe siècle av. J.-C., la Souda du Xe siècle ap. J.-C et les ouvrages de Jean Tzétzès, qui datent du 12e siècle ap. J.-C[1],[6]. D'après Soranos, le père d’Hippocrate était un médecin, Heraclides, et sa mère était Praxitela, fille de Phenaretis. Les deux fils d'Hippocrate, Thessalus et Draco, et son gendre, Polybus, ont été ses élèves. Selon Claude Galien, un médecin d’une époque plus récente, Polybus est le vrai successeur d’Hippocrate, tandis que Draco et Thessalus eurent tous deux un fils nommé Hippocrate[1],[6].

Selon Soranos, Hippocrate a appris la médecine de son père et de son grand-père et a étudié d'autres domaines du savoir avec Démocrite et Gorgias. Hippocrate a probablement été formé par les Asclepiades de Kos, une confrérie de prêtres-médecins vénérant Asclépios, dieu de la médecine et a pris des leçons d’Herodicus de Selymbria un médecin thrace. La seule mention contemporaine d'Hippocrate figure dans le dialogue de ProtagorasPlaton, décrit Hippocrate comme « Hippocrate de Cos, un membre des Asclépiades »[7],[8]. Il mourut probablement à Larissa à l'âge de 83 ou 90 ans, même si certains ont prétendu qu'il avait vécu jusqu’à plus de 100 ans. Il existe plusieurs versions sur les circonstances de sa mort[9].

[modifier] Théorie hippocratique

Sur la maladie sacrée (épilepsie[10])
« Il me semble qu’elle n’est pas plus divine, ni plus sacrée que d'autres maladies, mais qu’elle a une cause naturelle comme d'autres affections. L’homme considère sa nature et la croit divine à cause son ignorance et de sa crédulité ... »

— Hippocrate

Hippocrate est reconnu comme le premier médecin à avoir rejeté les superstitions et les croyances qui attribuaient la cause des maladies à des forces surnaturelles ou divines. Hippocrate a été crédité par les disciples de Pythagore d’avoir réuni la philosophie et la médecine[11]. Il a séparé la médecine en tant que discipline de la religion, en croyant et en faisant valoir que la maladie n'était pas une punition infligée par les dieux, mais plutôt le produit de facteurs environnementaux, de l'alimentation et des habitudes de vie. En effet, il n'existe pas une seule mention d'une maladie mystique dans la totalité du corpus hippocratique. Cependant, Hippocrate a travaillé sur la foi de nombreux principes qui étaient basés sur des conceptions qui sont maintenant connues comme erronées en anatomie et en physiologie tels que les humeurs[12],[13],[14].

Les écoles de médecine de la Grèce ancienne (de Cnide et de Cos) ont été partagées sur la façon de traiter les maladies. L’école de médecine de Cnide avait principalement axé sa pratique sur le diagnostic, mais elle était tributaire de nombreuses hypothèses erronées au sujet du corps humain : la médecine grecque à l'époque d'Hippocrate ignorait pratiquement tout de l'anatomie et de la physiologie humaine en raison du tabou grec qui interdisait la dissection de l'homme. L'école de Cnide par conséquent a échoué à identifier une affection donnée comme une seule et unique maladie lorsqu’elle pouvait se manifester par différents types de symptômes[15].

L'école hippocratique de Cos (Dodécanèse) a obtenu de meilleurs résultats en se contentant de diagnostics généraux et de traitements symptomatiques ou palliatifs, selon les points de vue. L’accent était mis sur les soins aux patients et le pronostic de la maladie, et non plus sur son diagnostic. Elle parvint à traiter efficacement les maladies, et cela a permis un grand développement de la pratique clinique[16],[17].

La médecine hippocratique et sa philosophie sont très éloignées des orientations de la médecine moderne. De nos jours, le médecin se concentre sur un diagnostic précis et un traitement spécialement adapté en conséquence, deux principes qui avaient déjà été préconisés par l’école de Cnide. Ces changements dans la pensée médicale depuis l’époque d’Hippocrate ont suscité des critiques pertinentes au cours des deux derniers millénaires, le traitement palliatif d’Hippocrate faisant l'objet de controverses particulièrement virulentes. Par exemple, en 1869 un médecin français MS Houdart qualifiait la méthode thérapeutique d'Hippocrate de « méditation sur la mort »[18].

[modifier] Les humeurs et les crises

Icône de détail Article détaillé : Théorie des humeurs.

