Albert Laponneraye

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Albert Laponneraye, né le 8 mai 1808 à Tours, mort le 1er septembre 1849 à Marseille, est un militant républicain et socialiste et un auteur français. Historien, publiciste, militant révolutionnaire, admirateur de Robespierre, Laponneraye a passé la majeure partie de sa vie en prison.

Sommaire

[modifier] Biographie

De famille noble, son père a émigré pendant de la révolution française. Après la mort de son père, il fonde une institution pour soutenir sa mère et sa sœur, sans fortune, installée 12 rue Thévenot, où il enseigne pendant trois ans. Après avoir pris part à la révolution de 1830, il ouvre une école gratuite pour les ouvriers. Pour donner une plus grande extension à cette œuvre, il réunit autour de lui plusieurs jeunes professeurs partageant ses opinions et fonde avec eux la « Société de la jeune France », consacrée à l'instruction populaire, qui rejoint plus tard la « Société des Droits de l'Homme ». Dans le même temps, il rejoint la « Société des Amis du Peuple », qui regroupe de nombreux militants révolutionnaires à Paris.

En avril 1831, détenu à Sainte-Pélagie, il participe à une émeute qui vient d'éclater dans la prison. Pour le punir, on le transfère dans un cachot à la Force. Là, privé de ses livres, travaillant de mémoire, il rédige un cours public d'histoire de France de 1789 à 1830, à l'usage des ouvriers. La douzième leçon est consacrée à Robespierre.

Sorti de prison, il donne sa première leçon le 6 novembre 1831; elle attire un important public d'ouvriers et de jeunes gens. Effrayées par son succès, les autorités font fermer son cours par la police le 4 décembre suivant; et, en avril 1832, il passe devant les assises pour excitation à la haine de classes ; il est condamné à deux ans de prison et 1 000 francs d'amende[1].

Toutefois, il poursuit son action d'instruction populaire en regroupant les ouvriers qui ont assisté à ses cours en sections de moins de vingt membres, afin qu'ils puissent lire entre eux ses leçons. Ces sections son bientôt organisées au sein de la « Société des Droits de l'Homme », qui intègre également la « Société des Amis du Peuple ».

Après sa libération, Laponneraye entreprend l'édition d'Œuvres choisies de Robespierre. Le premier volume, comprenant les discours de l'Incorruptible de la période 1789-1792, paraît en fascicules dans le courant de l'année 1832. Au début de cette année, les autorités, inquiètes de ses activités militantes le font de nouveau arrêter. En prison, il poursuit ses Cours d'histoire et publie un Commentaire des droits de l'Homme, opuscule imprimé à 200 000 exemplaires à Paris et en province. La date de sa sortie nous est inconnue, mais il y retourne le 27 juin 1833, condamné à trois ans de prison et 3 000 francs d'amende pour avoir, dans une Lettre aux prolétaires (deux ont été écrites en 1833, la première à Saint-Pélagie le 1er février, la seconde le 26 mars), « provoqué un renversement de gouvernement ».

Il semble que Laponneraye et Charlotte Robespierre se sont rencontré dans le courant du second semestre de 1832. Dès lors, ils se voient aussi souvent que possible, et ont de « longues et fréquentes conversations ». La mort de Charlotte Robespierre lui parvient le 1er août 1834, pendant son emprisonnement à Sainte-Pélagie. Lors des funérailles, le 3 août, un ami lit devant la tombe un discours que Laponneraye a rédigé. Charlotte lui lègue ses papiers, dont le manuscrit inachevé de ses Mémoires ; Laponneraye les publie presque aussitôt, après avoir comblé une partie des lacunes avec des notes trouvées dans les papiers et ajouté quelques pages de son cru. L'ouvrage paraît d'abord dans la collection Mémoires de tous. Quelques mois après, Laponneraye publie lui-même une deuxième édition. Libéré en 1837, il commence en 1840 l'édition des Œuvres de Robespierre en quatre volumes (dont trois seulement voient le jour) et intercale les Mémoires dans le tome II. Par ailleurs, il rédige une introduction très développée.

La parution presque simultanée des Mémoires et des Œuvres de Robespierre contribue grandement à attirer l'attention du grand public, qui peut ainsi, pour la première fois depuis la mort de l'Incorruptible, juger Robespierre d'après ses propres écrits, et non d'après l'interprétation tendancieuse d'auteurs le plus souvent hostiles. Laponneraye a donc joué un rôle capital dans la diffusion de l'œuvre de Robespierre et favorisé le travail de ses successeurs.

De septembre 1837 à mars 1840, il fait paraître une feuille intitulée l'Intelligence.

Après l'échec de la tentative d'insurrection républicaine de la Société des saisons, menée par Barbès, Blanqui et Bernard en mai 1839, on retrouve dans les papiers de Blanqui une liste du gouvernement provisoire qui devait être institué en cas de succès, dans laquelle le nom de Laponneraye figure. À partir de 1840, il fait partie du groupe des communistes néo-babouvistes[2],[3],[4].

Sous la Deuxième République, Laponneraye fonde à Marseille le journal La Voix du peuple et préside la Solidarité républicaine de la ville[5], où il se veut un relais des objectifs que Martin Bernard avait fixé à l’association :

« Le résultat est certain si nous savons nous unir, former faisceau, si nous savons comprendre que pour notre parti, la question va devenir une question d’être ou de n’être pas […]. Avec cette association, nous pouvons relier les tronçons épars de la démocratie, nous pouvons former une armée redoutable, d’autant plus redoutable qu’elle sera plus pacifique et plus légale dans l’acception la plus stricte de la Constitution. Il faut en un mot que notre Solidarité couvre la France, que pas une commune de la République ne soit privée de son action centralisatrice. »

Cardiaque, il meurt d'une « fièvre typhoïde, après quelques jours de maladie »[6], en septembre 1849, à l'âge de 41 ans. Il est remplacé à la tête de son journal par Alphonse Esquiros.

[modifier] Œuvres

  • Histoire de l'amiral de Coligny, Paris, 1830
  • Cours public d'histoire de France, depuis 1789 jusqu'en 1830, Chez la mère de l'auteur, 1831-34
  • commentaire sur les droits de l'homme, 1832
  • Défense du citoyen Laponneraye, prononcé aux assises de la Seine le 21 avril 1832, sous-titré Les poursuites étaient motivées par le cours d'histoire de France de Laponneraye, Paris, A. Mie, 1832, 12 pages
  • Lettre aux prolétaires (4 pages), Hambourg, 1833 (signée : Laponneraye. Prison de Sainte Pélagie, 1er février 1833)
  • Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Avec des commentaires par Laponneraye, Paris, A. Mie, 1833
  • Notice historique sur Maximilien Robespierre, Imprimerie de Grossteite, 1833
  • Mélanges d'économie sociale, de littérature et de morale, Paris, Dépôt central, 1835
  • Dictionnaire historique des Peuples anciens et modernes, leurs coutumes, leurs lois, leur gouvernement, les principaux faits de leur histoire, etc., Paris, Pagnerre, 1835-1836, 2 vol.
  • Catéchisme démocratique, Paris, Imprimerie de Baudoin, 1836 (extrait de L'Intelligence, journal de la réforme sociale), 18 pages
  • Description pittoresque et statistique de Paris au XIXe siècle, ou Tableau de ses édifices, de ses monuments, de ses arts, de sa littérature, de son industrie, de son commerce, de ses coutumes, de son organisation municipale, administrative, politique et judiciaire, etc., précédé d'un résumé de l'histoire de Paris depuis son origine jusqu'à nos jours, Paris, Imprimerie de Chassaignon, 1836
  • Biographie des rois, des empereurs et des papes, Paris, Dépôt central, 1837-1838, 2 vol.
  • Histoire complète de la Révolution, depuis 1789 jusqu'en 1814, Paris, 1838
  • Histoire des révolutions de l'Europe depuis l'invasion des Barbares jusqu'en 1789, Paris, bureau des révolutions de l'Europe, 1839
  • Stéphanowa, histoire russe, Paris, 1840
  • Histoire des rivalités et des luttes de la France et de l'Angleterre depuis le Moyen-Âge jusqu'à nos jours (en collaboration avec Hippolyte Lucas), Paris, Chez l'éditeur, 1842
  • Histoire des guerres civiles de France depuis les temps mérovingiens jusqu'à nos jours (en collaboration avec Hippolyte Lucas), Paris, bureau de la Société de l'industrie fraternelle, 1847, 1126 pages, 2 vol.
  • Catéchisme républicain, Avignon, Peyri, 1848, 13 pages
  • Histoire universelle depuis les premiers âges du monde, 1845-1846, inachevé (7 volumes sur les 20 prévues, ainsi que quelques pages du huitième tome)
Éditions
  • Mémoires de Charlotte Robespierre sur ses deux frères, Paris, 1835, 183 pages, précédés d'une introduction par Laponneraye, et suivis de pièces justificatives
  • Oeuvres de Maximilien Robespierre. Avec une notice historique, des notes et des commentaires, 3 volumes, Paris, Chez l'éditeur, 1840 (réédition Paris, E. Leroux, 1912 ; Paris, Presses universitaires de France, 1926 et 1950 ; New York, Burt Franklin, 1970 ; Ivry, Phénix éditions, 2000).

