Donjon

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Donjon du château normand de Rochester, en Angleterre, XIIe siècle.
Donjon du château normand de Rochester, en Angleterre, XIIe siècle.

Le donjon est la tour la plus haute d'un château fort, destinée à servir à la fois de point d'observation, de poste de tir et de dernier refuge si le reste de la fortification vient à être prise par un ennemi. Cette tour, ou ce bâtiment fortifié, sert aussi en général de résidence au seigneur du château.

Sommaire

[modifier] Origine et sens du terme

Le mot donjon (ou dongun, doignon, dangon) dérive du latin médiéval dominio, désignant la partie du château réservée au maître (en latin, dominus) du château. En dehors de son rôle spécifiquement militaire lors d'un siège, on y installe en général les appartements du seigneur et de sa famille, des réserves stratégiques de nourriture et d'armes ; le donjon sert également pour des prisonniers qu'on cherche à isoler particulièrement. En langue anglaise, le mot dungeon, qui avait au Moyen Âge le même sens de « tour principale », a vu sa signification dériver et désigner uniquement les cachots et les caves d'un château.

Le donjon du château d'Osaka
Le donjon du château d'Osaka

Au Moyen Âge, le terme peut s'appliquer à toute la haute-cour d'un château à plusieurs enceintes ; l'usage moderne en français, avec le sens exclusif de « tour la plus haute » est donc une dérive[1].

Le terme peut être appliqué à des édifices hors d'Europe, organisés selon les même principes, comme par exemple certaines forteresses du Japon.

[modifier] Utilité

Donjon de Gisors, caractéristique d'un château à motte.
Donjon de Gisors, caractéristique d'un château à motte.

En temps de paix, le donjon renferme les trésors, les armes, les archives de la famille. Le seigneur y loge avec sa famille, à l'étage noble : le premier étage.

Par sa position élevée, le sommet du donjon est en général celui qui offre la meilleure vue de la région environnante. En cas de siège, c'est l'endroit privilégié d'où peuvent être observés les mouvements de l'ennemi. Si le château est de petite taille, c'est de là que les archers, et les machines, auront la plus grande portée de tir.

Les châteaux sont prévus pour que, si la muraille extérieure est prise, les enceintes intérieures puissent encore être défendues. Le donjon est le dernier refuge dans ce cas, il est conçu pour être défendable même si tout le reste du château est déjà pris. Il ne s'agit pas que de se défendre d'attaquants venus de d'extérieur de la forteresse ; pour le seigneur du château, la disposition du donjon permet de se prémunir contre des trahisons venant, notamment, des vassaux venus en renfort et amalgamés à la garnison.

En général, les visiteurs des châteaux sont donc tenus à l'écart du donjon, afin que l'agencement intérieur du bâtiment soit inconnu des assaillants, en cas de conflit, de trahison, ou de retournement d'alliance. Les donjons sont parfois conçus selon des plans d'une grande complexité, pour dérouter et piéger les attaquants ; on peut à cet égard citer le cas du donjon d'Arques-la-Bataille[2].

Le donjon est aussi, en général, placé en contact avec l'extérieur de l'enceinte, afin de permettre de sortir ou de rentrer dans le donjon sans avoir à passer par le reste de l'enceinte. Cette disposition peut être vitale lorsque le donjon se retrouve assiégé, en permettant de s'échapper.

[modifier] Les donjons en France

La raison première qui fit élever des donjons fut l'invasion normande. Les villas mérovingiennes devaient ressembler beaucoup aux villæ romaines ; mais quand les Normands se jetèrent périodiquement sur le continent occidental, les seigneurs, les monastères, les rois et les villes elles-mêmes songèrent à protéger leurs domaines par des sortes de blockhaus en bois que l'on élevait sur le bord des rivières et autant que possible sur des emplacements déjà défendus par la nature.

Les Normands eux-mêmes, lorsqu'ils eurent pris l'habitude de descendre sur les côtes des Gaules et de remonter les fleuves, établirent, dans quelques îles près des embouchures, ou sur des promontoires, des camps retranchés avec une forteresse pour mettre leur butin à l'abri des attaques et protéger leurs bateaux amarrés. C'est aussi dans les régions qui furent particulièrement ravagées par les Normands que l'on trouve les plus anciens donjons, et ces forteresses primitives sont habituellement bâties sur plan rectangulaire formant un parallélogramme divisé quelquefois en deux parties.

La région du Val de Loire présente certains des plus anciens donjons français à Langeais (vers 994), Loches (vers 1010-1030), Montbazon, Lavardin (fin XIIe siècle), Chinon (tour du Coudray, vers 1200).

[modifier] Bibliographie

[modifier] Notes et références

  1. « L'ensemble constitué par le pralet, les bâtiments et les fortifications s'appelle le donjon. Le donjon n'est donc pas la tour la plus puissante ou la plus haute du complexe tel que cela est souvent dit, mais le haut lieu fortifié du pouvoir, qui, politiquement et militairement commande tous les autres. » Extrait de la publication de la thèse de doctorat d'Etat soutenue en 2005 par M. Alain Kersuzan : Défendre la Bresse et le Bugey, les châteaux savoyards dans la guerre contre le Dauphiné (1282-1355).
  2. Le donjon d'Arques est étudié en détail par Viollet-le-Duc dans le chapitre Donjon de son Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle.