Histoire de la logistique

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L'histoire de la logistique est l’étude des faits, des événements du passé de cette activité de service qui a pour objet de gérer les flux physiques. Celle-ci prend sa source historiquement dans deux territoires distincts : celui des mathématiques et celui des champs de bataille.

Sommaire

[modifier] Ethymologie

Premièrement, ce mot a d'abord une origine mathématique. Celui-ci est apparenté au mot grec logistikos : ce qui est relatif au raisonnement sous l’angle des mathématiques. Deuxièmement, une origine militaire : la logistique provient du grade d’un officier en charge du « logis » des troupes, lors du combat. Le territoire du logistikos ou de l’optimisation logistique. Selon le dictionnaire historique de la langue française Le Robert (2000), le mot logistique provient du mot grec logistikos qui signifie « relatif au calcul », « qui concerne le raisonnement ». Il sera par la suite à l’origine du mot latin logisticus ayant la même signification. C’est le philosophe grec Platon (428-348 av. J.C.) qui, le premier, va utiliser le mot logistikos : Il veut opposer le calcul pratique à l’arithmétique théorique : pour ce faire, il désigne la logistique comme le calcul pratique. On peut suivre l’usage de ce mot dans la langue française sous l’angle des mathématiques et/ ou de la logique mais toujours en conservant cette dimension pratique jusqu’au XXIe siècle. Le mot « logistique » est employé la première fois dans la langue française en 1590, comme un adjectif qui signifie « qui pense logiquement ». En 1611, la logistique est considérée comme une partie de l’algèbre qui concerne les quatre opérations élémentaires. En 1765, le terme « logistique » est associé à celui de logarithme, on parle de logarithme logistique. Au début du XXe siècle, sous l’impulsion de Bertrand Russell, la logistique devient une discipline qui s’intéresse à la dimension logique des mathématiques. Bertrand Russell considère que la logique devient de plus en plus mathématique et les mathématiques de plus en plus logiques. Il considère que la mathématique est l’étape de maturité de la logique. Le territoire du « logis »

Le mot « logistique » dérive du mot français « logis » comme le précise Antoine Henri Jomini (1779-1869). 1837, dans son traité Précis de l’art de la guerre. En effet, on donne le grade de « major général des logis » à « un officier qui avait la fonction de loger ou de camper les troupes, de diriger les colonnes, de les placer sur le terrain » [Jomini, 1837, p. 271]. Le logisticien militaire avait en charge le transport, le ravitaillement et le campement des troupes. C’est à lui que revenait l’art de combiner ces moyens pour réaliser sa mission. Puis, avec l’avènement de la guerre sans camp, le mouvement des troupes devient plus compliqué. De retour d’expérience en retour d’expérience, le domaine de compétence du logisticien va s’étendre : il devient le chef de l’État-major. On lui confie alors la transmission des ordres du général en chef sur les points les plus éloignés du combat. De fait, il pouvait en retour informer le chef suprême de l’avancée des combats, ce qui permettait à ce dernier, en retour, d’envoyer des nouvelles directives. Cet officier fut chargé progressivement de surveiller la bonne exécution de l’ensemble des opérations d’une campagne militaire dans les moindres détails [Jomini, 1837, p. 272]. Or le « mouvement des armées » est la chose reconnue par les grands stratèges, tels Sun Tzu ou von Clausewitz, comme à la fois la plus difficile et la plus essentielle dans le déroulement d’un combat. Jomini s’interroge alors sur le statut de la logistique dans les traités militaires : habituellement cataloguée « comme une science du détail », elle devient progressivement « une science générale, c’est-à-dire la science de l’application de toutes les sciences militaires » que nous traduisons comme une science de la « mise en oeuvre ». En effet, c’est la nature de la boucle entre la conception stratégique et la mise en oeuvre qui change profondément de nature ; la composante logistique ne doit plus suivre la stratégie d’une manière secondaire : elle doit être associée à la réflexion stratégique dès son amorce. Auparavant, le général des armées élaborait la stratégie à l’écart des problèmes logistiques. Cette stratégie une fois élaborée était communiquée au major général des logis qui devait prendre les dispositions adéquates en matière de transport, de ravitaillement et de campement. La logistique suivait les décisions stratégiques. L’expression commune « L’intendance suivra ! » traduit bien cette perspective. La prise de conscience de l’inversion qu’il fallait opérer quant à la place de la logistique par rapport à la stratégie s’est faite relativement tard : dans le traité de Jomini, elle fait l’objet d’une note de quinze pages à la fin de son ouvrage [1835, p. 271285]. Cette manière disjointe de rendre compte du rapport entre la conception et la mise en œuvre est l’héritage de la philosophie d’Aristote, comme le montre le philosophe François Jullien [1996, p. 17] ; un principe complètement absent de la pensée chinoise de la guerre telle qu’elle s’est exprimée chez Sun Tzu. La conception chinoise de l’« efficacité » telle qu’elle a été développée lors des guerres de l’Antiquité [Jullien, 1996] est très proche d’une réflexion moderne sur le statut de l’effectivité en logistique, qui va donner lieu, par exemple, à la notion de logistique stratégique dans le domaine de l’entreprise [Fabbe-Costes et Colin, 1992]. Il s’agit d’utiliser le potentiel logistique d’une organisation pour concevoir sa stratégie. Il suffirait, comme disent les anciens Chinois, de savoir tirer parti du déroulement de la situation pour se laisser porter par elle [Jullien, 1996, p. 8].

