Driss Chraibi

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Driss Chraibi
Driss Chraibi

Driss Chraïbi (15 juillet 1926 - 1er avril 2007) est un auteur marocain de langue française. Il a également fait des émissions radiophoniques pour France Culture. Driss Chraïbi est un écrivain qui est trop souvent réduit au seul Passé Simple et à une seule analyse de ce livre : révolte contre le père sur fond d'autobiographie. Or, Driss Chraïbi aborde bien d'autres thèmes au cours d'une oeuvre qui n'a cessé de se renouveller : colonialisme, racisme, condition de la femme, société de consommation, islam, Al Andalus, Tiers-Monde...

Sommaire

[modifier] Biographie

[modifier] Sa vie

Né à El Jadida et élevé à Casablanca, Chraïbi vint à Paris en 1945 pour étudier la chimie, avant de se tourner vers la littérature et le journalisme. Il produit des émissions pour France Culture, fréquente des poètes, enseigne la littérature maghrébine à l'Université Laval à Québec et se consacre à l'écriture.

[modifier] Sa littérature

Il s'est fait connaître par ses deux premiers romans, Le Passé simple (1954) et Les Boucs (1955) d'une violence rare, et qui engendrèrent une grande polémique au Maroc en lutte pour son indépendance.

Le Passé Simple décrit la révolte d'un jeune homme de la grande bourgeoisie marocaine contre toutes les formes du pouvoir incarnées par son père, « le Seigneur », stigmatisant au passage le décalage entre l'Islam idéal révélé dans le Coran et la rigidité ainsi que l'hypocrisie sociale de l'Islam tel que pratiqué par les musulmans.

Dans Les Boucs, Driss Chraïbi critique le rapport de la France à ses immigrés, travailleurs exploités qu'il qualifie de « promus au sacrifice ». C'est le premier livre qui évoque dans un langage haché, cru, poignant, le sort fait par le pays des Lumières aux « Nord-Africains ».

Suivent deux romans épuisés aujourd'hui.

L'Âne, dans le contexte des indépendances africaines, prédit avant tout le monde leur échec, les dictatures, « ce socialisme de flics ».

La Foule, également épuisé, est une critique voilée du Général de Gaulle. Le héros est un imbécile qui arrive au pouvoir suprême car la foule l'acclame dès qu'il ouvre la bouche, à son grand étonnement.

Une page se tourne avec la mort de son père Haj Fatmi Chraïbi en 1957. L'écrivain, en exil en France, dépasse la révolte contre son père et établit un nouveau dialogue avec lui par-delà la tombe et l'océan. Ce sera Succession Ouverte. Un deuxième Passé Simple qui pose la question qui le hantera jusqu'à ses derniers jours : "Cet homme était mes tenants et mes aboutissants. Aurons-nous un jour un autre avenir que notre passé ?" Question qu'il étendra à l'ensemble du monde musulman.

La Civilisation Ma Mère tente d'y apporter une réponse. Le fils aide sa mère à se libérer du carcan de la société patriarcale et à trouver sa propre voie. C'est la première fois que la question de la femme est évoquée dans la littérature marocaine.

Viennent ensuite La Mère du Printemps et Naissance à l'Aube. Driss Chraïbi y narre de façon magistrale la chevauchée des cavaliers arabes venus apporter l'Islam en Occident, l'intégration de l'Islam par les Berbères, puis la construction de l'utopie en Andalousie. Un monde où Arabes, Berbères, Juifs vivent côte à côte à la recherche de l'idéal.

Dix ans après, l'écrivain « accouche » de l'Homme du Livre, qu'il décrit comme « l'oeuvre de sa vie ». Le héros n'est autre que le Prophète Mahomet pendant les trois jours qui ont précédé la Révélation. Ici le roman côtoie la poésie, la poésie côtoie le sacré. On voit un homme seul face à lui-même, luttant pour accéder à la Vérité. Le livre s'achève quand la Révélation commence.

C'est ensuite la série des Inspecteur Ali qui avait débuté avec Une enquête au pays. L'Inspecteur Ali est une sorte d'alter ego de l'écrivain, qui mène des enquêtes décapantes, hors normes, au Maroc puis à l'étranger. Ainsi, à travers ce qui semble des polars à première vue, Driss Chraïbi dénonce les travers du Maroc et de l'Occident, mais cette fois l'attaque se fait plus ironique.

Enfin viennent les Mémoires. Lu, Vu, Entendu décrit son enfance au Maroc, le colonialisme, le lycée français, la Deuxième Guerre Mondiale, l'arrivée des Américains à Casablanca pour s'achever sur son arrivée en France. Il en profite pour remettre les pendules à l'heure concernant la relation avec son père qu'une certaine lecture à sens unique du Passé Simple a toujours supposé et enseigné.

Dans le deuxième volet des Mémoires, Le Monde à Côté, il raconte sa vie d'écrivain et sa vie privée d'une façon apaisée.

Son dernier livre, L'Homme qui venait du Passé, est une nouvelle enquête de l'Inspecteur Ali, mais sur la mort d'Oussama Ben Laden à Marrakech... Il y tente une dernière fois de répondre à la question fondamentale : « Aurons-nous un jour un autre avenir que notre passé ? ». Le livre s'achève par l'assassinat de l'auteur par l'Inspecteur Ali.

Driss Chraïbi s'est éteint à 80 ans, dimanche 1er avril 2007 dans la Drôme où il résidait depuis 20 ans. Il emporte avec lui le secret du livre qu'il était en train d'écrire qui demeurera à jamais un mystère. Il repose désormais à Casablanca, au Cimetière des Chouhada, à côté de son père comme il le souhaitait.

[modifier] Œuvres

  • Le Passé simple, Gallimard, 1954
  • les Boucs, Gallimard,1955
  • l'Âne, 1956
  • De tous les horizons, 1958
  • la Foule, 1961
  • Succession ouverte, Gallimard, 1962
  • Un Ami viendra vous voir, 1967
  • la Civilisation ma mère !..., Gallimard, 1972
  • Mort au Canada, 1975
  • Une enquête au pays, Seuil, 1981
  • la Mère du printemps, seuil, 1982
  • Naissance à l'aube, 1986
  • l’Inspecteur Ali, Gallimard, 1991
  • l’Homme du livre, 1995
  • l'Inspecteur Ali à Trinity College, Denoël, 1995
  • l'Inspecteur Ali et la CIA, Denoël, 1996
  • Vu, Lu, et entendu, Denoël, 1998
  • le Monde à côté, Denoël, 2001
  • L'homme qui venait du passé, Denoël, 2004

[modifier] Liens externes