Métapolitique

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La métapolitique est une stratégie qui « consist[e] à agir dans le champ idéologique et culturel, préalablement à la prise du pouvoir effectif (politique)[1] ». Elle a été développée notamment par les penseurs de la Nouvelle Droite durant les années 1970.

Cette stratégie consiste en une diffusion dans la collectivité et dans la société civile de valeurs et d'idées (ou d'« idéologèmes ») en excluant tout moyen ou toute visée politicienne, comme toute étiquette politique, mais selon une visée de « grande politique » (Nietzsche), c'est-à-dire de recherche d'un impact historique.

La métapolitique se situe en dehors et au-dessus (meta) de la politique « politicienne », laquelle – aux yeux de ses promoteurs – serait devenue théâtrale et ne constituerait plus le lieu de la politique. La stratégie métapolitique vise à diffuser une conception-du-monde (Weltanschauung) de sorte que les valeurs de cette dernière acquièrent dans l'histoire une portée et produisent un impact à long terme. Cette stratégie est incompatible avec l'ambition de détenir le pouvoir, d'« être dans » le pouvoir à court terme. Se voulant polyvalente, la métapolitique doit s'adresser aux décideurs, aux médiateurs, aux diffuseurs de tous les courants de pensée, auxquels elle ne dévoile pas forcément l'ensemble de son discours. La métapolitique diffuse aussi bien une sensibilité qu'une doctrine ; elle se fait culturelle ou idéologique selon les circonstances.

La théorisation de la métapolitique a surtout été l'objet du Groupement de recherche et d'études pour la civilisation européenne en France, avec les travaux d'Alain de Benoist, Jacques Marlaud ou Pierre Le Vigan.

Elle s'inspire notamment de la réflexion du penseur communiste italien Antonio Gramsci qui, dès les années 1920-1930, fit de la guerre culturelle menée par des « intellectuels organiques » une précondition du succès de l'action politique sur le long terme.

« La théorie gramscienne diverge fondamentalement du marxisme classique qui réduit la société civile à l'état de simple infrastructure économique. Pour elle, c'est l'ensemble de la culture, dont l'économie n'est qu'un secteur, qui est en jeu dans la lutte pour le pouvoir. La culture constitue l'infrastructure qu'il faut investir ou subvertir par des moyens intellectuels avant même de s'attaquer au pouvoir politique[2]. »

Sans renoncer à la métapolitique, Alain de Benoist relativise aujourd'hui l'importance du pouvoir intellectuel et du combat des idées face à d'autres facteurs de changements contemporains tels que les progrés de la technique :

« Bien entendu, on peut se demander si, dans le monde où nous sommes, les idées peuvent encore jouer un rôle comparable à celui qu’elles ont eu dans le passé. Le temps où les intellectuels détenaient, au moins dans certains pays dont la France, une véritable autorité morale est visiblement passé. L’Université elle-même a beaucoup perdu de son prestige, au profit du système médiatique. Or, les grands médias, à commencer par la télévision, ne sont guère aptes à faire passer une pensée complexe. Dans le même temps, il est clair que les transformations sociales les plus décisives sont aujourd’hui induites, non par les instances politiques classiques, mais par l’évolution des technologies. Il n’en reste pas moins que les idées ont toujours de l’importance, car elles influent sur les valeurs et les systèmes de valeurs auxquels se réfère la société globale. La multiplication des réseaux, qui est un des phénomènes les plus caractéristiques de notre époque, peut contribuer à leur diffusion[3]. »

[modifier] Notes et références

  1. Article « Métapolitique », dans Erwan Lecoeur, Dictionnaire de l'extrême droite, Paris, Larousse, « À présent », 2007, p. 202-203.
  2. Jacques Marlaud, « Métapolitique : la conquête du pouvoir culturel. La théorie gramscienne de la métapolitique et son emploi par la Nouvelle droite française », Interpellations. Questionnements métapolitiques, Dualpha, 2004, p. 121-139.
  3. Extrait de l'entretien d'Alain de Benoist donné à la revue The Occidental Quarterly (repris dans C'est-à-dire, vol. 1, Les Amis d'Alain de Benoist, 2006, pp. 181-183).
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