Origène

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Origène
Origène

Origène (en grec ancien Ὠριγένης / Ôrigénês) est un Père de l'Église, né à Alexandrie v.185 et mort à Tyr v.254.

Sommaire

[modifier] Biographie

Il naît en Égypte dans une famille chrétienne vers l'an 185. En 202, sous le règne de Septime Sévère, l'Église d'Alexandrie est persécutée et son père Léonidès meurt martyrisé. Origène voulut le suivre dans le martyre, mais sa mère réussit à l'en empêcher en cachant ses vêtements. La mort de Leonidès laissait sans ressources une famille de neuf personnes car ses biens avaient été confisqués. Origène, cependant, devint le protégé d'une femme riche et haut placée ; mais, comme elle abritait déjà chez elle un hérétique du nom de Paul, il semble qu'Origène qui professait la plus stricte orthodoxie ne soit resté avec elle que peu de temps. Selon Eusèbe de Césarée, qui lui consacre le sixième livre de son Histoire ecclésiastique, Origène doit alors travailler pour faire vivre ses nombreux frères et sœurs. En 215, bien que très jeune, il succède à Clément d'Alexandrie à la tête de la Didascalée à l'École théologique d'Alexandrie (école catéchétique).

Pour être entièrement indépendant, Origène vendit sa bibliothèque pour une somme qui lui rapportait un revenu quotidien net de 4 oboles qui lui suffisaient en raison de son extrême frugalité. Enseignant toute la journée, il consacrait à l'étude de la Bible la plus grande partie de ses nuits menant une vie d'ascète rigide. Selon quelques traditions, il portait si loin ce souci que, puisqu'il enseignait à des femmes aussi bien qu'à des hommes il craignit que cette situation pût donner lieu au scandale pour les païens et il suivit à la lettre Matthieu 19:12 (« il y a des eunuques qui se sont faits eux-mêmes eunuques pour le royaume des cieux » et Marc, verset 9:43 (« si ta main est pour toi une occasion de chute, coupe-la »), c'est-à-dire qu'il se châtra ; une telle action, si elle a vraiment eu lieu, était en partie, sans doute, due à ce qu'il croyait que le chrétien devait suivre l'enseignement de son maître sans la moindre réserve. Plus tard dans la vie, cependant, il vit des raisons qui auraient dû lui faire juger différemment avant de se décider à un tel acte. Dans son enseignement donné à Césarée maritime, il regretta son geste qu'il attribua à l'erreur que constitue la lecture littérale des Écritures. La vérité historique de cette castration a été mise en doute par quelques disciples. On a supposé que c'était un racontar répandu par les rivaux d'Origène qui s'efforçaient de réduire son importance ou de souiller sa réputation.

Il continue à étudier, notamment auprès d'Ammonius Saccas. En 230, il est ordonné prêtre en Palestine mais son évêque, Démétrius, lui reproche ses mutilations qui selon les canons le rend inapte au sacerdoce. Malgré le soutien des évêques et une assemblée en concile, Démétrius destitue Origène de ses fonctions et l'excommunie. En 231, Origène quitte Alexandrie pour Césarée, en Palestine, où il continue d'expliquer l'Écriture et où une nouvelle école prend corps autour de lui avec les élèves les plus remarquables (dont Grégoire le Thaumaturge).

En 250, sous le règne de Dèce, il subit la persécution et, bien qu'emprisonné et torturé, il ne cesse d'écrire pour encourager ses compagnons et composer son livre Contre Celse. Bien qu'il retrouvât la liberté, il meurt en 254, probablement des suites de ses blessures.

Selon saint Jérôme, il serait mort à Tyr, et aurait été enterré dans la cathédrale.

Il est considéré comme le père de l'exégèse biblique pour avoir commenté tous les Livres de l'Ancien et du Nouveau Testament et un des premiers grands philosophes chrétiens.

[modifier] Œuvres

Origène est réputé avoir laissé une œuvre considérable (Épiphane estime leur nombre à près de 6 000), dont il ne reste qu'une faible partie (Clavis Patrum Graecorum 1410-1525). Son entreprise la plus importante fut les Hexaples, un travail sur la Bible dans lequel il présente, sur six colonnes, le texte hébreu de l'Ancien Testament, sa translittération en grec et les versions grecques : la Septante et les autres versions d'Aquila, Symmaque et Théodotion.

Il est aussi l'auteur d'écrits polémiques (Contre Celse), dogmatiques (Sur les principes, De principiis) et exégétiques (Homélies, Commentaires).

On peut ajouter :

  • Commentaires sur l' Écriture sainte ;
  • De la prière ;
  • Exhortation au martyre ;
  • Homélies sur la Genèse.

Son ouvrage le plus volumineux Sur la Prière influença les premiers chrétiens.

Notons enfin qu'une anthologie de ses œuvres, la Philocalie a été réalisée par Grégoire de Nazianze et Basile de Césarée.

