Varlam Chalamov

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Varlam Tikhonovitch Chalamov [en russe : Варлам Тихонович Шаламов] (1907, Vologda1982, Moscou) est un écrivain russe.

Le père de Chalamov est un prêtre orthodoxe, ce qui va lui occasionner des difficultés après la Révolution de 1917. D'abord, Varlam ne peut poursuivre ses études universitaires à Vologda, il doit partir pour Moscou où il réussit en 1923 le concours d'entrée à la faculté de droit de l'Université d'État de Moscou (MГУ). Pour payer ses études à l'université, Chalamov travaille dans une tannerie.

Chalamov entre dans un mouvement trotskiste et conteste le pouvoir de Joseph Staline, en particulier en diffusant de manière clandestine les Lettres au Congrès du Parti, appelées ultérieurement le Testament de Lénine. Ces lettres de Lénine au Congrès mettent, entre autres, clairement en garde contre une éventuelle succession de Staline à la tête du Parti communiste. Il se fait arrêter le 19 février 1929 et est envoyé pour trois ans dans un camp de travail à Vichéra, dans l'Oural central.

Chalamov revient à Moscou en 1932 et y travaille comme journaliste et essayiste.

La Grande Purge de 1937 va le renvoyer dans les camps : le 1er janvier 1937, Chalamov est arrêté pour « activité trotskiste contre-révolutionnaire », condamné à 5 ans et envoyé dans la Kolyma, région à l'extrême-est de l'URSS, au-dessus du cercle polaire arctique, connue sous le nom de «pays de la mort blanche». Maintes fois Chalamov souhaite la mort mais, mal-nourri, abruti de travail dans les mines d'or, congelé par le climat polaire, battu par les détenus de droit commun, il survit. En 1943, toujours prisonnier, il écope d'une nouvelle condamnation, de 10 ans cette fois, mais toujours dans la Kolyma, pour « agitation anti-soviétique » pour avoir considéré Ivan Bounine comme un classique de la littérature russe.

« Il ne faut pas avoir honte de se souvenir qu'on a été un « crevard », un squelette, qu'on a couru dans tous les sens et qu'on a fouillé dans les fosses à ordures [...]. Les prisonniers étaient des ennemis imaginaires et inventés avec lesquels le gouvernement réglait ses comptes comme avec de véritables ennemis qu'il fusillait, tuait et faisait mourir de faim. La faux mortelle de Staline fauchait tout le monde sans distinction, en nivelant selon des répartitions, des listes et un plan à réaliser. Il y avait le même pourcentage de vauriens et de lâches parmi les hommes qui ont péri au camp qu'au sein des gens en liberté. Tous étaient des gens pris au hasard parmi les indifférents, les lâches, les bourgeois et même les bourreaux. Et ils sont devenus des victimes par hasard. »

En 1946, la chance va sourire deux fois à Chalamov : au seuil de la mort, il ne peut plus travailler et est envoyé à l'hôpital au lieu d'être exécuté. De plus le détenu-médecin Pantiouhov prend d'énormes risques pour le faire nommer aide-médecin. Chalamov reçoit un salaire (très faible mais cela va lui permettre d'acheter des livres) et surtout améliore ses conditions d'existence : une plus grande autonomie, une vraie ration de nourriture et surtout il ne travaille plus dans une mine mais dans un hôpital chauffé. Après une formation rapide il gère l'accueil des malades de l'hôpital.

Varlam Chalamov est libéré en 1951 mais il doit rester à Magadan, la grande ville de la région jusqu'à novembre 1953.

La mort de Staline en mars 1953 change la donne pour les prisonniers des camps (zek ou ZK qui est l'abréviation pour zaklioutchon) : les morts sont réhabilités, beaucoup de vivants sont remis en liberté. Chalamov ne peut revenir à Moscou avant sa réhabilitation en 1956, il travaille dans une exploitation de tourbe à Kalinine à 100 kilomètres au nord-ouest de la capitale.

A Moscou, Chalamov publie des essais et de la poésie dans des revues littéraires tout en s'attelant à son œuvre majeure : les Récits de la Kolyma où il raconte son expérience des camps. Les épreuves sont envoyées dans les pays occidentaux en contrebande, il sont aussi publiés en URSS par samizdat. Les Récits paraissent pour la première fois en 1966 et la première édition en langue russe (mais à l'étranger) en 1978. En 1972, Chalamov doit renier ses Récits, très probablement forcé par les pressions de l'État. Le livre parait en URSS en 1987.

La mort de Chalamov est une métaphore de sa vie : pauvre, affaibli, malade, il s'éteint dans un hôpital psychiatrique moscovite en 1982.

L'oeuvre de Varlam Chalamov a été adaptée au théatre Confluences à Paris pour la première fois en 2005 par Ariel Cypel sous le titre "C'est ainsi que nous vivions, quelques récits de la Kolyma", avec Charlie Bauer et Marie Alexandre Ferrier.

[modifier] Œuvres

  • Récits de la Kolyma, nouvelle édition, préf. de Luba Jurgenson, postf. de Michel Heller, Verdier, 2003.
  • Essais sur le monde du crime, Gallimard.
  • Vichéra, Verdier.
  • Les années vingt, Verdier.
  • Tout ou rien, Verdier.
  • Correspondance avec Alexandre Soljenitsyne et Nadejda Mandelstam, Verdier.
  • Correspondance avec Boris Pasternak et Souvenirs, Gallimard.

[modifier] Bibliographie

  • Claude Esteban, Ce qui retourne au silence, Farrago/Leo Scheer, 2004.
  • Hanne Aga, L'écriture du trauma dans les "Récits de la Kolyma" de Varlam Chalamov, L'Harmattan, 1999.
  • Georges Nivat, notice sur sa vie dans "Universalia" 1983; pp.548-549.

[modifier] Lien externe