Maladie de Crohn

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Maladie de Crohn
CIM-10 : K50


La maladie de Crohn est une affection inflammatoire chronique pouvant toucher tout le tube digestif avec une prédilection pour l'iléon, le côlon et la région anale.

Son diagnostic repose sur un ensemble des données cliniques, radiologiques, et/ou endoscopiques et histologiques.

Elle peut s'accompagner de manifestations extra-intestinales (articulaires, cutanées, oculaires...). Les principales manifestations cliniques observées au cours des poussées évolutives de la maladie dépendent du siège (grêle, côlon, autre segment digestif) et de l'étendue des lésions. Il s'agit surtout de la diarrhée avec ou sans syndrome dysentérique, des douleurs abdominales parfois de type subocclusif, des manifestations anales ou périnéales, de l'altération de l'état général avec ou sans fièvre, des manifestations extra-intestinales. Les poussées évolutives peuvent être émaillées de complications, dont certaines peuvent nécessiter une intervention chirurgicale : occlusion, perforation, colectasie, abcès, fistule, manifestations hépato-biliaires.

Sommaire

[modifier] Historique

La maladie a été décrite précisément dans les années 1930 aux États-Unis par le Docteur B. Crohn (1884-1983), chirurgien à New York au Mount Sinaï Hospital.

[modifier] Épidémiologie

L'incidence est de l'ordre d'environ 6 cas pour 100 000 personnes et sa prévalence d'environ 140 pour 100 000[1]. La maladie de Crohn reste une maladie rare. Elle concerne préférentiellement les adolescents et adultes jeunes. On estime à 60 000 le nombre de patients touchés en France en 2005.

Le coût économique est important puisqu'il est estimé à près de 3 milliards d'euros par an en Grande-Bretagne, pays qui compte 90 000 patients atteints par cette maladie[2].

[modifier] Causes

Elles sont encore en grande partie inconnues. Les dernières hypothèses évoquent une prédisposition génétique (plusieurs gènes potentiellement responsables ont eté identifiés), un facteur déclenchant environnemental (bactérie ?) et la survenue d'une cascade inflammatoire non contrôlée.

Il s'agit d'une maladie multifactorielle au même titre que la rectocolite hémorragique ou la polyarthrite rhumatoïde, autres maladies proches.

[modifier] Symptômes

Elle peut survenir à n'importe quel âge mais est découverte essentiellement chez l'adulte jeune[3]. Elle se manifeste principalement par une diarrhée chronique (plusieurs semaines à plusieurs mois), surtout hydrique et accompagnée fréquemment de douleurs abdominales.

On observe souvent une perte de poids (par malabsorption). Il n'est pas rare que les poussées soient accompagnées d'un peu de fièvre.

Il peut exister des manifestations extra-intestinales, principalement ostéo-articulaires mais aussi hépato-biliaires, oculaires ou cutanées.

On utilise un indice d'activité pour savoir si la maladie est en poussée ou non, c'est l'indice de BEST (CDAI pour les anglo-saxons). Si ce dernier est inférieur à 150, le patient est considéré être en rémission.

[modifier] Diagnostic

[modifier] Endoscopie

Image endoscopique du colon d'un patient atteint de la maladie.
Image endoscopique du colon d'un patient atteint de la maladie.

La visualisation directe des lésions par coloscopie est capitale pour affirmer le diagnostic. Les atteintes sont en général diffuses et discontinues, les contours flous. Les zones touchées sont typiquement le côlon et les derniers centimètres de l'iléon. Les lésions rencontrées sont des ulcérations, souvent aphtoïdes ou profondes. Elles peuvent se présenter sous forme de véritables fissures dans la muqueuse.

Dans les biopsies de muqueuse digestive, la présence d'un granulome epithélioïde est un argument fort en faveur du diagnostic de la maladie.

[modifier] Vidéocapsule

La vidéocapsule est une petite caméra vidéo que les patients avalent et qui enregistre les images du tube digestif. Son principal atout est de pouvoir visualiser l'intestin grêle, en effet ce dernier est inaccessible à l'endoscopie.

[modifier] Entéroscopie

On peut également explorer l'intestin grêle à l'aide d'un entéroscope (double ballon ou simple ballon). Il s'agit d'un endoscope plus long qu'un coloscope dont la progression est facilitée par un surtube à ballon gonflable. Son intérêt par rapport à la vidéocapsule réside dans la possibilité d'intervenir sur la lésion et d'avoir une bonne précision quant à la localisation.

[modifier] Radiologie

L'absorbtion d'un liquide radio-opaque permet de visualiser le tube digestif. Cet examen est utile pour observer les zones non visibles par endoscopie (en particulier l'intestin grêle). Elle permet de détecter d'éventuelles sténoses (rétrécissements).

Le Scanner peut aider au diagnostic, particulièrement s'il existe des fistules.

[modifier] Diagnostic différentiel

Le diagnostic différentiel est difficile à faire car la maladie peut avoir, à tort, été étiquetée comme un trouble fonctionnel digestif intestinal, appelé également côlon irritable.

On peut confondre facilement une rectocolite hémorragique (ne touchant que le côlon) et une maladie de Crohn (pouvant toucher tout le tube digestif), toutes deux des formes de maladies inflammatoires chroniques intestinales.

Le diagnostic peut ne pas être porté avec certitude entre ces deux entités lors des premières poussées, on parle alors de colite indéterminée. Dans la plupart des cas, l'évolution de la maladie et de ses signes cliniques permet, après plusieurs mois ou années, de finir par déterminer avec précision la maladie concernée et donc d'adapter au mieux la stratégie thérapeutique. Il arrive cependant que la colite reste indéterminée, le débat actuel étant de savoir si ce n'est pas une troisième entité des maladies inflammatoires chroniques intestinales !

