Vielle à roue

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Ne doit pas être confondu avec Vièle.
Vielle de Jacques Grandchamps vers 1980
Vielle de Jacques Grandchamps vers 1980

La vielle à roue est un instrument à cordes frottées par une roue en bois au lieu d'un archet. La roue est tournée avec une manivelle, pendant que la main gauche du musicien joue la mélodie sur un clavier.

Sommaire

[modifier] Fonctionnement

Deux cordes, appelées chanterelles, passent par le clavier ; leur longueur de vibration est changée par l'action des touches appelées "sautereaux".

Le sautereau est un élément du clavier de la vielle à roue qui comprend des tiges coulissantes pour chaque note. Les sautereaux sont fixés sur chaque tige par groupe de deux (deux cordes en chanterelles) et permettent, comme le doigt du violoniste, de déterminer la partie de corde vibrante. Après appui sur la tige du clavier, celle-ci est rejetée par la vibration des cordes, faisant ainsi reculer la paire de sautereaux.

Un nombre variable de cordes, passant hors du clavier, émettent chacune un son, formant ainsi un accord continu : ce sont les bourdons (gros bourdon, petit bourdon, mouche et corde de chien ou trompette). Au-dessous des bourdons se trouvent parfois des cordes sympathiques qui donnent au ton un caractère plus doux.

Parmi les bourdons, une corde particulière donne cette caractéristique originale de la vielle qui est de pouvoir rythmer une mélodie. Cette corde ne passe pas sur un chevalet fixe, mais repose sur une petite pièce de bois appelée le « chien », elle-même maintenue sur la table d'harmonie par la pression de la corde. Lorsque cette corde vibre suffisamment, la pièce de bois vibre alors sur la table, et génère un son comparable à un grésillement. L'instrumentiste produit cette vibration par une frappe de la manivelle, que l'on appelle détaché ou « coup de poignet ».

Mécanisme de la vielle
Mécanisme de la vielle
Vielle à roue du XIVe siècle, représentée sur un triptyque du monastère de Piedra à Saragosse.
Vielle à roue du XIVe siècle, représentée sur un triptyque du monastère de Piedra à Saragosse.

[modifier] Histoire

La vielle à roue apparaît dès le Moyen Âge. On en trouve de nombreuses représentations sculptées (chapiteaux d'église) ou peintes, par exemple par Jérôme Bosch. D'abord instrument de cour pour qui Bâton et Vivaldi ont écrit quelques pages, la vielle fut détrônée par le piano-forte et son usage fut alors plutôt réservé aux mendiants.

Vielle à roue du XIIIe siècle, représentée sur un chapiteau de la cathédrale de Burgos.
Vielle à roue du XIIIe siècle, représentée sur un chapiteau de la cathédrale de Burgos.

À la fin du XVIIe siècle, l'aspect de la vielle est encore simple et rustique, d'une forme à peu près carrée. C'est seulement à la fin du siècle qu'un luthier de Versailles commence à monter des mécanismes de vielle sur des corps de guitare ou de luth. Cela donne aux instruments un ton plus doux et en même temps plus fort que celui des vielles anciennes. Au cours du XVIIIe siècle, des instruments construits avec beaucoup de soin et richement ornés font leur entrée à la cour. Les luthiers Guersan, Lambert, Louvet, Varquin et Salomont étaient les plus performants vers le milieu du siècle. Pendant cette période, beaucoup d'œuvres ont été composées pour cet instrument, entre autres les six sonates « Il Pastor Fido » attribuées à Antonio Vivaldi.

La révolution française va provoquer un second changement profond de l'usage de la vielle, qui revient alors dans le domaine des instruments régionaux et populaires.

Au XIXe siècle, elle tombe en désuétude avant que le Berry, en quête d’identité, ne s’empare de l’instrument ainsi que de la cornemuse pour en faire ses emblèmes. La société des Gâs du Berry[1], fondée par Jean Baffier en 1888, solidifie cette réputation. Au XXe siècle, dans les années 60 et 70, le mouvement « folk » se l’approprie de nouveau et les groupes dits « folkloriques » se constituent.

Depuis, l’instrument est en constante évolution : on l’électrifie et la vielle électroacoustique apparaît ; ce qui fait aujourd’hui la joie de musiciens comme Marc Anthony ou Gilles Chabenat, habitués de ce type d’instrument. D’autres, comme Patrick Bouffard, préfèrent continuer à explorer la vielle dans sa simplicité en faisant plutôt varier les mélanges de styles musicaux. Et puis il y a les grands maîtres d’aujourd’hui dont la maîtrise de l’instrument, d’une précision hors du commun, est extraordinaire : citons Valentin Clastrier. Mais l’évolution de la vielle, n’est pas sans liens avec les génies d’hier tels que Gilbert Malochet (1859-1945), le légendaire Gaston Guillemain (1870-1965) et Gaston Rivière (1909-2004) dont les professeurs furent les deux précédents. Il faut mentionner aussi l’illustre André Dubois, dernier rescapé de cette tradition, dont la Méthode de vielle fait toujours référence.

Vielle à roue vers 1750
Vielle à roue vers 1750

Aujourd’hui, l’instrument continue à évoluer : on affine toujours et encore la qualité de la vielle et les luthiers sont en quête d’un son pur et précis. L’intérêt pour la vielle a grandi, mais le défaut majeur de notre époque est que la vielle électroacoustique prend médiatiquement le pas sur la vielle acoustique, ce qui entraîne parfois la désillusion des débutants : c’est la grande question de l’actualité viellistique.

L’apprentissage de la vielle est depuis les années 1970 possible dans certains conservatoires avec des maîtres-sonneurs comme Jacky Aucouturier à Châteauroux, qui y fonde la première classe de vielle de France à la fin des années 1970, ou Jean-François « Maxou » Heintzen dans le Bourbonnais.

Le conservatoire à rayonnement régional de Limoges a également vu la création du premier département de musique traditionnelle de France, en 1987. La classe de vielle à roue est dirigée par Philippe Destrem, qui enseigne également la cornemuse.

Vielles hongroises
Vielles hongroises

[modifier] Notes et références

  1. La société des Gâs du Berry

[modifier] Voir aussi

[modifier] Liens externes