L'école hippocratique professait que les maladies étaient la conséquence d'un déséquilibre interne à l’organisme entre les quatre humeurs, des fluides qui sont naturellement en proportion égale lorsque l’état de santé est bon (pepsis)[19]. Selon cette école de pensée, lorsque les quatre humeurs, (le sang, la lymphe, la bile et l'atrabile), ne sont pas en état d’équilibre (dyscrasie, signifiant «mauvais mélange»), une personne devient malade et le reste jusqu'à ce que l'équilibre ait été quelque peu rétabli. La méthode thérapeutique d’Hippocrate avait pour but de rétablir cet équilibre. Par exemple, en utilisant le citron dont on pensait qu’il était bénéfique lorsque le flegme était surabondant[20].

Un autre concept important dans la médecine hippocratique était celui de crise, un moment précis dans la progression de la maladie où tout peut basculer : soit la maladie commence à triompher, et le patient va succomber, soit à l'inverse les processus naturels de guérison se mettent en œuvre et permettent au malade de se rétablir. Après une crise, une rechute peut survenir, suivie d'une autre crise décisive. Selon cette doctrine, les crises auraient tendance à survenir au moment de jours critiques, qui étaient censés revenir à date fixe après le début de la maladie. Si une crise survient au cours d'une journée éloignée d'un jour critique, une rechute est à craindre. Galien estime que cette idée est née avec Hippocrate, mais il est possible qu'elle soit antérieure[21].

[modifier] La thérapeutique hippocratique

Dessin d'un banc d'Hippocrate d’une édition byzantine d’un ouvrage de Galien au IIe siècle
Dessin d'un banc d'Hippocrate d’une édition byzantine d’un ouvrage de Galien au IIe siècle

La médecine hippocratique était humble et palliative. L'approche thérapeutique était fondée sur le pouvoir guérisseur de la nature ( vis medicatrix naturae en latin). Selon cette doctrine, le corps contient en lui-même le pouvoir de rééquilibrer les quatre humeurs et de se guérir lui-même (physis)[19]. La thérapeutique hippocratique se donnait simplement pour but d'aider ce processus naturel. À cette fin, Hippocrate croyait que le "repos et l'immobilisation" étaient d'une importance capitale[22]. En règle générale, la médecine hippocratique était très respectueuse du patient, le traitement était doux, et visait surtout à garder le patient propre pour prévenir toute infection. Par exemple, seuls l'eau propre ou le vin étaient utilisés sur les plaies, bien qu’un traitement sec soit préférable. Des baumes apaisant étaient parfois utilisés[23].

Hippocrate hésitait à administrer des médicaments et à s'engager dans un traitement spécifique qui pourrait s'avérer mal choisi. Sa devise était « avant tout, ne pas nuire » (primum non nocere, en latin). Un diagnostic incertain était suivi d’un traitement polyvalent[23],[24]. De puissants médicaments ont toutefois été utilisés à certaines occasions[25]. Cette approche attentiste a rencontré un grand succès dans le traitement des affections relativement simples tels que les fractures qui nécessitaient une traction pour provoquer une élongation du membre brisé et soulager ainsi la pression sur la zone de fracture. Le banc d'Hippocrate et d'autres dispositifs ont été utilisés à cette fin.

Un des points forts de la médecine hippocratique était l'accent mis sur la pronostic. À l'époque d’Hippocrate, les traitements médicamenteux étaient encore primitifs et, souvent, la meilleure chose que les médecins pouvaient faire était d'évaluer une maladie et d'estimer comment elle était susceptible de progresser sur la base des données recueillies par l’observation détaillée de cas semblables[14],[26].

[modifier] Diététique

Icône de détail Article détaillé : Diététique.

Hippocrate a découvert la diététique en prônant l'utilisation des légumes et des fruits.

[modifier] Le professionnalisme

Instruments chirurgicaux de l’Antiquité grecque. Sur la gauche on distingue un trépan et sur la droite, un jeu de scalpels. La médecine Hippocratique a fait bon usage de ces instruments.
Instruments chirurgicaux de l’Antiquité grecque. Sur la gauche on distingue un trépan et sur la droite, un jeu de scalpels. La médecine Hippocratique a fait bon usage de ces instruments[27].

