Modernisation Qing et Mouvements modernisateurs

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L'humiliante défaite des guerres de l’opium a donné forme à deux mouvements de contestation, l'un par le bas contre le pouvoir mandchou, l'autre par le haut sous la forme d’une tentative de modernisation de l'économie par les élites. La vie politique chinoise de 1865-1894 se caractérise en grande partie par ces deux volontés modernisatrices et par le conservatisme d'autres puissants, notamment l'impératice Cixi.

Sommaire

[modifier] Le contexte et l’époque

[modifier] Les problèmes qui se posent

  • A/ PROBLÈMES ÉCONOMIQUES ET SOCIAUX

L'expansion démographique rapide entraîne des famines et leurs effets sociaux : émeutes de la faim réprimées sévèrement. Entre 1841 et 1849, il y aura plus de cent insurrections de ce type. Devant l'impossibilité de vivre de la terre, les paysans se font militaires, coolies ou bandits. Les pertes en impôts de ces années de guerre se font lourdement sentir.

  • B/ PROBLÈMES ETHNIQUES

Une grande partie des Hakkas, ethnie constituée autour d'un aggrégat de Hans ayant fui le Nord de la Chine en plusieurs vagues depuis le IIIe siècle, rejoints par de récents arrivés fuyant les raids mongols, s'installent dans le Guangdong et le Guangxi où ils occupent, comme d'habitude, les emplois et les terres dont personne d'autre ne veut.

  • C/ PROBLÈMES POLITIQUES

Les Mandchous ont apporté la preuve qu’ils étaient incapables de résister aux puissances étrangères. Cette constatation suscite des soulèvements populaires.

[modifier] La réaction par le bas : les mouvements populaires d’opposition

Entre 1850 et 1860, l’autorité impériale est contestée partout et parfois refusée complètement. Ces mouvements simultanés n'ont aucune connexion d'ensemble. Ils sont chacun l’expression de problèmes distincts.

Le Mouvement des Taiping : va apparaître en Chine centrale, se présentant comme un pouvoir impérial dissident, avec Nanjing pour capitale. De 1851 à 1864, le mouvement résiste. C'est un mouvement protocommuniste de paysans révoltés contre les propriétaires fonciers. Les Taiping s’opposent à la dynastie mandchoue sur le plan religieux car leur chef proclame une théocratie qui prétend se rattacher au christianisme, et aussi sur le plan politique, considérant l'autorité mandchoue comme « une force d’occupation ».

Le Mouvement des Nian, actif dans 6 provinces entre 1851 et 1868, est la première des insurrections de minorités musulmanes dans le Sud-ouest de 1855 à 1873 et dans le Nord-ouest de 1863 à 1878.

L’intrusion des étrangers a joué un rôle dans la naissance de ces mouvements :

  • Sur le plan économique : l’ouverture de la Chine aux marchands étrangers a eu deux conséquences : les portefaits et les bâteliers ont disparu et grossissent les rangs des Taiping.
  • Sur le plan politique : les Mandchous se sont montrés incapables de résister aux puissances étrangères, décrédibilisant l’empereur.

Les forces impériales ont du mal à venir à bout des insurrections et font appel à d’autres forces. Ce sont des milices constituées dans les provinces les plus menacées, levées par la « gentry » pour aider les forces impériales, notamment Zeng Guofan (1811-1872) qui œuvre dans les provinces Centre-sud, ou Li Hongzhang (1823-1901) dans la province de Anhui. Ce soutien de la « gentry » au gouvernement mandchou inaugure un régime dyarchique.

[modifier] La réaction par le haut et le diarchie sino-mandchoue

On peut distinguer deux pôles au sein du pouvoir : le pouvoir central qui correspond aux Mandchous et le pouvoir local qui correspond aux Chinois. Il existe également une scission entre les ultraconservateurs et les réformateurs et modernisateurs.

[modifier] Les ultraconservateurs : les Mandchous

Régnant depuis 1851, l’empereur Xianfeng meurt en 1861. Il a pour successeur son fils âgé de 5 ans Tongzhi (1856-1875), dont le règne est régenté par sa mère Cixi (1835-1908). L’empereur avait avant de mourir créé un conseil de régence, mais Cixi fait un coup d’État et va gouverner au nom de son fils jusqu'a sa mort en 1875. Elle s'arrange alors pour que la succession aille à son neveu Guangxu (1871-1908) âgé de 3 ans, de sorte qu’elle reste impératrice douairière jusqu’en 1908. Elle regroupe les éléments les plus conservateurs du pouvoir qui pensent que la Chine n'a aucune leçon à recevoir de « pays barbares », tout en menant une politique conciliatrice vis à vis des puissances étrangères. En politique intérieure, elle va laisser agir les modernisateurs, mais s’arrange pour faire échouer les tentatives de réforme.

