Buenaventura Durruti

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Buenaventura Durruti y Domingo (León, 14 juillet 1896 - Madrid, 20 novembre 1936) est une des figures principales de l'anarchisme espagnol avant et pendant la guerre d'Espagne.

Sommaire

[modifier] Biographie

Buenaventura Durruti
Buenaventura Durruti

Durruti naît à León en Espagne dans une famille ouvrière. C'est un élève dissipé. En 1903, son père, membre de l'UGT (Union General de Trabajadores), est emprisonné pour participation à la grève des corroyeurs, qui revendiquent la journée de huit heures. En avril 1913, il travaille en tant que tourneur et entre à l'Union des métallurgistes. L'année suivante il est embauché comme cheminot.

[modifier] La grève de 1917 et l'exil en France

Durant l'été de 1917, l'UGT lance une grève à laquelle Durruti participe activement. Le gouvernement espagnol fait appel à l'armée pour faire cesser cette grève ; plus de 500 travailleurs sont tués ou blessés, et 2000 grévistes sont emprisonnés sans procès légal ou juste. L'armée aurait ainsi, d'après un observateur, « sauvé le pays ». Durruti est de ces jeunes saboteurs pyromanes. Le syndicat les désavoue et ils sont licenciés. En septembre il se réfugie à Gijón, puis, toujours recherché, passe en France.

Durant son exil, jusqu'en 1920, Durruti travaille à Paris comme mécanicien. Il y rencontre Sébastien Faure, Louis Lecoin et Émile Cottin ainsi que des anarchistes espagnols exilés militant à la CNT. Puis il est persuadé d'aller à Barcelone pour y organiser les travailleurs.

[modifier] La CNT

A Barcelone, avec García Oliver, Francisco Ascaso et d'autres anarchistes, ils fondent Los Solidarios (Les Solidaires). Des membres de ce groupe essayent sans succès de tuer le roi d'Espagne : Alphonse XIII. En 1923, le groupe est impliqué dans l'assassinat du cardinal de Saragosse Juan Soldevilla y Romero en représailles de l’assassinat du militant Salvador Seguí. Durruti et Oliver s'enfuient en Argentine.

Durruti revient à Barcelone en 1931 (avènement de la Seconde République), et devient un militant influent à l'intérieur de deux des plus grandes organisations anarchistes d'Espagne à cette époque : la CNT (Confederación nacional del trabajo) et la FAI (Federación anarquista ibérica). En 1932 et 1933, il participe aux insurrections menées par la CNT contre le gouvernement républicain de Manuel Azaña.

Il vit pauvrement avec sa compagne Mimi, enceinte de leur fille Colette. Selon la militante de la CNT Federica Montseny, "la prestance de Durruti, sa voix de stentor, sa manière de s'exprimer, simple et accessible à tous, exercent sur les masses une puissante attraction. García Oliver est persuadé de lui être supérieur, mais les camarades et le peuple en général préfèrent Durruti, devinant intuitivement la bonté de son coeur et la droiture de son caractère."

Le jeune Durruti
Le jeune Durruti

[modifier] La guerre civile

Travaillant étroitement avec ses camarades, Durruti aide à la coordination de la résistance face au coup d'état militaire. Le 24 Juillet 1936, il mène plusieurs milliers de "guérilleros" (plus tard connus comme la Colonne Durruti) de Barcelone vers Saragosse. Après une brève et sanglante bataille à Caspe, la colonne s'arrête à Pina de Ebro. Sur les conseils d'un officier régulier de l'armée, employé comme "conseiller technique" et malgré la conviction de Durruti, l'assaut de Saragosse est remis à plus tard, ce qui est peut-être une erreur : Saragosse ne sera jamais reprise par les républicains. En fait, en libérant rapidement tout le nord de l'Espagne, ce qui supposait de commencer par cette ville, la révolution sociale aurait pu progresser en même temps que le front antifasciste ; mais c'est précisément ce que les staliniens, qui contrôlent de plus en plus le gouvernement républicain de Madrid, veulent éviter[1].

La mort de Durruti

Après avoir été persuadé, début novembre 1936, de mener une colonne de combattants à Madrid, attaquée par les franquistes, Durruti y est blessé grièvement et meurt quelques heures plus tard. Les circonstances exactes de sa mort restent incertaines. De toute évidence, ce n'est pas une balle franquiste qui l'a tué. Les communistes ont fait courir le bruit qu'il aurait été abattu par un de ses hommes en raison de son supposé "autoritarisme". Certains accusent le PCE qui lui était - il est vrai - hostile. D'autres encore envisagent un dysfonctionnement de son arme. On suppose généralement, sans preuve tangible, que la balle d'un de ses lieutenants l'aurait atteint accidentellement.