Après sa mort il continue d'être l'objet de controverses. Certains points de sa doctrine sont condamnés au concile de Constantinople II (553), en particulier, on l'accusait d'avoir soutenu la croyance en la réincarnation et la pré-existence de l'âme avant la naissance. Ces points sont davantage attribués à Origène que véritablement des doctrines affirmées par lui. Un dossier rassemblé par Pamphyle et Eusèbe de Césarée au IVe siècle intitulé Apologie pour Origène connaît cette controverse l'entourant. De plus, Origène lui même dans son Commentaire sur l’évangile de Matthieu, livre X, ch. 20 qualifie la réincarnation d'erreur (pseudodoxia tès metensômatôseôs)). Son seul ouvrage véritablement spéculatif, le De principiis ayant le caractère d'une recherche ouverte à l'époque où aucune doctrine n'a encore été fixée par un concile œcuménique. Origène est un penseur en mouvement, curieux, prolifique et jamais un doctrinaire obtus.

Ainsi, dans son commentaire sur l'Évangile selon Jean, commentant le premier chapitre dans lequel il est dit que Jésus baptisait dans un lieu situé le long du Jourdain appelé « Béthanie », Origène dit parcourir toute la vallée du fleuve sans trouver de lieu ainsi dénommé. Il ne trouve qu'un lieu appelé Bétharaba. Appliquant les méthodes étymologiques de l'époque, il détermine qu'en hébreu Béthanie signifie « la maison de l'accomplissement » tandis que Bétharaba signifie « la maison de la préparation ». Il corrige donc le texte évangélique en disant que Jésus commence sa vie publique par le baptême à Bétharaba tandis qu'il se rend à Béthanie, près de Jérusalem, pour célébrer son dernier repas avant la Passion.

Érasme n'en écrivait pas moins dans le De Ratione Studii, rédigé à Londres en mars 1506 et mis en vente à Paris en octobre 1511 : « En fait de théologie, après les Saintes Écritures, rien de mieux à lire qu'Origène — ex theologia, secundum divinas litteras, nemo melius Origene. »

[modifier] Pensée

Selon Origène, Dieu est transcendant et infini. Il engendre éternellement le Fils, son image. À travers le Logos (Verbe), il crée une multitude d’esprits purs qui, à l’exception de Jésus, s’éloignent de Lui et deviennent alors des âmes. Il leur donne des corps concrets en rapport avec la gravité de leurs fautes : corps d’anges, d’hommes ou de démons.

Ces âmes, grâce à leur libre décision, peuvent se rapprocher de Dieu ou s’en éloigner. Le salut équivaut au retour à la perfection originelle, à ce moment là les âmes auront des « corps de résurrection ». Le véritable idéal est cette connaissance complète, que les philosophes n’ont qu’entrevue, mais que le chrétien peut acquérir complètement s’il se détache de la matière.

Le corps physique est donc une punition, mais en même temps le moyen par lequel Dieu se révèle et soutient l’âme dans son élévation. Dieu ne veut pas contraindre l’âme, et recourt donc à l’éducation par le Logos, dont les agents ont été les philosophes, Moïse et les prophètes pour le peuple juif, et bien évidemment Jésus en qui s’incarna le Fils de Dieu.

Il est essentiel de rappeler qu'Origène pense que le salut final (la parousie) n'adviendra que lorsque toute la création et donc toute l'humanité aura été réintégrée dans le Christ. Cette doctrine est connue sous le nom d'apocatastase et elle sera reprise par les plus grands Pères de l'Église que sont Grégoire de Nazianze, Basile de Césarée et surtout Grégoire de Nysse.

Origène est à l'origine de la Lectio divina, fondée sur l'interprétation selon les quatre sens des Écritures. La Lectio divina est pratiquée dans les monastères. Le pape Benoît XVI a relancé la Lectio divina lors de sa catéchèse du 2 mai 2007.

[modifier] Bibliographie

  • Les Écritures, océan de mystères, Origène, Collection 'Foi vivante', Les Editions du Cerf, 1998, ISBN 2204059900
  • Philocalie 21-27 : Sur le libre arbitre, Origène, Collection 'Sources chrétiennes', Les Editions du Cerf, 1976, ISBN 2204081736
  • Entretien avec Héraclide, Origène, Collection 'Sources chrétiennes', Les Editions du Cerf, 2002, ISBN 2204070424
  • Histoire et Esprit : L'Intelligence de l'Ecriture d'après Origène, Cardinal Henri de Lubac, Les Editions du Cerf, 2002, ISBN 220406761X
  • Homélies sur la Genèse. Introduction par Henri de Lubac, s.j. et Louis Doutreleau, s.j., Traduction et notes par Louis Doutreleau, s.j., éditions du Cerf, première édition en 1944, réédition en 2003. 448 pages.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Liens externes