Expédition en Corée du contre-amiral Roze

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L'expédition du contre-amiral Roze, en 1866, marque l'échec de l'unique tentative française de colonisation de la Corée.

Sommaire

[modifier] Une initiative personnelle du représentant de la France en Chine

Après l'exécution de plusieurs prêtres catholiques français en Corée début 1866 – dont le père Petitnicolas – le père Ridel, un des trois derniers prêtres français catholiques en Corée avec les pères Calais et Féron, rencontre le contre-amiral Pierre-Gustave Roze, commandant de la flotte française d'Extrême-Orient.

Roze informe Henri de Bellonnet, représentant de la France en Chine qui, de sa propre initiative, adresse au roi de Corée un message dans lequel il annonce que "le gouvernement de sa majesté (Napoléon III) ne peut laisser impuni un aussi sanglant outrage" que la mort des prêtres français. Bellonnet fait savoir que, en conséquence, la France va envahir la Corée :

"Le jour où le roi de Corée a porté la main sur nos malheureux compatriotes a été le dernier de son règne. Dans quelques jours, nos forces militaires vont marcher à la conquête de la Corée et l'empereur, mon auguste souverain, a seul aujourd'hui le droit et le pouvoir de disposer selon son bon plaisir du pays et du trône vacant".

Roze répond à Bellonnet que la mort des neuf prêtres français sera vengée "en tuant 9 000 Coréens".

[modifier] Les opérations militaires

[modifier] Une avancée initiale rapide en raison de la stratégie de repli des Coréens

Les Américains ayant décliné la proposition de Bellonnet de mener une expédition commune franco-américaine, les opérations ont été exclusivement conduites par les Français.

Après une mission de reconnaissance en septembre 1866, l'expédition française dirigée par le contre-amiral Roze quitte Chéfou le 11 octobre 1866. Forte de 600 hommes, y compris le père Ridel, elle comporte une frégate (la Guerrière), deux corvettes à hélice, deux avisos et deux canonnières.

Profitant du repli des Coréens, les troupes françaises prennent la ville de Kapkotchi le 14 octobre. Après une forte résistance des Coréens, elles entrent dans Kangwha, désertée, le 17 octobre. Les Français s'emparent d'un important butin, constitué de 23 caisses de lingots d'argent, de plusieurs autres caisses de lingots d'or, de laques et de jade, ainsi que de 297 volumes manuscrits et 45 volumes imprimés.

Le 19 octobre, Roze envoie un nouveau message au roi de Corée où il demande que, d'une part, lui soient remis "les trois ministres qui (ont) le plus contribué à la mort" des missionnaires français et, d'autre part, qu'un ministre plénipotentiaire soit désigné pour négocier un traité entre la France et la Corée ; "sinon, il rendait le gouvernement de Corée responsable de tous les malheurs qu'entraînerait la guerre".

Le roi de Corée juge la lettre arrogante et profite du répit ainsi donné pour préparer la résistance coréenne, sous le commandement du général Ri Kyong-ha (appelé Yi Kyong-ha en Corée du Sud).

[modifier] Une succession d'échecs pour les troupes françaises

Peu nombreuses, les troupes françaises essuient dès lors une série d'échecs jusqu'à devoir quitter la Corée :

- le 26 octobre, un détachement de 120 hommes, dont une cinquantaine sont tués, échoue à prendre la forteresse de Munsusansong qui aurait ouvert la route vers Séoul ;

- le 7 novembre, une nouvelle tentative pour prendre la forteresse est confiée à 160 fusiliers marins ; éventée, elle échoue dès les premières opérations ;

- alors que les Coréens ont désormais regroupé plus de 10.000 hommes, Roze décide de lever l'ancre le 11 novembre ; les troupes françaises incendient la ville de Kangwha lors de leur retraite.

Les Coréens célèbrent leur victoire et le général Ri Kyong-ha accède au rang d'adjoint au gouverneur de Séoul.

[modifier] Les conséquences

[modifier] Le désaveu de l'initiative personnelle d'Henri de Bellonnet

Malgré l'échec de la tentative française d'invasion de la Corée, Roze cherche à en dresser un bilan positif en affirmant que la mort des missionnaires français est vengée et que les opérations menées ont préparé une éventuelle attaque qui serait conduite avec des moyens militaires plus importants.

En fait, Bellonnet essuie les sévères critiques du ministère des affaires étrangères qui observe qu'il n'avait pas mandat pour déclarer la guerre et proclamer la déchéance du roi de Corée.

Pour leur part, les derniers missionnaires français en Corée quittent le pays après l'échec de l'expédition.

[modifier] Les succès coréens face aux tentatives de colonisation des Occidentaux

Pour leur part, les Coréens ont appris qu'ils pouvaient vaincre les Occidentaux, deux mois après l'échec de l'expédition du navire américain General Sherman qui avait voulu forcer les Coréens à s'ouvrir au commerce international.

[modifier] Un contentieux latent : la restitution des ouvrages pillés

Enfin, les ouvrages pillés par les Français en 1866 sont à l'origine d'un contentieux non résolu entre la France et la Corée du Sud pour la restitution de ces pièces du patrimoine national coréen. Le gouvernement sud-coréen a par ailleurs ajouté, à la liste des documents à restituer, des ouvrages qui appartenaient à la collection privée du premier ambassadeur de France en Corée, Victor Collin de Plancy, parmi lesquels le plus ancien ouvrage du monde à caractères imprimés mobiles  : le second tome du Pulcho chikchi simche yojol écrit par Kyonghan, et datant de 1377.

[modifier] Références

  • Jean-Marie Thiébaud, "La présence française en Corée de la fin du XVIIIe siècle à nos jours", L'Harmattan, 2005, pp. 20-25.

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