Hanns Eisler

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Hanns Eisler, né le 6 juillet 1898 à Leipzig, mort le 6 septembre 1962 à Berlin-Est, fut un théoricien musical et compositeur germano-autrichien politiquement engagé.

Sommaire

[modifier] Années de jeunesse et formation musicale

Hanns Eisler était le troisième enfant du philosophe et savant indépendant (Privatgelehrter) Rudolf Eisler et d'Ida Maria, née Fischer. Son frère, Gerhart Eisler, fut homme politique communiste stalinien. Sa sœur Elfriede joua un rôle éminent dans la création du parti communiste autrichien puis du parti communiste allemand (KPD) sous le pseudonyme militant Ruth Fischer. Elle s'opposa dès 1925, au stalinisme.

En 1901, la carrière de Rudolf Eisler amena la famille Eisler à quitter Leipzig pour Vienne. Hanns Eisler grandit dans un environnement bourgeois où la musique et la littérature jouèrent un rôle central. En 1916, Hanns Eisler fut enrôlé dans l'armée austro-hongroise, dans une école d'officiers de réserve près de Prague et ensuite, jusqu'en 1918, il devint soldat dans un régiment hongrois. Plusieurs compositions musicales datent de cette période (i.e. Oratorium Gegen den Krieg). Revenu à Vienne après la défaite, il étudia de 1919 à 1923 avec Arnold Schönberg. Eisler fut le premier élève de Schönberg qui composa en adoptant la technique des douze tons (musique dodécaphonique). Il dédia à Schönberg sa Sonate pour piano op.1.

[modifier] Berlin. Art engagé

Dès son enfance Hanns Eisler fut attiré par les idéaux communistes (en partie sous l'influence de sa sœur et son frère) et cet élan marquera sa création musicale. C'est à partir de son installation à Berlin en 1925 que cette tendance vers une musique résolument politique se confirma. Berlin traverse alors un âge d'or pour les arts et les lettres et devient un creuset d'expérimentation dans tous les domaines artistiques et politiques tandis que les années 1925-1929 marquent le retour à une prospérité et à une stabilité relative en Allemagne. Hanns Eisler s'éloigne de la vision musicale sacralisée d'Arnold Schönberg et du post-romantisme qu'il juge « embourgeoisés ». Il s'oriente vers des formes musicales plus populaires, influencées par le jazz et le cabaret.

Eisler se rapprocha du parti communiste allemand KPD mais ne sera jamais membre du parti. C'est dans ce contexte que débutera sa collaboration avec Bertolt Brecht lui-même marxiste et « compagnon de route », collaboration qui ne cessera qu'avec la mort de ce dernier en 1956. Hanns Eisler écrivit la musique de plusieurs pièces de Brecht : Die Massname, Die Mutter (d'après un roman de Maxime Gorki de 1907), Galileo, Furcht und Elend des Dritten Reiches, "Die heilige Johanna"

Eisler et Brecht ont aussi produit des chants politiques qui ont joué un rôle dans les années agitées de la République de Weimar au début des années 1930. Ainsi, la Solidaritätslied (1932) du premier film parlant « prolétarien » Kuhle Wampe. Il rencontra en 1933 à Paris les comédiens du groupe "Octobre", et mit en musique deux poèmes de Jacques Prévert: "Histoire du cheval" et "Vie de famille".

[modifier] Exil aux USA, 1933-1948

Dès 1933, la musique d'Eisler et la poésie de Brecht furent bannies par le parti nazi. Tous deux firent partie de la génération anti-nazi qui trouva refuge aux États-Unis.

Eisler enseigna à la New School University à New York et composa de la musique de chambre expérimentale. Peu avant le début de la Seconde Guerre mondiale, il déménagea à Hollywood et composa la musique de nombreux films (Hangmen Also Die de Fritz Lang, None but the Lonely Heart, The 400 Millions de Joris Ivens…)

Il écrivit en 1947 l'ouvrage Composing for the Films en collaboration avec Theodor Adorno. Eisler reprit la technique dodécaphonique (un exemple en est sa composition Fourteen ways of describing the Rain en l'honneur du 70e anniversaire d'Arnold Schönberg).

Ses deux œuvres essentielles de ces années sont la monumentale Deutsche Sinfonie (symphonie chorale en 11 mouvements basée sur des poèmes de Brecht et Ignazio Silone, commencée en 1935, et qui ne sera terminée qu'en 1958) et un cycle de mélodies Hollywooder Liederbuch (1942-43).

[modifier] Berlin Est (1948-1962)

Depuis la mort de Roosevelt (avril 1945), les États-Unis sont sous l'emprise de tendances anti-soviétiques encouragées par Truman et indirectement par la notion « de rideau de fer » de Churchill.

Hanns Eisler (dont le frère Gerhart était accusé par J. Edgar Hoover, chef du FBI, d'être une figure centrale de l'espionnage soviétique) fut inquiété par la Commission des activités non-américaines. Après deux auditions, Eisler fut accusé d'être « le Karl Marx de la musique » et l'agent soviétique à Hollywood. Il fut, comme de nombreux artistes comme Brecht ou Chaplin, contraint de quitter les États-Unis en 1948. Son frère Gerhart fut condamné à 3 ans de prison mais fut libéré sous caution, puis s'échappa des États-Unis et rejoignit l'Allemagne de l'Est.

Hanns Eisler s'installa à Berlin Est. Il continua à composer, à enseigner au conservatoire Hochschule für Musik Hanns Eisle. Il composa l'hymne national Auferstanden aus Ruinen de la République démocratique allemande (RDA). Il composa la musique du film Nuit et brouillard d'Alain Resnais en 1954. Son projet le plus ambitieux, un opéra moderne sur le thème de Faust, fut attaqué par la censure communiste. Sa loyauté politique fut mise en cause lors d'une série d'auditions. Ce climat politique et la mort de Brecht en 1956 assombrirent ses dernières années. Il mourut en 1962 et est enterré près de Brecht au cimetière de Dorotheenstadt.

[modifier] Arrangement

Avec Karl Rankl, Hanns Eisler a composé un arrangement pour orchestre de chambre de la symphonie n° 7 d'Anton Bruckner.

[modifier] Bibliographie

  • Gerard Friedlandler, Vienna, Berlin, Paris, London. Growing up in Interesting Times, manuscrit, 1995.
  • François Furet, Le passé d'une illusion, Robert Laffont/Calmann-Lévy, 1995
  • J. Schebera: Eisler. Eine Biographie in Texten, Bildern und Dokumenten. Schott. Mainz 1998.
  • Ruth Fischer - Arkadij Maslow : Abtrünnig wider Willen. Aus Reden und Manuskripten des Exils. Hg. von Pete Lübbe. Vorw. Hermann Weber. München 1990. (Nachlassausgabe des Exilschaffens, mit Einleitung)

[modifier] Voir aussi

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[modifier] Liens externes