Edme-Samuel Castaing

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Edme-Samuel Castaing, né à Alençon en 1796 et guillotiné le 6 décembre 1823, est un fameux empoisonneur français.

Castaing fut reçu médecin à la faculté de Paris en juillet 1821. Ambitieux et dévoré de l’ardent désir de faire fortune, il était doué d’un caractère ardent et d’une fermeté qu’il poussait jusqu’à la ténacité. Il parvint à force d’application à modifier et à corriger son naturel, de façon à faire succéder une grande douceur à la pétulance et à l’opiniâtreté qu’il avait montrées dans sa première jeunesse.

S’étant adonné à l’étude des poisons, surtout des poisons végétaux, de nombreuses expériences faites sur des animaux lui avaient acquis la certitude que ces sortes de poisons ne laissent point de traces. Vers 1817, il fut accueilli avec amitié dans la famille d’un riche notaire de Paris, du nom de Ballet.

Cette famille se composait, en 1821, de six personnes : le père, la mère, un oncle, une fille mariée, et deux fils, Auguste et Hippolyte, tous deux avocats. C’était surtout avec ces deux derniers, plus jeunes que lui et sur lesquels il avait un grand ascendant, que Castaing avait contracté amitié.

La mort vint bientôt toucher cette famille : M. et Mme Ballet moururent à cinq mois l’un de l’autre. L’oncle mourut quelque temps après. Une fort belle fortune échut alors aux enfants. Dès cet instant, une plus grande intimité s’établit entre eux et Castaing. Hippolyte surtout, menacé d’une phtisie pulmonaire, s’attacha davantage à un ami qui pouvait lui être d’autant plus utile par ses connaissances en médecine. Il mourut le 3 octobre 1822, dans les bras de Castaing, lorsque un brusque accident morbide l’emporta en quatre jours.

Hippolvte avait confié à plusieurs personnes l’intention de déshériter son frère : après son décès l’on ne trouva aucun testament dans sa succession, et Castaing était en possession de cent mille francs. Des témoins déposèrent que cette somme fut donnée par Auguste Ballet pour prix du testament de son frère.

Dix-sept jours avant la mort d’Hippolyte, Castaing avait acheté dix grains d’acétate de morphine. Le 29 mai 1823, Auguste et Castaing allèrent ensemble à Saint-Cloud et descendirent à l’auberge de la Tête noire, où ils occupèrent une chambre à deux lits. Le lendemain au soir, Castaing demanda du vin chaud, dans lequel il mit du sucre et des citrons qu’il avait achetés, puis il quitta la chambre. Quand il rentra, son ami avait bu une partie du vin qui lui avait été versé, et l’avait trouvé très mauvais, très amer.

Auguste passa une nuit fort agitée : il eut des coliques, ses jambes enflèrent ; le matin, il ne put quitter le lit. Castaing au contraire, qui était resté seul auprès de son ami, se fit ouvrir les portes à quatre heures du matin, pour faire, disait-il, un tour de parc, mais dans la réalité pour aller à Paris acheter chez un pharmacien douze grains d’émétique, et chez un autre un demi-gros d’acétate de morphine. Revenu à Saint-Cloud vers huit heures, son premier soin fut de demander du lait froid pour Auguste. Le malade prit le lait, et fut saisi de violents vomissements et de grandes coliques. On se débarrassa sur-le-champ de toutes les déjections. Auguste mourut.

Tout le monde fut frappé de stupeur en voyant ce jeune homme terminer sa vie, au milieu de circonstances si extraordinaires, par une mort si subite et si effrayante. La justice informa. L’autopsie offrit les mêmes circonstances et donna lieu aux mêmes observations chez l’un et l’autre frère ; elle n’offrit toutefois aucune trace de substances vénéneuses. Plusieurs médecins célèbres déclarèrent que la mort avait pu être occasionnée par des causes naturelles, comme il était possible aussi qu’elle fût le résultat d’un empoisonnement par l’acétate de morphine. Le docteur Chaussier alla jusqu’à affirmer positivement que la mort n’avait pas été causée par le poison; car, disait-il, ou le malade l’avait rejeté, et alors le décès ne devait pas s’ensuivre ; ou il ne l’avait pas rejeté, et dans ce cas les substances vénéneuses se seraient retrouvées; car il ne s’était pas écoulé assez de temps pour qu’elles fussent absorbées.

Castaing, interrogé sur le motif qui lui avait fait acheter des poisons, répondit que c’était pour empoisonner des chiens et des chats dont le bruit l’incommodait, et avait surtout troublé son ami. On lui demanda l’emploi qu’il avait fait de ces poisons : il dit que, ne s’en étant pas servi, en voyant les soupçons qui s’élevaient contre lui, il les avait jetés dans les latrines; mais ils ne furent point retrouvés. En conséquence de tous ces faits et de toutes ces circonstances accablantes, il fut accusé d’avoir, 1° attenté à la vie d’Hippolyte Ballet  ; 2° d’avoir, de complicité avec Auguste Ballet, détruit son testament; 3° enfin d’avoir attenté à la vie d’Auguste Ballet, dont il était légataire universel.

Acquitté sur le premier chef de cette accusation, il fut condamné sur les deux autres, et fut exécuté à Paris le 6 décembre 1823. Arrivé au pied de l’échafaud, il tomba à genoux, et resta près de quatre minutes en prière. Il n’eut pas la force de se relever, et deux aides de l’exécuteur furent obligés de le soutenir pour l’aider à monter sur l’échafaud.

[modifier] Référence

  • Procès complet d’Edme-Samuel Castaing, docteur en médecine, Paris, Pillet Ainé, 1828.

[modifier] Sources

  • Ferdinand Hoefer, Nouvelle Biographie générale, t. 9, Paris, Firmin-Didot, 1855, p. 77-9.