[modifier] Les modernisateurs : les Chinois

Ils veulent moderniser la structure économique du pays et s’opposent aux diverses rébellions qui, pensent-ils, menacent le pays. Ce sont des hommes nouveaux qui ont fait leurs preuves à la tête des milices qu’ils ont levées: Zeng Guofan, Li Hongzhang et Zuo Zongtang.

[modifier] Objectifs et mobiles des modernisateurs

[modifier] Objectifs

Mettre la Chine à l’école de la société occidentale pour obtenir sa technique tout en conservant l’ordre social chinois jugé supérieur, et collaborer avec les puissances étrangères. C’est pourquoi on appelle ke mouvement modernisateur « le mouvement des activités à l’occidentale ».

[modifier] Mobiles

Tout d'abord, combattre les ennemis intérieurs tels que les Taiping qui fragilisent la Chine. Les puissances étrangères réalisent des bénéfices à cette occasion en vendant des armes qui serviront à combattre l’ennemi intérieur

Ensuite, combattre l’ennemi extérieur en se dotant d’une flotte militaire crédible permettant la défense et l'attaque en dehors des eaux teritoriales, et stimuler le développement de industrie non seulement militaire, mais aussi civile.

[modifier] Le programme des modernisateurs

Ils vont s’investir en premier dans le secteur militaire et acquérir une armée et une marine moderne. Le mouvement va durer 30 ans (1865-1894). On y distingue trois sous-périodes :

  • De 1865 à 1872 : construction d’arsenaux modernes et création d’entreprises qui touchent au secteur militaire
  • De 1872 à 1885 : création d’entreprises modernes moins directement liées à l’industrie militaire
  • De 1885 à 1894 : mise sur pied une marine de guerre moderne et création d'aciéries

[modifier] Première phase de modernisation

De 1865 à 1872 : le mot d’ordre est « auto-renforcement », c'est-à-dire renforcement de l’armée pour faire face à la menace ennemie. Les modernisateurs vont construire un ensemble d’usines d’armes et de munitions, des chantiers navals, etc. La particularité des ces entreprises est qu’elles sont largement tributaires de l’étranger car le personnel est formé par des techniciens occidentaux et les machines viennent de l’étranger. L’essentiel de l’activité économique est dominée par les importations, et c'est surtout le secteur militaire qui se développe.

[modifier] Deuxième phase de modernisation

De 1872 à 1885 : le mot d’ordre devient « richesse et puissance ». On assiste à la naissance d’entreprises industrielles civiles qui font appel à des capitaux propres privés. Une vingtaine d’entreprises voient ainsi le jour, (ex : compagnie de navigation marchande à vapeur), suivies d'une centaine d'autres jusqu’en 1894. 30 000 ouvriers seront employés dans ces usines.
Les domaines concernés sont principalement l'industrie de la soie (filature et tissage), les minoteries, la fabrication d'allumettes, l'exploitation des mines de charbon. Ces industries connaissant une certaine prospérité dans un premier temps, qui n'aura cependant quasiment aucun effet sur l’ensemble de l'industrie nationale à cause de l’attitude du gouvernement qui y voit avant tout une source de recettes fiscales. Les élites anciennes se sentent menacées et n'encouragent pas le mouvement. D’autre part, ces entreprises modernes sont trop dépendantes pour leurs approvisionnements des entreprises étrangères. Elles doivent faire face à la concurrence des produits importés, qui bénéficient de toutes sortes d’avantages grâce aux traités inégaux, et de la production des entreprises étrangères créées sur le sol chinois et employant une main d’œuvre locale, qui ont accès au marché chinois tout en disposant d'un réseau financier de plus d’une dizaine de banques étrangères.

[modifier] Troisième phase de modernisation

1885 à 1894 : création d’une flotte et d'aciéries. Une partie des navires (24 en 1884, 67 en 1894) sont achetés aux Britanniques et aux Allemands. En 1885, le ministère de la Marine est créé. Néanmoins, la flotte chinoise reste dépendante de l'étranger. Les aciéries commencent à fonctionner vers 1894 avec des rendements peu élevés.

[modifier] Modernisation culturelle

On assiste à la création d’instituts de langues étrangères, et d’un institut du savoir occidental où on forme les Chinois à des techniques empruntées à l’Occident (Canton, 1880). En 1881, une école navale et une école de médecine militaire ouvrent.