Tarasque (ethnie)

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Des hommes tarasques en train de tisser des nasses.
Des hommes tarasques en train de tisser des nasses.
Pécheur p'urhépecha au bord du lac Pátzcuaro (2005)
Pécheur p'urhépecha au bord du lac Pátzcuaro (2005)

Les Tarasques sont un peuple amérindien habitant le Michoacán et les États limitrophes du centre-ouest du Mexique. En 2000, l'Institut National Indigéniste recensait 121 409 locuteurs de langue tarasque (dont 103 168 bilingues tarasque / espagnol). Ces chiffres sont faussés car un certain nombre d'Indiens tentent de se faire passer pour métis devant l'enquêteur. La raison en est bien simple: le terme Indio conserve dans le langage courant une connotation insultante et les indigènes qui occupent le niveau le plus bas de l'échelle sociale sont victimes de discriminations. Il faut ajouter à cela le fait que les enfants de moins de cinq ans sont inscrits dans la case "ne parle pas" et de ce fait ne sont pas reconnus en tant qu'indiens. Les estimations du recensements présentent donc une erreur majeure d'environ 15 % (M. Antochiw, J. Arnauld, A. Breton).

Sommaire

[modifier] Géographie du pays tarasque

Les frontières politiques de l'État du Michoacan gardent en souvenir l'histoire de la civilisation tarasque. Cet État possède un cadre naturel varié qui s'étend sur une aire de 50 000 à 60 000 km carrés.

[modifier] Le bassin du rio Lerma

La limite septentrionale du Michoacan se caractérise par une succession de vallées que séparent des chaînes montagneuses. L'altitude générale tourne autour de 1500 - 2000 m. L'ensemble est irrigué par le bassin du rio Lerma, fleuve qui prend sa source dans l'État de Mexico et se déverse dans le lac de Chapala (1524 m) après un parcourt de 515 km.

[modifier] L'Axe Néo-Volcanique

Immédiatement au sud, on trouve l'axe Néo-Volcanique qui traverse le centre du Michoacan d'est en ouest. Le volcan Paricutin (2800 m) est un des phénomènes naturels les plus connus de cette entité géographique de 880 km de long. Le relief se présente sous la forme d'une suite interminable de Montagnes entre lesquelles s'insèrent de petites vallées et des lacs situés entre 1500 et 2600 m. De par sa superficie, 111 km carré, le lac de Patzcuaro (2035 m) est le plus vaste. Il se rattache au système hydrographique du rio Lerma.

[modifier] La dépression du rio Tepalcatepec

Une dépression inférieure à 1000 m borde la façade méridionale de l'Axe Néo-Volcanique. Elle est constituée de petite collines qui délimitent en partie une plaine où coule le rio Tepalcatepec, principal affluent du rio Balsas. né dans l'État de Puebla, ce fleuve long de 771 km sépare le Michoacan de l'État du Guerrero, avant de se jeter dans l'océan Pacifique.

[modifier] La Sierra Madre Occidentale

Une seconde chaîne de montagne, la Sierra Madre Occidentale, descend le long de l'océan Pacifique sur une distance de 1250 km et selon une direction nord-ouest/sud-est. Ce formidable ensemble naturel révèle une morphologie très accidentée d'une altitude moyenne de 2000 m.

[modifier] La côte de l'océan Pacifique

Une étroite plaine côtière de moins de 60 m d'altitude s'intègre entre la Sierra madre Occidentale et l'océan Pacifique. Elle est traversée par une dizaine de torrents de courtes distances.

[modifier] Le climat

Le climat de ces cinq régions géographiques se répartissent entre les hautes terres et les basses terres. Les premières supérieures à 1000 m, offre un régime tempéré aux hivers froids et secs et aux étés chauds et humides. Les variations thermiques annuelles se situent entre 0° et 22°. La végétation est essentiellement dominée par les pins, les chênes et les agaves. Une atmosphère tropicale règne sur les basses terres où les températures annuelles ne descendent pas en dessous de 20°. La végétation exubérante côtoie la culture du coton, du cacao, du melon, de la mangue, de la vanille, de l'ananas, de la papaye, de l'ananas...

[modifier] La Relation des cérémonies, des rites, des peuples et du gouvernement des Indiens de la province de Mechuacan

[modifier] Présentation du manuscrit

Ce document est la référence absolue pour toute étude consacrée à la civilisation Tarasque. L'ouvrage est aujourd'hui conservé à la bibliothèque royale de l'Escorial, au nord-ouest de Madrid. Il comporte 140 pages de 20,5 cm par 14,5 cm ainsi que 44 illustrations en couleur dont un arbre généalogique des souverains tarasques. La Relation de Michoacan est divisée en trois parties: la première était consacrée aux divinités et aux fêtes religieuses. Il n'en reste qu un court fragment, l'essentiel ayant été irrémédiablement perdu. La seconde partie narre "l'histoire" du royaume tarasque. La construction du récit repose sur une forte connotation idéologique et symbolique. Toute tentative de reconstitution du passé fondé sur une lecture au premier degré est vouée à une confusion. La troisième partie porte sur les évènements de la conquête espagnole ainsi que sur les us et coutumes des Tarasques. Le document aurait été écrit vers 1541, soit onze ans après la conquête du Michoacan.