[modifier] Sources partielles

  • Gérard Walter, Robespierre, Gallimard, collection NRF Biographies, 1961, réédition 1989, p. 645-650
  • Jean-Chrétien Ferdinand Hoefer (dir.), Nouvelle biographie générale depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, Paris, Firmin didot frères, 1859, tome 29, p. 556-557
  • Germain Sarrut, B. Saint-Edme, Biographie des hommes du jour, Paris, Henri Krabe, tome 1, 1837, p. 117-121

[modifier] Notes et références

  1. Loïc Rignol, «Augustin Thierry et la politique de l’histoire. Genèse et principes d’un système de pensée.», Revue d'histoire du XIXe siècle, 2002-25, « Le temps et les historiens ».
  2. Claude Mazauric, «La communauté des Égaux. Le communisme néo-babouviste dans la France des années 1840», in Annales historiques de la Révolution française, n° 322, compte rendu d'Alain Maillard, La communauté des Égaux. Le communisme néo-babouviste dans la France des années 1840, Paris, Kimé, 1999
  3. Babeuf François-Noël, dit Gracchus
  4. Bruce Vanderort, « Babouvism (Babeuvism) »
  5. Frédéric Négrel, Clandestinité et réseau républicain dans le Haut-Var. La société secrète montagnarde d'Artignosc (1849-1851), quatrième partie
  6. L'Ami de la religion, journal ecclésiastique, Librairie ecclésiastique d'Adrien Le Clere & Cie, 1849, tome 142, p. 682, n° 4825, mardi 11 septembre 1849.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Sur Laponneraye

  • Philippe Darriulat :
    • « Albert Laponneraye, journaliste et militant socialiste du premier XIXe siècle », Bulletin du Centre d'histoire de la France contemporaine, Université Paris X Nanterre, 1992, n° 12, p. 104-111, soutenance de thèse[1]
    • « Aux origines du communisme français », Revue historique, Presses universitaires de France, 1992, n° 582, p. 365-378
  • Sudhir Hazareesingh :
    • « Une profonde haine de la tyrannie : Albert Laponneraye et les paradoxes de la mémoire républicaine », Colloque international « Les discours de la haine. Récits et figures de la passion dans la Cité. Regards croisés », Reims, 26, 27 et 28 septembre 2007
    • « Between the memory of Robespierre and the cult of Napoleon: the ambivalent republicanism of Albert Laponneraye », conférence sur « Historicising the French Revolution », Cambridge, 15-16 novembre 2007

[modifier] Liens externes

[modifier] Articles connexes