Yolande d'Aragon

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Yolande d'Aragon (1379, Barcelone - 1443, près d'Angers), également connue comme Jolantha de Aragon ou Violant d'Aragó, était la fille de Jean Ier d'Aragon et de Yolande de Bar (voir son ascendance).

Sommaire

[modifier] Prétentions au trône d'Aragon

Elle joua un rôle important dans la politique de l'Empire angevin, de la France et de l'Aragon, pendant la première moitié du XVe siècle. Elle était la fille survivante du roi Jean Ier d'Aragon, qui n'avait pas de fils, et réclama le trône d'Aragon après la mort de sa sœur aînée Jeanne (comtesse de Foix). Pourtant, les lois de succession d'Aragon et de Barcelone n'étant pas claires, elles furent comprises en faveur des héritiers mâles, ainsi l'oncle de Yolande (frère cadet de Jean Ier), Martin d'Aragon, hérita du trône d'Aragon. Martin mourut sans descendance en 1410, et après deux ans d'interrègne, les États d'Aragon élirent Ferdinand d'Antequera comme nouveau roi d'Aragon. Ferdinand était le second fils d'Éléonore (reine de Castille), sœur de Jean et de Martin.

Le candidat angevin était le fils aîné de Yolande, Louis III d'Anjou, duc de Calabre, dont la revendication reposait dans le Pacte de Caspe. Yolande et ses fils se considéraient comme héritiers prioritaires et commencèrent à utiliser le titre de Rois d'Aragon. À cause de cet héritage, Yolande fut appelée "reine de quatre royaumes", ces royaumes étant probablement la Sicile, Jérusalem, Chypre et Aragon. (Une autre interprétation sépare Naples de la Sicile et exclut donc Chypre). De toute façon, la réalité était que Yolande et sa famille ne possédèrent que pour des intervalles très courts des territoires dans ces royaumes, Jérusalem n'a d'ailleurs jamais été en leur possession. Leur véritable royaume se réduisait aux fiefs d'Anjou en France : ils possédèrent sans conteste la Provence et l'Anjou, le Duché de Bar, le Maine, la Touraine et le Valois. Son fils René devint par mariage Duc de Lorraine.

[modifier] La France et la maison d'Anjou

Dans la seconde période de la guerre de Cent Ans, Yolande prit parti pour la France (par exemple pour le parti des Armagnacs durant la guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons) contre les Anglais et les Bourguignons. Le dauphin Charles, qui comptait beaucoup sur l'aide de Yolande, parvint à se faire couronner Charles VII de France. Comme la propre mère de Charles, Isabeau, combattait sa revendication à la couronne, on a dit que Yolande fut celle qui protégea l'adolescent de toutes sortes de machinations et tentatives d'empoisonnement et joua le rôle de mère. Elle retira Charles de la Cour et le garda dans ses châteaux de la vallée de la Loire, où Charles rencontra Jeanne d'Arc. Elle maria Charles à sa fille Marie d'Anjou et devint ainsi la belle-mère de Charles.

Son mariage avec Louis II d'Anjou en décembre 1400 à Arles fit partie de l'effort pour résoudre les revendications contestées sur le royaume de Sicile et Naples entre les maisons d'Anjou et d'Aragon.

Louis II d'Anjou passa la plus grande partie de sa vie à combattre en Italie pour soutenir sa revendication sur le royaume de Naples. En France, elle était duchesse d'Anjou et comtesse de Provence. Elle préférait tenir cour à Angers et Saumur.

Yolande arrangea en 1413 le mariage de sa fille Marie avec Charles de Ponthieu, troisième fils de Charles VI et de la reine Isabeau. Cele amena son implication personnelle et cruciale dans le combat pour la continuation de la dynastie des Valois en France.

La victoire des Anglais à Azincourt (1415) faisait peser des menaces sur le duché d'Anjou. Le roi Charles VI était malade et son royaume divisé par la guerre civile entre les Bourguignons et les Orléanistes (Armagnac). La situation empira par l'alliance des ducs de Bourgogne avec les Anglais et parce que la reine Isabeau fournit aux ducs de Bourgogne des arguments pour contester les droits des enfants de Charles VI sur la couronne de France. Craignant le pouvoir abusif des Bourguignons, Louis II envoya Yolande, ses enfants et son futur beau-fils en Provence.

