Eau pluviale

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Vue d'un Johad au village Thathawata.
Vue d'un Johad au village Thathawata.

Eau pluviale est le nom que l'on donne à l'eau de pluie après qu'elle a touché le sol ou une surface construite ou naturelle susceptible de l'intercepter ou de la récupérer (toiture, terrasse, arbre..).

Sommaire

[modifier] Caractéristiques de l'eau de pluie

[modifier] Définitions

Analyse d'une eau de citerne de récupération d'eau de pluie[1]
pH rH2 (oxodo reduction) Dureté totale Minéralisation globale Ca2+ Na+ K+ SO42- Cl- NO3- Bactéries banales Bactéries pathogène
Avant traitement 7 à 8 28 à 29 +- 5°F (+- 50 mg de carbonate de calcium - CaCO3L +-80 mg/L 21 mg/L 1,6 mg/L 0,8 mg / litre 9,5 mg/L 9 mg/L 6 mg/L Grand nombre Parfois petit nombre
Normes maximales pour une eau potable 6,5 à 9,2 67°F 1500 mg/L 270 mg/L 150 mg/L 12 mg/L 250 mg/L 200 mg/L Absence Absence



On constate que l'eau de pluie a des caractéristiques bio-chimiques assez proche d'une eau potable et même bio-compatible sans aucun traitement. Néanmoins, il existe une relative contamination de l'eau de pluie au contact de gaz(oxydes d’azote, de soufre), de particules souvent riches en matériaux lourds et des différents aérosols relâchés par les activités humaines.

Une fois que l'eau de pluie a touché le sol, qu'elle ruisselle sur les surfaces les réceptionnant, elle est alors dénommée eau pluviale. Plus précisément, le Code civil français (article 640) considère que les eaux pluviales sont "les eaux qui découlent des fonds élevés vers les fonds inférieurs, naturellement, sans que la main de l'homme y ait contribué"[2].

[modifier] Le régime légal des eaux pluviales

En France, le régime légal des eaux pluviales et des eaux de source est déterminé par les articles 640 à 643 du Code civil français. Tout propriétaire a le droit d'user et de disposer des eaux pluviales qui tombent sur son fonds[3]. Il peut donc la récupérer, la stocker ou même la revendre. Une limite cependant à ce droit : un propriétaire peut user et disposer librement des eaux pluviales tombant sur son terrain à la condition de ne pas causer un préjudice à autrui et particulièrement au propriétaire situé en contrebas de son terrain vers lequel l'eau s'écoule naturellement[4].

Les eaux de pluie tombant sur les toits doivent donc être dirigées soit sur le propre terrain du propriétaire des constructions (recevant l'eau de pluie) soit sur la voie publique[5]. Néanmoins, il est dans le pouvoir du maire d'interdire (ou de soumettre à conditions) le rejet d'eaux pluviales sur la voie publique (la gestion des eaux pluviales et de ruissellement relève en principe du budget général de la commune financé par le contribuable local). Cette interdiction peut être inscrite dans le plan local d'urbanisme ou dans le règlement du service d'assainissement.

[modifier] Assainissement et eaux pluviales

L'établissement des réseaux d'assainissement d'une agglomération doit permettre l'évacuation correcte des eaux pluviales afin d'empêcher la submersion des zones urbanisées et d'éviter la stagnation de ces eaux particulièrement dans les points bas de l'agglomération. Il existe plusieurs types de réseau :

  • Les réseaux unitaires reçoivent, en mélange, les eaux usées, les eaux pluviales et des produits de curage des égoûts, mélange aussi appelé RUTP (Rejets Urbains de Temps de Pluie). C’est celui qui équipe la plupart des centres villes ;
  • Les réseaux séparatifs : un collecteur est dévolu au transport des eaux usées, un autre est dévolu aux eaux de ruissellement issues des eaux pluviales. Ces ouvrages sont plus récents. C'est notamment le cas pour la zone d'assainissement de Seine-amont.

[modifier] La récupération des eaux pluviales

Pratique ancestrale, la récupération de l'eau de pluie bénéficie aujourd'hui de nombreuses applications et d'innovations techniques éprouvées.

