Denis Rake

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Denis Rake (1902-1976) fut, pendant la Seconde Guerre mondiale, un agent secret britannique ayant servi dans le Special Operations Executive. Envoyé en mission en France comme opérateur radio, il travailla en 1942 pour les réseaux SPRUCE et PRIVET et en 1944 pour le réseau FREELANCE.

Nom de guerre SOE : « Justin ».

Note : pour accéder à une photographie de Denis Rake, se reporter au paragraphe Sources et liens externes en fin d'article.

Sommaire

[modifier] Famille

  • Son père : Anglais, correspondant du Times. Pendant la Première Guerre mondiale, il fournissait des faux papiers au réseau d’Edith Cavell. Il échappe à la rafle qui conduit l'infirmière au poteau (le 12 octobre 1915), mais meurt peu après de tuberculose.
  • Sa mère : Galloise, cantatrice (soprano coloratur) à l'Opéra de La Monnaie de Bruxelles.

[modifier] Biographie

[modifier] Avant la guerre

1902. Naissance de Denis Joseph Rake le 22 mai à Bruxelles[1].

1905. Sa mère le confie au cirque Sarazini. Ainsi, pendant toute son enfance, il va parcourir l'Europe.

1914. Empêché par la guerre, le cirque le rend à ses parents.

1915. Son père meurt. Sa mère réussit à passer en Angleterre avec Denis.

Denis suit des cours de transmissions radio.

1918. À la fin de la guerre, il retourne à Bruxelles.

1920-1923. Un diplomate anglais, qui s'éprend de lui, l'emmène à Athènes. Après leur séparation, Rake a une laison avec un prince de la famille royale grecque, qui l'entretient mais qui, entrant en politique, devient la cible de la presse d'opposition. Rake va à Venise, puis rentre en Angleterre.

1924. Pendant 15 ans, il joue dans des comédies musicales[2]. Il atteint l'apogée professionnelle avec le premier rôle de Mercenary Mary.

[modifier] Pendant la guerre

1939. Il est mobilisé. Parlant parfaitement français, il sert comme interprète à Nantes.

1940. Il subit deux naufrages : • à la débâcle, il réussit à s'embarquer in extremis sur le Lancastria, qui est coulé ; il ne sait pas nager, mais un camarade le sort de l'eau. • il est affecté, comme interprète, sur un dragueur de mines rallié à de Gaulle, Pollux, qui est coulé en juillet ; Rake en réchappe de justesse. Il est alors affecté à terre.

1942.

  • Il est recruté par le Special Operations Executive. Il suit l'entraînement, mais refuse de participer aux exercices physiques.
  • Mai. Dans la nuit du 13/14, une felouque le largue dans un canot en caoutchouc au large de Antibes, ainsi que Charles Hayes[3].
  • Déçu par le fonctionnement des réseaux de la Côte d'Azur, il va à Lyon et prend contact avec Virginia Hall. Dès le début, ils s'entendent bien. Elle commence par le loger chez une prostituée. Mais là, les émissions radio ne passent pas bien. Il doit changer d'adresse. Dans la journée, il fait son travail d'opérateur radio, aux côtés d’Edward Zeff « Mathieu », opérateur du réseau SPRUCE. Le soir, il se produit comme chanteur dans le cabaret lyonnais La Cigogne. Un jour qu'un policier lui demande d'ouvrir sa valise, il s'en tire en prétendant faire du marché noir et en payant grassement le policier !
  • Il est trahi : un jeune agent du SOE, récemment parachuté, qu'il a rencontré chez Virginia Hall, révèle à une parente lyonnaise pétainiste qu'il vient de Londres. La parente le dénonce à la police. Interrogé, il livre le signalement de Rake.
  • Fin juin, apprenant que la Gestapo connaît le nom de Rake, Virginia Hall le prévient qu'il doit quitter Lyon et rentrer à Londres. Mais Rake se propose comme opérateur radio d’Edward Wilkinson, qui attend en vain à Paris que l'opérateur radio attendu réussisse à franchir la ligne de démarcation.
  • Juillet. Au début du mois, il tente de passer la ligne de démarcation près de Montceau-les-Mines, mais il est arrêté[4]. Il est d'abord interrogé par la Gestapo à Chalon-sur-Saône, de manière brutale, mais sans succès, bien qu'il perde plusieurs dents. Il corrompt un gardien et saute du train qui l'emmène à la prison de Dijon[5]. À Paris, il se rend au Bœuf sur le toit, qu'il connaît d'avant guerre. Au bar, il rencontre Max, officier de l'état-major de la Wehrmacht à Paris, vêtu en civil. C'est le coup de foudre. Ils deviennent amants. Il finit par rencontrer Edward Wilkinson « Alexandre », qui lui demande de mettre un terme à sa liaison. Celui-ci commence par refuser. L'arrivée du poste émetteur tardant, Edward Wilkinson « Alexandre » décide de retourner à Lyon auprès de « Marie ». « Justin » devant l'accompagner, doit rompre avec son amant. Ils repassent la ligne de démarcation et se rendent à Lyon le 15[6] auprès de « Marie  », qui leur remet un poste émetteur. Rake souffrant de dysenterie, Virginia Hall le cache quelque temps, avant qu'il retourne à Paris. Puis « Alexandre » ayant retrouvé son camarade d'entraînement Richard Heslop « Fabien », le trio décide de repasser la ligne de démarcation près de Limoges.
  • Août. Le 15, à Limoges, les trois hommes sont arrêtés par la Surveillance du territoire et incarcérés.
Récit de l'arrestation. À Limoges, « Alexandre » et Richard Heslop « Fabien » déposent Rake dans un café qui loue des chambres et s'installent eux-mêmes dans un hôtel. Le trio se retrouve pour dîner au restaurant de l'hôtel des Faisans. « Alexandre » et Richard Heslop « Fabien » s'abstiennent de mentionner où ils sont descendus. Rake pense qu'ils se méfient de lui. Il est ulcéré. Ils prennent rendez-vous pour le lendemain à 11 heures devant Les Faisans. Rake n'y est pas. Une règle de sécurité du SOE impose dans ce cas de ne pas insister. Pourtant, « Alexandre » et Richard Heslop « Fabien » insistent et font le tour du pâté de maison. Ils sont arrêtés au moment où ils repassent devant Les Faisans. Trois heures auparavant, Rake a été arrêté à l'occasion d'un contrôle de police. Redoutant la curiosité de la logeuse, il avait bien caché son émetteur au vestiaire des Faisans. Mais le policier a trouvé dans sa valise une importante somme d'argent (65000 francs). De plus, les billets n'étaient pas épinglés comme d'habitude par liasses de dix. « Alexandre » et Richard Heslop « Fabien » déclarent ne connaître Rake que de la veille. Or deux indices prouvent le contraire : les billets de Rake et ceux d'« Alexandre » sont numérotés à la suite ; et leurs cartes d'identité, supposées avoir été établies dans des villes différentes, sont écrites de la même main.
  • Transfert des trois prisonniers à la prison de Castres. Le régime d'incarcération est beaucoup plus dur : isolement, privations, sévices[7].
  • Novembre. Le 8, nouveau transfert au camp de Chambaran (Isère). Le 11, la Wehrmacht franchit la ligne de démarcation. Le directeur du camp, qui penche pour les alliés, libère alors les trois hommes. Rake part de son côté et réussit à passer en Espagne. Wilkinson et Richard Heslop « Fabien », sans papier et avec peu d'argent, le laissent aller de son côté (car ils le soupçonnent d'être à l'origine de leur arrestation), et reprennent leur chemin interrompu vers Angers. Le 24[8], il est libéré de la prison de Chambaran. Il réussit à passer en Espagne avec deux compatriotes qui ne parlent pas français. Il fait un séjour dans un camp d'internement espagnol, où il se lie avec un garçon qui lui montre ses photos de famille. Il reconnaît « Alexandre ». Le garçon est le frère de Wilkinson, que Rake ne connaîssait que par son pseudo. Rake est récupéré par le consulat britannique.