[modifier] Un auteur anonyme

L'auteur du manuscrit de l'escorial demeure inconnu. cependant, un court extrait du prologue nous permet de dire qu'il s'agissait d'un religieux espagnol de l'ordre de Saint François. certains mexicanistes proposent les noms du premier évêque du Michoacan : V. de Quiroga, d'un évangélisateur du nom de F.G. de Alcala ou encore de l'auteur du premier dictionnaire tarasque / espagnol (écrit en 1559): F. Maturino Gilberti. Le débat reste ouvert...

[modifier] Les motifs de la rédaction et les sources d'information

C'est à la demande du vice-roi de la Nouvelle-Espagne, Don Antonio de Mendoza que fut entrepris la rédaction de la Relation de Michoacan. Les informations furent recueillies oralement par le religieux anonyme auprès des Indiens tarasques. L'un d'entre eux nous est connu puisqu'il s'agit d'un certain Don Pedro Cuinierengari, gouverneur de la cité de tzintzuntzan après la conquête espagnole.

[modifier] Toponymes et ethnonymes

[modifier] Purepecha

Les Tarasques actuels parlent d'eux-même sous le terme Purepecha (il s'agit de la graphie la plus courante, Phorhépicha, Phurpépecha, Porhépecha, Porépicha, P'urhépecha sont aussi attestés). Ce nom, qui apparaît dans la seconde moitié du XVIe siècle et se traduit par « les Hommes », est la conséquence d'une incompréhension culturelle entre les Espagnols et les Tarasques. Les premiers cherchèrent à savoir sous quel ethnonyme s'identifiaient les seconds. Or, toutes les civilisations de l'Amérique pré-hispanique ignoraient ce qu'était un ethnonyme. En effet, les Amérindiens se désignaient en tant que membre d'une cité et non d'une nation (Ch Duverger, 2003). L'une des raisons vient du fait que chaque culture préhispanique se caractérisait par une grande diversité linguistique. Les Tarasques parlaient le tarasque, le nahua (parlé dans toute la Méso-Amérique), l'otomi, le mazahua, le matlatzinca, etc. Tous ces groupes se superposaient sur une même région, dans une même cité. Pour compliquer le tout, les traits culturels de la civilisation tarasque étaient nahuas mais la langue du pouvoir était le tarasque (la structure étatique était d'esprit nahua).

[modifier] Tarasque

Le terme de Tarasque apparait à la fin de la première moitié du XVIe siècle. Il existe deux traductions possibles :

  1. Selon L'Histoire Générale des Choses de la Nouvelle-Espagne (document écrit entre 1529 et 1590) de F. Bernardino de Sahagún, l'ethnonyme dériverait du nom du dieu Tares Upeme ou Taresupeme (il s'agit de Mixcóatl : divinité aztèque du Nord, de la chasse et de la voie lactée).
  2. Selon l'auteur anonyme de la Relation de Michoacán, le dictionnaire Espagnol / Tarasque de F. Maturino Gilberti et la Relation de la Cité de Pátzcuaro de B. J. Martínez (document écrit en 1581), l'ethnonyme vient de Tarascue, Tarasco ou Taraskwe qui signifierait : « gendre », « beau-fils ». Les premiers espagnols arrivés au Michoacán auraient portés leur attention sur ce terme pour des raisons inconnues.

[modifier] Michoacan

Les Aztèques appelaient le pays tarasque Michoacán (c'est la graphie la plus courante, on trouve aussi Michhuahcan, Michhuacan, Mechuacan, Michuacan) que l'on peut traduire par : « le lieu appartenant au(x) poisson(s) ». ce nom nahua est composé d'un radical - Mich - (de Michin : "le poisson")+ un suffixe possessif : -oa- + un suffixe locatif -can-. Les habitants du Michoacán étaient les Michoaque (ou Michoacaque, Michuaca, Michhuaque, Michhuahque, Michuaque).

[modifier] Histoire de la civilisation tarasque

Le passé préhispanique du Michoacan se divise en trois grandes périodes :

  1. De 8000-5000 à 1200 avant J.-C. (Période paléosédentaire de la chronologie de Ch. Duverger, 1999)
  2. De 1200 avant J.-C. à 800-900 après J.-C. (Époques I, II et III de la chronologie de Ch. Duverger, 1999)
  3. De 800-900 après J.-C à la Conquête espagnole (Époques IV et V de la chronologie de Ch. Duverger, 1999)

[modifier] De 8000-5000 à 1200 avant J.-C.

Des populations parlant le tarasque (on les appelle les Proto-Tarasques) s'installent au Michoacan vers 8000 / 5000 avant J.-C. Il s'agit de chasseurs-cueilleurs- agriculteurs (l'agriculture se développe dès 6000 - 5000 avant J.-C.) qui se déplacent au grès des saisons vers des sites déjà connus d'eux. Ces semi-nomades se sédentarisent vers 3000 - 2000 avant J.-C. puis façonnent les premières céramiques vers 1500 / 1200 avant J.-C.

[modifier] De 1200 avant J.-C. à 800-900 après J.-C.

Les Nahuas s'installent le long du Río Lerma dès 1200 avant J.-C. Cependant, la méso-américanisation / nahuatlisation de cette région ne prendra toute son importance qu'aux environs de 500 avant J.-C. Les nouveaux venus se mélangent avec les Proto-Tarasques. Les particularismes culturels de ces derniers sont intégrés dans le moule de la pensée nahua. De ce syncrétisme naît la civilisation tarasque. Cette dernière est à l'origine de plusieurs styles artistiques locaux connus sous les noms d'El Opeño (500 - 200 avant J.-C.) et Chupícuaro (500 avant J.-C. - 200 après J.-C.)...