[modifier] Les systèmes de récupération

Procédé simple de filtration et de récupération d'eau de pluie à partir de pvc du commerce
Procédé simple de filtration et de récupération d'eau de pluie à partir de pvc du commerce
Le remplacement du flotteur horizontal par deux flotteurs verticaux permet d'alimenter la chasse d'eau par l'un ou l'autre des deux circuits sans nécessité de disconnexion
Le remplacement du flotteur horizontal par deux flotteurs verticaux permet d'alimenter la chasse d'eau par l'un ou l'autre des deux circuits sans nécessité de disconnexion

[modifier] Pour des usages domestiques

56% de l’eau que nous utilisons ne nécessite pas une qualité d’eau potable. L’eau de pluie filtrée est suffisante pour une utilisation industrielle (lavage de surfaces ou de véhicules, refroidissement et démoulage), collective (alimentation de blocs sanitaires, arrosage d’espaces verts) ou domestique (usages non alimentaires et non corporels). Dans le cadre des usages domestiques, la quantité d'eau utilisée pour des usages non alimentaires et non corporels se répartit comme suit :

  • WC : 35%
  • Lessive : 15%
  • Jardin : 5%
  • Nettoyage : 3%

Il y a donc un réel potentiel de substitution de l'eau potable par de l'eau de pluie (stockée et filtrée) pour ces usages.

Suite à ce constat, des systèmes de récupération des eaux pluviales ont été élaborés et sont éprouvés depuis une trentaine d'année, en particulier à l'étranger. Des systèmes de stockage-filtrage avec surpresseur permettent ainsi de récupérer jusqu'à 70 mètres cubes d'eau par an et par famille :

  • Le stockage s'effectue dans des cuves conçues avec des matériaux divers : certaines cuves sont en composés polyéthylène recyclable, d'autres sont en béton. Les cuves en béton permettent par ailleurs de réduire l'acidité de l'eau de pluie récupérée : l'eau réagit avec les composants de base de la citerne qui mettent des sels minéraux en solution et neutralisent le pH de l'eau.
  • Le filtrage peut se réaliser en deux phases : un préfiltrage de 5 à 200 microns, puis un second filtrage à 10 microns.

L'utilisation de l'eau de pluie à l'intérieur de l'habitat suppose qu'à ce système de stockage-filtrage soit associé un double réseau d'eau intérieur : l'un pour l'eau potable, l'autre pour l'eau de pluie. Pour éviter toute interconnexion entre les deux réseaux, il est recommandé d'appliquer la norme européenne NF EN 1717 qui dresse une liste générale des ensembles de protection existants et précise ceux nécessitant des travaux de normalisation supplémentaires afin de prévenir la pollution de l'eau dans les réseaux intérieurs. L'application de cette norme permet d'identifier les deux réseaux, sans risque de repiquage d'un réseau à l'autre. A cela, s'ajoute d'autres nécessaires précautions : information de non potabilité au point d’usage, impossibilité à manipuler un robinet technique sans clé spécifique.

[modifier] Pour des usages industriels ou collectifs

La récupération des eaux pluviales existe également à grande échelle. Les applications industrielles sont nombreuses : lavages de véhicules industriels, des outils de production, des sols, alimentation de WC, ... Dans le cas des collectivités, plusieurs usages sont possibles : lavage des voiries, rôle de rétention en cas de fortes pluies ou de violents orages (en Flandres belge, ces cuves de rétention sont obligatoires dans chaque lotissement).

[modifier] La position de l'Union européenne

La directive 98/83/CE du Conseil du 3 novembre 1998 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine[6] a défini, dans son article 2, les "eaux destinées à la consommation humaine". Selon la directive des eaux sont :

a) toutes les eaux, soit en l'État, soit après traitement, destinées à la boisson, à la cuisson, à la préparation d'aliments, ou à d'autres usages domestiques, quelle que soit leur origine et qu'elles soient fournies par un réseau de distribution, à partir d'un camion-citerne ou d'un bateau-citerne, en bouteilles ou en conteneurs ;

b) toutes les eaux utilisées dans les entreprises alimentaires pour la fabrication, la transformation, la conservation ou la commercialisation de produits ou de substances destinés à la consommation humaine, à moins que les autorités nationales compétentes n'aient établi que la qualité des eaux ne peut affecter la salubrité de la denrée alimentaire finale.

Mais une difficulté a néanmoins été soulignée par le législateur français, notamment lors des débats accompagnant le projet de loi sur l’eau et les milieux aquatiques examiné à l'Assemblée nationale en mai 2006[7]. En effet, le terme « domestique » employé dans la directive a été traduit différemment selon les États membres. En conséquence, nombre d’entre eux portent un jugement favorable sur l’utilisation de l’eau de pluie pour la chasse d’eau et pour le lavage du linge. Ce qui n'est pas le cas de la France.

