Talaru

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César Marie, marquis de Talaru, comte de Chamarande (1725-1794), était un ancien maître d'hôtel de Marie-Antoinette. Il possédait deux hôtels particuliers rue de Richelieu, aux numéros 60 et 62.

Au moment de la Terreur, il en donna un en location à un homme qui souhaitait ouvrir un hôtel. L'immeuble fut réquisitionné par les autorités de la section le 17 mai 1794 pour en faire une maison d'arrêt, et Talaru en devint le premier pensionnaire. Il se trouva payer, pour une seule pièce de sa propre maison, plus cher que le tout ne lui rapportait en loyer. On y mit jusqu'à deux cents prisonniers.

À la suite d'une méprise, il fut guillotiné au printemps suivant. L'ordre du tribunal révolutionnaire était "d'amener La Borde, logé dans la chambre de Boutin, chez Talaru". On lui amena tous les noms marqués, c'est-à-dire La Borde, Boutin et Talaru, et le tribunal trouva plus simple de modifier l'acte d'accusation que de les renvoyer.

On pouvait aussi y rencontrer le député Jean-Marie Boscary de Romaine ; Jeanne de Lavaulx, veuve du maréchal duc de Richelieu, petit neveu du cardinal dont les mémoires nous sont restés ; François Nicolas Racine de Monville, le créateur du célèbre Désert de Retz à Chambourcy, en forêt de Marly, dont il dessina lui-même les plans ; Paul Henri Marron, pasteur protestant, membre du club des Feuillants ; Antoine d’Andlaw, gendre du philosophe Helvétius ; Louis Gérard, abbé et écrivain, ancien chanoine de Saint-Louis-du-Louvre ; Alexandre Rousselin, comte de Corbeau de Saint-Albin, qui était allé terroriser Troyes comme commissaire de la Convention, et que Robespierre fit jeter en prison.

Les détenus, au lendemain du 9 thermidor, eurent la surprise de voir arriver une bonne partie de la famille Duplay, chez qui Robespierre séjournait depuis 1791. De même Marie Brunet, veuve du conventionnel Georges Couthon, guillotiné avec Robespierre. De même Paul Auguste Taschereau de Fargues, opulent armateur qui avait été membre des Jacobins et ami de Robespierre. De même Dossonville, policier qui avait particulièrement tourmenté les détenus. On y mit ensuite des réfugiés de Saint-Domingue qui plaidaient pour que la République écrasât la révolte des Noirs et leur rendît leurs plantations.

Au reste, hormis les trois malchanceux, ils survécurent tous à cette épreuve.

La maison devint l’hôtel meublé des Colonnes en 1816, puis abrita l’agence Havas à partir de 1825. De 1831 à 1907, la joaillerie "Nitot Étienne et fils" le loua pour y placer ses magasins. Elle se transporta place Vendôme, où elle existe encore sous le nom de "Bijouterie Chaumet". L’hôtel de Talaru fut démoli en 1914 pour permettre l’édification de locaux plus modernes destinés à l’agence Havas.