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Je crois que c'est les trajets en voiture que je détestais le plus, car les routes ici sont droites et tranquilles, et il y a quelque chose de singulièrement déprimant (tu ne peux pas t'en rendre compte, puisque tu n'as jamais été marié) à savoir qu'on est en train de devenir un de ces couples de quadras qu'on s'était promis justement de ne jamais devenir, qui roulent pendant des heures côte à côte, les yeux fixés sur la route, sans un mot à se dire. Plusieurs fois j'ai failli m'écrier : "Oooh, regarde ! Des vaches !", rien que pour briser ce silence lugubre. Bon, je ne suis pas allée jusque-là, mais tu vois le tableau.

Jonathan Coe - Le Cercle fermé (éd. Gallimard 2006, p. 285)

[modifier] s:Jonathan Coe - Le Cercle fermé

Je crois que c'est les trajets en voiture que je détestais le plus, car les routes ici sont droites et tranquilles, et il y a quelque chose de singulièrement déprimant (tu ne peux pas t'en rendre compte, puisque tu n'as jamais été marié) à savoir qu'on est en train de devenir un de ces couples de quadras qu'on s'était promis justement de ne jamais devenir, qui roulent pendant des heures côte à côte, les yeux fixés sur la route, sans un mot à se dire. Plusieurs fois j'ai failli m'écrier : "Oooh, regarde ! Des vaches !", rien que pour briser ce silence lugubre. Bon, je ne suis pas allée jusque-là, mais tu vois le tableau.

Jonathan Coe - Le Cercle fermé (éd. Gallimard 2006, p. 285)

[modifier] s:Madame de Staël - Corinne ou l'Italie

En vain Oswald aurait voulu se le cacher, il fut vivement heureux en recevant cette lettre ; il entrevit un avenir confus de jouissances et de bonheur ; l' imagination, l' amour, l' enthousiasme, tout ce qu' il y a de divin dans l' âme de l' homme, lui parut réuni dans le projet enchanteur de voir Rome avec Corinne. Cette fois il ne réfléchit pas, cette fois il sortit à l' instant même pour aller voir Corinne, et, dans la route, il regarda le ciel, il sentit le beau temps, il porta la vie légèrement. Ses regrets et ses craintes se perdirent dans les nuages de l' espérance ; son coeur, depuis long-temps opprimé par la tristesse, battait et tressaillait de joie ; il craignait bien qu'une si heureuse disposition ne pût durer ; mais l' idée même qu'elle était passagère donnait à cette fièvre de bonheur plus de force et d' activité.

Madame de Staël - Corinne ou l'Italie (livre IV, ch premier) (1807)

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[modifier] s:Curzio Malaparte – La Peau

Assis sur le seuil des taudis, les gens nous regardaient en silence, nous suivant longuement des yeux: c'étaient des enfants presque nus, c'étaient des vieillards blancs et transparents comme des champignons de cave, c'étaient des femmes au ventre enflé, au visage hâve, couleur de cendre, des jeunes filles pâles et décharnées, aux seins flétris, aux hanches maigres. Autour de nous ce n'était qu'un étincellement d'yeux dans la verte pénombre, un éclat de rires muets, un éclair de dents, un mouvement de gestes silencieux: ces gestes fendaient cette lumière d'eau sale, cette lumière spectrale d'aquarium qui est la lumière des ruelles de Naples au coucher du soleil. Les gens nous regardaient en silence, ouvrant et refermant leur bouche à la façon des poissons.

Curzio Malaparte (1898 – 19/07/1957) – La Peau" (1949), traduit de l'italien par René Novella. (Copyright Editions Denoël – Folio 1989).

[modifier] s:Béranger – Le petit homme gris

LE PETIT HOMME GRIS

Air: Toto, Carabo

Il est un petit homme
Tout habillé de gris,
Dans Paris,
Joufflu comme une pomme,
Qui, sans un sou comptant,
Vit content,
Et dit: Moi, je m'en...
Et dit: Moi, je m'en...
Ma foi, moi, je m'en ris !
Oh ! qu'il est gai (bis) le petit homme gris !

Pierre-Jean de Béranger (1780 -16/07/1857) – Chansons

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