Otto Meissner

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Otto Meissner est un homme politique allemand né le 13 mars 1880 à Bischwiller, décédé à Munich le 27 mai 1953 qui servit sous la République de Weimar et le Troisième Reich.

Son père était un fonctionnaire des Postes originaire de Prusse, grand patriote et héros de la Guerre de 1870. Il avait été grièvement blessé au cours d'une action d'éclat, ce qui lui valut un avancement rapide et le fit par la suite officier de réserve. Fier de son uniforme il aimait, le dimanche, se rendre à l'église en grande tenue et casque à pointe. Il tint à s'installer dans cette Alsace «reprise aux Français», au milieu de ses «frères allemands» qu'il pensait avoir «libérés», et y épousa une Alsacienne qui mourut jeune en lui laissant cinq enfants. Il se remaria alors avec une arrière-petite-fille du général Kléber ; une telle alliance devait rendre sa famille «intouchable» lors du retour des Français, à l'issue de la Première Guerre mondiale.

Le jeune Otto Meissner grandit donc dans une ambiance particulière qui n'était pas rare dans les milieux germano-alsaciens, où un profond patriotisme allemand n'était pas jugé incompatible avec une culture française assez poussée. En l'occurrence il s'y ajoutait le culte du général Kléber qu'avait apporté sa belle-mère, laquelle sut donner aux orphelins toute l'affection nécessaire.

Après des études de droit de 1898 à 1903 à Strasbourg et Berlin, Otto Meissner reçut le grade de docteur à l'Université d'Erlangen. En 1908 il entra dans les Chemins de Fer impériaux d'Alsace-Lorraine et épousa une jeune fille, elle aussi de père allemand et de mère alsacienne. De 1915 à 1917, pendant la Première Guerre mondiale, il servit dans le 136ème Régiment d'Infanterie de l'armée prussienne et devint ensuite chargé d'affaires à Bucarest, puis à Kiev auprès du gouvernement ukrainien.

En 1918, du fait de ses compétences exceptionnelles, les nouvelles autorités françaises auraient bien voulu lui confier la direction des Chemins de Fer d'Alsace-Lorraine mais, grâce à ses relations, il venait déjà d'obtenir à son retour à Berlin un poste au Cabinet du nouveau Chef de l'État, Friedrich Ebert. Dans d'autres circonstances il aurait peut-être préféré rentrer chez lui, en Alsace, mais l'après-guerre y était marqué par un virulent anti-germanisme. Son fils Hans-Otto, devenu écrivain par la suite, raconte les scènes auxquelles il dut assister, comme l'expulsion de leurs amis Sonnemann ; même s'il se savait invinciblement protégé par l'ombre tutélaire du « bon oncle Kléber », le jeune enfant en fut profondément marqué. Otto Meissner resta donc à Berlin, comme d'autres membres de l'intelligentsia alsacienne, et ses qualités manquèrent à la reconstruction du pays.

Grâce aux protections dont elle jouissait, sa famille put le rejoindre en emportant tous ses meubles et son argent. Ce traitement de faveur explique probablement l'attitude modérée qu'il eut par la suite vis-à-vis de la France. Dès 1920 il devint, à Berlin, Chef de Cabinet puis Secrétaire d'État en 1923. Il a ensuite été secrétaire particulier d'Hindenburg et de von Papen.

Sous le Troisième Reich, il accéda au rang de ministre d'État et, à ce titre, fut arrêté par les Alliés le 23 mai 1945, jugé à Nuremberg au procès des ministères, et acquitté le 14 avril 1949. En mai 1949 il fut poursuivi à nouveau comme compagnon de route et la procédure fut forclose en 1952. Sauva-t-il la vie de plusieurs Alsaciens condamnés à mort en glissant l'ordre de les gracier parmi plusieurs feuilles qu'il avait présentées à signer au Führer, comme le disent l'historien allemand Kettenacker et Robert Heitz (un des condamnés à mort) relayés par Pierre Pflimlin, alors qu'il était Président du Conseil de l'Europe? Un réponse positive montrerait que son activité au service d'Adolf Hitler serait allée dans le sens de la modération.

Il est l'auteur de mémoires : Staatssekretär unter Ebert, Hindenburg, Hitler (Hoffmann & Campe, ISBN: B0000BLGO5, 1951), c'est-à-dire Secrétaire d'État sous Ebert, Hinderburg et Hitler. Son fils a laissé un livre de souvenirs sur son enfance strasbourgeoise, Straßburg, o Straßburg, qui contient de précieux renseignements sur la perception de cette famille germano-alsacienne des événements qu'ils y ont vécus.