La médecine hippocratique se distinguait par son strict professionnalisme, sa discipline et la rigueur de sa pratique[28]. L’ouvrage d'Hippocrate Sur le Médecin recommande aux médecins d'être toujours rigoureux, honnêtes, calmes, compréhensifs et sérieux. Le médecin Hippocrate a porté une attention particulière à tous les aspects de sa pratique : il a suivi des prescriptions détaillées pour l'éclairage, le personnel qui l’assistait, le positionnement des instruments et du patient, les techniques de bandage et de contention dans les salles d'opération[29]. Il veillait même à garder les ongles d’une longueur convenable[30].

L'école d'Hippocrate a donné beaucoup d'importance aux doctrines cliniques d'observation et de documentation. Ces doctrines enseignent aux médecins comment enregistrer leurs conclusions et leurs prescriptions médicamenteuses d'une manière très claire et objective, de sorte que ces documents puissent être transmis à d'autres médecins et utilisés par eux[31]. Hippocrate s’astreint avec minutie à noter régulièrement de nombreux symptômes dont le teint, le pouls, la fièvre, les douleurs, la motricité du patient et l’aspect des urines et des selles[26]. On dit qu’il aurait pris le pouls d'un patient pendant qu’il l’interrogeait sur l’histoire de sa maladie (anamnèse) pour savoir si le patient avait menti[32]. Hippocrate a étendu ses observations cliniques à l’histoire de la famille et de l'environnement[33]. Pour lui, la médecine est l'art de l'observation et de l’examen clinique[14]. Pour cette raison, il peut légitimement être appelé le Père de la médecine clinique[34].

[modifier] Diagnostic

Icône de détail Article détaillé : Diagnostic (médecine).

Il est reconnu comme ayant clairement décrit les symptômes de la grippe humaine. Ses élèves sont les premiers à avoir fait des diagnostics.

[modifier] Contributions directes à la médecine

Doigts en baguettes de tambour secondaire à une hypertension artérielle pulmonaire chez un patient atteint du syndrome d'Eisenmenger. Décrite pour la première fois par Hippocrate, l’aspect des doigts en baguette de tambour est également connu sous le nom « d’Hippocratisme digital ».
Doigts en baguettes de tambour secondaire à une hypertension artérielle pulmonaire chez un patient atteint du syndrome d'Eisenmenger. Décrite pour la première fois par Hippocrate, l’aspect des doigts en baguette de tambour est également connu sous le nom « d’Hippocratisme digital ».

Hippocrate et ses disciples ont été les premiers à décrire de nombreuses maladies et affections médicales. Il est crédité d’avoir réalisé la première description de l’Hippocratisme digital, un signe important pour le diagnostic de la broncho-pneumopathie chronique obstructive, du cancer du poumon et des cardiopathies congénitales cyanogènes. Pour cette raison, le symptôme des doigts en baguette de tambour est parfois appelé Hippocratisme digital[35]. Hippocrate a également été le premier médecin à décrire dans Pronostic la face hippocratique, le changement qui se produit dans le visage au moment de la mort, ou pendant une longue maladie. Shakespeare fait allusion à cette description lorsqu’il écrit la mort de Falstaff dans Henry V acte II, scène III[36],[37].

Hippocrate a commencé à classer les maladies en maladies aiguës, chroniques, endémiques et épidémiques, et à utiliser des termes tels que, « exacerbation, rechute, résolution, crise paroxysme, pic, et convalescence »[26],[38]. Une autre des grandes contributions d’Hippocrate peut être trouvée dans ses descriptions des symptômes, des signes physiques, du traitement chirurgical et du pronostic de l’empyème thoracique, c'est-à-dire de la suppuration de la muqueuse de la cavité thoracique. Ses enseignements demeurent pertinents pour les étudiants d'aujourd'hui en pneumologie et en chirurgie[39]. Hippocrate a été le premier chirurgien thoracique répertorié et ses conclusions sont toujours valables.

[modifier] Corpus hippocratique

Manuscrit  byzantin du XIIe siècle du Serment d’Hippocrate sous la forme d'une croix
Manuscrit byzantin du XIIe siècle du Serment d’Hippocrate sous la forme d'une croix

Le Corpus hippocratique (du latin : Corpus hippocraticum) est une compilation de près de soixante-dix traités de médecine de la Grèce antique, écrit en Ionique. La question de savoir si Hippocrate lui-même a été l'auteur du corpus n'a pas été résolue de façon concluante[40]. Mais, ces livres ont probablement été rédigés par ses étudiants et ses disciples[41]. En raison de la variété des thèmes, des styles d'écriture et de la date apparente de rédaction, les chercheurs estiment que le Corpus hippocratique n'aurait pas pu être écrit par une seule personne (Ermerins évalue le nombre des auteurs à dix-neuf)[25]. Pendant l'Antiquité, le corpus a été attribué à Hippocrate, et son enseignement a en général suivi ses principes, de sorte qu'il est désigné par son nom. Il pourrait s’agir des vestiges d'une bibliothèque de Kos, ou d’une collection de manuscrits compilés au IIIe siècle av.J.-C à Alexandrie[29],[7].

