Drapeau de l'Alsace

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Le Rot un Wiss (en allemand Rot und Weiss, en français Rouge et blanc), est le drapeau de l'Alsace. Sur la base de celui-ci a été également dessiné le drapeau de l'Alsace-Lorraine, officialisé par la Constitution d'Alsace-Lorraine de 1911.

[modifier] Histoire

L'association du rouge et blanc remontent à l'époque médiévale. Dès le XIe siècle, l'armée du premier duc de Lorraine, Gérard d'Alsace (1024-1070), arbore les deux bannières, rouge et blanche. Mais le rouge et le blanc sont à l'origine les couleurs spécifiquement alémaniques qu'on retrouve dans tous les pays du Rhin supérieur, et plus tard dans les pavillons de la navigation rhénane.

Les armes de Strasbourg, celles de Mulhouse, Guebwiller, Sélestat, Munster, Wissembourg, Saverne, ou celles des Habsbourg possessionnés en Haute-Autriche comme en Haute-Alsace, celles de la ville de Fribourg-en-Brisgau, celles de la Confédération helvétique et aujourd'hui celles du Wurtemberg sont rouges et blanches.

Au plus loin, on trouve le rouge et le blanc associés dans les armoiries du Nordgau, utilisées à partir de 1262 par le landgrave issu des Comtes de Werd. Le blason rouge et blanc de l'évêque de Strasbourg, Walther de Geroldseck, deviendra celui de la cité entière lorsqu'elle se libèrera de la mainmise ecclésiastique. Plus tard, c'est sur l'étendard déployé du " Rot un Wiss " que, chaque année, les bourgeois de la Ville libre de Strasbourg (die Freie Reichstadt) prêtent leur serment de fidélité à la Constitution (Schwörtag) au pied de la Cathédrale Notre-Dame, ce cérémonial perdurant jusqu'à la Révolution. C'est encore le drapeau rouge et blanc qui flottait autrefois sur la plate-forme de la cathédrale pour indiquer la direction des incendies qui pouvaient se déclarer dans la ville. A la fin du XVe siècle et au début du XVIe siècle, le " Rot un Wiss " est repris lors des soulèvements des paysans du Bundschuh.

Plus tard, il apparaîtra même dans certains dessins de Hansi, notamment ceux se rapportant à la visite du roi Charles X en Basse-Alsace en 1828, où dans les villages pavoisés traversés par le roi, à côté des trois fleurs de lys, symbole de la royauté, on voit flotter à toutes les maisons et jusque sur les clochers des églises, la bannière Rot un Wiss. Et si le blason de Basse-Alsace est rouge et blanc, il en est de même du costume traditionnel où l'on retrouve associées les deux couleurs : le gilet rouge porté sur chemise blanche.

En 1870, les Alsaciens-Lorrains, pour marquer leur différence par rapport à l'occupant allemand, arborent de plus en plus fréquemment les couleurs rouge et blanche qui s'imposent comme l'emblème, non reconnu, du Reichsland, mais surtout de la contestation régionale. Le drapeau rouge et blanc devient le symbole des libertés à reconquérir et donc plus spécialement celui des autonomistes. Les poètes alsaciens-lorrains, tels que les frères Mathis, Stoskopf ou René Schickelé, vont prendre le relais pour le mythifier.

Le drapeau alsacien
Le drapeau alsacien

Les autonomistes francophiles adopteront eux aussi le " Rot un Wiss " et lorsque l'un deux sera en prison, viendront fleurir sa place laissée vide d'un immense bouquet d'œillets rouges et blancs. Nombreux sont également ceux qui arborent à la boutonnière deux petites fleurs, l'une rouge et l'autre blanche. Petit à petit, le drapeau s'impose dans l'esprit des habitants comme le symbole de leur patrie. La question de l'officialisation du drapeau sera donc débattue à plusieurs reprises au Landtag et au sein des diverses fractions politiques de 1912 à 1913.

Les couleurs rouge et blanc viennent immédiatement à l'esprit des alsaciens-lorrains lors de la proclamation de la Constitution de 1911. Dès lors, des études fouillées sur les couleurs traditionnelles voient le jour. En 1911, Albert Unlhorn, notaire à Sarre-Union), publie sur la question une étude se fondant sur les règles traditionnelles héraldiques, étude de laquelle ressort que les couleurs à prendre en compte sont, pour la Basse-Alsace le blanc et le rouge, pour la Haute-Alsace le jaune et le rouge et pour la Lorraine le rouge et le jaune. Et l'auteur de conclure : "Nous avons donc trois couleurs pour notre drapeau : or, rouge et blanc".

