Extrêmophile

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Un organisme est dit extrêmophile lorsque ses conditions de vie normales sont mortelles pour la plupart des autres organismes : températures proches ou supérieures à 100°C (hyperthermophiles) ou inférieures à 0°C (psychrophiles), pressions exceptionnelles (grands fonds marins), milieux très chargés en sel halophiles, milieux acides ou alcalins, milieux radioactifs et pauvres en oxygène…
Beaucoup d'extrémophiles appartiennent au taxon des Archaea ou des Bactéries, bien qu'il existe aussi des extrémophiles eucaryotes unicellulaires et métazoaires, (insectes, crustacés, poissons…). On réserve toutefois le terme aux organismes unicellulaires.

Les organismes extrêmophiles peuvent être isolés de sources chaudes sulfureuses, de cheminées hydrothermales sous-marines, de sédiments, dans les glaces de l'Antarctique ou de l'Arctique, dans des eaux saturés en sel (lac ou Mer Morte), dans des gisements pétroliers…

Quelques êtres vivants, appelés polyextrémophiles, cumulent même plusieurs de ces résistances (exemple de Deinococcus radiodurans, Kineococcus radiotolerans, ou de Sulfolobus acidocaldarius).

Parfaitement adaptés à ces conditions très spéciales, les extrémophiles sont rares dans les conditions plus ordinaires. En effet, même lorsqu'ils sont capables de supporter ces conditions (car dans bien des cas leur métabolisme spécial nécessite les conditions extrêmes), ils supportent mal la concurrence d'organismes banals. Il arrive que l'on distingue extrémophilie et extrémotolérance, selon que l'organisme a besoin des conditions exceptionnelles, ou bien qu'il les supporte mais qu'on le trouve dans des conditions plus ordinaires.

Il faut bien distinguer le cas des extrémophiles, qui vivent normalement dans ces conditions extrêmes, du cas relativement banal des organismes capable de prendre une forme résistante aux conditions défavorables (en suspendant leurs fonctions vitales, en se protégeant par la formation d'un kyste ou d'une spore).

Sommaire

[modifier] Différents types d'extrêmophiles

  • Acidophile : organisme vivant dans des environnements acides (pH optimum de croissance proche de 3).
  • Alcalophile : organisme vivant dans des environnements basiques (pH optimum de croissance proche de 9 et plus).
  • Halophile : organisme vivant dans des milieux très salés (forte concentration en NaCl).
  • Métalotolérant : organisme tolérant de hautes concentrations en métal (cuivre, cadmium, arsenic, zinc).
  • Psychrophile : organisme vivant dans des environnements froids.
  • Piézophile : organisme vivant dans des environnements soumis à des pressions élevées (fonds océaniques profonds jusqu'à -11 000 mètres ; fosse des marianes)
  • Radiorésistant : organisme pouvant survivre à des radiations ionisantes élevées.
  • Thermophile : organisme vivant dans des environnements chauds avec des optimums de croissance proche de 60°C.
  • Hyperthermophile : organisme vivant dans des environnements très chauds avec des optimums de croissance proche de 90°C à plus de 100°C.
  • Xérophile : organisme capable de résister à la dessication (ayant besoin de peu d'eau pour survivre).

[modifier] Intérêts de l'étude des extrêmophiles

Les extrémophiles sont un sujet d'étonnement et d'étude à plusieurs titres :

  • Leurs particularités offrent des perspectives technologiques variées (protéines thermostables, enzymes de lessives à l'eau froide, par exemple) et un vaste champ d'études biologiques. Les protéines et enzymes extrêmes constituent un marché en plein essor (biotechnologie et industries chimiques). L'exemple le plus spectaculaire est la Taq polymérase provenant de Thermus aquaticus qui est largement employé pour les réactions de PCR.
  • L'apparition de la vie a peut-être eu lieu dans un environnement extrême. L'atmosphère primitive de l'époque, sans oxygène et sans ozone, laissait passer les UV du soleil qui pouvait entraîner la formation de radicaux libres toxiques pour les cellules. D'après le chimiste Günter Wächtershäuser la vie serait apparue dans un milieu chaud sulfuro-ferreux en absence d'oxygène. Ce milieu est proche de celui des cheminées hydrothermales ou vivent de nombreux micro-organismes hyperthermophiles. Cependant, les preuves fossiles de l'existence d'une forme de vie au niveau de site hydrothermaux fossilisés ne sont pas encore confirmées.
  • Ils illustrent les capacités étonnantes d'adaptation de la vie, ce qui crédibilise l'idée de formes de vie sur des planètes en apparence non viables.

[modifier] Quelques exemples d'extrêmophiles

  • Pyrolobus fumarii isolée de cheminée hydrothermale sous-marine se multiplie encore à 113°C.
  • Une souche surnommée Strain 121, proche des Archaea des genres Pyrodictium et Pyrobaculum, a été isolée d'échantillons hydrothermaux et serait capable de survivre à 121°C.
  • Sulfolobus acidocaldarius isolé de sources chaudes acides, est à la fois acidophile (croissance à un pH de 2-3) et hyperthermophile (optimum de croissance vers 80°C).
  • Deinococcus radiodurans, radiorésistant à 1 500-3 000 fois la tolérance humaine.
  • Bacillus infernus a été isolée à 2 700 mètres sous la surface du sol.
  • Ferroplasma acidarmanus peut croître à pH proche de 0.
  • Haloarcula marismortui isolée de la Mer morte, est très halophile et se développe dans une eau à 300 g/l de NaCl (10 fois la salinité de l'océan).
  • Les poissons de la famille des Nototheniidae, vivent dans l'Océan Austral et sécrètent des protéines antigel dans leur sang.
  • Le ver de Pompéi Alvinella pompejana, des cheminées hydrothermales sous-marines, présente des capacités de thermorésistance exceptionnelles pour un eucaryote pluricellulaire (tolère une température de 20 à plus de 80°C chez l’adulte).

[modifier] Extrémophilie polaire

On a découvert en 2004 un nombre important de micro-organismes sous des roches de l'Arctique et du continent Antarctique.

Ce milieu était jusqu'alors considéré comme particulièrement hostile au développement de la vie, d'une part en raison des températures extrêmes, mais aussi à cause de vents extrêmement violents et surtout du rayonnement ultraviolet.

[modifier] Références bibliographiques

  • Michael Gross. La vie excentrique : voyage dans les mondes extrêmes. Éd. Belin, Pour la science, 2003.
  • Patrick Forterre. Microbes de l'enfer. Éd. Belin, Pour la science, 2007.
  • Fujiwara, S. 2002. Extremophiles: Developments of their special functions and potential resources. Journal of Bioscience and Bioengineering 94:518-525.
  • Rothschild, L. J., and R. L. Mancinelli. 2001. Life in extreme environments. Nature 409:1092-101.
  • Stetter, K. O. 1999. Extremophiles and their adaptation to hot environments. FEBS Lett. 452:22-25.
  • Horikoshi K. & Grant W. D. Extremophiles. Microbial Life in Extreme Environments. (Wiley-Liss, New York 1998).

[modifier] Liens internes

[modifier] Lien externe