Sonate pour alto et piano de Chostakovitch

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La Sonate pour alto et piano, opus 147 de Dmitri Chostakovitch a été écrite entre le 10 juin et le 5 juillet 1975, juste avant la mort du compositeur le 9 août suivant. La sonate est dédiée à Fiodor Droujinine, le nouvel altiste venu du Quatuor Beethoven qui avait remplacé Borissovski décédé en 1968. La sonate se caractérise par un équilibre entre deux mouvements lents encadrant un mouvement central rapide et dansant qui puise son inspiration dans le folklore. L'alto, avec son registre intermédiaire proche de la voix humaine donne à la composition un caractère expressif. Le chant est souvent mélancolique et crépusculaire mais aussi par instant parodique et dérisoire.

  • Le premier mouvement, Moderato, utilise un lagage abstrait. L'alto attaque par des pizzicatos arrachés et le piano propose un thème légato. Puis les rôles s'inversent; le soliste reprend le thème du clavier et celui-ci répète en notes détachées le dessin des pizzicatos. Le monologue se poursuit : ici les instruments ne dialoguent pas vraiment, ils se livrent davantage à un jeu de questions sans réponses et jamais ne s'allient pour vibrer ensemble.
  • Le mouvement central, Allegretto, fait de larges emprunts à l'opéra inachevé de Chostakovitch, Les joueurs d'orgue d'après Gogol. On se retrouve donc en 1941, alors que le compositeur imitait et parodiait tout à la fois son aîné Prokofiev. C'est un scherzo au parfum de danse populaire russe, aux rythmes mécaniques qui se désarticulent et d'où s'échappent quelques brèves envolées lyriques.
  • Le dernier mouvement se charge de mémoire, de souvenirs. Dés le début, on reconnait très nettement la référence au premier mouvement de la sonate n° 14, dite au clair de lune de Beethoven. L'accompagnement du piano et le rythme si caractéristique du mouvement beethovénien réussissent, dans un contexte totalement différent de l'œuvre de départ, à décrire la désolation et l'obsession. Puis, tout au long du morceau, défilent des emprunts au Concerto pour violon d'Alban Berg, à la Cinquième symphonie de Beethoven, à la Quatrième symphonie de Tchaikovski, à la mélodie Le destin de Rachmaninov, à Richard Wagner, ainsi que des bribes d'œuvres de Chostakovitch lui-même, du Nez, son opéra d'après la nouvelle de Gogol, du Treizième Quatuor.

Ce dernier mouvement de toute l'œuvre de Chostakovitch est comme un dernier regard, triste et désabusé, qu'il porte sur sa propre vie.