L'Eau vive

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L'Eau vive
Image associée au film
L’eau vive de la Durance près d’Avignon

Titre original L'Eau vive
Réalisation François Villiers
Acteur(s) Pascale Audret (Hortense)
Charles Blavette (Simon)
Scénario Jean Giono
(Adaptation : Alain Allioux)
Dialogues Jean Giono
Musique Guy Béart
Décors Pierre-Louis Thévenet
Photographie Paul Soulignac
Montage Édouard Berne
Producteur(s) Claude Clert
Production Les Films Caravelle (France)
Distribution Gaumont
Format Couleur (Eastmancolor)
2.35:1 (Franscope)
Monophonique
35 mm
Genre Comédie dramatique
Durée 96 min
Sortie 13 juin 1958 France France
Langue originale Français
Pays d'origine France France
Fiche IMDb

L’Eau vive, film français réalisé par François Villiers, est sorti en 1958.

Sommaire

[modifier] Synopsis

Ce qui suit dévoile des moments clés de l’intrigue.

Dans la vallée de la Durance, en réaménagement à cause de la construction du barrage de Serre-Ponçon, le décès d’un propriétaire terrien fait que sa jeune fille Hortense devient la seule héritière des 30 millions de francs perçus comme indemnité d'expropriation. La richesse de la mineure éveille la convoitise de certains membres de la famille. Ils vont user de tous les stratagèmes, de la séduction à la violence, pour essayer de s’approprier son magot. Mais Hortense, éprise de liberté comme l’eau vive de la Durance, glissera toujours entre leurs doigts pour trouver finalement l’accalmie auprès de son oncle chéri, le berger Simon…

[modifier] Commentaire

Film aux moyens égaux à ses ambitions, adoptant le format des grandes productions hollywoodiennes de l’époque : Eastmancolor et Franscope (l’équivalent français du CinemaScope) avec un tournage s’étalant sur un an et demi pour pouvoir restituer, à la demande d’EDF, l’ampleur du gigantesque chantier qui bouleversa la Provence durant des années : la construction du barrage de Serre-Ponçon et la canalisation de la Durance. Œuvre à la gloire de la fée électricité, c’est la chanson spécialement composée par Guy Béart qui seule restera dans la mémoire collective et assez injustement, car le réalisateur François Villiers remplit son contrat en imbriquant intelligemment fiction et réalité. La dimension colossale des travaux est savamment restituée grâce aux plans larges de la caméra de Paul Soulignac. La couleur locale est donnée juste ce qu’il faut par les Provençaux Charles Blavette et Milly Mathis tandis que les autres acteurs, dont l’héroïne Hortense-Pascale Audret, jouent sans lorgner du côté de Pagnol car nous sommes bien dans l’univers de Giono : âpres luttes pour la liberté sur fond de paysages grandioses et sauvages. On se souviendra surtout des impressionnantes scènes d’inondation où l’on aura tremblé pour la vie de l’héroïne, anticipation conceptuelle des films catastrophe des années 1980 avec eau vive emportant tout sur son passage…

[modifier] Distribution

[modifier] Autour du film

  • Affichiste : Clément Hurel
  • Période de tournage : 1956-1957
  • Tournage extérieur :
  • L’eau vive de l’EDF  : En évaluant les besoins énergétiques de la France pour les années 1950, la Commission de Modernisation et d’Équipement de l’Électricité prévit d’augmenter la production hydroélectrique. L’Eau vive, commandité par EDF, fait partie des 39 films liés à cette période d’intense activité de constructions hydroélectriques. Tournée entre 1956 et 1957 avec, en toile de fond, la construction du barrage de Serre-Ponçon (Hautes-Alpes) commencée en 1955 et la prochaine canalisation de la Durance, cette propagande romancée connut un grand succès.[1]
  • Pour les séquences de l’inondation, c’est le barrage de Chaudanne (achevé en 1951 et mis en service en 1952) dans les Alpes-de-Haute-Provence qui fut la doublure du futur barrage de Serre-Ponçon (mis seulement en service en 1960).
  • La scène d'inondation de la cave a été tournée à la piscine municipale de Gap, dont le bassin fut transformé en décor pour l'occasion. Pascale Audret bénéficiait, pour certaines scènes, de l'aide d'une jeune fille de Gap, Édith Isnard, fille des gérants de la piscine, engagée comme doublure. Pour cause d'engagement de Pascale sur d'autres tournages, Édith la remplaça dans les séquences de la cave inondée, de la descente en scooter de Serre-Ponçon ainsi que dans une partie de la fin du film (plaine de la Crau). La participation d'une jeune fille du pays à ce film, relatant la construction d'un barrage qui bouleversa les structures socio-économiques du département des Hautes-Alpes, au-delà de l'aspect symbolique, laisse encore aujourd'hui une trace très vivante dans la mémoire des habitants de la Haute-Durance.
  • Le scénario engendra un ouvrage cosigné Jean Giono et Alain Allioux (l’adaptateur), Hortense ou l’eau vive (Éditions France-Empire, 1958).
  • Plus que le film, c’est la chanson éponyme qui s’inscrira dans la mémoire collective. Écrite et chantée par Guy Béart sur la musique originale du film, cette chanson est devenue un classique national.
  • En 1995, à l’occasion de la commémoration du centenaire de la naissance de Jean Giono, dans le supplément du quotidien Le Provençal,[2] Jean Contrucci se penche sur les tentatives cinématographiques de Giono et note, à propos de L’Eau vive : « Un film documentaire sur la construction du barrage de Serre-Ponçon devient — enfin ! — un film de fiction signé Giono, mis en scène par François Villiers : L’Eau vive. À son propos, François Truffaut, alors grand pourfendeur de médiocrités cinématographiques, écrivit dans Arts [magazine] : Giono est l’écrivain qui pourrait apporter le plus au cinéma. Un conditionnel qui induit que cet apport n’est pas encore réalisé… »

