Lionel Marchetti

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Lionel Marchetti, né en 1967, est un compositeur français de musique concrète.

Sommaire

[modifier] Biographie

Lionel Marchetti, compositeur de musique concrète, est né en 1967. Il a composé au CFMI de l'Université Lumière Lyon 2 entre 1989 et 2002, où il anime également des ateliers autour de l'art du haut-parleur, du son enregistré, de la musique concrète, et ceci de façon pratique comme théorique, depuis 1990. Il a composé au Groupe de recherches musicales de Paris (INA-GRM) depuis 1993, ainsi que dans son studio personnel. Il a également travaillé à La Muse en Circuit, à Alfortville ; au COREAM de Grenoble ; au Collectif et Compagnies d'Annecy ; au GRIMM de Marseille ainsi qu'au studio CESARE de Reims.

Lionel Marchetti se consacre également l’improvisation (dispositif analogique avec microphones divers, feed-back, ondes radiophoniques, magnétophone à bande magnétique, haut-parleurs modifiés…) avec Jérôme Nœtinger (électronique, magnétophone à bande), en duo, depuis 1993, tout comme avec le collectif Le Cube (mélangeant images cinématographiques, lumières et sons travaillés en direct : Christophe Auger, Étienne Caire, Christophe Cardoen, Xavier Quérel, Jérôme Noetinger, Gaëlle Rouard) qui propose une performance marquante de 12 heures : Midi/Minuit. Il a joué avec de nombreux musiciens de la scène improvisée, tant électronique que instrumentale, en France, en Europe, au Japon et en Amérique.

Il collabore également avec la chorégraphe/musicienne et danseuse Japonaise Yôko Higashi (danse Butô) depuis 2003 pour un duo mélangeant corps et électricité… (Cf. extraits vidéos sur You Tube).

Ses compositions de musique concrète, saluées par des compositeurs comme François Bayle, Michel Chion, Denis Dufour, Luc Ferrari, Ivo Malec ou Christian Zanési, sont éditées dans divers labels, en France et à l'étranger : Metamkine (France), Erewhon (Belgique), Goundfault (USA), Intransitive recordings (USA), Corpus Hermeticum (Nouvelle Zélande), Groob (Allemagne), Musica Genera (Pologne), Fringes (Italie)… Distribution en Europe : Metamkine.com

Il travaille régulièrement avec Olivier Capparos à la réalisation d’Ateliers de Création Radiophonique pour les ACR de France Culture, depuis 1992, ainsi que sur nombre de projets liés à la voix et son interprétation haut-parlante. ACR Sing me to sleep : http://reseau.erasme.org/article.php3?id_article=233

De 2003 à 2007, il a réalisé une première résidence d'artiste via Internet, invité par le centre ERASME, dans de nombreux collèges du Rhône ; les travaux de cette résidence sont consultables sur http://musique.laclasse.com.

Depuis 1999, il travaille également pour des installations sonores, le plus souvent avec Jérôme Nœtinger, mettant en scène, comme une extension invisible les haut-parleurs, avec du papier, de l'eau, du lait, de la terre... ... installations sonores présentées dans divers festivals et galeries comme : Musica Genera/Musée d'Art contemporain de Sceszin (Pologne); Festival Musique Action (Vand'Œuvre-les-Nancy); Musica (Berlin); Le 102 (Grenoble); Among Others Tree/avec Peter Morrens (Vienne/Autriche); Galerie Mathieu (Lyon); Hôpital Le Vinatier (Lyon)...

Parallèlement, il poursuit un travail d’écriture poétique (revue internet lampe-tempete.fr) ainsi qu’une réflexion théorique sur la musique concrète et l'art du haut-parleur, en tant qu'artiste praticien du genre, poursuivant en ce sens la tradition de pensée de Pierre Schaeffer, de Michel Chion ou de François Bayle, eux-mêmes compositeurs et théoriciens d'un genre. Il a notamment écrit deux essais : La musique concrète de Michel Chion (1998), et Haut-parleur, voix et miroir… (2003) (CF Biblio.).