De par ses valeurs culturelles et son esthétique, la civilisation Teotihuacan va influencer la vallée du Río Lerma entre 200 et 600 après J.-C.

Entre 1200 avant J.-C. et 800-900 après J.-C. tout le reste du Michoacán échappe au processus de méso-américanisation / nahuatlisation. Les Proto-Tarasques y vivent dans la plus parfaite autarcie culturelle, luttant contre toute tentative de pénétration nahua.

[modifier] De 800-900 après J.-C à la Conquête espagnole

L'autarcie proto-tarasque prend fin vers 800-900 après J.-C. et marque l'intégration de tout le Michoacán dans l'orbe culturelle nahua qu'est la Mésoamérique. Le site archéologique de Tingambato est le seul témoignage de cette période.

Entre 800-900 et 1200 après J.-C., les Tarasques constituent un des nombreux styles artistiques régionaux de l'horizon toltèque (un horizon est l'uniformisation de l'inspiration artistique).

Un état centralisé se développe à une époque inconnue que l'on ne peut situer qu'entre 800-900 et le XVe siècle. Le cœur politique de ce « royaume » se situe sur les rives du lac de Pátzcuaro. La capitale Tzintzuntzan atteignait le chiffre de 20000 à 30000 habitants au moment de la conquête espagnole.

1478 : les Aztèques connaissent leur première défaite militaire en tentant d'envahir le « royaume » tarasque.

La conquête du Michoacán fut menée de manière expéditive et pacifique par Cristobal de Olid en juillet 1522. Les Espagnols laissent le souverain Tangaxoan Tzintzicha sur le trône tout en le surveillant. Ses pouvoirs ont été réduits à une peau de chagrin.

1525 : arrivée de missionaires franciscains au Michoacan.

En juin-juillet 1529, Tangaxoan II est invité à Mexico par Nuño Beltrán de Guzmán. Ce dernier le fait prisonnier afin d'extorquer un maximum d'or aux Tarasques. En décembre 1529, Nuño de Guzmán entreprend une longue série d'explorations et de guerres de conquête dans l'ouest et le nord-est du pays. Il arrive au Michoacán en janvier 1530. Accusé de cacher des trésors et de conspirer contre les Espagnols, Tangaxoan II est torturé puis exécuté en février 1530. Cette condamnation marque la fin de la civilisation tarasque et la mise en place du régime colonial.

[modifier] Le pouvoir

L'organisation étatique tarasque était de type méso-américain. Elle se présentait sous deux aspects: un conseil et un souverain (ou Cazonci en tarasque). Ces deux éléments étaient intimement mêlés. Le conseil était composé de l'élite: prêtres, guerriers, proches parents du souverain... Cet organe politique ne fonctionnait pas selon la règle de la majorité mais selon celle de l'acceptation de tous. sa première fonction était de désigner un nouveau souverain : Les membres discutaient entre eux, lançaient des suggestions puis se mettaient tous d'accord sur un nom (presque toujours un membre de la famille royale). Une fois choisi, le nouveau Cazonci devait être perpetuellement en phase avec les sentiments des membres de son conseil. Malheur à lui si l'envie lui prenait de se passer de leur avis. Ces derniers pouvaient alors décider de son élimination physique. Si le conseil était tout puissant, il ne faut pas sous-estimer celle du souverain puisqu'il était à la fois chef des armées, grand prêtre et juge suprême. Il recevait les ambassadeurs des cités vassales ainsi que des territoires indépendants. Enfin, il présidait aux assemblées du conseil.

[modifier] Un isolat linguistique

Les langues méso-américaines se divisent en 3 grandes familles linguistiques (classification de Ch. Duverger, 1999): le phylum Uto-Aztèque (les Nahuas en sont les principaux représentants), le phylum Oto-Mangue et le phylum Macromaya.

Le tarasque pose un problème aux linguistes car cette langue n'appartient à aucun des trois grands phyla méso-américains. Deux chercheurs ont tenté de mettre fin à cette situtaion d'isolat en faisant appel à la lexico-statistique (on compare le vocabulaire de plusieurs langues et on comptabilise le pourcentage de racines communes). M. Swadesh découvrit des affinités entre le tarasque et l'aymara (parlé sur les rives du lac Titicaca) le quechua (parlé dans toutes les Andes centrales) et le Zuñi (parlé dans le sud-ouest des États-Unis). J. H. Greenberg présente des conclusions différentes de celles de M. Swadesh. Il n'établit aucun lien entre le tarasque et l'Aymara, le Quechua ou encore le Zuñi. Pour ce même auteur, la langue des Proto-Tarasques appartiendrait à un phylum nommé Chibcha-Paeza. Cette famille linguistique se diviserait en deux branches: d'une part la branche Chibcha, d'autre part la branche Paeza. L'idiome tarasque serait rattaché au premier sous-groupe. Les divergences de point de vue qui apparaissent entre les études de M. Swadesh et de J. H. Greenberg sont autant d'arguments pour qualifier la lexico-statistique de science incertaine.

[modifier] Une écriture glyphique

Les Tarasques possédaient une écriture glyphique. Elle était composée de pictogrammes (le glyphe représente la chose) et d'idéogrammes (le glyphe exprime un concept ou une idée). les glyphes pouvaient avoir, à la fois, un sens pictographique et idéographique. Leur disposition n'obéissait à aucune règle absolue: ils apparaissaient en ligne horizontale, en colonne, en boustrophéon ou étaient intégrés au dessin ou à la sculpture. Ils se dissimulaient alors dans les motifs d'un vêtement, dans les volutes d'une coiffe, dans un paysage ou se transformaient en ornements d'apparats (pectoral, sceptre, ornement d'oreille...).

