Thierry Groensteen

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Thierry Groensteen, né le 18 avril 1957 à Uccle (Bruxelles), est un historien et théoricien de la bande dessinée de nationalité belge et française.

Il contribue dans les années 1980 à l'émergence de la théorie de la bande dessinée en dirigeant Les Cahiers de la bande dessinée, puis en travaillant pour Le Monde. À travers diverses revues, missions institutionnelles et conférences, il poursuit depuis ses travaux de théorisation et légitimation de la bande dessinée. C'est le théoricien francophone de la bande dessinée le plus visible et le plus important de ces trente dernières années.

Sommaire

[modifier] Biographie

De 1960 à 1975, Thierry Groensteen est élève de l'École européenne de Bruxelles[1]. Au début des années 1970, il suit des cours de théâtre, tout en dirigeant Buck, le journal de son école, qu'il transforme progressivement en fanzine de bande dessinée. Tome y publie ses premières planches, Numa Sadoul et Didier Pasamonik rédigent des articles.

Après son baccalauréat, il étudie à partir de 1975 le journalisme à l’Institut des hautes études des communications sociales, à Tournai, dont il sera diplômé en 1979. Après avoir été stagiaire pour Le Soir en 1978, il travaille à la Direction générale de l'Information de la Commission des Communautés européennes jusqu'en 1983. Cependant, dès cette époque, il s'oriente avant tout vers la bande dessinée.

En 1980, ses amis Didier et Daniel Pasamonik, qui viennent de fonder Magic Strip, publient son premier livre, une monographie de Jacques Tardi. L'ouvrage, approchant l'auteur en délaissant sa biographie, inaugure une « nouvelle critique » en bande dessinée, sur les modèles de Roland Barthes, Umberto Eco ou Maurice Blanchot[2]. En 1983, il rédige l'essentiel du rédactionnel de Spirou. Il réalise dans les premières années de la décennie quelques scénarios dans (A SUIVRE) et publie en 1982 chez Glénat Antoine et Victor, avec le dessinateur Jean Lucas. Le manque de réussite de cet album, et la prise de conscience par l'auteur de ses limites le poussent à se spécialiser dans le discours sur la bande dessinée.

En janvier 1984, il prend en main les Les Cahiers de la Bande Dessinée, ancien fanzine de Jacques Glénat en perdition après 55 numéros. Distribuée en kiosque à 12 000 exemplaires, la revue propose, sous la direction de Groensteen, une approche critique très poussée de la bande dessinée. Elle renouvelle entièrement — si elle ne l'inaugure pas — la théorie de la bande dessinée et participe du processus de reconnaissance de cet art. À la fois pour des raisons de temps et de dissenssions de plus en plus fortes avec son éditeur, Groensteen abandonne la tâche en décembre 1988, après 28 numéros. La revue ne survit que quelques mois à son départ. De 1986 à 1990, Groensteen assure également la chronique mensuelle de bande dessinée du Monde.

En 1987, il organise le colloque « Bande dessinée, récit et modernité », (du 1er au 11 août 1987) à Cerisy, là encore acte fondateur de la théorie et de la critique francophones modernes. Jean-Christophe Menu y fait la connaissance de Lewis Trondheim. Les actes du colloque sont publiés par les éditions Futuropolis. Il en organise quelques autres par la suite, dont « La Bande dessinée en Europe », en janvier 2001. De 1986 à 1989, enseigne à l’Institut des Hautes Etudes des Communications Sociales le langage de la bande dessinée, seul puis aux côtés de Thierry Smolderen. C'est sa première expérience d'enseignement.

En septembre 1988, le Centre national de la bande dessinée et de l'image (CNBDI) d'Angoulême, prenant en considération sa place prééminente dans le paysage critique francophone, le recrute comme « conseiller scientifique ». Groensteen s'installe à Angoulême l'année suivante et enseigne l'histoire et la théorie de la bande dessinée à l'École supérieure de l'Image d'octobre 1989 à juin 1993. Il monte au Centre d’Action culturelle de la ville sa première exposition en 1990, Little Nemo et autres songes de Winsor McCay. À Angoulême, il revient également à ses premières amours théâtrales.

En 1991, il publie chez Casterman L'Univers des Mangas : une introduction à la bande dessinée japonaise, premier ouvrage de langue française entièrement consacré à la bande dessinée japonaise, et ce avant l'arrivée massive des manga sur le marché francophone. Cet ouvrage, qui passe alors assez inaperçu, reste cependant une référence à la fin des années 2000. Le livre est mis à jour en 1996.

