Syndrome du canal carpien

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Le syndrome du canal carpien se manifeste par un engourdissement ou des douleurs au niveau de certains doigts de la main consécutif à la compression de structures nerveuses et musculo-tendineuses dans le canal carpien.

Sommaire

[modifier] Rappel anatomique

Le canal carpien est la zone de transition entre l'avant-bras et la main. Il est situé dans le talon de la main. Il forme un défilé ostéofibreux inextensible, plus étroit à ce niveau qu'à l'avant-bras ou la main.

Cette zone représente une arche, délimitée par la deuxième rangée des os du carpe (entre l'hamulus de l'Hamatum et le trapèze) et fermée à la face ventrale par le ligament annulaire antérieur du carpe.

Coupe du canal carpien.
Coupe du canal carpien.

À l'intérieur de cette structure, circulent les tendons fléchisseurs des doigts, (les extrinsèques de la main : long fléchisseur du pouce et huit tendons fléchisseurs superficiels et profond des quatre doigts longs) et le nerf médian. L'artère et le nerf ulnaire (cubital) cheminent dans une loge indépendante située sur le bord interne : la loge de Guyon. Le Flexor Carpi Radialis a sa propre loge, à l'intérieur de la concavité du trapèze.

Lorsqu'il existe un œdème ou une atteinte inflammatoire de la gaine des muscles fléchisseurs (synovites), il en résulte une augmentation de la pression intracanalaire entraînant une compression du nerf médian, responsable du syndrome. Cette compression peut entraîner jusqu'à la lésion irréversible du nerf.

[modifier] Description

Les symptômes siègent sur tout ou partie du territoire anatomique du nerf médian. Ils prédominent sur la face palmaire des trois premiers doigts et sont parfois décrits par les malades comme atteignant toute la main. Le syndrome du canal carpien se présente de manière bilatérale dans plus de la moitié des cas[1].

Le syndrome s'exprime par des picotements, des engourdissements, des fourmillements ou des décharges électriques. Il oblige le malade à mobiliser sa main. Le malade dit souvent que sa main lui parait gonflée, engourdie, endormie, morte, que sa circulation semble arrêtée, qu'il se sent maladroit. Il existe une faiblesse de la pince pouce-index, une diminution de la masse musculaire (amyotrophie) de l'éminence thénar (sous le pouce), une sensation de doigts boudinés. L'apparition est habituellement progressive et la forme aiguë reste assez rare.

Typiquement, les douleurs sont nocturnes, réveillant le malade, l'obligeant à se lever (acroparesthésies nocturne). Elles peuvent apparaître seulement au petit matin ou se répéter plusieurs fois dans la nuit. Dans la journée, les douleurs peuvent être déclenchées par certains mouvements ou le maintien de position : téléphoner, lire le journal, conduire, tricoter… Des activités manuelles professionnelles ou de temps libre, inhabituelles ou habituelles, mais intenses, sont parfois à l'origine de l'apparition du syndrome.

[modifier] Causes

Il existe de multiples facteurs favorisants : traumatismes répétés sur la face palmaire du poignet, anomalies osseuses saillant dans le canal, modifications hormonales chez la femme, dialyse rénale, obésité (surtout chez le patient jeune[2]) etc. Il semble exister également une prédisposition génétique[3].

Ce syndrome se rencontre le plus souvent chez les femmes.

Chez la femme, la cause est habituellement de nature hormonale, c'est pour cela que ce syndrome atteint plus fréquemment les femmes enceintes ainsi que les femmes proches de la ménopause. Chez l'homme, la cause est quasi exclusivement d'ordre mécanique, typiquement, l'ouvrier utilisant fréquemment un marteau piqueur.

Les formes de syndrome du canal carpien d'origine professionnelle sont nombreuses en France. Cette pathologie est reconnue par le tableau de maladie professionnelle n°57 du régime général.

Icône de détail Article détaillé : Troubles musculosquelettiques.

Il est de plus en plus fréquemment observé chez les personnes travaillant sur un poste informatique non ergonomique (clavier[4], souris, position du siège mal adaptés...) Dans ce cas, il suffit de revoir la configuration du poste de travail pour y remédier.[5]

D'autres causes sont plus rares : ténosynovites, compression par les muscles fléchisseurs au cours de la polyarthrite rhumatoïde, causes infectieuses, algodystrophies, dépots amyloïdes (lors de l'hémodialyse).

Le syndrome est plus fréquent en cas de diabète, d'hypothyroïdie, de myélome, de sarcoïdose

Un nombre important de syndromes du canal carpien n'ont aucune cause retrouvée (idiopathiques).

[modifier] Diagnostic

L'examen clinique retrouve parfois des troubles vasomoteurs (acrocyanose ou doigts bleus, parfois accompagnés de douleurs dans le cadre d'un syndrome de Raynaud).