[modifier] Un double calendrier

Comme toutes les autres civilisations méso-américaines, les Tarasques utilisaient deux calendriers. Le premier des deux, appelé Tonalpohualli en nahuatl, comportait 260 jours résultant de la combinaison de deux suites: 20 noms et 13 nombres compris entre 1 et 13. Cette association donnait naissance à 20 divisions de 13 jours. Chaque jour était influencé par son signe, son nombre (il peut être néfaste, bénéfique ou neutre), la divinité associée au jour, celle de la treizaine, le point cardinal associé au jour (le centre, le nord, le sud, l'est et l'ouest qui ne contiennnent aucune véritable indication géographique mais seulement une connotation symbolique et abstraite. L'intégration des cinq directions dans le Tonalpohualli montrent que l'espace et le temps sont intimement liés), la couleur du point cardinal... ce système calendérique de 260 jours était employé à des fins divinatoires. Les Méso-Américains consultaient des prêtres, les Tonalpouhque, pour définir la date d'une évennement à venir (guerre, mariage, voyage, inauguration religieuse d'un édifice...), pour interpréter un fait survenu ou pour donner un destin à un nouveau-né (le jour où le nouveau-né recevait son nom allait influer sur son destin toute sa vie). Les Tonalpouhque interprétaient les influences des signes du Tonalpohualli en consultant un "recueil": le Tonalamatl. Le second calendrier, Xiuitl en nahuatl et Uriyata Miuqua en tarasque, comprenait 365 jours répartis en 18 mois de 20 jours auxquels il fallait ajouter 5 jours additionnels particulièrement néfastes: les Nemontemi. On se servait du calendrier de 365 jours pour mesurer le temps historique, noter les hauts faits, les conquêtes, les guerres, la succession des souverains, les signes célestes, pour organiser les cycles agricoles...Il fallait attendre 52 années pour voir les dates de début des deux calendriers coïncider entre elles. Ce long cycle était divisé en 4 périodes de 13 ans combinant 4 signes issus du Tonalpohualli et 13 chiffres allant de 1 à 13. L'ensemble formait les signes de chaque année. La première année d'une treizaine influençait les douze suivantes ainsi que la date du Tonalpohualli. La fin d'un cycle de 52 ans était particulièrement redoutée car une destruction cataclysmique du monde pouvait survenir.

[modifier] Les principaux exemples d'architecture tarasque

[modifier] Les 5 temples majeurs de Tzintzuntzan

L'une des pyramides de Tzintzuntzán.
L'une des pyramides de Tzintzuntzán.

Il s'agit du cœur cérémoniel de la capitale tarasque. L'ensemble est constitué d'une gigantesque terrasse artificielle (H: 18 m / L: 425 m / l: 250 m) édifiée sur un terrain en pente au pied du mont Yaguarato. Une rampe (disparue) permettait de d'accéder au sommet de la structure où s'alignent 5 pyramides (ou Yacatas en langue tarasque). La plate-forme (H: 13 m / nombre de degrés: 12) de chacun de ces 5 édifices présente une forme mixte : un corps rectangulaire (L: 75 m) accolé à un corps circulaire (D: 35 m). Un sanctuaire (disparu) de plan cylindrique et à la toiture conique en chaume coiffait le sommet de la section circulaire. Un escalier (disparu) reposait contre la face principale de la plate-forme rectangulaire. On peut observer de semblables constructions un peu partout en Mésoamérique : Ihuatzio, Tula, Cempoala, Tlatelolco/Tenochtitlan, Calixtlahuaca… Le chiffre 5 se rapporte à deux conceptions culturelles nahuas qui sont, d'une part, les 5 directions et, d'autre part, le mythe de la création du monde (les Mésoaméricains pensaient que l'univers actuel avait connu quatre antécédents disparus dans des cataclysmes). Les archéologues A. Caso et D. Rubin de la Borbolla mirent au jour un édifice dans la partie nord-est de la grande plate-forme de Tzintzuntzan. L'ensemble est composé de plusieurs pièces et d'un patio quadrangulaire. Au centre de ce dernier se trouve une sorte d'impluvium avec canalisations. Après y avoir découvert un certain nombre d'ossements et des crânes humains, les deux archéologues déclarèrent qu'il s'agissait d'un tzompantli. E. Le Bras réfute cette hypothèse pour la simple et bonne raison que l'édifice B ne ressemble en rien au schéma classique du Tzompantli: plate-forme à degrés sur laquelle étaient alignés des poteaux de bois verticaux reliés entre eux par des perches horizontales. Les crânes des victimes sacrifiées (on a affaire à des décapitations post-mortem faisant suite aux sacrifices par arrachement du coeur) étaient perforés au niveau des tempes puis embrochés sur ces perches. On peut admirer des vestiges de ce macabre monument de tradition nahua à Tula, calixtlahuaca, Chichen-Itza, Mexico... Les restes humains, dont parlent A. Caso et D. Rubin de la Borbolla, devaient être des dépôts d'offrandes sacrificielles. Pour Ch. Duverger (1999), cette pratique rituelle méso-américaine matérialisait l'enracinement des Nahuas en un lieu d'où ils n'étaient pas originaires.