[modifier] Origines militaires

[modifier] Origines anciennes

L'Université de Lille I [1] indique dans un document sans titre [2] : "Logistique a comme racine grecque logisteuo signifiant avant tout administrer. L’institution militaire a utilisé ce terme pour définir l’activité qui réussit à combiner deux facteurs nécessaires dans la gestion des flux : l’espace et le temps. La logistique a donc été un sujet de réflexion intensif pour les grands chefs militaires.

Au IVe siècle av. J.-C., H. Nikolopoulou (note du rédacteur de ce chapitre - voir discussion : la citation exacte de l'Université de Lille est "Sun Tzu" et non H. Nikopoulos ) met en avant la nécessité de disposer de chariots d’approvisionnement de denrées alors qu’Alexandre le Grand (356-323 av. J.-C.) avant de se lancer dans son périple en Asie, brûla tous ses chariots de denrées afin de rendre moins pesante la mobilité de ses troupes. De par cette réflexion, Alexandre le Grand avait pensé faire précéder le mouvement de ses armées par l’organisation du ravitaillement. Ainsi Jules César en créant la fonction « logista » chargeait un officier de s’occuper des mouvements des légions romaines pour organiser les campements de nuit et constituer les dépôts d’approvisionnements dans les villes soumises".

[modifier] Origines du génie militaire - Du XIIIe au XVIIIe siècle [3]

Selon le Ministère de la défense [4], les origines du génie sont anciennes.

  • "Des origines très lointaines : le Génie militaire est né du besoin des dirigeants d'assurer la survie de la collectivité : aménager les sites, construire pour se protéger ou attaquer. L'abri, la motte, le donjon de pierre, le château fort ou encore les enceintes des villes constituent les premières réalisations fortifiées. Ces œuvres modèlent le territoire national et les actions du Service du génie témoignent de sa capacité d'adaptation à chaque époque.
  • L'origine du service d'infrastructure des armées partage les historiens : En 1445, sous le règne de Charles VII existe une organisation relative à l'inspection des fortifications ; sous Henri IV, Sully prend le titre de surintendant des fortifications.
  • 1690 marque l'avènement de l'arme du Génie : avec la création du corps des "ingénieurs militaires" ou "ingénieurs du Roy" par le marquis de Vauban, lui-même ingénieur, urbaniste, stratège et informateur. Le Service du génie puise ainsi ses origines de l'étroite association entre la fortification et les ingénieurs.
  • Rue de l'Indépendance Américaine, une installation historique : au XVIIIe siècle, lors de la guerre d'indépendance des États-Unis d'Amérique aux États-Unis, Washington demande de l'aide à la France. Louis XVI envoie alors ses ingénieurs de l'École Royale de Mézières pour aider à l'organisation de l'armée américaine. Le Génie français prend une place si importante dans la conduite des opérations, que Washington lui confie la création, l'organisation et le commandement du Génie américain. Le Génie français contribue à la mise en place de l'infrastructure du nouveau pays. L'actuel écusson du Génie américain comporte la devise des ingénieurs français « essayons ».

Le traité d'indépendance a été préparé à Versailles dans l'Hôtel de la Guerre. Ce bâtiment, achevé en 1760, a été l'une des premières cités administratives de l'histoire. Il abritait alors le ministère de la guerre et possédait une direction des fortifications. La direction centrale du génie est issue de ce service et occupe aujourd'hui encore les locaux de l'Hôtel de la guerre, situé 3, rue de l'Indépendance américaine à Versailles."

[modifier] Au XVIIIe siècle

Toujours selon l'Université de Lille : "A partir du XVIIIe siècle, trois étapes principales sont considérées dans le mode de traitement de la logistique dans les armées modernes. Le premier mode est associé aux armées principalement statiques avec un approvisionnement issu des magasins. Le second mode correspond à la démarche napoléonienne cherchant essentiellement sur les pays envahis ou les pays de passage, les denrées nécessaires à l’approvisionnement des armées.