Le Corpus hippocratique comprend des manuels, des conférences, des recherches, des notes et des dissertations philosophiques sur divers sujets en rapport avec la médecine, réunis sans ordre particulier[40],[42]. Ces ouvrages ont été écrits pour différents publics, à la fois pour les spécialistes et pour les profanes ont parfois été conçus à partir de points de vue opposés ce qui explique que d’importantes contradictions peuvent être constatées entre les différentes parties du corpus[43]. Parmi les œuvres importantes du Corpus citons le serment d'Hippocrate , le Livre des pronostics, le Régime dans les maladies aiguës, les Aphorismes, dans les airs, sur les eaux et sur terre, Les instruments de réduction, sur la maladie sacrée, etc[25].

[modifier] Le serment d’Hippocrate

Icône de détail Article détaillé : Serment d'Hippocrate.

Le serment d'Hippocrate, un document sur l 'éthique de la pratique médicale, a été attribué dans l'Antiquité à Hippocrate. Il s’agit probablement du document le plus célèbre du Corpus hippocratique. Récemment, l'authenticité du document a été mise en doute. Bien que le serment soit aujourd'hui rarement utilisé sous sa forme originale, il a inspiré d'autres serments similaires et les lois qui définissent les bonnes pratiques et la morale médicale. De tels serments sont aujourd’hui régulièrement prononcés par les diplômés en médecine sur le point d'entrer dans la pratique médicale[44],[7].

[modifier] Oeuvre

Peinture murale représentantGalien et Hippocrate. XIIe siècle; Anagni, Italie
Peinture murale représentantGalien et Hippocrate. XIIe siècle; Anagni, Italie

Hippocrate est largement considéré comme le « Père de la Médecine »[41]. Ses contributions ont révolutionné la pratique de la médecine, mais après sa mort, les progrès de la discipline ont marqué le pas[45]. Hippocrate était tellement révéré que ses enseignements ont été considérés comme trop parfaits pour pouvoir être améliorés et qu’aucun progrès significatif dans ses méthodes n’a été réalisé pendant longtemps[7],[22]. Les siècles après la mort d'Hippocrate furent marqués autant par des mouvements rétrogrades que par de nouveaux progrès. Par exemple, après l’époque d'Hippocrate, la pratique d’écrire l’histoire de cas cliniques a disparu selon Fielding Garrison[46].

Après Hippocrate, le médecin le plus remarquable a été Galien, un grec qui a vécu de 129 à 200 apr. J.-C. et qui perpétua la médecine Hippocratique avec à la fois des apports et des reculs[47]. Au moyen-age, les Arabes ont adopté les méthodes d'Hippocrate[48]. Après la Renaissance, les méthodes d’Hippocrate ont été redécouvertes en Europe et même développées au XIXe siècle. À noter parmi ceux qui ont pratiqué les méthodes cliniques rigoureuses d’Hippocrate les personnalités suivantes Sydenham, Heberden, Charcot et Osler. Un médecin français Henri Huchard, a déclaré que ces retours aux sources jalonnent « toute l'histoire de la médecine interne »[49].

[modifier] Image

Image conventionnelle de « portrait » romain en buste (gravure du 19e siècle)
Image conventionnelle de « portrait » romain en buste (gravure du 19e siècle)

Selon le témoignage d’Aristote, Hippocrate est connu comme « le Grand Hippocrate »[50]. Concernant son apparence, Hippocrate fut d'abord décrit comme un « vieux médecin de campagne digne et compatissant », puis comme « arrogant et inaccessible »[7]. Il est certainement considéré comme un sage, un homme d’une très grande intelligence et surtout comme un bon praticien. Francis Adams le décrit comme un vrai « médecin, homme d’expérience et de bon sens »[15].