Pour définir sa musique, tant composée que improvisée, où la dimension corporelle tient une place importante (L.M. a dansé avec la compagnie universitaire Reylanse en 1986/1991), il est possible de reprendre l'adage de l'écrivain Kenneth White : « Concret ou abstrait ? J'aime l'abstrait où subsiste un souvenir de substance, le concret qui s'affine aux frontières du vide. »

Site internet : http://forets.free.fr/

[modifier] Discographie

[modifier] Musiques concrètes

  • Mue (la demeure brillante) CD Metamkine - 1993
  • L'incandescence de l'étoile, CD Divided - USA - 1994, CD Stichtingmixer - Amsterdam - Réédition (version 2002/2003) - 2003
  • Roger de La Frayssenet (Kitnabudja town), CD Metamkine - 1996
  • Dans la montagne, CD La Muse en Circuit/SACEM - Hörspiele 2 - 1996, CD Chloérecords-USA/réédition - 2003
  • La grande vallée, CD Metamkine - 1997
  • L'œil retourné, CD Séléktion (avec Ralph Wehowsky) - Allemagne - 1999
  • Knud Un nom de serpent (le cercle des entrailles), CD Intransitiverecording - USA - 2001
  • Sirrus (Micro-climat, Passerelle, Sirrus), CD Auscultareresearch - USA - 2001
  • Portrait d’un glacier (Alpes, 2173m), CD Ground Faultrecordings - USA - 2001
  • Riss (l'avalanche), CD Erewhon - Belgique - 2002
  • Train de Nuit (Nord 3.683), CD Metamkine - 2002
  • Les fleurs tombent (poème interprété par Olivier Capparos), CD compilation - Vand' Œuvre les Nancy 2002
  • Les 120 jours (en co-écriture avec Michel Chion et Jérôme Nœtinger), CD Fringesrecording - Italie - 2003
  • A rebours, CD Musée d'art contemporain de St. Francisco/ Auscultare -2003
  • Docteur Kramer/Zizi - (Zizi en co-écriture avec Emmanuel Petit), CD - Musica Genera - Pologne - 2005
  • Red Dust - 3 mini CD Crouton records - USA - 2006 (CD numéro 3 en co-écriture avec Yôko Higashi)
  • Mementum/Momentum (table de cire) (en co-écriture avec Olivier Capparos) - CD CFMI Lyon 2006
  • Noord Five Atlantica - CD Cesare - 2006
  • Disque d'archives (en co-réalisation avec des enfants d'écoles élémentaires et collèges...) - CD Erasme - musique.laclasse.com - 2007
  • Hatali Atsalei (l'échange des yeux) (en co-réalisation avec Seijiro Murayama), CD Intransitiverecording - USA - 2007
  • Livre des Morts (en co-écriture avec Olivier Capparos) - CD Entr'acte - Angleterre - 2008
  • Adèle et Hadrien (le livre des vacances) - double CD Optical Sound - 2008

[modifier] Improvisation

  • Duo avec Jérôme Noetinger, CD Tulpas - Compilation Selektion - Allemagne - 1998
  • Trio - avec J. Noetinger et Mathieu Werchowski, CD - Corpus Hermeticum - New Zeland - 2000
  • Voice Crack/ J.Nœtinger/L.Marchetti, CD Double Wash - Grob - Allemagne - 2001
  • J. Nœtinger/L. Marchetti, CD in collection "Mort aux vaches" - Staalplaat - Amsterdam - 2001
  • Sylvain Bonvalot/Cyril Darmedru/L. Marchetti, CD -Crètes - Ishtard - Lyon - 2001
  • Peter Morrens/J.Nœtinger/L.Marchetti, CD - 28 (Memory machine) - Among others tree - Autriche - 2001
  • Sophie Agnel/J. Nœtinger/L. Marchetti, CD Rouge gris bruit - Potlach - Paris - 2001
  • Jean Pallandre/Marc Pichelin/Laurent Sassi/L. Marchetti/J. Nœtinger, Vinyle - QuintetAvant/Les clous moux - Mego - Autriche - 2002
  • Mère feu 40 têtes - Christophe Cardoen/L. Marchetti/Emmanuel Petit, CD - Absurd - Grèce - 2003
  • Jean Pallandre/Marc Pichelin/Laurent Sassi/L. Marchetti/J. Nœtinger, CD - QuintetAvant/ " " - Compilation Sonic protest - Paris - 2007
  • Jean Pallandre/Marc Pichelin/Laurent Sassi/L. Marchetti/J. Nœtinger, CD - QuintetAvant/En concert à la salle des fêtes - Editions Mego 077 - Autriche - 2005