[modifier] Les pyramides jumelles d'Ihuatzio

Ce site tarasque situé à quelques kilomètres de Tzintzuntzan possède deux pyramides jumelles contigües qui reposent sur une plate-forme rectangulaire (H: 1,5 m / L: 87 m / l: 37,5 m / nombre de degrés: 2). On accédait au temple (disparu) de chacune des deux structures rectangulaires (nombre de degrés: 10) par un escalier (disparu). Des édifices identiques existent dans la vallée de Mexico (Tlatelolco/Tenochtitlan, Tenayuca) ainsi que dans les hautes terres du Guatemala (Mixco Viejo). Les pyramides jumelles se rattachent au système de pensée dualiste nahua où les contraires sont mutuellement complémentaires.

[modifier] Le terrain de Tlachtli de Tingambato

Ce terrain de jeu de balle présente un plan en forme de I majuscule (H: 2m / L: 36 m / l: 13 m). Deux structures latérales limitent l'allée sur ses côtés (H: 2m / L: 34 m / l: 1 m). Une banquette s'appuie sur chacune de ces deux structures (H: de 0,5 à 1 m / L: 34 m / l: 1 m). Deux zones terminales délimitent l'allée au nord et au sud. Elles présentent des murs verticaux avec décor en Talud-tablero (Ce style est à l'origine un marqueur de l'influence de la civilisation de Teotihuacan. Il lui survit jusqu'à la conquête espagnole. Il se présente sous la forme d'un court talus incliné et surmonté d'un panneau vertical encadré par des corniches) qui délimitent de petites aires (H: 2 m / L: 16 m / l: 1 m). Le Tlachtli (terme d'origine nahua qui signifie : « voir, regarder ») était un rituel présacrificiel nahua. Les parties opposaient deux équipes qui symbolisaient le dédoublement de l'astre solaire (diurne / céleste et nocturne / chtonien). Elles se disputaient une balle de caoutchouc dont la trajectoire évoquait le mouvement du soleil. Il faut voir dans ce rituel une réactualisation « théâtrale » d'une cosmologie fondée sur le dualisme. La finalité des parties de Tlachtli est le sacrifice de l'ensemble des joueurs (des prisonniers de guerre) sur le terrain (c'est un sanctuaire religieux).

[modifier] Les sépultures d'El Opeño

Il s'agit de 12 sépultures présentant une chambre souterraine de forme ovale aménagée avec deux banquettes symétriques. L'accès à la chambre sépulcrale se faisait par un petit escalier aménagé dans un couloir central, lequel était comblé de terre et de gravas. Chaque tombe abritait plusieurs individus essentiellement masculins (peut-être le défunt et ses esclaves sacrifiés pour l'accompagner dans l'au-delà) déposés sur les banquettes avec des offrandes. Ces hypogées appartiennent à la tradition andine des tombes à puits que l'on retrouve en Colombie, sur la côte sud du Pérou (culture Paracas: 600 - 200 avant J.-C.) ainsi que dans l'ouest mexicain (cultures dites des tombes à puits: 500 avant J.-C. - 600 après J.-C.). L'originalité du site d'El Opeño réside dans le fait que les archéologues découvrirent des coutumes funéraires méso-américaines dans ces sépultures d'origine sud-américaine.

[modifier] Les principaux exemples de sculpture tarasque

[modifier] les Chac-Mool

Il existe cinq Chac Mool tarasques en basalte qui proviennent d'Ihuatzio et de Pátzcuaro. Ils représentent tous un homme à demi-couché sur le dos, redressé sur ses coudes, les mains sur le ventre, les genoux pliés et la tête tournée sur le côté. Bien qu'entièrement nu, il porte des ornements aux chevilles (?). Deux de ces Chac-Mool (exposés au Museo Nacional de Antropología de Mexico et au Museo Michoacano de Morelia) tiennent dans leurs mains un plateau. Ils sont sexués et ridés. La représentation du phallus (en érection?) renvoie aux principes de fertilité et de fécondité. Les rides expriment toujours la vieillesse. La taille des cinq sculptures tarasques varie fortement (H: entre 20 et 90 cm environ / L: entre 30 et 160 cm environ / l: entre 10 et 50 cm environ). L'identité et de ce curieux personnage masculin est débattu. Selon L. López-Lujan et M.-F. Fauvet-Berthelot, les Chac-Mool ne seraient pas des images de culte au sens strict car aucun d'entre eux n'a été mis au jour dans un sanctum sanctorum. certains auteurs y voient un messager divin chargé de recueillir sur son ventre les cœurs humains (Quauhxicalli) fraichement arrachés dans le but de les offrir à l'astre solaire. L'usage cérémoniel est incertain : A. López Austin, L. López-Lujan et M.F. Fauvet-Berthelot donnent plusieurs fonctions possibles : Tlamanalco (table d'offrande) ou Techcatl (pierre sacrificielle). Cette dernière hypothèse ne peut pas s'appliquer pour les pièces d'une vingtaine de cm de hauteur. Les Chac-Mool tarasques témoignent de l'imprégnation culturelle nahua au Michoacán. Les archéologues ont découvert des pièces semblables dans toute la Mésoamérique: à Mexico, Tula, Chichén-Itzá, Cempoala, Quirigua, dans l'État de Tlaxcala ainsi qu'au Salvador.