[modifier] L’Eau Vive au fil des saisons

  • Les notes de tournage de Charles Blavette[3] : « Je vais faire un tour à Manosque et y reste. Je vois souvent Jean Giono. Il me parle d’un film qui va se faire… C’est le contrat de L’Eau Vive que je signe avec les films Caravelle, pour le rôle de l’oncle Simon, le berger. Ce rôle me prend entièrement et me redonne du goût. Je découvre la Haute-Provence. Pascale Audret (ma nièce Hortense dans le film) me semble assez sauvage.
    Je reçois un télégramme à Manosque, pour me rendre chez M. Ventre, berger à Coudoux (près Aix-en-Provence). […] M. Ventre me désigne « quelques bêtes » du côté de Berre et me dit « d’aller me promener avec ! » Il y a là trois cent moutons, mais aucun ne veut promener ! M. Ventre, son fils et son berger Titin me montrent comment faire pour emmener un troupeau. Je réussis avec Pascale qui commence à être un peu « grenouille », nous faisons enfin « promener » les moutons. Pendant quelques jours nous ne faisons que ça.
    Puis nous allons du côté des Martigues faire des essais de costumes et de caméra. Plus de vingt ans après Toni,[4] je me retrouve à l’hôtel Sainte-Anne aux Martigues. […] Nous quittons de bon matin l’hôtel Sainte-Anne.
    François Villiers repère les décors. […] Embrun, Briançon, Savines, Névache (Hautes-Alpes) où, en montant vers le col et la frontière italienne, une tempête de neige nous oblige à faire demi-tour. Nous sommes le 5 juin ! […] François nous emmène à pied vers la source de la Durance (deux heures de marche). Dans l’après-midi, après divers repérages de décors, nous redescendons, toujours pédibus, au Bivouac Napoléon où nous arrivons « lessivés ».
    François Villiers, Alain Allioux et Paul Soulignac discutent technique… […] Nous repartons en tenue de tournage, c’est le premier tour de manivelle, à 23 heures, au bord de la Durance du côté de l’île Rousset, nous réintégrons Gap à 5 heures et demies du matin, assez défraîchis, l’œil vague et escagassés ! Nous remettons ça le soir même à Savines et ainsi pendant quatre nuits avec rentrée à six heures du matin. […] François Villiers est infatigable.
    Nous tournons du côté de l’Argentière et divers points de la région tout le jour, et nous émigrons sur La Vachette où, après la journée de tournage, nous retrouvons à Névache l’hôtel Mouthon. […]
    Après huit jours passés à cet endroit, et un mois de tournage consécutif, c’est fini pour cette année.[5] […]
    Je passe l’hiver à Manosque et au printemps, juste au moment des asperges sauvages, il faut que j’aille à Paris pour répéter les scènes que nous devons filmer cette année pour L’Eau Vive. Nous répétons une vingtaine de jours. […]
    Puis je pars pour Manosque, mais en gare de Veynes, un télégramme m’attend. Je dois rejoindre Briançon et non Manosque. […] La cavalcade recommence pendant des mois, avec une sarabande de kilomètres et d’hôtels à travers les Hautes-Alpes, les Basses-Alpes, les Bouches-du-Rhône. […]
    Pour la fin du film, nous allons coucher à Arles. […] Nous abordons la Crau. Le mistral d’octobre est assez maigre. Les raccords que j’ai à faire, raccordent avec les prises de vue « d’été ».
    — Vous êtes en bras de chemise, me dit gentiment la script, les boutons déboutonnés, manches retroussées ; il fait très chaud, souvenez-vous.
    J’ai en effet grand besoin de me souvenir « qu’il faisait très chaud », car, pour le moment, avec le zéphyr de la Crau, je dois ressembler à un morceau de tôle ondulée. On répète et on essaie de tourner mais les moutons donnent du fil à retordre aux caméras, ils ne passent pas où il faut. Nous recommençons et enfin, avec de la patience, François Villiers finit par obtenir ce qu’il veut. »
    [6]

[modifier] Distinctions

[modifier] Liens externes

[modifier] Notes

  1. D’après un mémoire DEA de 2001 d’Anne Baudon consacré aux films techniques du génie civil.
  2. Rebaptisé La Provence depuis 1997.
  3. Extraites de ses mémoires Ma Provence en cuisine, Éditons Jeanne Laffitte, Marseille, 2002 (ISBN 2862763861) — Réimpression de l'édition originale de France-Empire de 1961.
  4. Film réalisé par Jean Renoir et sorti en 1935.
  5. Fin 1956.
  6. Octobre 1957.