Certaines colites infectieuses peuvent aussi présenter un tableau trompeur.

[modifier] Complication

[modifier] à court terme

On craint surtout les sténoses, fissures, fistules ou perforations, une colectasie (dilatation toxique du côlon) ou une colite grave (poussée très sévère d'emblée).

[modifier] risques à long terme

Il existe, après 10 ans d'évolution, une majoration du risque de cancer colo-rectal. Ce risque est surtout important en cas d'atteinte étendue et nécessite une surveillance régulière par coloscopie.

[modifier] Traitement

Le traitement d'attaque repose surtout sur les corticoïdes de la prednisone par exemple la dose prise et proportionelle au poids de l'individu équivaut a 1mg/kg/jour pour les poussées moyennes et les Inhibiteur du TNF alpha pour les poussées sévères ou réfractaires.

Le traitement préventif se partage entre les salicylés (sulfasalazine ou mésalazine ou la 5-ASA) et l'acide 5- amino salyciles et les immunosuppresseurs. Les plus utilisés sont l'azathioprine (Imurel) (2 à 2.5 mg/kg/jour), la 6-mercaptopurine (Purinethol) (1.5 mg/kg/j) et le méthothexate (methotrexate, ledertrexate)(posologie 15-25 mg par semaine)

[modifier] Traitement des poussées

  • Salicylés pour les poussées minimes.
  • Corticoïdes pour les poussées modérées à sévères.
  • Infliximab (immunomodulateur, anti-TNF alpha) ou chirurgie pour les poussées graves ou en cas d'échec des précédents traitements.
  • Antidépresseurs sérotoninergiques peuvent entrainer un espacement des poussées.

L'utilisation d'antibiotiques, en cas d'infections associés, peut être utile.

[modifier] Traitement d'entretien (préventif)

Sont utilisés l'Azathioprine (immunosuppresseur), le méthotrexate ou l'infliximab (Remicade)[4] ainsi que la lactoferrine[réf. nécessaire] (proteine laitière)

Les corticoïdes au long cours n'ont pas démontré d'intérêt.

[modifier] Chirurgie

Elle était la règle auparavant mais son indication décroit régulièrement[5].

Elle est parfois nécessaire, le plus souvent en dernier recours, après échec des traitements médicaux :

  • au niveau de l'intestin grêle : en cas de sténose (le plus souvent iléale) ou de fistule
  • au niveau du colon : en cas de colite aigüe grave ne répondant pas au traitement médical ou compliquée de perforation, d'hémorragie ou de dilatation majeure (mégacôlon toxique)
  • en cas d'atteinte anopérinéale grave.

Elle consiste essentiellement en une ablation de la partie iléo-cœcale de l'intestin.

[modifier] Régime

Le régime sans résidu peut être utile au cours des poussées inflammatoires pour limiter la diarrhée mais ne necessite pas d'être poursuivi après rémission sauf en cas de sténose digestive. Des régimes d'exclusion sont parfois proposés par certains praticiens et (notamment la nutrition Seignalet). Ils consistent, principalement, à éliminer le gluten, les produits laitiers et les sucres raffinés de l'alimentation du patient atteint de ces troubles intestinaux chroniques. Ils n'ont aucun fondement scientifique et n'ont jamais fait la preuve de leur efficacité clinique. Aucun leader d'opinion français des MICI ne le recommande. Ils pourraient au contraire entraîner des carences préjudiciables et limiter un retour à une alimentation normale, qui peut être obtenu dans la grande majorité des cas.

[modifier] La maladie et le tabac

L'arrêt définitif de toute consommation de tabac est très fortement conseillé. [6], [7]

[modifier] Divers

Les dernières recommandations européennes concernant le diagnostic et le traitement de la maladie ont été publiées en 2006.[8]. Les recommandations de la Société Américaine de Gastroentérologie datent de 2007[9].

[modifier] Voir aussi

[modifier] Notes et références

  1. Loftus EV Jr, Clinical epidemiology of inflammatory bowel disease: incidence, prevalence, and environmental influences, Gastroenterology, 2004;126:1504-17
  2. Bassi A, Dodd S, Williamson P, Bodger K, Cost of illness of inflammatory bowel disease in the UK: a single centre retrospective study, Gut, 2004;53:1471-8
  3. Fraser Cummings JR, Keshav S, ogist, Travis S PL, Medical management of Crohn’s disease, BMJ, 2008;336:1062-1066
  4. Akobeng AK, Review article: the evidence base for interventions used to maintain remission in Crohn’s disease, Aliment Pharmacol Ther, 2008;27:11-8
  5. Jess T, Riis L, Vind I, Winther KV, Borg S, Binder V, et als. Changes in clinical characteristics, course, and prognosis of inflammatory bowel disease during the last 5 decades: a population-based study from Copenhagen, Denmark, Inflamm Bowel Dis, 2007;13:481-9
  6. 1995/02 AFA - Maladie de Crohn : arrêter le tabac
  7. 1996/12 AFA - Tabac et maladie de Crohn
  8. Travis SP, Stange EF, for the European Crohn’s and Colitis Organisation (ECCO), European evidence based consensus on the diagnosis and management of Crohn’s disease: current management, Gut, 2006;55(suppl 1):i1-58
  9. Clark M, Colombel JF, Feagan BC, Fedorak RN, Hanauer SB, Kamm MA, et als. American gastroenterological association consensus development conference on the use of biologics in the treatment of inflammatory bowel disease, Gastroenterology, 2007;133:312-39

[modifier] Liens externes