Soura (Babylonie)

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Soura était le nom de deux villes situées dans le sud de l'ancienne Babylonie[1].
La première, dite Soura Stam (« simplement Soura »), et se situait près du lac Essouria, à l'ouest de la rive de l'Euphrate. Cette proximité rendait la région fertile, et elle était réputée pour sa production agricole de raisins, de blé et d'orge. Ella abritait une importante communauté juive, vivant de l'agriculture.
La seconde s'appelait Soura DePhrat[1], et était située sur le bord de l'Euphrate, au nord de Poumbedita.

Dans ses Antiquités judaïques (18:9), Flavius Josèphe rapporte qu'après la chute du royaume de Hassinaï et Hanilaï, et le mort de ces potentats, environ 45 ans avant la destruction du Second Temple, les Juifs du Sud de la Babylonie ont à souffrir de leurs voisins, qui se vengent des exactions des potentats, ce qui est la cause d'émigrations en masse. Certains se retrouvent à Saloukia, où les Grecs et les Syriens, qui se livraient bataille, font cause commune contre eux. Les Juifs connaissent le même accueil à Katissifon, capitale du royaume parthe, et trouvent finalement refuge à Nehardea, dépeuplant les centres comme Soura.

Cependant, une communauté se reforme environ 225 ans plus tard, et est florissante au IIIe siècle.
En 219, Abba Arika, promoteur des études talmudiques en Babylonie, quitte Nehardea pour y fonder une académie talmudique à Soura (Stam), dans laquelle sera, avec la collaboration du collège de Poumbedita, compilé le Talmud de Babylone, quatre siècles plus tard.

Sommaire

[modifier] La yeshiva de Soura

Abba Arika, que le Talmud appelle beaucoup plus souvent Rav, est le premier Sage à s'établir à Soura, et à y enseigner la Torah à une communauté nombreuse mais peu pratiquante[1], ainsi que le dit le Talmud: « Rav trouva un champ ouvert et y établit des barrières tout autour[2]. » Il y imprime sa méthodologie, héritée de ses maîtres, Rabbi Juda Hanassi et Rabbi Hiyya, et caractérisée par la recherche du sens littéral des versets d'une part, et par les commentaires homilétiques et ésotériques de l'autre[3].

Sherira Gaon semble assimiler Soura à Mata Mehassia, laquelle est mentionnée dans le Talmud; c'est du moins ainsi que le comprend Abraham ibn Dawd, dans son Sefer HaQabbala. Toutefois, Neubauer pense que Sherira indique seulement que le collège de Soura fut transporté à Mata Mehassia ou que les étudiants de Soura et Mata Mehassia étudiaient ensemble à l'époque de la clôture du Talmud[1].

La yeshiva est fondée 7 ans après l'arrivée de Rav; du vivant de Rav, on y compte 1200 étudiants, de Babel ou d'ailleurs[1]. Du fait de la grande affluence, la yeshiva s'agrémente de 3 sections: l'« akhsadra » (le vestibule), le « kiton » (des petites pièces dans la yeshiva, à l'usage des rabbins et des maîtres de la yeshiva, la « guinata » (un vaste champ dont le produit servait à l'entretien de l'académie et de ses étudiants) et les « tzippi » (des pièces avec nattes utilisées pour le repos et le confort). Des grands noms du judaïsme se succèdent, et c'est un Rosh yeshiva de Soura, Rav Achi, qui entreprend de compiler les traditions orales composant la Guemara babylonienne, pour aboutir au Talmud de Babylone.

L'académie de Soura domine le paysage spirituel des Juifs de Babylonie dès sa fondation, malgré une éclipse à l'ère des Saboraïm, du fait de la conquête musulmane. Les dommages qu'elle y subit obligent ses directeurs à recourir aux exilarques, et à se complaire à leurs désirs et prérogatives. La yeshiva de Soura conserve cependant sa prééminence sur Poumbedita pendant la période des Gueonim[4]: le Gaon de Soura siège à la droite de l'exilarque, tandis que le Gaon de Poumbedita est à sa gauche; Lorsque les deux sont présents à un banquet, le premier récite les bénédictions avant et après le repas; le Gaon de Soura a toujours préséance sur son collègue même s'il est plus jeune, et ne lui donne pas le titre de gaon dans ses missives, s'addressant aux « Savants de Poumbedita, » tandis que le gaon de Poumbedita doit écrire « au Gaon et aux Savants de Soura; » au cours de l'installation solennelle de l'exilarque, le gaon de Soura lit les sections du Targoum (traduction interprétative) sur le Pentateuque qui avaient été lues par l'exilarque; à la mort de l'exilarque, le gaon de Soura a le droit exclusif de déterminer ses émoluments officiels jusqu'à l'élection d'un nouvel exilarque.

Au cours de cette période, Yehoudaï Gaon marque le début d'une période d'éminence, qui se solde 130 ans plus tard avec Rav Naḥshon (879). La concurrence de l'académie de Poumbedita se fait de de plus en plus agressive, les privilèges financiers de Soura tombent, et il est même question de la supprimer. Saadia Gaon parvient néanmoins à la maintenir et à la restaurer, mais peu après sa mort, la yeshiva doit suspendre ses activités pendant 45 ans. Sherira Gaon, chroniqueur de l'ère du Talmud jusqu'aux Gueonim, est témoin d'une autre et dernière tentative de redressement, qui s'achève à la mort de Samuel ben Hofni[5]. La yeshiva ferme définitivement ses portes vers 1034.
Lorsque Benjamin de Tudèle visite la région, en 1170, il ne voit plus de trace d'une présence juive; quant à la ville, et l'acédémie, ce sont des champs de ruines[6].

