Liz McComb

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Liz McComb est une chanteuse, compositrice et pianiste américaine de gospel et de spirituals, de blues, de jazz et de soul, née le 1er décembre 1952 à Cleveland (Ohio), surnommée « la pasionaria du gospel ».

Sommaire

[modifier] Biographie

[modifier] Des racines dans la patrie du gospel

Elizabeth McComb est née le 1er décembre 1952 à Cleveland (Ohio) dans une famille afro-américaine originaire du Mississippi Elle est la sixième parmi sept enfants. Son père, ouvrier d’usine, est décédé quand elle était petite. Sa mère, très religieuse comme toute la famille, deviendra prédicatrice et pasteur d’une église pentecôtiste. Trois de ses sœurs forment un groupe vocal baptisé The Daughters of Zion, très populaire dans les églises locales. Beaucoup plus tard, elles accompagneront occasionnellement Liz McComb dans ses concerts.

Liz commence à chanter dès l’age de trois ans. Chez elle on écoute principalement les grandes voix du gospel : The Staple Singers, Sister Rosetta Tharpe et surtout Mahalia Jackson qui devient vite son idole et son modèle, dont elle apprend et reprend le répertoire par cœur. En même temps son unique frère, qui est devenu trompettiste, lui révèle les grandes figures du jazz, de Louis Armstrong à Charlie Parker et Max Roach en passant par Nat King Cole et Sarah Vaughan. Liz a étudié le violon, mais l’a vite délaissé au profit du piano, «sur lequel son cœur est parfaitement accordé», dit-elle. Elle l’apprend en autodidacte, et finira par sauter le pas sur un coup de tête, remplaçant un soir son pianiste au pied levé, pour devenir progressivement l’une des meilleures chanteuses-pianistes de sa génération.

Encore adolescente, elle intègre l’école puis la troupe du centre culturel Karamu House Theater. Elle en profite pour étudier l’histoire et la culture de la communauté afro-américaine. C’est l’époque de la lutte pour les droits civiques, qui marquera profondément sa conscience et sa vie entière.

[modifier] Ses débuts dans la chanson

Tout le monde la complimente depuis toujours sur sa voix et elle rêve fugitivement de devenir une star à Broadway. Elle part à New York et postule à quelques auditions pour des revues et comédies musicales. Soutenue par sa cousine Annie Moss, elle est recrutée dans le groupe The Jean Austin Singers, qui participera aux tournées européennes de la fameuse revue itinérante «Roots of Rock’n’Roll». Sans jamais rien perdre de la ferveur, de l’intimité, du naturel et de la spontanéité du chant dans les églises – elle ne cessera jamais de s’y ressourcer – voilà Liz propulsée sur les grandes scènes internationales où elle réussira à transcender face au public une grande timidité. Tournant régulièrement en Allemagne, en Espagne, en France et en Suisse, elle va y côtoyer désormais des « monstres sacrés », pour lesquels elle sait si bien « chauffer la salle » en assumant la première partie de leurs concerts, comme Bessie Griffin ou Helen Humes, Luther Allison ou B. B. King, James Brown, Ray Charles, Memphis Slim ou Taj Mahal, Randy Weston, etc.

[modifier] La période européenne

Séduite par l’Europe, elle s’y est «posée» comme un oiseau migrateur, retournant toujours plusieurs fois par an à son bercail immuable : la petite église familiale de Cleveland où elle prend le soin de laisser ignorer à chacun son succès croissant sur l’autre rive de l’Océan. Elle séjourne d’abord en Suisse où elle fait sensation au Festival de Montreux. Puis elle choisit Paris comme résidence principale. Elle y rencontre notamment Maurice Cullaz, célèbre critique de jazz et pionnier de la découverte du gospel par l’Europe, qui repère immédiatement en elle un renouveau de cette musique. Sous son impulsion, Liz McComb fonde à Paris l’excellent mais hélas éphémère quatuor « Psalms », avec Jerome Van Jones, Lavelle McKinnie Dugan et le regretté Gregg Hunter, dont la mort tragique, peu après celle de sa femme, des suites du sida, la plonge dans une profonde dépression. Elle s’éloigne alors de la scène. La suite, elle l’a racontée au musicologue Bill Carpenter pour l’important article qu’il lui a consacré dans sa magistrale « Gospel Music Encyclopedia » : Tant pis si la plupart des gens ne me croient pas mais Gregg est venu me rendre visite ; j’étais sur mon lit en train de regarder la télévision, j’avais une main posée sur ma tête et soudain, ma main s’est déplacée, indépendamment de ma volonté. Gregg était passé me dire adieu.

[modifier] Une rencontre et un déclic

Profondément mystique, Liz McComb vit intensément sa vie personnelle et publique, intime et artistique, selon des règles et des « signes » très éloignés de toute logique rationnelle. Curieusement, cet événement « miraculeux » qui la poussée à revivre, donc à chanter à nouveau, coïncide avec la rencontre d’un personnage qui est presque en tout point aux antipodes de sa personnalité. Athée et libre-penseur, ancien militant trotskyste devenu fortuné un peu par hasard, le producteur français Gérard Vacher succombe au chant de Liz McComb au point de lui consacrer l’essentiel de sa vie. En peu de temps, cette relation étrange, à la fois fusionnelle et perpétuellement conflictuelle, va très vite faire de Liz McComb ce qu’elle aurait pu devenir bien avant : une superstar du gospel, au moins aussi célèbre comme telle que le fut son idole Mahalia Jackson.