[modifier] Les coyotes

Ces sculptures en basalte qui proviennent d'Ihuatzio sont au nombre de huit. Elles se divisent en deux groupes. D'une part, on a quatre coyotes représentés de manière naturelle : sur leurs quatre pattes et la queue dressée. Le dos, le ventre et les flancs de ces coyotes sont plats. Cela donne au tronc de l'animal la forme d'un bloc rectangulaire. Ces pièces ont pu servir de trône ou d'autel. D'autre part, on a quatre coyotes anthropomorphisés. La tête de l'animal est associée au corps d'un être humain nu et sexué. Il est debout, les jambes fléchies et les mains jointes sur l'abdomen. Celles-ci se touchent sans pourtant être jointes. L'une des pièces (American Museum of Natural History de New-York) porte, autour du cou, un petit pendentif qui semble être un petit masque. Les huit coyotes ont la gueule ouverte, les dents dégagées et la langue pendante. Les yeux sont incisés. Les sculptures anthropomorphisées se doivent d'être mises en relation avec une pièce de l'American Museum of Natural History de New-York. Il s'agit d'un homme nu dont la posture est absolument identique aux quatre coyotes anthropomorphisés:il est debout, nu, sexué, les jambes fléchies et se mains sont posées sur l'abdomen. À quelle divinité correspondent ces sculptures? Les indices sont à chercher du côté de la symbolique de l'animal. Selon G. Olivier, le coyote était l'un des Nahualli (c'est la faculté qu'a une divinité ou un homme à se transformer en animal) de prédilection du dieu Tezcatlipoca (dieu aztèque du nord, de la nuit, du vent nocturne, de la grande ourse, protecteur des jeunes guerriers, dieu de la providence, de l'echec, de la ruine, de la pureté, de l'ordre tout en protégeant le péché et formantant les querelles. Il est l'ami des riches et considère les esclaves comme ses fils bien aimés. Son invisible omniprésence est esprit, air, ténèbres et l'attribut qui le distingue est un obscur miroir qui dégage de la fumée. Il est l'image du soleil de terre). Huehuecoyotl (dieu du rythme, de la danse et de la musique. Il avait fort mauvaise réputation car il était associé à la lubricité. Il mouchardait et semait la discorde), le plus connu de tous est souvent représenté le sexe en érection. Les quatre coyotes anthropomorphisés d'Ihuatzio possèdent tous un phallus. Pour E. Le Bras, cela pourrait bien en faire des représentations de Huehuecoyotl / Tezcatlipoca.

[modifier] Deux sculptures de Loma Alta

Les archéologues mirent au jour une petite plate-forme sur le site funéraire de Loma Alta (H: 30 cm / L: 470 cm / l: 480 cm / un des faces de la plate-forme est arrondie). Des offrandes cérémonielles furent déposées dans une fosse ovaloïde située au centre de la structure (H: 80 cm / L: 120 cm / l: 100 cm). La cache cérémonielle recelait dix sculptures dont trois avaient été rituellement mutilées avant d'être enterrées. La fosse fut remplie de pierres naturelles, de fragments de metate (pierre à moudre le maïs), de manos (pilons fuselés tenus horizontalement pour écraser le maïs) et de tessons de céramiques qui permirent de dater la structure entre 250 et 550 après J.-C. Les offrandes en basalte de la structure figurent parmi les plus anciennes sculptures tarasques. On retiendra ici une tête mutilée au yeux cerclés et aux dents finements incisés (H: 19 cm / l: 16 cm / épaisseur: 12 cm). Les cercles autour des yeux sont les attributs essentiels de Tlaloc (dieu aztèque de la pluie et du tonnerre). Il y a de fortes chances pour la pièce de Loma Alta représente bien cette divinité nahua. Une petite protubérance ronde apparait au-dessu de la tête. Cette curieuse protubérance se retrouve sur les deux Chac-Mool ridés et sexués du Museo Nacional de Antropologia de Mexico et du Museo Michoacano de Morelia ainsi que sur plusieurs têtes tenons du site péruvien de Chavin de Huantar (culture dite de Chavin de Huantar: 1200 - 200 avant J.-C.). Si ce "chignon" donne l'impression d'être une tradition pan-américaine, sa signification demeure inconnue. Une seconde sculpture mutilée (H: 14 cm / l: 19 cm / épaisseur: 13 cm) représente un visage aux rides bien marqués. Une légère dépression creusée au sommet de la tête pourrait évoquer un petit brasero. P. Carot et R. Ponce Lopez font état de traces de fumées visibles sur la partie inférieure de la tête. Les rides et le brasero amènent à penser qu'il s'agit de Huehueteotl (dieu aztèque du feu). Dans l'iconographie méso-américaine, Huehueteotl est toujours représenté, bossu, édenté, bossu, ridé et portant un brasero sur son dos. il y a donc peu de doutes sur l'identité de la divinité découverte à Loma Alta.

[modifier] Les principaux exemples de métallurgie tarasque

Tous les américanistes s'accordent pour dire que la métallurgie n'est pas née en Mésoamérique mais dans les Andes centrales (vers 1500 avant J.-C.). Les plus anciennes traces d'orfèvrerie tarasque apparaissent dans la région du Río Balsas et sur les bords du lac de Chapala vers 900-1200 après J.-C.

