Grosse Bertha

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Modèle réduit de Grosse Bertha
Modèle réduit de Grosse Bertha
Mortier de 420 mm type M "Grosse Bertha" en batterie
Mortier de 420 mm type M "Grosse Bertha" en batterie
Mortier de 420 mm type Gamma, monté sur rails
Mortier de 420 mm type Gamma, monté sur rails
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La Grosse Bertha est le nom français d'une très grosse pièce d'artillerie de siège utilisée par l'armée allemande lors de la Première Guerre mondiale.

C'est par erreur que l'on donne souvent ce nom au type de canon utilisé pour bombarder Paris.

Sommaire

[modifier] Historique

En 1908, l'état-major allemand chargea l'usine d'armements de Alfried Krupp von Bohlen und Halbach, située à Essen, d'élaborer une pièce d'artillerie capable de percer trois mètres de béton armé et de briser les tourelles en acier au nickel des fortifications françaises.

On confia la conception de l'arme au professeur Rausenberger et les calculs au capitaine Becker. Après avoir testé une grande variété d'obus, le meilleur compromis entre les performances balistiques et les capacités de pénétration fut obtenu avec un obus de 1150 kg chargé de 144 kg d'explosifs. Toutefois, le canon correspondant — appelé Gamma-Gerät (appareil Gamma) — ne pouvait être transporté que par voie ferrée, ce qui limitait son champ de manoeuvre.

À partir du Gamma-Gerät, très coûteux (1 million de marks de l'époque, équivalant à 5 728 000 euros pour un mortier complet, et 3 000 marks par coup tiré, soit 16 000 euros par obus!), fut donc développé un obusier plus léger (de 42 tonnes tout de même !) et plus mobile, le type M. Conformément à la tradition des usines Krupp, qui voulait que les machines fussent baptisées du nom d'un membre de la famille, le M 42 fut renommé Dicke Bertha (Grosse Bertha), en l'honneur de Bertha Krupp, la fille unique et héritière d'Alfred Krupp. Les artilleurs surnommèrent ce mortier Fleissige Bertha (Bertha l'assidue).

En août 1914, une seule batterie de deux pièces "M" était prête (batterie n°3), mais dix autres mortiers ont été construits par la suite.

[modifier] Utilisation

La Grosse Bertha (type M, soit la version légère) entra en service le 12 août 1914 face au fort de Pontisse, lors du siège de Liège. Le 15 août, le fort de Loncin fut bombardé par les Grosses Bertha qui provoquèrent l'explosion de la poudrière du fort (où il restait encore 12 tonnes de poudre). Le 16 août, les douze forts ceinturant la ville s'étaient rendus (seuls trois forts, Pontisse, Fléron et Loncin, sur les douze furent bombardés par les Grosses Bertha). Les "Bertha" (type M et gamma) dévastèrent les forteresses de Namur, Maubeuge et Anvers, ainsi que les défenses russes du Danube. Cependant, devant Verdun, notamment face au fort de Manonviller, les Bertha montrèrent leurs limites. Les forts de Verdun, modernisés peu avant la guerre, résistèrent aux Grosses Bertha non pas parce qu'ils étaient plus solides que les forts belges, mais par le fait qu'ils n'ont jamais été encerclé, permettant ainsi aux défenseurs d'évacuer les forts pendant les bombardements et d'y retourner lorsque l'orage était passé.

Si les dégâts causés aux forts impressionnèrent les alliés, la célébrité de la Grosse Bertha est venue de la confusion avec les canons longs qui bombardèrent Paris en 1918 et que les Allemands appelaient Ferngeschütz ou Pariser Kanonen : Rausenberger avait adapté des tubes de gros calibre destinés au croiseur Ersatz Freya, dont la construction avait été suspendue.

À la fin de la guerre, les Grosses Bertha furent détruites pour ne pas tomber entre les mains ennemies. Seul le canon affecté au champ de tir de Meppen fut conservé.

Rebaptisé Große Gilda (Grande Gilda), il reprit du service lors de la Seconde Guerre mondiale. Il fut utilisé en mai 1940 contre certains forts belges et contre l'ouvrage de Schoenenbourg (sur la Ligne Maginot en France), sans grands résultats. Il fut de nouveau utilisé en 1942, lors du siège de Sébastopol et, deux ans plus tard, lors de l'insurrection de Varsovie. Cependant à cette époque, l'Allemagne avait développé d'autres canons encore plus puissants, les Karl et Gustav.

[modifier] Caractéristiques du mortier de 420 mm type M

  • Nom officiel : Kurze-Marine-Kanone 14, M-Gerät
  • Surnoms : Dicke Bertha (Grosse Bertha), Fleissige Bertha (Bertha l'assidue)
  • Type : mortier lourd
  • Calibre : 420 mm
  • Longueur du tube: 5 mètres
  • Portée de tir : 9 300 mètres
  • Poids d'un mortier mis en batterie: 42,6 tonnes (dont 13,4 pour le tube)
  • Poids d'un mortier en transport (5 chariots tractés par locomobiles à vapeur): 89 tonnes
  • Poids de l'obus : 800 kg (dont 100 à 140 kg de charges explosives)
  • Vitesse initiale du projectile : 333 m/s
  • Cadence maximale de tir: 10 coups par heure
  • Nombre d'exemplaires produits: 12

[modifier] Bombardement de Paris

Contrairement à ce qu'on peut lire notamment dans l'Encyclopédie Universalis, Paris ne fut pas bombardé à très grande distance par une Grosse Bertha. Le genre de canons utilisé était plutôt un type d'artillerie à longue portée (Ferngeschütz) nommé Pariser Kanonen.

Le 23 mars 1918, à partir de 7 h 15, les Parisiens furent assez étonnés d'entendre plusieurs explosions à un quart d'heure d'intervalle et de ne voir aucun avion dans le ciel. Les effets furent surtout psychologiques. 185 coups ont été tirés du 23 mars au premier mai 1918, faisant de nombreuses victimes. Ce fut notamment le cas lors de la sortie de la messe du vendredi-saint à l'église Saint-Gervais.

À la fin de la guerre, ne voulant pas que ce type d'arme tombe entre les mains des alliés, les Allemands jugèrent qu'il était préférable de s'en débarasser. La majorité des pièces furent renvoyées en Allemagne et refondues.

[modifier] Caractéristiques du Ferngeschütz

  • Surnoms : Ferngeschütz (canon à longue portée), Pariser Kanonen (canons de Paris)
  • Longueur du tube : 34 m (le tube était maintenu par des haubans)
  • Calibre : entre 210 et 240 mm (le tube était usé après 65 coups)
  • Portée maximale : 108 km (130 km selon certaines sources)
  • Masse de l'obus : 103 kg
  • Masse de poudre nécessaire : 145 kg
  • Vitesse initiale du projectile à charge maximale : 1600 m/s
  • Apogée : 38,6 km
  • Temps de vol du projectile : 176 s

[modifier] Articles connexes