En 1992, il démissionne du CNBDI et soutient à Toulouse le Mirail un mémoire de D.E.A, Le système spatio-topique de la bande dessinée, afin d'entériner universitairement ses acquis professionnels. En 1996, il y soutient en Lettres Modernes sa thèse Système de la bande dessinée devant Mireille Dottin-Orsini, Pierre Fresnault-Deruelle, Bernard Magné et Pascal Ory. Celle-ci, qui obtient la mention « très honorable » avec félicitations du jury, est édité en aux Presses universitaires de France en 1999 sous le même titre. L'ouvrage, assez complexe dans sa subtilité, propose une approche sémiotique de la bande dessinée.

En 1993, il est un des membres fondateurs de l’Oubapo, Ouvroir de bande dessinée potentielle, groupe fondé sur le modèle de l'Oulipo. Il rédige en 1997 la préface de la première publication du groupe, l’Oupus 1, publié par L'Association. Il se met en congé du groupe en 1999. Fin 1993, il réintègre le CNBDI, dont il est nommé directeur. En 1994, il crée et dirige, avec Henry Dougier, la collection « Histoires graphiques » aux éditions Autrement. Cinq titres sont publiés jusqu'en 1997. La même année, il dirige avec Benoît Peeters un ouvrage sur Rodolphe Töppfer.

En 1996, alors que Groensteen vient d'obtenir la nationalité française, paraît le premier numéro de la revue 9e Art, qu'il dirige. Reprenant l'héritage des Cahiers de la bande dessinée]], 9e Art, éditée par le CNBDI, est un annuel luxueux portant un regard critique avancé aussi bien sur le patrimoine de la bande dessinée que sur ses manifestations les plus contemporaines.

Multipliant ses participations institutionnelles, Groensteen entre au Centre d’Etude de l’Ecriture (groupe de recherche Paris VII-CNRS) comme chercheur associé en 1998, et tient à partir de 1999 la chronique de bande dessinée de Vient de paraître, publié par l'Association pour la diffusion de la pensée française (ministère française des Affaires étrangères).

En 2001, il démissionne de son poste de directeur du Musée de la bande dessinée, son Projet scientifique et culturel de 1999 n'ayant pas obtenu le soutien escompté. Durant ses années à ce poste, il a organisé ou participé à de nombreuses expositions, qui ont donné des ouvrages sur George Herriman, Caran d'Ache, l'histoire de la bande dessinée française, etc. Recevant une bourse dite « d'année sabbatique » du Centre national du livre en juin 2001, il se consacre à l'écriture. En 2002 paraît un ouvrage sur La Cage de Martin Vaughn-James et l'année suivante un autre consacré au visage dans la bande dessinée.

En 2002, après être devenu administrateur de la Maison des Auteurs, il crée, toujours à Angoulême, sa structure d'édition, les Éditions de l'An 2, qui publie des bandes dessinées contemporaines (dans la mouvance « alternative »), réédite des grandes œuvres du passé, et propose divers ouvrages critiques, de Groensteen ou Harry Morgan. L'An 2 co-édite 9e Art à partir de 2003, et la revue devient semestrielle au numéro 8. Cependant, le manque de succès interrompt sa parution en 2005 et l'An 2, en difficulté, se rapproche d'Actes Sud en 2005. Une formule annuelle renaît en janvier 2006. La même année, Groensteen a publié un nouvel ouvrage critique sur la rire hergéen et Un objet culturel non identifié, qui fait le bilan de trente ans de légitimisation de la bande dessinée, et explique pourquoi les clichés perdurent. Le 28 décembre 2006, Groensteen dépose cependant le bilan, et la maison d'édition est absorbée par Actes Sud, et devient une de ses collections.

Moins pris par son métier d'éditeur, Groensteen reprend un poste à l'École européenne supérieure des Arts et technologies de l’image en octobre 2007 (en 2005, il avait assuré quelques cours à l'Université d'Orléans). Son activité éditoriale, reste très vive. Fin 2007, il publie avec Harry Morgan un ouvrage sur Alain Saint-Ogan.

[modifier] L'œuvre critique

[modifier] Un défenseur de la bande dessinée

[modifier] Travaux en relations avec la bande dessinée

[modifier] Essais

  • Tardi, Magic Strip, Bruxelles, 1980.
  • Avec Alix (avec Jacques Martin, Casterman, Tournai, 1984. Réédition augmentée 1987.
  • La bande dessinée depuis 1975, M.A., Paris, coll. « Le Monde de », 1985.
  • L'univers des mangas, une introduction à la BD japonaise, Casterman, Tournai, 1991. Nouvelle édition mise à jour 1996.
  • Töpffer, l’invention de la bande dessinée (avec Benoît Peeters), Hermann, Paris, coll. « Savoirs sur l'art », 1994.
  • La bande dessinée, Milan, Toulouse, coll. « Les essentiels », 1997. Nouvelle édition mise à jour 2005.
  • Krazy Herriman, CNBDI, Angoulême, 1997.
  • Les années Caran d'Ache, CNBDI, Angoulême, 1998.
  • La bande dessinée en France, Ministére des affaires étrangères, ADPF/CNBDI, Paris-Angoulême, 1998.
  • Systéme de la bande dessinée, Presses universitaires de France, Paris, coll. « Formes sémiotiques », 1999.
  • Astérix, Barbarella et Cie. Histoire de la bande dessinée d'expression française à travers les collections du musée de la bande dessinée d'Angoulême, CNBDI-Somogy, Angoulême/Paris, 2000.
  • La Construction de La Cage, autoposie d'un roman visuel, Les Impressions nouvelles, 2002.
  • Lignes de vie. Le visage dessiné, Mosquito, Saint-Egrève, 2003.
  • Le Rire de Tintin. Essai sur le comique hergéen, Moulinsart, 2006.
  • Un objet culturel non identifié, Éditions de l'An 2, coll. « Essais », 2006.
  • L’Art d’Alain Saint-Ogan (avec Harry Morgan), Actes Sud, coll. « Actes Sud-L’An 2 », 2007.
  • La Bande dessinée mode d’emploi, Les Impressions nouvelles, 2008.

[modifier] Ouvrages collectifs (direction)

[modifier] Expositions

  • Little Nemo et autres songes de Winsor McCay, Angoulême, janvier 1990, remontée à Sierre et à Rio
  • Alberto Breccia, Angoulême, janvier 1992, remontée à Paris
  • Storyboard : 90 ans de dessins pour le cinéma, Paris, Palais de Tokyo, avril 1992, remontée à Angoulême
  • Couleur directe, Hambourg, mai 1993, remontée à Blois, Trévise et Barcelone
  • Alex Barbier, les paysages de la nuit, Angoulême, janvier 1994
  • Anges et démons, Angoulême, janvier 1994, remontée à la Martinique
  • Saint-Ogan l’enchanteur, Angoulême, janvier 1995, remontée à Sierre
  • Naissance de la bande dessinée : les histoires en estampes de Rodolphe Töpffer, Angoulême, janvier 1996, remontée à Genève, Hanovre et Bruxelles
  • Krazy Herriman, Angoulême, janvier 1997
  • Les années Caran d’Ache, Angoulême, janvier 1998
  • Tout’an BD, L’Egypte dans la bande dessinée, Angoulême, Musée de la bande dessinée, été 1998, remontée à Angers et à Chatou
  • 49-956 : 50 ans de démoralisation de la jeunesse, Angoulême, janvier 1999
  • Astérix, Barbarella et Cie Trésors du musée de la bande dessinée d'Angoulême », Hildesheim, Basse-Saxe, Roemer- und Pelizaeus Museum, 26 mai -1er octobre 2000
  • Maîtres de la bande dessinée européenne », Bibliothèque nationale de France, Site François Mitterrand, Grande Galerie, du 10 octobre 2000 au 7 janvier 2001 Remonté au CNBDI du 24 janvier au 29 avril 2001
  • Maîtres de la bande dessinée américaine, starring : Popeye », Musée de la bande dessinée, juin-octobre 2001

[modifier] Annexes

[modifier] Notes et références

  1. Sauf notre complémentaire, toute la biographie provient de l'esquisse biographique présente sur le site officiel de Thierry Groensteen.
  2. Arnaud De la Croix, « Monographies, l'ancien et le nouveau », dans Les Cahiers de la bande dessinée n°58, éd. Glénat, juin-juillet 1984, pp. 53-54

[modifier] Liens externes