[modifier] Musiques de films/vidéos

  • YYY de Pierre-Jean Giloux - 1990
  • Danse, Là, Sur le rivage de Claire Perrot et Lionel Marchetti - 1992
  • Abraxas de Bruno Roche - 1996/2003
  • Sur terrain humide… de Pierre-Jean Giloux - 1998
  • Lebel Woh de Pierre-Jean Giloux - 2001
  • Agence V/O de Bruno Roche - 2002
  • Livre des Morts de Eric Pellet - 2003
  • Nirrivik game de Pierre-Jean Giloux - 2003
  • XXX de Pierre-Jean Giloux - 2003

[modifier] Bibliographie

  • La musique concrète de Michel Chion, Essai, 320 pages (Préface de François Bayle, Suivi d’une discussion avec Michel Chion, par Christian Zanési) - Metamkine, 1998
  • Cries and silence / sur la musique de Michel Chion. Translation by Christine North and John Dack - Errant bodies Press and Ground Fault Recordings ; USA - 2001
  • The microphone and the hand. Translation by Patrick Mac Ginley et Matthew Marble - Foarm Magazine numéro 5 (autonomy) - foarm.artdocuments.org ; USA - 2004
  • Haut-parleur, voix et miroir… Essai technique sous forme de lettre - Revue & Corrigée - 2003
  • Lettres de Lionel Marchetti à Michel Chion et Catalogue des œuvres musicales commenté par Lionel Marchetti dans Portrait polychrome n° 8 : Michel Chion ; INA - 2005
  • Poésies diverses : 11 têtes ; 12 poèmes sur des peintures de Pierre Bonnard ; Huit caprices de Goya ; Esprit buveur… etc. dans la revue internet Lampe-tempete.fr



Citations

"Dans une composition musicale, la matière du sonore doit pouvoir se retirer. Et l’excédent de ce retrait est une grève lisse, unie mais travaillée. Un fond riche où se sont déposées des fertilités, un peu comme si au dedans de notre audition s’affirmait une vie sous-tendue, qui nous aurait été cachée par la pesanteur d’un premier reflux. Seules quelques traces et dépôts se retrouvent mis à nus, délicatement logés dans le presque rien d’un silence (...)"

Lionel Marchetti - La musique concrète de Michel Chion - éd. Metamkine - 1998 - P.203


"Ce précieux livre s'adresse au clair-écoutant, selon la belle expression d'Henri Corbin que ressuscite fort à propos Lionel Marchetti, dans cette approche clairvoyante justement, qu'il propose des musiques de Michel Chion. Ce qui va surpendre ici le lecteur c'est cette invention à deux voix, et du fait de la structure de l'ouvrage ce jeu des miroirs qui se regardent, bien sûr pour réflechir davantage. Alors va s'ouvrir pour lui tout l'espace imaginable. Celui de l'écoute en abyme, d'où remonte le souvenir des choses, de leurs apparitions-disparitions, leurs chemins qui bifurquent dans la mémoire, des phosphènes que laissent leurs traces (...)"

François Bayle - Préface de La musique concrète de Michel Chion.


"… J’aime cette possibilité que donne la musique concrète, et dont Lionel Marchetti s’empare, de recréer le jour par la nuit. Au cinéma, lorsque les pellicules étaient encore de faible sensibilité, c’est en plein jour que l’on tournait souvent les “extérieurs nuit”: une plage, un désert, une campagne. Il suffisait de mettre devant l’objectif un filtre assombrissant et bleuissant, d’attribuer les ombres sur le paysage, s’il y en avait, à la clarté de la Lune, et ça s’appelait le Day for Night. En France, on disait: la nuit américaine. Je dirai alors que la musique concrète illustre, dans bien des cas, le contraire, c’est-à-dire le “night for day”. C’est de la nuit acousmatique, de la non-visibilité des sources consubstantielle à cette musique, que naît le sentiment éclatant d’un peu de jour. Des extérieurs-jours, il y en a depuis longtemps dans la musique de Lionel Marchetti; une musique que j’aime parce qu’il y a le cosmos autour, le ciel au-dessus, la vallée parfois au-dessous, des voix en nous - ici des voix d’enfants qui nous semblent les nôtres, un horizon au loin. Le cosmos est mystérieux, cela veut dire non qu’il nous cache quelque chose, mais qu’il nous parle. Il parle avec des accords mouvants, comme une draperie-paysage, tout au fond, cependant que des sons-événements surgissent près de nous. Dialogues, et contrastes, entre le caractère dérivant et ample des tenues lointaines - notes glissant les unes sur les autres, des plaques, des couches - et la tension des premiers plans (...) "

