Massacres de Machecoul

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Les massacres de Machecoul sont l'un des premiers événements de la guerre de Vendée. Ils se déroulent à partir du 11 mars 1793 à Machecoul, petit chef-lieu de district de Loire-Inférieure, centre d'un commerce de grains prospère. La ville compte alors de nombreux bourgeois, administrateurs et marchands, qui ont été les principales victimes des massacres perpétrés par les Vendéens.

Le Massacre de Machecoul, peinture de François Flameng, 1884
Le Massacre de Machecoul, peinture de François Flameng, 1884

Sommaire

[modifier] Les événements

Icône de détail Article détaillé : Guerre de Vendée.

En mars 1793, de nombreux Vendéens, refusant de satisfaire au décret de Levée en masse du 24 février 1793, se soulèvent contre la Convention nationale. Des bandes se forment, qui commettent des massacres à Noirmoutier et à Machecoul.

Le 11 mars 1793, Machecoul est assaillie par une foule venue des campagnes environnantes, venue réclamer l'arrêt de la campagne de recrutement. Le petit peuple du faubourg Sainte-Croix se joint aux assaillants, afin d'assouvir leur rancune à l'encontre des « Messieurs ». La garde nationale est débordée, et des coups de feu partent de ses rangs. Elle est mise en déroute et plusieurs républicains sont tués par les paysans. Parmi les victimes figure le curé constitutionnel Letort.

Les événements prennent cependant une tournure bien plus dramatique vers la fin du mois de mars. L'exécution à Pornic de 250 insurgés capturés la veille, dont beaucoup venaient de Machecoul, ravive la fureur des paysans. Lucas de la Championnière, témoin visuel, fait la description suivante :

« On établit à Machecoul une espèce d'administration sous le nom de Comité (...). C'est devant ce tribunal qu'on conduisait les patriotes : Souchu président les condamnait à mort sans les entendre ; il y eut à ce sujet de grands débats entre les gens plus humains et le président du comité aidé de sa cohorte. La plupart ne désiraient pas la mort des prisonniers ; on voulait seulement les mettre en lieu de sûreté pour les empêcher de correspondre avec l'ennemi ; les égorgeurs furent les plus forts. Cependant quelques paroisses parvinrent à ravoir leurs patriotes ; plusieurs, par suite, furent remis en liberté et se sauvèrent à Nantes ; mais les malheureux retenus à Machecoul y furent horriblement massacrés. On les attachait tous ensemble par les bras : cette chaîne qu'on appelait le chapelet, était conduite sur le bord d'une douve, dans la cour du château ; après quelques coups de fusil qui ne blessaient qu'un petit nombre, les autres entraînés par leur chute étaient percés à coups de piques et souvent à demi-morts précipités dans la douve.[1] »

Souchu était un ancien procureur fiscal de seigneuries. Présent, Charette, dont l'autorité n'était pas encore assise à cette date, ne semble avoir rien tenté pour arrêter les massacres. Ceux-ci durèrent environ un mois, jusqu'à l'entrée dans Machecoul, déserté par les insurgés, de 3 000 soldats commandés par Beysser. Dénoncé et capturé, Souchu fut décapité à la hache.

Le nombre total des morts est inconnu. Le procureur syndic du district de Montaigu, Goupilleau, parle de 575 victimes, allégation impossible à vérifier. D'autres évaluations parlent de 400 à 800 morts. Jean-Clément Martin considère, pour sa part, qu'il y a eu au minimum 160 victimes.

[modifier] Les suites

Les massacres de Noirmoutier et surtout de Machecoul font la plus pénible impression. La petite ville est proche de Nantes, ses notables patriotes ardents, bien connus des Nantais. Souchu, ancien procureur fiscal des Charette et des Briords, en massacre un nombre indéterminé - de cent soixante à huit cents selon les historiens - durant la quarantaine de jours qu'il tient la ville. Il laisse l'abbé Prioul, figure exaltée de moine ligueur, célébrer une messe d'action de grâces à proximité "de monceaux de cadavres dépouillés de leurs vêtements, et demeurés par ordre sans sépultures".

Les patriotes vendéens, notamment les notables républicains, fuient les pays insurgés et affluent vers les grandes villes voisines, à Nantes, Angers, Saumur, etc., où leurs récits nourrissent la peur.

[modifier] Rapport de Wieland

Le colonel Jean-Conrad Wieland (1754-1794), qui reprend Machecoul, fait le rapport suivant:

« On compte qu'ils ont égorgé plus de quatre cent patriotes de Machecoul et des environs. Nos gardes nationaux ont été contempler avec horreur une fosse où, le matin même, on venait de joindre neuf victimes qui y étaient entassées. Quelques cadavres n'étaient pas entièrement couverts, ce qui fit naître l'idée de les exhumer. On trouva sur eux des marques de vengeance la plus cruelle et la plus féroce ; des femmes s'étaient permis d'y commettre des indécences que l'on ne peut exprimer. On les garrottait ensemble et on les fusillait. Ensuite, détachant leurs liens, on promettait la vie à ceux qui pouvaient se relever, mais bientôt ceux qui faisaient des efforts pour se séparer des tas de morts et des mourants furent achevés à coups de pique et de crosse de fusil parmi les cris des cannibales et des anthropophages qui se repaissaient de leurs douleurs et de leur sang. »

[modifier] Notes et références

  1. Pierre-Suzanne Lucas de la Championnière, Mémoires sur la guerre de Vendée, Plon, Paris 1904. Reprint La guerre de Vendée au pays de Charette, Les éditions du bocage, Cholet 1994

[modifier] Bibliographie

  • Albert Soboul (dir.), Dictionnaire historique de la Révolution française, Quadrige/PUF, 1989, p. 697-698
  • Jean-Clément Martin, Contre-Révolution, Révolution et Nation en France, 1789-1799, Le Seuil, collection Points, 1998
  • Jean-Clément Martin, Violence et Révolution. Essai sur la naissance d'un mythe national, Le Seuil, 2006, p. 158-162
  • Roger Dupuy, La République jacobine. Terreur, guerre et gouvernement révolutionnaire, 1792-1794, tome 2 de la Nouvelle histoire dela France contemporaine, Le Seuil, collection Points, 2005
  • Woell, Edward J., Small-town martyrs and murderers. Religious revolution and counterrevolution in western France, 1774-1914. Marquette studies in history no. 1. Marquette University Press, 2006, 292 pages
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