Au niveau des parlementaires du Landtag, des propositions sont faites les 25 et 26 janvier 1912, priant le gouvernement d'élaborer rapidement un projet de loi dans ce sens. Pour concilier l'opinion, on prend soin d'ajouter au drapeau une Croix de Lorraine jaune dans la bande rouge côté hampe.

Une commission chargée d'élaborer une proposition définitive est mise sur pied. Celle-ci propose que le drapeau rouge et blanc soit fait de deux bandes horizontales, une rouge en haut, une blanche en bas, avec une croix de Lorraine en haut à gauche du drapeau).

Le drapeau de l'Alsace-Lorraine
Le drapeau de l'Alsace-Lorraine

Mais le processus décisionnel ne reçoit pas l'accord du gouvernement. Le 27 mai 1913, irrité par ce retard, le député Hauss interpelle le gouvernement pour s'enquérir de l'évolution du dossier. On l'informe que le dossier butte sur des problèmes héraldiques. La réponse définitive de Berlin ne parviendra jamais à Strasbourg. Puis arrive la Première Guerre mondiale, de sorte que la Constitution de 1911 et le consensus autour de l'idée d'un État souverain doté de sa bannière nationale seront finalement abandonnés.

Mais la bannière " Rot un Wiss " sera plus que jamais arborée par les alsaciens-lorrains. L'Elsassisches Fahnenlied, hymne national crée à l'occasion de la promulgation de la Constitution de 1911 exalte ces couleurs. En 1916, en Haute-Alsace reconquise par les Français, Pierre Loti, dans l'Illustration, est frappée à la vue de " ces drapeaux français et de ces drapeaux d'Alsace blancs et rouges qui jaillissent spontanément comme par magie des fenêtres ouvertes ". Les brassards des hommes, chargés par le comité exécutif du Nationalrat du maintien de l'ordre, sont rouges et blancs.

En 1918, il sera mis un peu de côté par le gouvernement français, expliquant aux Alsaciens qu'il fait ombrage au drapeau tricolore qui ne supporte pas « cette concurrence » dans les cœurs. Ceci n'empêche pas les fondateurs de " l'Exekutivkomitee der Republik Elsass-Lothringen " (Comité exécutif de la République d'Alsace-Lorraine) de l'adopter en avril 1919 comme emblème.

Les drapeaux réapparaîtront en 1922 à l'occasion de la chute des cheminots alsaciens-lorrains. Et lors d'un grand meeting communiste à Strasbourg, le Rot un Wiss est brandi dans la salle comble et Charles Hueber, futur maire de la ville, de lancer cet avertissement : " Oui, voici nos couleurs, celles que nous sortions toujours en guise de protestation contre le système prussien. Nous ne les avons pas encore arborées contre la France, mais cela pourrait venir ! ".

Michel Walter, représentant l'Union populaire républicaine et la Ligue des Catholiques, dépose une couronne rouge et blanche au pied de la statue de Kleber, lors des manifestations de juillet 1924 contre les lois laïques. Lors du Komplottprozess de 1928, des conscrits arrachent le bleu du drapeau tricolore en signe de protestation et pour affirmer leur solidarité aux accusés.

Le 19 octobre 1928, au cours de la réunion du " Komitee der elsässischen Einheitsfront ", Paul Schall fait cette déclaration : " Tous nos efforts tendent à créer une nouvelle Europe. Cela ne sera toutefois possible que lorsque nous serons maîtres chez nous et que le drapeau rouge et blanc flottera dans tout le pays ".

Il sera également adopté par le Jungvolkspartei fondé par Rossé, Stürmel et l'Abbé Zemb en 1931. Dans toutes leurs réunions, il figurera toujours en bonne place. Le 24 octobre 1933, les catholiques, en lutte contre la politique anticléricale des Français, décorent la tribune de la salle du meeting de drapeaux rouges et blancs frappés d'une croix de Lorraine. Il sera à nouveau brandi en 1936 lors des manifestations et des défilés d'ouvriers en lutte. A la Libération, des Alsaciennes viendront offrir aux soldats libérateurs des bouquets de fleurs rouges et blanches.

En 1968, il apparaîtra sur la flèche de la cathédrale et en 1976, lors de la venue du président Giscard d'Estaing pour l'inauguration du tunnel de Sainte-Marie-aux-Mines, au faîte de plusieurs maisons pour marquer, sur la crête des Vosges, l'entrée en Alsace.

Aujourd'hui, ce drapeau est utilisé régulièrement lors de réunions ou de rassemblements populaires.

Il est aussi à noter que le drapeau alsacien est l'égal ( mêmes couleurs et même proportions ) du Drapeau de l'Indonésie et diffère en proportions de celui de Monaco.

[modifier] Bibliographie

"Le Drapeau Alsacien, des origines à nos jours", Jean-Georges TROUILLET, Editions Nord-Alsace, 2007, ISBN 978-2-9517546-6-9


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