[modifier] Le Dauphin

En 1416, le dauphin Louis, frère aîné de Charles de Ponthieu mourut. Il fut suivi en 1417 par Jean, le deuxième frère et donc entre-temps dauphin. Les deux aînés avaient été sous la protection du duc de Bourgogne. Yolande était la protectrice de son beau-fils Charles qui devint le nouveau dauphin. Le 29 avril 1417 Louis II d'Anjou mourut de maladie, laissant Yolande, alors âgée de 33 ans, en charge de la maison d'Anjou. Elle tenait également le sort de la maison royale des Valois dans ses mains. Le dauphin Charles était très vulnérable face aux desseins du roi d'Angleterre Henri V et de son cousin Jean sans Peur, le duc de Bourgogne. Les parents les plus proches de Charles, les ducs d'Orléans et de Bourbon avaient été faits prisonniers à Azincourt par les Anglais. À cause de l'alliance de sa mère, du duc de Bourgogne et des Anglais, Charles ne pouvait compter que sur le support de la maison d'Anjou et celle des Armagnac (qui avait rejoint la cause orléaniste).

Après l'assassinat de Jean sans Peur à Montereau en 1419, son fils Philippe le Bon devint duc de Bourgogne. Philippe et Henri V d'Angleterre imposèrent le traité de Troyes (21 mai 1420) au roi Charles VI. Le traité désignait Henri comme régent de France et héritier de la couronne. En 1421, le dauphin Charles fut donc déshérité. Henri V et Charles VI moururent tous deux en 1422 (respectivement le 31 août et le 21 octobre). Charles, alors âgé de 19 ans, devint légitimement Charles VII de France. Ce titre était contesté par les Anglais et leurs alliés bourguignons qui soutenaient la prétention du jeune fils d'Henri V, Henri VI d'Angleterre. Cela marqua la dernière étape de la guerre de cent ans.

Yolande joua un rôle important dans cette lutte, entourant le jeune roi de conseillers et domestiques de la maison d'Anjou. Elle manœuvra pour que le duc de Bretagne rompe son alliance avec l'Angleterre et fit nommer Arthur de Richemont, membre de la famille ducale bretonne, connétable de France en 1425. Le soutien fort et précoce à Jeanne d'Arc, alors que d'autres avaient encore des doutes, suggère que la duchesse joua un rôle dans l'apparition de la jeune fille. Yolande menait sans aucun doute une politique réaliste. Avec l'aide du connétable de Richemont, Yolande fut derrière le renvoi de plusieurs proches conseillers de Charles VII dont :

Yolande n'était pas contre l'utilisation de maitresses ou d'hommes d'influence. Elle disposait d'un réseau de femmes dans les cours de Lorraine, Bourgogne, Bretagne et même dans celle de son beau-fils.

Le chroniqueur contemporain Jean Juvénal des Ursins décrivit Yolande comme « la plus belle femme du royaume ». Charles de Bourdigné, chroniqueur de la maison d'Anjou, dit d'elle "Elle était considérée comme la plus sage et la plus belle princesse de la chrétienté". Plus tard, le roi Louis XI affirma que sa grand-mère avait "un cœur d'homme dans un corps de femme". Un auteur du XXe siècle, Jehanne d'Orliac, rédigea un des rares ouvrages spécifiques sur Yolande. Elle nota que la duchesse ne fut pas appréciée à sa juste valeur pour son génie et son influence durant le règne de Charles VII: elle n'est mentionnée qu'en passant, alors qu'elle fut le pivot de tous les événements importants de 42 années d'histoire de France, alors que Jeanne d'Arc ne fut sous les feux de la rampe que durant onze mois.

Yolande finit par se retirer à Angers puis au château de Tuce-de-Saumur, où elle mourut le 14 décembre 1443

[modifier] Chronologie

1379 : Yolande naît à Saragosse, Aragon
1400 : en décembre, Yolande épouse Louis II d'Anjou à Arles
1410 : mort du roi Martin Ier d'Aragon
1412 : le fils de Yolande, Louis, est reconnu roi d'Aragon, mais son parent Ferdinand Ier de Trastamare devint roi
1413 : Louis II d'Anjou rejoint la faction orléaniste contre les Bourguignons
1417 : Yolande devient veuve le 29 avril. Elle rejete la demande de la reine Isabeau de renvoyer Charles (devenu dauphin après la mort de ses frères) à la cour. On rapporte qu'elle répondit Nous n'avons pas nourri et chéri celui là pour que vous le fassiez mourir comme ses frères, devenir fou comme son père ou devenir anglais comme vous. Je le garde près de moi. Venez le prendre si vous l'osez.
1419 : le 29 juin, Yolande obtint un audience de Charles VI et le poussa à signer le décret faisant de son fils le lieutenant-général du royaume. Isabeau ne put ainsi plus prétendre à être régente. Yolande se retire en Provence.
1423 : Yolande revient de Provence. Elle met en route le premier traité avec la Bretagne.
1424-1427 : Yolande préside les États-généraux. Elle signe un traité avec le duc de Bretagne et engage le frère du duc, Arthur de Richemont à supporter la cause des Valois
1427 : le régent anglais, le duc de Bedford, voulut prendre le duché d'Anjou. Yolande riposta par une série de rencontres et d'accord de mariage entre plusieurs familles nobles, ce qui sapa les initiatives anglaises et bourguignonnes et soutint le couronne. Des désaccords entre la Trémoïlle, un conseiller de Charles VII et le connétable Richemont amena au bannissement de Richemont.
1429 : Yolande fut en charge d'une des enquêtes sur Jeanne d'Arc que la duchesse supportait. Yolande arrangea le financement de l'armée de Jeanne qui alla au secours d'Orléans.
1431 : Yolande réside à Saumur où Charles VII tint son assemblée. La plus jeune fille de Yolande épouse le prince héréditaire de Bretagne. Son fils hérite du duché de Lorraine mais est fait prisonnier à la bataille de Bulgnéville le 30 juin 1431.
1433 : Richemont qui était de retour à la cour depuis 1432 fait tomber La Trémoïlle. Le plus jeune fils de Yolande, Charles, comte du Maine, assume la position de conseiller en chef du roi Charles.
1434 : le fils de Yolande, Louis III d'Anjou, meurt et René devient duc d'Anjou et héritier en Sicile. La reine Jeanne de Sicile avait fait Louis III co-régent et héritier.
1437 : René est libéré en échange d'une importante rançon. Il part pour l'Italie en 1438 et engage une guerre contre Alphonse d'Aragon pour le royaume de Naples. Il est forcé d'abandonner Naples durant l'été 1442.
1443 : Yolande meurt.

[modifier] Famille

Elle fut promise à l'héritier dAnjou, Louis (qui avait accédé au trône de Naples sous le nom de Ludovic II de Naples un an plus tôt, suite à la conquête de Naples) en 1390, et se maria avec lui le 2 décembre 1400 à Montpellier. Leurs enfants :

  1. Louis III (1403 † 1434) - duc d'Anjou, roi de Naples
  2. Marie (1404 † 1463) - épouse du roi de France Charles VII
  3.  ? (1406 †? ) - épouse d'un comte de Genève
  4. René (1408 † 1480) - duc d'Anjou, duc de Bar, duc de Lorraine (par alliance), roi titulaire de Sicile et de Naples
  5. Yolande (1412 † 1440), épouse de François Ier, duc de Bretagne
  6. Charles (1414 † 1472), comte du Maine (ne fut jamais duc d'Anjou, mais son fils le fut)

[modifier] Fiction

Le personnage de Yolande apparaît en 1999 dans le film Jeanne d'Arc de Luc Besson sous les traits de Faye Dunaway. On la retrouve également dans la bande dessinée Le Trône d'Argile, des éditions Delcourt.

[modifier] Sources

  • Jehanne d'Orliac Yolande d'Anjou, la reine des quatre royaumes (Paris, Plon, 1933). (Œuvre de fiction)
  • Philippe Erlanger Charles VII et son mystère (Paris, Gallimard 1945, Perrin 1973, 1981)
  • Philippe Erlanger 9 femmes qui ont fait la France, Historia (septembre 1971, pp.40-53)

[modifier] Bibliographie

  • Arnaud des Roches de Chassay, Yolande d'Aragon, éditions Charles Hérissey, 2006 (ISBN 2914417306)
  • Gérard de Senneville, Yolande d'Aragon, celle qui a gagné la guerre de Cent Ans, Perrin, 2008 (ISBN 2262028001)
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