Michel Chion - Livret de Adèle et Hadrien (le livre des vacances) - CD Optical Sound 2008


"C’est pour cela qu’une voix enregistrée, diffusée au travers de ce masque quasi pétrifié qu'évoque l’enceinte acoustique - le haut-parleur, de son côté, comme cornet de papier est extrêmement mobile - n’en finit pas de nous parler malgré son allure fantomatique de voix sans corps. Tel un audible au visible désaccordé, la voix haut-parlante, jouissant ainsi d'une intimité sans précédent, nous communique ce non-dit qui circule entre les mots, au-delà des gestes, des postures, tout comme la permanence d'une ancienne tenue corporelle.

Mais pour vraiment faire parler le haut-parleur il ne suffit pas de s’en servir que comme émetteur, que comme lieu par où ça passe, ne fait que passer, traverser.

Il faut que celui qui l’utilise dote ses sons d’une valeur.

Cette valeur sera, par exemple, leur inoculer la fougue d’une prise de possession.

Afin que les sons aillent posséder à leur tour.

Il s’agit de créer un espace de contagion — contagion de fait mise en cache, pliée, et qui saura revenir en surface lors de futures rediffusions.

Contagion portant en elle des germes d'images.

Contagion nous inoculant cette exigence d'un au-delà de la voix.

Il s’agit, pour cela, plutôt que de simplement enregistrer une voix, ou tout autre sonore au devenir haut-parlant, de travailler à créer une subtile mise en relation. Relation entre celui ou celle qui écoute et la manifestation haut-parlante. Relation nous donnant accès, dans ces conditions, à ce que l'on peut appeler la chair de l'audible. C'est à dire à une incarnation, pour le sonore, prenant pied, véritablement, dans le monde - monde flottant ou ira se prendre l'image - quand bien même cette chair ne saurait être immédiatement palpable, en aucun cas ne se désignera sous couvert d'un soi-disant projet qui, naïvement, consentirait à sa venue, à son audibilité..."

Lionel Marchetti - Haut-parleur, voix et miroir - Revue et Corrigée - Numéro 58, décembre 2003 - P.58


"Jeudi 14 décembre, 20h au Théâtre du Saulcy, on donnait Les 120 jours, pièce de musique concrète pour 16 haut-parleurs, de Michel Chion, Lionel Marchetti et Jérôme Noetinger, présentée, jouée par ces deux derniers. C’est le noir dans la salle où ont pris place en assez grand nombre des spectateurs. Dans la pénombre, deux paires de mains se relaient selon un rythme connu de leurs seules propriétaires – musiciens ou ingénieurs du son ? Disons artistes- sur un clavier, ou plutôt une console de mixage qui me fascine comme me fascine tout ce que je ne connais pas. L’envie de connaître, vous connaissez ? Des diodes vertes escaladent les rampes, parfois jusqu’au rouge (là je me protège les tympans), puis dégringolent, épousant le rythme, transmis par seize haut-parleurs, de bribes de musique, de morceaux, de lambeaux de vie, de sons, de bruits, auxquels je n’associe pas forcément des références connues ; des rafales d’informations auditives me clouent parfois dans mon siège : staccati, rafales de mitraillettes, voix qui s’interpellent, cris de détresse de femme, aboiements, voix fraîche d’un enfant, craquements, crachotements d’une radio ancienne…expérience étrange et « secouante », sensations plus ou moins agréables d’un corps à corps avec la matière sonore. Même les sons parasites produits par les spectateurs et jusqu’au grattement de mon crayon sur le petit carnet noir font partie de cette installation sonore que je visite, immobile pendant une heure. J’ai tenu une heure sur les deux que dure le concert, malgré l’injonction maintes fois réitérée « Ecoutez ! », jusqu'à la fracture, à la saturation, jusqu’à me dire que deux heures, c’est trop long pour mes oreilles encore trop sages, sans doute encore privées des outils culturels et imaginaires voulus pour envisager ce genre de musique... concrètement. Et le silence, dehors, me paraît alors musique bien douce. « Staccati t’a quittée » ajouterait le regretté Bobby Lapointe."

Anne de Rancourt - à propos des 120 jours - 2006