Agrégation à la noblesse

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L'agrégation à la noblesse est une expression historiographique désignant le processus par lequel, en France, des personnes ou des familles s'intègrent au groupe social nobilliaire sans l'intervention du pouvoir royal (lettres d'anoblissement, charges anoblissantes, etc.).

[modifier] Définition

Depuis toujours la noblesse fut une classe sociale relativement ouverte. L'agrégation à la noblesse se fait donc par l'adoption de normes sociales considérées comme nobiliaires : rôle guerrier, renforcé par la possession des armes et de la monture, conception lignagère de la famille, absence de travail manuel, ... . Durant tout le Moyen Âge et le début de l'époque moderne, le fait de "vivre noblement", c'est-à-dire de partager les valeurs et le mode de vie de la noblesse, permet d'entamer un processus d'agrégation. L'agrégation est la plupart du temps un processus relativement long (3 ou 4 générations), mais il peut être aussi plus rapide dans certains cas. Ce processus repose globalement sur la considération de la famille dans son environnement social et culturel et pour une part sur le patrimoine financier de la famille.

Pourtant, dès le début du XVIe siècle, les souverains français ont cherché à restreindre et à contrôler l'accès des personnes à la noblesse. Un système d'enquête fut mis en place, notamment sous le règne de Louis XIV qui punissait les personnes revendiquant la noblesse sans pouvoir la prouver. Parallèlement, le développement des offices anoblissants offre de nouveaux moyens d'accession à la noblesse aux classes roturières aisées.

À titre général, l'on peut dire que la noblesse d'extraction (antérieure à l'année 1560) est la plupart du temps une noblesse d'agrégation.

[modifier] Modes d'agrégation

Déjà, à la fin de l'ancien régime, cette question faisait débat. Pour certains, la noblesse ne pouvait se prescrire et il n’y avait que le roi qui pouvait anoblir. Mais comme dit G. A. de La Roque (1678) « la prescription que l’on prétend ne procède pas tant de la longueur du temps que de l’autorité du Prince qui donne force à la sentence de ses officiers fondée sur cette forme de prescrire ». En d’autres termes, si le roi accepte le principe de la prescription, en ne l’interdisant pas, alors la noblesse peut se prescrire. En l'occurrence, il semble bien que la possession continue sur plusieurs générations de qualification noble (titre de noblesse) avec fiefs, emplois et services autorisaient la prescription.

Dans la France d'ancien Régime il existe plusieurs moyens de s'agréger à la noblesse :

  • L'achat d'un fief noble et d'en rendre hommage durant trois générations : Dès le haut Moyen Âge, cette possibilité fut offerte aux familles possédant alors assez de finances pour acquérir un ou plusieurs fiefs nobles. Durant la longue période des Croisades (du XIe au XIIIe siècle), des familles nobles s'appauvrirent au bénéfice de familles bourgeoises qui à travers le commerce purent s'enrichir et ainsi débuter un processus d'agrégation. Ce mode d’acquisition de la noblesse est réputé prendre fin avec l’ordonnance de Blois (1579) qui stipule que « les roturiers et non nobles, achetant fiefs nobles, ne seront pour ce anoblis, ni mis au rang et degrés des nobles, de quelque revenu et valeur que soient les fiefs par eux acquis ».
  • La possession centenaire : La possession centenaire consiste à jouir de certains privilèges de la noblesse - typiquement une qualification de noblesse (un titre de noblesse) - sans que cela ne soit contesté durant au moins un siècle. L’arrêt d’avril 1771 pourrait mettre fin à ce mode d’agrégation pour les commencements de noblesse postérieurs à 1715. L’arrêt de 1773, à ce sujet, rappelle en effet que les anoblis d’après 1715 « ne puissent à l’avenir être admis à faire aucune preuve de noblesse pour être reçus dans aucun ordre, corps, chapitres ou charges pour lesquels la noblesse est requise, qu’en justifiant la quittance du droit de confirmation... et ce nonobstant toutes qualifications de nobles ou d’écuyers, ou autres qualifications de noblesse qui pourraient avoir été prises par leurs auteurs, à moins qu’ils ne justifient un titre confirmatif de noblesse antérieur au 1er janvier 1715 ».
  • La vie noble : La vie noble se caractérise par le fait de vivre selon les coutumes nobles. "Vray est, que quand le Père et Ayeul ont vécu noblement, on tient qu'ils transmettent cette qualité à leur postérité" (Traité des droits honorifiques des seigneurs es églises - 1643). Là encore l'arrêt d'avril 1771 peut ête vu comme une limite à ce mode d'acquisition de la noblesse.

Le paiement de la capitation noble, la convocation au ban, aux assemblées de la noblesse, les certificats de reconnaissance, etc., participent également à cette élévation sociale. Ce mode d'acquisition de la noblesse permit ainsi de tout temps à de nombreuses familles du Tiers état d'accéder au Second Ordre.

[modifier] Bibliographie

  • Antoine Maugard, Remarques sur la noblesse
  • Guy Chaussinand-Nogaret, La noblesse française au XVIIIe siècle
  • François Bluche, La vie quotidienne de la noblesse française au XVIIIe siècle
  • Alain Texier, Qu'est-ce que la noblesse ?
  • Emmanuel de Barrau, La Maison de Barrau
  • Pierre VIEUILLE, "Nouveau traité des elections" (1739)