Le corps de Durruti est transporté à travers le pays jusqu'à Barcelone pour ses funérailles. Plus de 250 000 personnes défilent pour accompagner le cortège funéraire jusqu'au cimetière de Montjuich où il est inhumé.

C'est la dernière démonstration publique à grande échelle de la force des anarchistes pendant la guerre d'Espagne.

La colonne Durruti

La formation créée par Durruti ne disparaît pas après sa mort ; elle est maintenue pendant toute la guerre civile, avec la dénomination officielle de 26e Division, commandée (en 1939 au moins) par Ricardo Sanz.

[modifier] Citations

  • « Nous vous montrerons, à vous les bolcheviques russes et espagnols, comment on fait la révolution et comment on la mène à son terme. Chez vous, il y a une dictature, dans votre Armée rouge, il y a des colonels et des généraux, alors que dans ma colonne, il n'y a ni supérieur ni inférieur, nous avons tous les mêmes droits, nous sommes tous des soldats, moi aussi je suis un soldat. »
  • « Ce ne serait vraiment pas la peine de se déguiser en soldat si l'on devait se laisser à nouveau gouverner par les pseudo-républicains de 1931 ; nous consentons à faire de grandes concessions, mais n'oublions jamais qu'il nous faut mener de front la guerre et la révolution. »
  • « Nous n’avons pas peur des ruines. Nous sommes capables de bâtir aussi. C’est nous qui avons construit les palais et les villes d’Espagne, d’Amérique et de partout. Nous, les travailleurs, nous pouvons bâtir des villes pour les remplacer. Et nous les construirons bien mieux ; aussi nous n’avons pas peur des ruines. Nous allons recevoir le monde en héritage. La bourgeoisie peut bien faire sauter et démolir son monde à elle avant de quitter la scène de l’Histoire. Nous portons un monde nouveau dans nos cœurs. »

[modifier] Dernières paroles

« Nous renoncerons à tout, sauf à la victoire. » Ces paroles ne sont évidemment pas de Durruti. Il s'agit là d'une manipulation des staliniens de l'époque ! Cela est facilement vérifiable : lire Durruti dans le labyrinthe de Miguel Amoros. .

[modifier] Chanson

Durruti

Voilà Durruti une lettre à la main, où est écrite toute la misère de ce peuple souverain.

Voilà Durruti un livre dans sa musette, où il note les millions volés par le capital.

Voilà Durruti avec 14 camarades, et il dit aux patrons ce que veulent les ouvriers.

Voilà Durruti avec une feuille de papier, qui demande aux soldats de sortir de leur caserne.

Voilà Durruti sans carrosse et sans argent, qui salue tout le monde, paysans et journaliers.

Voilà Durruti avec les tables de la loi, pour que sachent les ouvriers qu'il n'y a ni patrie, ni dieu, ni roi.

(Traduction d'une chanson rendant hommage à Durruti ; l'auteur est inconnu)

[modifier] Bibliographie

  • Durruti dans le labyrinthe de Miguel Amoros. Traduit de l'espagnol par Jaime Semprun. Editions de l'Encyclopédie des nuisances, Paris 2007. ISBN 978-2-910386-25-2
  • Durruti: le peuple en armes d'Abel Paz, trad. & éd. Tête de Feuilles, 1972.
  • Durruti 1896 - 1936, (album de photographies), prologue de Lucencia Espejo. Edition en cinq langues: espagnol, anglais, allemand, italien et français. Madrid; London; Hamburg; Milano; Paris: Fundación Anselmo Lorenzo; Active/Beastie; Nautilus; Zero in Condotta; L'Insomniaque, 1996.- 192 pages, ISBN 3-89401-267-6 (éd. Casa de Velázquez, 1996, ISBN 8-48686-422-4)
  • Le bref été de l'anarchie - la vie et la mort de Buenaventura Durruti. Biographie romancée de Hans Magnus Enzensberger, traduite de l'allemand par Lily Jumel et édité par Gallimard, 1975.
  • Durruti, un anarchiste espagnol. Biographie d'Abel Paz, éditée par Quai Voltaire, 1993.

[modifier] Notes et références

  1. La dernière phrase est discutable : l'emprise communiste sur le gouvernement (de José Giral) est encore limitée à cette date ; d'autre part, il faudrait au moins prouver que l'officier responsable a donné un mauvais conseil parce qu'il était communiste

[modifier] Liens internes

[modifier] Liens externes