Cette image de sage, de vieux médecin est renforcée par les bustes qu’on possède de lui et qui le représentent le visage ridé et portant une grande barbe. De nombreux médecins de l'époque avaient les cheveux coupés courts dans le style de Jupiter et d’Asclépios. Par conséquent, les bustes d'Hippocrate qui nous sont parvenus ne sont peut-être seulement qu’une autre version des portraits de ces divinités[45]. Hippocrate et les croyances qui lui sont attribuées sont considérées comme celles de l’idéal médical. Fielding Garrison, une autorité en matière d'histoire de la médecine, a déclaré : « Il est, avant tout, l'exemple de cette attitude d'esprit critique, toujours à la recherche de sources d'erreur, qui est l’essence de l'esprit scientifique »[49]. « Sa figure ... se dresse pour les temps futurs comme celle du médecin idéal », selon une courte histoire de la médecine, qui a inspiré la profession médicale depuis sa mort[51].

[modifier] Légendes

Les Aphorismes
« La vie est courte, la médecine vaste, l’occasion fugitive, l'expérience trompeuse, le jugement délicat. »

— Hippocrate

La plupart des histoires qui sont rapportées sur la vie d'Hippocrate sont probablement fausses parce qu’elles sont incompatibles avec les données historiques, et qu’on raconte des histoires similaires ou identiques, à propos d’autres personnages comme Avicenne et Socrate, suggérant qu’il s’agit de légendes. Même au cours de sa vie, la réputation d'Hippocrate était extraordinaire et les histoires de guérisons miraculeuses étaient légion. Par exemple, on dit qu’Hippocrate aurait contribué à la guérison des Athéniens durant la peste d'Athènes par de grands feux utilisés en guise de «désinfectants» en complément d'autres traitements. Il existe une histoire d'Hippocrate guérissant Perdiccas, roi de Macédoine, de la « maladie d'amour ». Aucune de ces fables n'est corroborée par aucun historien et ces événements ont donc peu de chances de s'être réellement produits[52],[53],[54]. Même le miel provenant d'une ruche située sur sa tombe était réputé avoir des pouvoirs de guérison[7],[22].

Arbre d'Hippocrate sous lequel on dit qu’Hippocrate aurait travaillé, dans la ville de Kos.
Arbre d'Hippocrate sous lequel on dit qu’Hippocrate aurait travaillé, dans la ville de Kos[55].

Une autre légende concerne la manière dont Hippocrate aurait rejeté une convocation officielle au tribunal d’Artaxerxès, roi de Perse et refusé de le soigner en dépit de cadeaux importants que celui-ci lui proposait[56]. La validité de cette anecdote est admise par les sources anciennes, mais niée par certains historiens modernes, et est donc sujette à caution[57].

Un autre récit affirme que Démocrite était considéré comme fou parce qu'il se moquait de tout et qu’il fut envoyé à Hippocrate pour être soigné. Hippocrate ne diagnostiqua chez Démocrite qu'une disposition à être heureux. Démocrite fut par la suite surnommé « le philosophe rieur »[58].

Dans les histoires qui le concernent, Hippocrate n’est pas toujours dépeint positivement : selon une légende, Hippocrate aurait fui après l'incendie d'un temple de guérison en Grèce. Soranos d’Éphèse, à l’origine de cette histoire, citait le temple comme étant l’un de ceux de Cnide. Toutefois des siècles plus tard, le grammairien byzantin Jean Tzétzès écrit qu’Hippocrate a brûlé son propre temple, le temple de Cos, prétendant qu'il avait agi ainsi pour conserver son monopole de la connaissance médicale. Cette histoire est totalement en contradiction avec la personnalité d'Hippocrate, telle que la rapporte la tradition. D'autres légendes racontent la résurrection de son neveu Auguste. Cet exploit est censé être survenu au moment de l'érection d'une statue d'Hippocrate et de la création d'une chaire en son honneur à Rome[54],[52],[31],[59]

[modifier] Généalogie

La généalogie légendaire d’Hippocrate fait remonter son ascendance paternelle directement à Asclépios et son ascendance maternelle à Héraclès[25]. Selon les Chiliades de Tzetzes, la généalogie d'Hippocrate II est la suivante[60] :

Une image d'Hippocrate dans l’ Asclepieion de Kos, avec Asclépios au milieu.
Une image d'Hippocrate dans l’ Asclepieion de Kos, avec Asclépios au milieu.