[modifier] Directeurs de la yeshiva

[modifier] Ère des Amoraïm:

  • Abba Arika, appelé Rav, disciple de Rabbi Yehouda Hanassi, fondateur, premier rosh yeshiva et premier à recevoir le titre d'Amora
  • Rav Houna, successeur de Rav, à la tête de la yeshiva pendant environ quarante ans
  • Rav Hisda
  • Rav Achi
  • Maremar
  • Rav Iddi bar Abin (II)
  • Rav Nahman bar Rav Houna
  • Mar bar Rav Achi
  • Rava Tosfaa
  • Ravina (II)

[modifier] Ère des Saboraïm:

  • Rav Ina

[modifier] Ère des Gueonim[7]:

  • Rav Mar bar Rav Houna — 591
  • Rav Hanania — approx. 610
  • Mar Rav Hounaï — approx. 650
  • Mar Rav Sheshoua (également appelé Mesharsheya bar Taḥlifa) — 670
  • Mar Rav Ḥanina HaCohen de Nehar Peḳod — 689-694
  • Mar Rav Nehilaï (Hilaï) Halevi de Naresh — 694-712
  • Rav Yaaqov de Nehar Peḳod — 712-730
  • Mar Rav Shmouel (descendant d'Amemar) — 730-748
  • Mar Rav Mari HaCohen de Nehar Peḳod — 748-756
  • Mar Rav Aḥa, auteur des Sheïltot - 756
  • Rav Yehoudaï bar Mar Rav Naḥman, auteur des Halakhot Psoukot — 757-761
  • Rav Aḥounaï (ou Ahounaï, ou Houna) Kahana bar Mar Papa - 761-769
  • Mar Rav Ḥaninaï Kahana bar Mar Rav Houna — 769-774
  • Rav Mari HaLevi bar Rav Mesharsheya — 774-778
  • Rav Bebaï HaLevi bar Mar Rav Abba de Nehar Peḳod — 778-789
  • Mar Rav Hilaï bar Mar Rav Mari — 789-798
  • Rav Yaaqov HaCohen bar Mar Mordekhaï — 798
  • Rav Abimaï, frère de Mar Rav Mordekhaï
  • Mar Rav Tzadok bar Mar Rav Ashi (ou Iẓḥaḳ bar Ishaï) — 810-812
  • Mar Rav Hilaï bar Mar Rav Hanania — 812-816
  • Rav Ḳimoï bar Mar Rav Ashi — 816-820
  • Rav Moshe (ou Mesharsheya) bar Rav Yaaqov — 820-830
  • Kahana bar Mar Yaaqov — 830-832

Deux années sans Gaon

  • Rav Cohen Ẓedeḳ bar Mar Abimaï — 832-843
  • Mar Rav (ou Sar) Shalom bar Mar Rav Boaz — 843-853
  • Rav Naṭronaï bar Mar Rav Hilaï Gaon bar Mar Rav Mari — 853-861
  • Mar Rav Amram bav Mar Rav Sheshna, auteur du premier siddour — 861-872
  • Rav Naḥshon bar Mar Rav Zadok — 872-879
  • Rav Ẓemaḥ bar Mar Rav Ḥayyim, frère utérin de Rav Naḥshon — 879-886
  • Mar Rav Malka — 886
  • Rav Haï bar Mar Rav Naḥshon — 886-896
  • Rav Hilaï bar Naṭronaï Gaon — 896-904
  • Rav Shalom bar Mar Rav Mishael — 904
  • Rav Yaaqov bar Mar Rav Naṭronaï — 911-924
  • Rav Yom Ṭov Kahana bar Mar Rav Yaaqov — 924
  • Rav Saadia bar Mar Yosseph (de Fayyoum) — 928-942 (nonobstant sa période de destitution entre 928 et 937)
  • Rav Yosseph bar Rav Yaaqov bar (ou ibn) Saṭya — 930

Fermeture de la yeshiva pendant 45 ans

  • Mar Rav Ẓemaḥ Ẓedeḳ bar Mar Palṭoï — circa 990-circa 998
  • Rav Shmouel HaCohen ben Ḥofni — circa 998-1012
  • Rav Dossa — circa 1012-circa 1018
  • Rav Israël HaCohen ben Rav Shmouel ben Ḥofni — 1018-1033
  • Rav Azraia HaCohen ben Rav Israël ben Rav Shmouel
  • Rav Yitzhaq, dernier Gaon de Soura.

[modifier] Notes et références

  1. abcde (he) Soura sur le site daat
  2. T.B. Erouvin 100b
  3. Adin Steinsaltz, Personnages du Talmud, p.122, éd. Pocket, coll. Bibliophane Daniel Radford, isbn 2-266-11129-9
  4. Voir http://www.daat.ac.il/daat/vl/yohasin/yohasin01.pdf la première édition des "Youḥassin," in Neubauer, ii. 77 et suivantes
  5. (he) La Yeshiva au temps des Gueonim, du Dr. Y. Horowitz, sur le site daat
  6. Encyclopedia Judaica, tome 15, pp.521-523
  7. La liste est basée sur celle établie par Sherira Gaon dans son Iggeret Les dates sont tirées de Mamlekhet Israël betkoufat HaGueonim, du Prof. Moshe Gil

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens externes