[modifier] La position des instances sanitaires françaises

Les textes en vigueur, et au premier titre le décret 2001-1220 du 20 décembre 2001 relatif aux eaux destinées à la consommation humaine à l'exclusion des eaux minérales naturelles, a transposé la directive 98/83/CEE. Mais à sa lecture, "il n'est guère évident de savoir si l'utilisation d'une eau n'ayant pas fait l'objet d'un traitement comparable à l'eau distribuée par le réseau public d'adduction est autorisée ou non pour des usages intérieurs au bâtiment"[8]. Néanmoins, dans le cas de l'installation d'un double réseau (eau de pluie / eau potable), le Conseil supérieur d’hygiène publique de France (CSHPF) a émis un avis concernant les risques de « repiquage » du réseau d’eau potable par des personnes non informées de l'existence d'un réseau de pluie. L'utilisation de l'eau pluviale (a l'intérieur de la maison) pour les toilettes ou le lavage du linge ne peut donc normalement se faire en France, au regard des textes actuellement en vigueur (règlement sanitaire départemental). Mais les DDASS (Direction départementales de l'action sanitaire et sociale), selon les départements, accordent des dérogations pour l’installation de tels systèmes de récupération.

[modifier] Les aides à la récupération de l'eau de pluie

Des expérimentations, en faveur de la récupération pour les entreprises, sont menées avec l'aide des Agences de l'eau qui accordent certaines subventions selon les régions.

Alors qu'en Allemagne les premières subventions datant de 1986[9], ce n'est que 20 ans après, en mai 2006, qu'un encouragement fiscal a été en France voté à l'unanimité à l'Assemblée nationale (et contre l'avis du gouvernement)[10]. Cet amendement, voté en première lecture du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques instaurait un crédit d'impôt de 40%[11] (pour une dépense plafonné à 5000 euros) en faveur de l'installation de systèmes de récupération des eaux pluviales. Cette disposition a ensuite fait l'objet d'une modification par le Sénat : le crédit d'impôt à été ramené à 15% pour un plafond de dépenses moyen de 8000 euros. Ce dispositif a été amélioré en deuxième lecture à l'Assemblée nationale et adopté à l'unanimité. Cet amendement a remonté le taux du crédit à 25% pour un plafond de 8000 euros voire plus selon les situations familiales.

[modifier] Bibliographie

  • James Chéron et Alix Puzenat, Les Eaux pluviales. Récupération, gestion, réutilisation, Éditions Johanet, 2004, 124 p. (ISBN 2900086515)
  • La Ville et son assainissement: Principes, méthodes et outils pour une meilleure intégration dans le cycle de l'eau, CERTU/Ministère de l'écologie et du développement durable (cédérom).
  • Bernard Chocat et Al, Encyclopédie de l'hydrologie urbaine et de l'assainissement, Éditions Lavoisier, coll. Tec et Doc, 1997, 1124 p. (ISBN 2-7430-0126-7)

[modifier] Notes

  1. Source : Terreau - "Les amis de la Terre" - Mons - Belgique
  2. Les eaux pluviales. Récupération, gestion, réutilisation, James CHEON et Alix PUZENAT, Editions JOHANET, p. 25
  3. Code civil français, article 641.
  4. Code civil français, articles 640 alinéa 3 et 641 alinéa 2.
  5. Code civil français: article 681.
  6. directive 98/83/CE
  7. compte rendu intégral de la séance du 17 mai à l'Assemblée nationale
  8. "La récupération de l'eau de pluie dans les bâtiments", Bernard de Gouvello[1]
  9. Source : Hans-Otto Wack, expert du domaine de l’eau, lors d’une journée sur l'eau, organisée par l’Office international de l’eau (Oieau), le 13 novembre 2007.
  10. compte rendu intégral de la séance du 17 mai à l'Assemblée nationale
  11. Le taux de 40% est le taux de crédit d'impôt prévu par l’arrêté du 9 février 2005 [2]qui renforce le caractère incitatif du dispositif fiscal en faveur des équipements de l'habitation principale les plus performants au plan énergétique. C'est le cas notamment des systèmes de chauffage à l'énergie solaire, des chaudières à basse température ou à condensation, ou encore des dispositifs d'isolation thermique

[modifier] Voir aussi

[modifier] Article connexe

[modifier] Liens externes

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