[modifier] Entre gloire et piété

La quadragénaire Liz McComb apprend à vivre une double vie. D’un côté, elle fait salle comble dans toutes les grandes salles parisiennes, au Casino de Paris (où elle est la seule chanteuse afro-américaine à obtenir le même succès que jadis Joséphine Baker) comme à l’Olympia où son triomphe rappelle ceux de Jimi Hendrix ou de Frank Sinatra). Elle ne s’en émeut pas outre-mesure, le lendemain elle reprendra l’avion incognito vers la minuscule église de sa maman à Cleveland, où elle redeviendra simplement ce qu’elle est vraiment : une chanteuse de gospel parmi tant d’autres. Entre l’enthousiasme impatient d’un impresario-fan qui veut faire d’elle une superstar et son propre désir d’exprimer sa foi en restant avant tout une religieuse militante, Liz McComb ne fera que renforcer sa personnalité et saura très vite y retrouver un certain équilibre. Son caractère très trempé l’empêche définitivement de succomber au «péché », aux tentations faciles de la gloire et du succès.

[modifier] L'apport d'un héritage

Surtout, Liz McComb a parfaitement conscience d’être l’une des rares héritières d’un fabuleux patrimoine culturel et musical. Dès ses premiers disques personnels elle s’est fait (sans le vouloir vraiment) une spécialité d’interpréter de façon très originale les plus anciens « negro spirituals », ceux du temps de l’esclavage. Elle est dans sa génération l’une des dernières à connaître, à savoir interpréter sans les dénaturer ces « chants de liberté » parce que l’histoire de sa famille en fait pour elle un répertoire absolument évident et naturel. C’est ce qui fait l’importance historique de Liz McComb : au XXI° siècle elle est peut-être la seule chanteuse dont la famille semble lui avoir légué intact l’héritage des chants religieux africains-américains du XIX° siècle – peut-être même du XVIII°, dont semble dater au moins une de ses chansons favorites, « Sinner, Please ». Cela n’empêche pas Liz McComb de faire le grand écart entre le passé et le futur, de composer à tour de bras, et au cours des années 1990, de s’imposer par ses propres chansons, aux paroles toujours très religieuses, mais dont la musique s’imprègne sans aucune réticence de toutes les tendances contemporaines : soul, funk, rap, etc.

Elle est invitée dans tous les festivals et elle voyage beaucoup, de plus en plus loin. Elle découvre ainsi la réalité de l’Afrique de ses ancêtres, que préfèrent ignorer la majorité des Afro-Américains. Elle ne sait pas d’où viennent ses ancêtres, mais elle se découvre d’innombrables cousins lors de ses tournées au Congo, en Côte d’Ivoire ou au Sénégal. Cette découverte d’une extrême pauvreté et d’une extrême dignité la font réfléchir sur le sens de son engagement et de ses chansons. « What Happened to the Love ? » exprime bien cette interrogation.

[modifier] L'arrivée du succès américain

Liz McComb, européenne depuis vingt ans, est alors presque inconnue aux Etats-Unis. Pourtant, elle représentera les États-Unis à Bethléem, au concert organisé pour le 2000 anniversaire de Jésus ! D’autres concerts, en Palestine et au Liban, l’ont convaincue de devenir avant tout une « messagère de la paix », et une autre chanson personnelle, « The Peacemakers », deviendra désormais son antienne, elle le chantera partout, avec d’innombrables chorales.

C’est alors que la vie musicale de Liz McComb connaît une parenthèse assez stupéfiante. Comme poussée par un pressentiment, elle s’envole vers La Nouvelle-Orléans pour y enregistrer un disque très différent de tout ce qu’elle a fait jusque là. Prémonition ou simple hasard, chacun est libre d’en juger : « Spirit of New Orleans », enregistré hâtivement avec quelques-uns des meilleurs musiciens de la place, peut être écouté comme un vrai testament musical de cette ville avant la catastrophe de Katrina.

Liz McComb se passionne aussi pour les chants et les tambours traditionnels des Caraïbes, en particulier ceux de la Guadeloupe, convoqués à ses concerts des années 2006-2007, et présents dans la trilogie de cds qu’elle entame sous le titre : « Soul, Peace & Love ». Liz McComb s’affirme ainsi comme l’instigatrice du « global gospel », pour reprendre l’expression de journalistes américains. Ce concept inventé pour elle reflète surtout le fait que Liz McComb est devenue la plus « mondialisée » des chanteuses de gospel. Elle est la seule de sa génération qui a su échapper, comme l’avait fait jadis son idole, son modèle Mahalia Jackson, au nationalisme étroit qui prétendait faire du gospel une musique exclusivement américaine.

Son neveu, Frank McComb, est lui aussi musicien - pianiste et chanteur.

[modifier] Discographie