[modifier] Au XIXe siècle

En 1806, l'empereur Napoléon 1er crée les premiers éléments militaires du personnel d'administration [5] Selon le ministère de la Défense, dans sa revue Armée de terre, « Il s'agit de compagnies d'ouvriers d'administration rattachées à la garde impériale, constituées de boulangers, bouchers et artisans ».

Destinées à assurer le ravitaillement en vivres des armées napoléoniennes puis royales, dotées de statuts et d'uniformes propres (" habit veste en drap gris… "), ces compagnies se sont illustrées au cours de toutes les campagnes napoléoniennes entre 1806 et 1815 (Espagne, Allemagne, Russie, Saxe, France et Belgique) et des expéditions ultérieures : Espagne 1823, Corée 1828, Algérie de 1830 à 1839 et Italie 1849.

C’est avec la Seconde Guerre mondiale que la logistique va trouver sa consécration dans l’art de la guerre en Occident. En effet, le débarquement des alliés en Normandie a été un problème logistique formidable qui a consisté à débarquer 150 000 hommes sur des plages, appuyés par 14 000 hommes acheminés par avions et planeurs en quelques heures.

Dans le même temps, il fallait paralyser la riposte adverse qui avait anticipé ce type d’opération par la construction du mur de l’Atlantique. C’est en brisant l’ensemble des communications allemandes, en détruisant leurs dépôts de munitions et de carburant que le débarquement a pu avoir lieu et a pu réussir. Le général de Gaulle déclarera à ce sujet : « C’est en respectant la logistique que le général Eisenhower mena jusqu’à la victoire […] la machinerie des armées du monde libre. » Cette réflexion logistique va pénétrer l’entreprise industrielle à partir des années 1960. Ce sont les logisticiens militaires démobilisés qui vont devenir les premiers acteurs de cette logistique d’entreprise. Des chercheurs en sciences de gestion comme Heskett aux États-Unis ou comme Tixier, Mathe et Colin en France, vont se reconnaître explicitement dans la perspective logistique ouverte par Jomini : coupler stratégie et logistique dans une même boucle, la logistique stratégique.

[modifier] Apparition de la logistique moderne aux XIXe et au XXe siècles

Encore, selon l'université de Lille : "Enfin le troisième mode correspondant à celui apparu vers les années 1870 et s’appuyant sur une industrialisation des approvisionnements à partir des bases arrières de plus en plus lointaines. De nombreux facteurs viennent expliquer cette évolution : des facteurs technologiques comme l’apparition du chemin de fer. À partir de 1917, l’automobile et le poids lourd font apparaître une alternative beaucoup plus souple au chemin de fer et la traction motorisée se substitue rapidement à la traction hippomobile. Mais dès lors, le carburant devient la ressource sensible. Pour approvisionner les armées, la création d’un service, le service des Essences, fut nécessaire pour prendre en charge la logistique des carburants.

Au cours des siècles, si la perception de maîtriser correctement les flux a toujours été claire, la façon de l’aborder a été très variée. Dans chaque étape de son évolution, nous devons voir des réponses aux contraintes imposées par la complexité de la gestion des flux et par les moyens de déplacement des armées. Ainsi Vauban a utilisé le rôle vital de la logistique en affirmant que « l’art de la guerre c’est l’art de subsister ». C’est donc naturellement que la logistique a pris une place croissante dans la pensée militaire au cours de l’histoire. L’institution militaire a aussi constituée un premier corps de connaissance dans ce domaine de la gestion de flux. La pensée de la logistique civile s’est donc construite en parallèle à la pensée de la logistique militaire du fait de finalités différentes. Cependant les problèmes de base restent les mêmes. L’institution militaire a insufflé de façon périodique des avancées significatives en logistique qu’elle soit militaire ou civile. Au cours de la Seconde Guerre mondiale, les travaux structurant la recherche opérationnelle se sont développés, permettant ainsi aux entreprises, dès la période de l’après guerre, d’adopter un premier traitement de la logistique par la voie quantitative".

[modifier] Annexes

[modifier] Notes et références

  1. Université de Lille I - USTL http://www.univ-lille1.fr
  2. Origines de la logistique selon l'université de Lille http://www.univ-lille1.fr/pfeda/iaal/docs/dess2003/log/multimedia/penseelogistique/penseelogistique.html
  3. Origines du génie militaire - Du XIIIe au XVIIIe siècle http://www.defense.gouv.fr/terre/archives/direction_centrale_du_genie
  4. Ministère de la Défense http://www.defense.gouv.fr
  5. Création des premiers éléments militaires du personnel d'administration http://www.defense.gouv.fr/terre/decouverte/presentation/composantes/commissariat_de_l_armee_de_terre/4e_groupe_logistique_du_commissariat_de_l_armee_de_terre