1. Hippocrates II. “Le père de la médecine”
2. Heraclides
4. Hippocrates I.
8. Gnosidicus
16. Nebrus
32. Sostratus III.
64. Theodorus II.
128. Sostratus, II.
256. Thedorus
512. Cleomyttades
1024. Crisamis
2048. Dardanus
4096. Sostatus
8192. Hippolochus
16384. Podalirius
32768. Asclépios

[modifier] Noms de symptômes

Certains signes cliniques et certains symptômes ont reçu le nom d’Hippocrate parce que l’on croyait qu’il avait été la première personne à les avoir décrits. La face hippocratique est le changement qui se produit dans le visage au moment de la mort, ou pendant une longue maladie, à cause de l’amaigrissement et de la dénutrition. Le signe des doigts en baguette de tambour, une déformation des doigts et des ongles, est également connu sous le nom d’Hippocratisme digital. La succussion hippocratique est le bruit d’éclaboussures d’un hydropneumothorax ou d’un pyopneumothorax que l’on entend à l’intérieur du thorax en « secouant » le patient. Le banc d'Hippocrate qui est un appareil permettant de mettre les os en traction et le bandage hippocratique sont deux dispositifs qui ont reçu le nom d’Hippocrate[61]. Le corpus hippocratique et le Serment d'Hippocrate portent également son nom. Une boisson médicinale très utilisée au Moyen Âge, l’hypocras, est aussi réputée avoir été inventée par Hippocrate. Le rire sardonique, provoqué par le spasme des muscles du visage est aussi parfois qualifié de sourire d'Hippocrate.

À l'époque moderne, on a baptisé de son nom un cratère de la lune – le cratère Hippocrate. Un musée sur l'île grecque de Kos le Musée Hippocrate, lui est consacré. Le projet Hippocrate est un programme du centre médical de l 'Université de New York pour renforcer l'éducation à travers l'utilisation de la technologie. Le Projet Hippocrate (un acronyme de "HIgh PerfOrmance Computing for Robot-AssisTEd Surgery") est un projet de la Carnegie Mellon School of Computer Science et du Shadyside Medical Center, pour élaborer la planification, la simulation, et la mise en pratique des technologies pour la prochaine génération des robots de chirurgie assistée par ordinateur[62].

[modifier] Voir aussi

[modifier] Notes et références

  • (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu d’une traduction de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Hippocrates ».
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[modifier] Sources

Une gravure sur bois représentant la réduction d’une épaule luxée avec un dispositif hippocratique.
Une gravure sur bois représentant la réduction d’une épaule luxée avec un dispositif hippocratique.
s:Accueil

Voir sur Wikisource : Hippocrate.

  • Alberto Jori, Medicina e medici nell'antica Grecia. Saggio sul 'Perì téchnes' ippocratico, Bologna, édition il Mulino, 1996 (ISBN 8815057927).
  • Jacques Jouanna, Hippocrate, Fayard, 1992.
  • Adams Francis, The Genuine Works of Hippocrates, William Wood and Company, New York, 1891.
  • Encyclopedia Britannica, « HIPPOCRATES », 1911, Encyclopedia Britannica, Inc., p. 519. Consulté le 4 Octobre 2006.
  • Garrison Fielding H., History of Medicine, W.B. Saunders Company, Philadelphia, 1966.
  • Fishchenko AIa Khimich SD, Modification of the Hippocratic cap-shaped bandage, vol. 1, 1986 [détail des éditions].
  • Internet Encyclopedia of Philosophy, « Democritus », 2006, The University of Tennessee at Martin. Consulté le 17 Décembre 2006.

[modifier] Autres lectures

  • Adams Francis (translator) [1891], « Works by Hippocrates », 1994 (original date 1891), Daniel C. Stevenson, Web Atomics © 1994–2000.
  • Jori, Alberto, Medicina e medici nell'antica Grecia. Saggio sul 'Perì téchnes' ippocratico, il Mulino, Bologna (Italy), 1996.
  • Kalopothakes M. D., « An essay on Hippocrates », 1857, King and Baird Printers.
  • Lopez Francesco, Il pensiero olistico di Ippocrate. Percorsi di ragionamento e testimonianze. Vol. I, Edizioni Pubblisfera, Cosenza (Italy), 2004.
  • Pliny the Elder, Natural History: Book XXIX., translated by John Bostock. See original text in Perseus program.
  • Smith Wesley D., Hippocratic Tradition, Cornell Univ Pr, 1979 (ISBN 0801412099)

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens externes