Aniota (société secrète)

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Les Aniotas ou anioto ou encore anyoto et dit aussi hommes-léopards sont une société secrète africaine criminelle avec une base de religiosité animiste, réputée recruter ses cadres parmi les sorciers villageois sans pour autant revêtir la structure hiérarchisée d'une secte, actifs autrefois au Congo belge, dans la région des Babali du Haut Aruwimi et pratiquant l'assassinat rituel en simulant une attaque de léopard ou de panthère dont la motivation première serait la vengeance.

Sommaire

[modifier] Historique

Anyoto viendrait d’un verbe nyoto qui signifie griffer, mais la tradition populaire parle aussi d’une Aniota qui aurait été une instigatrice de la secte.

Lors de leur initiation, lors d’une cérémonie Mambela, les jeunes recrues, pour montrer leur détermination, devaient tuer un de leur proche, homme, femme ou enfant, en faisant simuler une mort par le léopard, il n'entraient pas délibérément dans la confrérie mais étaient désignés par les anciens et ne pouvaient se soustraire à leur ordre. Leur initiation commençait juste après la circoncision. Ils devaient alors abandonner leur famille et se rendre dans un endroit isolé, forêt ou îlot. Là, pendant de longs mois, le néophyte était soumis à des épreuves très pénibles et mettait sa vie en jeu. Si le candidat était blessé ou tué, nul ne s’en souciait, cela prouvait simplement qu’il n’était pas digne de devenir un homme-léopard. Si le candidat réussissait toutes les épreuves, on lui apprenait alors à imiter parfaitement les cris des félins et à sa servir de ses armes d’assassin.

Les Aniotas furent aussi réputés anthropophages et, à un niveau supérieur, d'être capables de projeter leur conscience dans le corps d’un léopard, qu’il pouvait ainsi téléguider pour aller tuer quelqu’un sur le principe du loup-garou mais sans transformation corporelle[1].

Les Anyotos étaient connus de la population qu’ils terrorisaient mais qui faisait cependant souvent appel à leurs services pour agir en tant que justiciers.

Connus depuis la fin du XIXè siècle, c’est en 1919 seulement que l’administration coloniale soupçonna le mouvement aniota d’être les assassins de si nombreuses victimes apparentes de léopards.

La croyance générale étaient d'abord que les hommes-léopards adeptes de la secte, n’avaient pour cible que les noirs hostiles à la tradition et à l’indépendance, ou trop enclins à coopérer avec les colons. Parmi les victimes, on n’a jamais recensé un blanc.

L’administration coloniale belge lutta contre cette confrérie qui risquait de déstabiliser le système mis en place des chefferies.

Dès 1921, des rapports de police avaient été rédigés sur des meurtres mystérieux perpétrés par les hommes-léopards. Après des mois d’enquête, des suspects furent arrêtés et pendus en place publique.

De 1933 à 1934, l’administration coloniale du Congo belge enquêta sur une série impressionnante de morts suspectes. Les cadavres, du moins ceux que l’on retrouvait car il y avait aussi des disparitions, présentaient tous de profondes blessures à la gorge et, sur le reste du corps, de sillons sanglants. Ces blessures donnaient à penser que le meurtre était l’œuvre d’un fauve. Les empreintes repérées au sol, autour des victimes, tendaient à corroborer cette hypothèse. Mais, un examen plus approfondi révéla bientôt que tous ces crimes avaient été perpétrés par de faux félins: les hommes-léopards. Durant ces deux années, ils atteignirent dans cette région de grandes proportions. Plusieurs centaines de corps lacérés et atrocement mutilés furent retrouvés. Les populations locales refusèrent en majorité de collaborer avec les autorités coloniales de crainte de représailles. Ces massacres auraient été liés à la rivalité entre deux populations : les Bapakombe et les Wanande, les premiers reprochant aux seconds d’envahir leur territoire.

Dans les mois qui précédèrent l’indépendance décidée du pays le mouvement reprit une ampleur inattendue, les aniotas assassinèrent rituellement d’importants leaders nationaux.

Le mouvement n'aurait plus fait parler de lui depuis ou serait à l'état latent.

On peut voir un costume d'aniota au Musée royal de l’Afrique centrale à Tervueren près de Bruxelles.

On parle également d'hommes-léopards, sous d'autres noms au Libéria et en Sierra Leone. Divers cultes animistes semblables peuvent être rencontrés à travers l'Afrique. Les animaux de totem sont différents : hommes-lions au Tanganyika, hommes-hyènes en Côte d'Ivoire ainsi que des hommes-chimpanzés et des hommes-alligators dans quelques régions.. La structure criminelle et vengeuse de la fraternité serait par contre identique. On peut alors parler d’une confrérie initiatique existant dans un grand nombre de tribus vivant entre le Congo et la Guinée.

[modifier] Analyses et Hypothèses

Les hommes-léopards étaient intimement liés à l'association initiatique du mambela. Les chefs religieux ou sorciers choisissaient parmi eux les futurs hommes-léopards ou anioto, qu'ils formaient au meurtre. Le secret total et la solidarité absolue entre initiés du même groupe a certainement favorisé la naissance de l'aniotisme au sein du mambela. Mais la mise en place des structures coloniales a effrité les pouvoirs religieux, politiques et judiciaires des grands initiés détenteurs de ces pouvoirs. Ceci peut avoir conduit les chefs à ériger en système le meurtre rituel, seul moyen de restaurer par la crainte le pouvoir vacillant de leurs dirigeants traditionnels. Ce qui expliquerait qu'au moment de l'indépendance, ces mêmes pouvoirs se soient attaqués aux leaders africains qui allaient prendre la place de l'administration coloniale, d'autres évoquent que leur membres avaient finit par collaborer avec le colonialisme belge, voire même tiraient de ce régime une garantie de pérennité de leur pouvoir.

[modifier] Les Aniotas dans la culture populaire

  • La confrérie est évoquée dans la série Tarzan dans la nouvelle: Tarzan et les hommes-léopards (Tarzan and the Leopard Men), 1932, 1933.

[modifier] Bibliographie

  • Joset P.E., Les sociétés secrètes des hommes-léopards en Afrique Noire, Payot, Paris.
  • Cyrier, Jeremy, Anioto: Mise d'une patte sur la puissance. Hommes de léopard du Congo belge, 1911-1936, causerie délivrée à la 4e conférence annuelle d'étudiant gradué de Midwestern pour des études africaines, septembre 12, 1999 à Lansing est, Michigan par Jeremy Cyrier de l'université de la Virginie.
  • Hallet Jean-Pierre, Congo Kitabu , Fawcett Crest, 1967. (d'abord édité par Random House, février 17, 1966). (Hallet utilise l'épellation d'Anyoto tandis que Cyrier préfère Anioto.)
  • Burroughs Edgar Rice, Tarzan et Leopard Men , ERB Inc., 1935.
  • Turnbull, M. De Colin, le peuple de la forêt, Touchstone, 1969
  • Sarno Louis, chanson de la forêt: Ma vie parmi les pygmées de Ba-Benjelle, Houghton Mifflin, 1993.

[modifier] Liens et références externes

[modifier] Notes et références

  1. Aniotas et sorcellerie en Afrique, interview de Patrick Nguema Ndong par le site Afrik