Formalisme

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Le formalisme, du latin "forma", "forme", est un concept esthétique. Il désigne :

  • Les mouvements littéraires et artistiques mettant l'accent sur "la forme" plutôt que "le fond" (par exemple dans la doctrine de "l'art pour l'art". En musique, certaines écoles stylistiques se sont appuyées plutôt sur des formes prédéfinies alors que d'autres créaient un style musical plus personnel à partir même du matériau sonore. Voir notamment la controverse entre sérialisme er spectraux)
  • Une adhésion excessive aux formes artistiques en opposition au naturalisme ou au réalisme (connotation péjorative)
  • Par extension, l'adoption de formes abstraites, éloignées de leur sujet réel, dans d'autres disciplines
  • En linguistique : une approche théorique considérant le langage comme un système de formes plutôt qu'une matière propre. Cette approche a été popularisée par le groupe des formalistes russes et a largement inspiré le structuralisme.

« Aucun art ne peut refuser absolument le réel... Le formalisme peut parvenir à se vider de plus en plus de contenu réel, mais une limite l'attend toujours... Le vrai formalisme est silence. De même, le réalisme ne peut se passer d'un minimum d'interprétation et d'arbitraire. »

(Albert Camus.-L'homme révolté.- Paris: Gallimard, 1972, p. 332).

Selon Klages, le formalisme est « la pensée par signes purs ». Cette définition, au début du XXe siècle, anticipe la meilleure illustration du langage formaliste, la programmation informatique, dont les termes récurrents, protocoles, commandes, routines, séquences, n'admettent aucune approximation.

[modifier] Le formalisme philosophique et mathématique

La notion de formalisme est souvent associée, à bon droit, à la philosophie, mais surtout aux mathématiques. Au moment où Descartes inventait la géométrie analytique et où Leibniz jetait les bases de la logique formelle, la Bourse, une institution où le signe a plus d’importance que le signifié, apparaissait en Europe.

Si en art, le formalisme se résume par le paradigme "l'art pour l'art", en morale, il trouve sa forme la plus aboutie dans l'impératif kantien : "ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu'on te fasse à toi-même". Cette approche formaliste de la morale a inspiré la célèbre formule au sujet de Kant : "la philosophie kantienne a les mains propres, mais elle n'a pas de mains" ; autrement dit, elle est trop formaliste pour trouver son application dans la vie réelle.

[modifier] Les autres aspects du formalisme contemporain

Cet encodage formaliste de la pensée affecte de nombreux aspects de la vie moderne ; outre la place des technologies numériques, qui en sont l'illustration la plus concrète, un arsenal de chiffres sont couramment utilisés pour décrypter la société humaine : quotient intellectuel, PIB, taux de natalité, sondages, dont le versant formaliste peut être critiqué, notamment dans les choix de gestion économiques.

Joseph E. Stiglitz a critiqué l'idéologie formaliste du FMI et de la Banque Mondiale, qui ne concèdent des prêts aux pays en développement que sous caution de critères formels de taux d'inflation, taux de croissance et autres paramètres qui conviennent rarement à la diversité des économies concernées. La crise asiatique de 1997 serait une conséquence de l'application de cette politique formaliste dans les pays d'Asie du sud-est. Cet économiste dénonce aussi la libéralisation des marchés financiers, où, sémiologiquement parlant, le signe - cotes de bourse - a plus d'importance que le signifié - industries dans leur contexte socio-politique. Cette acception du formalisme trouve également un écho dans le concept deleuzien de déterritorialisation.

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