1944. Dans la nuit du 9/10 mai, un Lysander le dépose à 2,5 km O/SO de Luzillé (Indre-et-Loire)[9]. Il est envoyé comme opérateur radio du réseau FREELANCE, avec J. H. Farmer comme chef (organizer) et Nancy Wake courrier.

[modifier] Après la guerre

Il est maître d'hôtel chez Douglas Fairbanks, Jr.

1976. Il meurt.

[modifier] Récompenses

[modifier] Sources et liens externes

  • Photographie de Denis Rake sur le site Special Forces Roll of Honour
  • Gilles Perrault, Les Jardins de l'Observatoire, Fayard, 1995. Cf. les chapitres 16 à 18.
  • Sir Brooks Richards, Flotilles secrètes. Les Liaisons clandestines en France et en Afrique du Nord, 1940-1944, Éditions Marcel-Didier Vrac (M.D.V.), 2001.
  • Michael Richard Daniell Foot, Des Anglais dans la Résistance. Le Service Secret Britannique d'Action (SOE) en France 1940-1944, annot. Jean-Louis Crémieux-Brilhac, Tallandier, 2008, ISBN : 978-2-84734-329-8 / EAN 13 : 9782847343298. Traduction en français par Rachel Bouyssou de (en) SOE in France. An account of the Work of the British Special Operations Executive in France, 1940-1944, London, Her Majesty's Stationery Office, 1966, 1968 ; Whitehall History Publishing, in association with Frank Cass, 2004. Ce livre présente la version officielle britannique de l’histoire du SOE en France. Une référence reconnue sur le SOE en France.
  • Vincent Nouzille, L'espionne, Virginia Hall, une Américaine dans la guerre, Fayard, 2007.

[modifier] Notes

  1. 22 mai 1902, selon SFRoH. Mais année de naissance 1901, selon Gilles Perrault.
  2. Acteur à Drury Lane [Source : SFRoH].
  3. Source : Brooks Richards, p. 925.
  4. Selon Foot, p. 294, il parvient à convaincre ses gardes français de le laisser sauter du train qui le conduit en prison.
  5. Selon Gilles Perrault, c'est l'aumonier de la prison qui le fait évader, en le mettant dans un bidon d'eaux grasses, avec le nez et les oreilles bouchées par de l'ouate.
  6. Marcel Ruby, p. 102.
  7. Selon Vincent Nouzille, p. 208, l'évasion de Mauzac (16 juillet) provoque un renforcement de la surveillance : Rake est séparé de ses deux camarades et envoyé dans un camp près de Toulouse.
  8. Source : G. Perrault.
  9. Hugh Verity, p. 301.