[modifier] Les haches

Elles sont en cuivre, en bronze ou en alliages cuivre-bronze-arsenic / étain-bronze-arzenic / cuivre-bronze-arsenic. Selon D. Hosler, les haches en métal du Michoacán étaient utilisées pour couper le bois et le travailler. Ch. Duverger conteste cette utilisation et pensent qu'elles étaient utilisées comme monnaie d'échange et non comme outils. La fabrication de ces haches se faisait de la façon suivante : un homme souffle à l'aide d'une canne de soufflage dans un feu de braise. Du métal en fusion s'échappe du foyer, lequel est creusé dans un creuset en céramique, pour se déverser dans un moule. Selon D. Hosler, un martelage à froid donnait à la lame sa forme définitive. La forme des haches dérive du Tumi péruvien.

[modifier] Les pinces à épiler

les premières pinces à épiler du Michoacán datent de 1200-1300 après J.-C.(Les plus anciennes pinces à épiler proviennent de l'Équateur et dateraient de 800 après J.-C. environ). Elles se caractérisent par des formes originales au nombre de cinq: rondes, rectangulaires aux bouts légèrement arrondis, en forme de Tumi péruvien, en forme de Tumi avec deux spirales situées de part et d'autre de chaque face de la face à épiler. Si les trois premiers types de pinces à épiler sont communs à l'ensemble de l'ouest mexicain, il n'en va pas de même pour le dernier : cette forme particulières n'a été mise au jour que sur le site de Tzintzuntzán. Ces objets étaient portés autour du cou par l'élite religieuse et politique tarasque. Les fouilles archéologiques ont mis au jour des pinces à épiler composées, mais pas toujours, d'un alliage binaire ou ternaire : cuivre-argent / cuivre-or / cuivre-étain / cuivre-bronze-arsenic-étain/ cuivre-or-argent. Pour D. Hosler, ces objets de métal étaient travaillés plusieus fois de suite à chaud: L'orfèvre crée tout d'abord une pièce uniforme puis il supprime une partie de la surface du métal pour donner à l'ensemble la forme qu'il désire. celle-ci peut comporter 4 « membres » informes qui serviront à l'élaboration des décors spiralés. L'artiste allonge par la suite ces "membres" afin de leur donner l'allure de tiges qu'il enroule. Enfin, il plie la plaque de métal en deux. La pince à épiler est terminée.

[modifier] Les grelots

A l'instar des pinces à épiler et des haches, les artisans tarasques développèrent les techniques des alliages pour les grelots (les plus anciens apparaissent en Colombie vers 200-500 après J.-C.) : cuivre-étain / cuivre-bronze-arsenic. La technique employée pour la fabrication de ces grelots était celle de la cire perdue. Ele jouissait d'une très nette préférence pour la production d'éléments décoratifs. On utilisait un moule fait d'un mélange de cire et de résine de copal enveloppé dans une gangue d'agile mêlée de matières organiques, souvent du charbon de bois. Après un temps de séchage, le moule était mis au jour de manière à faire s'écouler la cire par l'évent. Le métal en fusion était alors versé dans l'ouverture. Après refroidissement, on brisait le moule ; on ébarbait et l'on polissait avec une pierre l'objet démoulé. Après la fonte à la forme perdue, on soudait l'attache et d'autres éléments de décor au moyen d'une pâte en matière combustible et d'oxyde de cuivre. Chauffés ensemble, la matière organique était carbonisée tandis que l'oxyde de cuivre s'unissait avec le métal du grelot. La fonction rituelle des grelots nous échappe quelque peu.

[modifier] Le masque de Xipe-Totec du Museo Nacional de Antropologia e Historia de Mexico

Le Museo Nacional de Antropologia e Historia de México possède un masque, une pièce d'exception en alliage de cuivre et d'argent (H: 12,5 cm / L: 10 cm / l: 0,7 cm). Les paupières sont closes et la bouche est ouverte. ces deux éléments iconographiques indiquent qu'il s'agit d'un mort. Selon E. Le Bras, le masque évoquerait la peau prélevée sur le crâne d'une victime sacrifiée. cet écorchement post-mortem était réservé au dieu Xipe Totec (ce dieu aztèque présidait à la renaissance de la végétation. Il était le patron de la corporation des artisans-joailliers) : il était toujours représenté revêtu de la peau d'un sacrifié et les traits de son visage se dissimulaient derrière un masque de peau qui n'était autre que la face de la victime écorchée. Les cérémonies qui lui étaient dédiées visaient à réincarner le dieu pour redonner vie aux principes qu'il représentait.

[modifier] Les principaux exemples de céramique tarasque

Trois méthodes étaient en usage pour confectionner des céramiques en méso-Amérique: Le modelage en bloc, la technique du colombin et le moulage.La première consiste à prendre une grosse boule d'argile que l'on évide en son centre pour lui donner la forme voulue. On amincie les parois à la main. La base et le col sont modelés à part et ajoutés après coup. La seconde méthode était a plus répandue. Des boudins d'argile sont montés en spirales pour donner naissance aux parois de le céramique. On lissait ensuite l'extérieur. En ce qui concerne le moulage, on sculptait au préalable un modèle qu'on enveloppait dans une couche d'argile. On la coupait ensuite en deux pour obtenir le moule. On remplissait les moules d'argile pour confectionner une céramique. Il est à noter que le tour de potier était inconnu sur le continent américain. La cuisson se faisait soit à feu ouvert, soit dans un four maçonné ou non (le four non maçonné est souterrain et est recouvert d'une couche de fumier sec de combustion facile et sur lequel on répandait des tessons.

