Voie de fait en droit administratif français

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La voie de fait, en droit administratif français, correspond à une mesure ou une action gravement illégale de l'administration, qui porte atteinte à une liberté fondamentale ou au droit de propriété.

La théorie de la voie de fait est d'origine jurisprudentielle. Elle protège des droits des administrés en ce qu'elle entraîne pour l'Administration la perte de la majeure partie de ses privilèges traditionnels.

Sommaire

[modifier] Caractères généraux de la voie de fait

Il y a voie de fait si l'Administration accomplit un acte matériel représentant une irrégularité manifeste

  • soit parce qu'elle exécute une décision ne se rattachant pas à un pouvoir qui lui appartient (comme une décision grossièrement illégale, ou déjà annulée auparavant par une juridiction),
  • soit parce qu'elle exécute selon une procédure grossièrement illégale une décision même légale.

Cet agissement doit porter atteinte à la propriété mobilière ou immobilière, ou à une liberté publique ou fondamentale.

Les juges judiciaires deviennent alors compétents pour connaître de cette irrégularité, à titre exclusif en matière d'action en responsabilité, et concurremment avec les juges administratifs pour prononcer l'annulation de l'acte.

[modifier] Évolution du régime de la voie de fait

Cette théorie est aujourd'hui « une des constructions jurisprudentielles les plus controversées du droit administratif français » selon Damien Thierry, « outil utile mais d'un maniement délicat »[1]. Une partie importante de la doctrine la remet en cause : ce serait, pour le professeur René Chapus, « la folle du logis, présente là où on l'attend le moins, et perturbatrice au-delà de l'acceptable  »[2], et feraient que « les victimes de l'arbitraire ploient sous le poids de traditions devenues anachroniques »[3].

Notamment, la loi du 30 juin 2000 relative au référé devant les juridictions administratives modifie les règles relatives à la voie de fait, en créant auprès des tribunaux administratifs un référé « liberté fondamentale », qui pouvait être en concurrence avec la théorie de la voie de fait.

Toutefois, la voie de fait et le référé liberté fondamentale ont des champs différents :

  • le référé-liberté n'est octroyé que si l'Administration a prise une mesure grave et manifestement illégale dans l'exercice de ses attributions,
  • la voie de fait s'applique à une mesure, tout aussi grave et manifestement illégale, mais lorsque l'Administration prend une mesure en dehors de ses attributions, c'est-à-dire que l'Administration agit sans aucun fondement légal.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

[modifier] Documentation externe

Textes juridiques

Bibliographie :

  • Marceau Long, Prosper Weil, Guy Braibant, Pierre Delvolvé, Bruno Genevois, Les grands arrêts de la jurisprudence administrative, 2005, Dalloz-Sirey, coll. « Grands arrêts, Paris, 1er septembre 2005, 974 p. (ISBN 978-2247061211), Action française (no 49), p. 301
  • Pierre-Laurent Frier, Jacques Petit, Précis de droit administratif [détail des éditions]

Revues

  • Damien Thierry, « La jurisprudence Eucat dix ans après : sa portée sur la théorie de la voie de fait », dans Revue française de droit administratif, 1997, p. 524

Liens externes

[modifier] Notes et références

  1. AJDA 1966, p. 490
  2. R. Chapus, Droit administratif général, Paris, Montchrestien, 10e éd., 1996, p. 90.
  3. F. Burdeau, Histoire du Droit administratif, Paris, PUF, 1er éd., 1995, p. 452.