Révolte des Mokrani

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La Révolte des Mokrani, survenue le 16 mars 1871[1] en Algérie, est la plus importante insurrection contre le pouvoir colonial français depuis le début de la conquête de l'Algérie en 1830. Elle est menée par le cheikh Mohamed El Mokrani et du cheikh Haddad, chef de la confrérie des Rahmaniya, en Kabylie.

Sommaire

[modifier] Histoire

En 1870, un notable algérien, Mohand Amokran, surnommé par les arabes Cheikh El Mokrani, est rétrogradé au titre de bachagha pour avoir soutenu la révolte du Cheikh Bouaquaz, un proche de son père, en 1864-1865.

  • El Mokrani, pour pallier la disette qui touche alors les campagnes, investit sa fortune personnelle et emprunte. L’empressement de ses créanciers et la pression des autorités l'oblige à hypothéquer ses biens.
  • A celà s'ajoute l'annonce du remplacement de l'autorité militaire française, dont il acceptait de dépendre, par une autorité civile. Il décide alors de se révolter, mais, en homme d'honneur, il en avise auparavant le général Augerand (Cf. Lettre de Mokrani au Gal. Augerand, en page 768 du Rapport de M. Léon de La Sicotière au nom de la «Commission d’Enquête sur les actes du Gouvernement de la Défense Nationale », Versailles, Cerf et fils, 1875). Après quoi il entre en rébellion en mars 1871
  • Mais la première manifestation de l'insurrection est intervenue en réalité, dès janvier 1871 sous la forme d'une révolte de spahis qui ont refusé d'être envoyés sur le front de métropole, alors que les intéressés estimaient leur engagement valable uniquement pour servir en Algérie. Cette révolte, d'abord déclenchée la révolte à Aïn Guettar et à Mondjebeur, s'est ensuite étendue au Tarf et à Bou Hadjar, ainsi qu'à Bône encerclée pendant 3 jours. Quelques 20 colons ont été tués, jusqu'à ce qu'une répression très forte soit engagée.

Est complètement fausse, par contre, l'assertion répandue selon laquelle le décret Crémieux du 24 octobre 1870, attribuant la citoyenneté aux juifs d'Algérie, aurait été la cause de la révolte kabyle. On sait cela par Mokrani lui-même, puisque sa lettre exposant les causes de sa rébellion au général Augerand ne contient pas la moindre allusion à ce décret. Cette légende a, en réalité, été inventée par les Européens et militaires locaux, hostiles à cette accession d'indigènes à la citoyenneté.

Après avoir d'abord soutenu sous l'Empire cette réforme propre à renforcer la présence française en Algérie, par les voeux concordants de leurs 3 conseils généraux (d'Alger, Oran et Constantine), ces Européens ont réalisé que cette première mesure de décolonisation, bien que limitée, risquait de constituer, pour la suite, un précédent invocable par les musulmans. Les milieux colonialistes ont donc dès lors, tenté de faire abroger le décret Crémieux, en accusant cette réforme d'avoir prétendument été la cause de la révolte indigène,et furent relayés ensuite par l'extrème-droite métropolitaine et les meneurs antisémites qui ont propagé ce mythe jusqu'à nos jours. Au demeurant cette légende était d'autant plus ridicule qu'en 1871 les musulmans d'Algérie lisaient peu, et encore moins les décrets métropolitains, et que, d'autre part, les élites indigène savaient que tout musulman désireux d'accèder à la citoyenneté française, pouvait l'obtenir, en vertu du sénatus consulte de 1865, à la seule condition de renoncer à son état civil coranique, en adoptant, lui-aussi, le régime normal d'état-civil français(laïc), comme venaient de le faire les Juifs, rabbins en tête.

Cette fausse allégation n'en fût pas moins exploitée entre 1940 et 1943, sous le régime de Vichy, comme prétexte pour justifier le retrait par Pétain, puis Giraud de la citoyenneté française des juifs d'Algérie, dans le même temps qu'ils les soumettaient à toutes les lois racistes d'inspiration hitlérienne. Ajoutons qu'alors les patriotes algériens, Ferhat Abbas et Me Boumendjel, donnèrent une leçon de dignité aux autorités collaborationnistes, en refusant de cautionner cette mesure inique.

Quoiqu'il en soit, la révolte des spahis, fût amplifiée à partir du 16 mars 1871 par sa prise en main par Mokrani, dont l'influence était très forte. Elle constitua fût la plus importante insurrection et la dernière d'Algérie durant l'occupation française.

Le mouvement soulève 250 tribus, près du tiers de la population algérienne. La plupart des villes et des villages de Kabylie et des Hauts-Plateaux sont pillés. Les insurgés sont contraints à la reddition après l’attaque de la Kabylie par les Français. Ils sont arrêtés à l’Alma le 22 avril 1871, et le 5 mai le bachaga El Mokrani mourut au combat près de l’oued Soufflat. Les troupes françaises (vingt colonnes) marchent sur Tizi-Ouzou, Dellys et Draâ El Mizan. Le cheikh Haddad et ses fils se rendent le 13 juillet, après la bataille d'Icheriden. L’insurrection ne prend fin qu’après la capture de Bou-Mezrag, le 20 janvier 1872.

La répression fût très sévère et se traduisit, une fois matée l'insurrection, par de nombreux internements et déportations en Nouvelle-Calédonie, mais aussi par d'importantes confiscations de terres, qui ensuite ont obligé de nombreux kabyles à s'expatrier.

[modifier] Bibliographie

  • Rapport de M. Léon de La Sicotière au nom de la «Commission d’Enquête sur les actes du Gouvernement de la Défense Nationale », Versailles, Cerf et fils, 1875)

[modifier] Voir aussi

[modifier] Notes et références

  1. [1] et [2]