[modifier] Les vases à anse en étrier

Les vases à anse en étrier sont une tradition sud-américaine (les plus anciennes céramiques andines sont associées à la culture équatorienne Machalilla: 1500 / 1450 - 1200 / 1000 avant J.-C.). Ils apparaissent en Méso-Amérique dans l'État de Colima (Complexe Capacha: 800-600 avant J.-C.) et dans la vallée de Mexico (site olmèque de Tlatilco : on a retrouvé quelques exemplaires dans trois tombes datées entre 1000 et 800 avant J.-C. La civilisation olmèque s'est développée entre 1200 et 500 avant J.-C.). L'anse en forme d'étrier se présente en demi-cercle et est surmontée d'un goulot. Elle est généralement placée verticalement sur le vase et comme elle est creuse, elle fait communiquer le récipient avec le goulot. Les premières poteries tarasques de ce genre sont datées entre 500 avant J.-C. et 300 après J.-C. (styles El Opeño et Chupicuaro). Elles disparaissent de la région du rio Lerma pendant quelque 900 ans puis réapparaissent dans la région du lac de Patzcuaro (on en a découvert un grand nombre sur le site de Tzintzuntzan) et ce jusqu'à la conquête espagnole. Une nouveauté distingue les plus récentes céramiques à anse en étrier tarasques des plus anciennes: elles présentent toutes un bec verseur protubérant de forme tubulaire. J. L. Rojas Martinez (2004) y voit une connotation phallique et, de ce fait, une allusion aux principes de fertilité et de fécondité.

[modifier] Les céramiques tripodes

Les céramiques tripodes sont une caractéristique culturelle nahua que l'on trouve dans toute la Méso-Amérique entre 500 avant J.-C. et la conquête espagnole. La charge symbolique du chiffre 3 est forte: elle évoque le feu puisque les pierres plates ou l'on cuisait les Tamales (les galettes de maïs qui sont la base de l'alimententation méso-américaine) reposaient toujours sur trois pierres. Le récipient tripode transporte donc en lui l'essence même du foyer. Le chiffre 3 est aussi la triade eau/sang/jade qui renvoit au sacrifice humain (Le sang versé, symbolisé par le jade, est indispensable à la survie du monde tout comme l'eau d'où l'association de ces trois éléments).

[modifier] Les Tapaderas

L'usage des Tapaderas n'est pas connu avec exactitude. Ces céramiques ressemblent à des couvercles hémisphériques et tétrapodes. Elles auraient pu servir de couvercles d'encensoirs ou recouvraient directement un trou, creusé dans le sol, contenant le copal en combustion. Les tapaderas tarasques sont surmontés d'une anse ou d'un élément de préhension aux formes variées: maison miniature, tête humaine ou animale... Le décor peut être peint et réalisé selon la méthode du pastillage (Il s'agit d'un décor créé par ajout de petites boules ou de boudins d'argile)

[modifier] Les figurines de type 2 d'El Opeño

Il s'agit de 11 figurines pleines dont la hauteur générale dépasse à peine les 12 cm. 6 d'entre elles représentent des personnages debouts de sexe masculin: L'un d'entre eux parait être au repos. Il est vêtu d'un Maxtlatl (cache-sexe). Les cinq autres sont nus et dans une attitude dynamique. Ils portent des protections matelassées sur une des deux jambes, une sorte de casque (?) et une batte. Tous les archéologues y voient des joueurs de Tlachtli. Cette idée pourrait être confirmée par une des figurines féminines: Elle est debout et semble avoir, elle aussi, une attitude dynamique. Selon A. Oliveros, elle tiendrait dans ces mains une balle (?). Les 4 autres personnages féminins sont tous au repos : 3 sont assises: L'une se tient le ventre. Les deux autres sont penchées en arrière, elles sont retenues par leurs bras. Celle qui est debout présente une position analogue au personnage masculin précédemment cité. Il pourrait s'agir de spectateurs assistant au rituel du Tlachtli. A. Oliveros suggère que les 11 figurines portent des masques mais cette hypothèse est difficile à confirmer. Le pastillage et l'incision sont utilisés pour mettre en relief quelques détails anatomiques (seule la poitrine permet de différencier les femmes des hommes. On notera un sens du détail pour les muscles et les articulations) et certaines parties du corps, dont la tête, devaient être peintes en rouge. Bien que découvertes dans deux tombes, la fonction funéraire des 11 figurines d'El Opeño nous échappent totalement.

[modifier] Les Figurines creuses Chupicuaro

Les figurines creuses de style Chupicuaro sont rares et de ce fait très recherchées dans le marché de l'art. Leur hauteur varie entre 30 et 40 cm environ. Presque toutes sont des représentations féminines sur pieds (on connaît quelques exemplaires masculins). Les cuisses sont parfois callipyges, le ventre est proéminent et les seins sont traités discrètement quand ils ne disparaissent pas. Le sexe est toujours représenté. Les Mains reposent sur le ventre. Elles ne portent pas d'ornements corporels mais quelques unes des figurines ont les lobes des oreilles percés. Le corps et quelquefois la tête de ces figurines sont peints. Les décors sont des motifs géométriques qui incluent des lignes en zig-zag, des rectangles... Les tonalités employées sont: rouge, crème et noir (On retrouve ces couleurs identiques sur les vases à anse en étrier datés entre 1200 après J.-C. et la conquête espagnole). Dans certains cas une sorte de bonnet semble allonger la tête. D'après des découvertes archéologiques récentes, ces statuettes creuses en terre cuite pourraient avoir été associées à des sépultures d'enfants et auraient été confectionnées entre 500 et 300 avant J.-C.


[modifier] Bibliographie et liens externes

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