Stigmates

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Les stigmates sont les traces des plaies qui furent infligées à Jésus-Christ au cours de sa crucifixion, selon le Nouveau Testament.

Sommaire

[modifier] Définition

Carlo Crivelli, Déposition du Christ : Madeleine regarde la main gauche stigmatisée
Carlo Crivelli, Déposition du Christ : Madeleine regarde la main gauche stigmatisée

Dans l'acception religieuse, stigmates est toujours un nom masculin pluriel, à la différence des significations médicale (plaie, cicatrice), judiciaire (marque d'infamie), militaire (marque faite sur les recrues dans l'Empire romain), botanique et autres (voir stigmate).

À l'imitation de Jésus, diverses personnes ont présenté, dans l'histoire du christianisme, des marques semblables à celles du Christ sur diverses parties de leur corps :

  • sur les mains ou les poignets, rappelant les plaies causées par les clous,
  • sur les pieds ou les chevilles, rappelant les plaies causées par les clous,
  • sur la tête, rappelant les plaies causées par la couronne d'épines,
  • sur le dos, rappelant les coups de fouet,
  • sur le flanc, rappelant la plaie causée par une lance.

Les personnes présentant ces marques sont appelées « stigmatisé(e)s ».

[modifier] Histoire

Le Greco : Saint François recevant les stigmates
Le Greco : Saint François recevant les stigmates

Le plus célèbre des stigmatisés est François d'Assise qui, séjournant sur le mont Alverne (La Verna ?) en 1224, aurait vu un séraphin à six ailes flottant dans les airs dont le corps était fixé à une croix, comme celui du Christ. Une fois la vision disparue, François d'Assise aurait constaté l'apparition sur son propre corps de marques semblables à celles qui furent faites à Jésus, marques qui demeurèrent indélébiles. Son corps fut ainsi porteur de deux stigmates qui, selon les versions, n'auraient été découverts qu'après sa mort.

L'Église catholique a reconnu un certain nombre de stigmatisés, et les a béatifiés ou canonisés : par exemple, sainte Catherine de Sienne, saint Jean de Dieu, sainte Marie de l'Incarnation, la bienheureuse Anna Katharina Emmerick, célèbre par ses visions[1], saint Padre Pio (1918-1968), sainte Gemma Galgani (1878-1903) qui fut canonisée en 1940.

On peut citer d'autres personnes, non reconnues par l'Église : Thérèse Neumann, Marthe Robin, pour lesquelles une demande de béatification a été déposée auprès du Vatican depuis plusieurs années, ou encore Marie Nazzour, et, en 2007, le frère Elie du couvent de Calvi dell'Umbria, à 50 km de Rome, qui recevrait les signes de la Passion tous les ans pendant le Carême.

[modifier] Interprétations

Ces manifestations ont été différemment interprétées. L'Église catholique ne reconnaît que certains cas. Et certains experts ont émis l'hypothèse qu'il s'agissait de manifestations hystériques.

Analysant le livre de Jean-Pierre Albert, Le sang et le Ciel. Les saintes mystiques dans le monde chrétien, Claudine Leduc écrit : « Et Jean-Pierre Albert d'émettre l'hypothèse que la sainte, à cause de l'impureté du sang menstruel qui s'écoule du corps des femmes, est dans l'obligation de reconquérir sans cesse sa sainteté en faisant s'échapper de son corps un sang sublimé. » [2].

Des féministes ont même écrit : « Un médecin, J. Lhermitte, a établi que la plupart des femmes (saintes ou non) ne sont stigmatisées qu'entre 15 et 50 ans, période pendant laquelle la femme a ses règles. Les stigmates sont eux aussi soumis à des rythmes cycliques : “Natuzza Evolo (née en 1924) les voyait apparaître chaque année pendant le Carême, Gertrude d'Oosten (1358), chaque jour aux heures canoniales [mais] la formule la plus habituelle est qu'ils saignent le vendredi avec plus d'abondance, ou exclusivement ce jour-là, et sont à peine visibles le reste du temps” [3]. Si l'on ajoute que les hagiographes précisent souvent que le sang des stigmates est parfumé et que les saintes n'ont plus leurs règles [4], on est conduit à penser que la stigmatisation est une conversion du sang menstruel : à un sang impur, doté, dit-on, d'une odeur forte et délétère, se substitue un sang dont le parfum signale la pureté. La sainteté féminine apparaît ainsi comme un des révélateurs privilégiés de l'imaginaire de la femme dans le christianisme. Être de désir, être charnel, la femme doit, pour accéder à la sainteté, nier sa féminité : renoncer à tout ce qui pourrait la rendre séduisante et refuser la maternité[5].

[modifier] Culture

[modifier] Cinéma

[modifier] Littérature

Dans son roman Le Complot des Franciscains [6], l'écrivain américain John Sack imagine que, à la mort de saint François d'Assise, sa dépouille a été enterrée dans un lieu secret qui ne sera découvert que plusieurs siècles plus tard. Le « complot » vise à préserver le mythe des stigmates de saint François, qui ont participé à la réputation du saint et à l'expansion de l'ordre des Franciscains. Il s'agit d'une œuvre de fiction que l'auteur ne présente pas comme une thèse historique.

Le dénouement montre les stigmates de saint François comme les marques indélébiles d'une crise aiguë de lèpre[7].

[modifier] Bibliographie

  • Jean-Pierre ALBERT, Le sang et le Ciel. Les saintes mystiques dans le monde chrétien, Paris, Aubier, Collection historique. 1997, 458 p.
  • Sous la direction de Dominique de COURCELLES, Stigmates, L'Herne, Paris, Éditions de l'Herne, 2001, 272 p.

[modifier] Notes

  1. Vie de N.S. Jésus-Christ par Catherine Emmerich
  2. Claudine Leduc
  3. J.-P. Albert, 1997 : 209
  4. C. Bynum, 1987 : 291-94
  5. La femme dans le christianisme : introduction
  6. Paru en 2005. Traduction en langue française : éd. Michel Lafon, 2006
  7. Il s'agirait de lèpre lépromateuse limitrophe, qui se distingue par une seule lésion de forme ovale et de couleur rosée sur le côté, ainsi que par une diminution de la vision et des croûtes maculaires sur les mains et les pieds, p. 451