Il existe une perte du « O » parfait lors de l’opposition du pouce.

L'altération de la sensibilité de la main peut être détectée par un test de Weber. La percussion de la face antérieure du carpe peut provoquer des fourmillements (signe de Tinel), de même que l'hyperflexion du poignet (signe de Phalen). La compression du poignet avec un garrot peut provoquer l'apparition d'une douleur au bout de 30 secondes. La perte de la force musculaire peut être attestée au dynamomètre de Jamar.

L'électromyogramme sert à confirmer l'atteinte du nerf médian et permet d'apprécier l'importance des lésions nerveuses. Un EMG normal permet quant à lui d'exclure de façon presque certaine une forme sévère de syndrome du canal carpien. Il montre une augmentation de la latence motrice et diminution de la conduction nerveuse.

La radiographie du poignet selon l'incidence du canal carpien (main collée à la plaque, et avant-bras perpendiculaire) permet d'en apprécier le mécanisme.

Dans les formes plus complexes, on peut utiliser l'imagerie par résonance magnétique en cas, notamment, d'échec d'une intervention chirurgicale ou de formes atypiques (formes à l'effort ou compression extrinsèque).

Le bilan biologique ne montre rien de particulier. Il faut rechercher systématiquement un diabète, facteur favorisant fréquent.

[modifier] Diagnostic différentiel

les plus courants sont les atteintes des racines nerveuses C6-C7, le syndrome de la traversée thoracobrachiale et les neuropathies périphériques, syndrome du rond pronateur, atteinte du nerf interosseux antérieur.

[modifier] Traitement

Il ne faut pas attendre les complications pour traiter. Quand il y a perte de la sensibilité digitale ou fonte musculaire, le nerf est en général sévèrement atteint. Dans les formes légères ou modérées un traitement médical, conservateur, peut être proposé. Dans les formes sévères la chirurgie parait préférable. Les formes sévères surviennent le plus souvent chez les personnes âgées.

Les récidives ne sont pas rares après traitement médical mais sont exceptionnelles après chirurgie.

Il n'existe pas de recommandations officielles françaises ou européennes pour sa prise en charge. Le seul document à type de "recommandations" a été publié en 1993 par l' American Academy of Neurology[6].

[modifier] Traitement médical

Les injections de dérivés cortisonés dans le canal (infiltrations) sont régulièrement proposés, mais d'action inégale(Malheureusement, elles sont plus ou moins limitées à 3 par an).

Les médicaments associant diurétiques et anti-inflammatoires n'ont qu'un effet partiel.

Dans les formes légères ou modérées, une orthèse de repos du poignet permet souvent de calmer les engourdissements. Elle peut être portée seulement la nuit. Cette amélioration des symptômes est parfois de courte durée, obligeant alors à proposer la chirurgie.

Dans tous les cas, il est licite d'essayer cette triade : arrêt du mouvement causal, repos (orthèse) et pharmacologie (anti-inflammatoire et diurétiques).

Les atteintes purement mécaniques sont souvent professionnelles et peuvent entrainer un changement d'affectation ou de poste de travail. Quand cela est possible, il est conseillé de réduire les micro-traumatismes répétés, en particulier l'exposition aux vibrations.

[modifier] Traitement chirurgical

Il est basé sur la neurolyse permettant la libération du nerf médian des structures qui le compriment. La chirurgie, anciennement à ciel ouvert, puis maintenant par endoscopie, donne de très bons résultats.

Il consiste en la section du ligament annulaire antérieur du carpe. La technique endoscopique améliore le résultat dans les trois premières semaines mais il n'existe pas de différences significative dans les résultats à moyen et long terme. Il existe un risque de lésion du nerf médian par voie endoscopique qu'il ne faut pas négliger.

Un repos prolongé est nécessaire avant la reprise d'un travail manuel exigeant. Une rééducation est utile (manipulation d'une balle en mousse). Les sujets opérés se plaignent parfois de quelques douleurs résiduelles, d'une légère perte de force de préhension.

Les suites post-opératoires sont généralement bonnes : 1% de déception. Il existe cependant des complications : algodystrophie, infection (dans environ 1% des cas), récidive. Plus rarement, une section d’un des rameaux nerveux destiné au pouce peut survenir.

[modifier] Liens externes

[modifier] Notes et références

  1. Bland JDP, Rudolfer SM, Clinical surveillance of carpal tunnel syndrome in two areas of the United Kingdom, 1991-2001, J Neurol Neurosurg Psychiatry 2003;74:1674-9
  2. Bland JDP, 'The relationship of obesity, age, and carpal tunnel syndrome: more complex than was thought?, Muscle and Nerve, 2005;32:527-32
  3. Hakim AJ, Cherkas L, El Zayat S et Als. The genetic contribution to carpal tunnel syndrome in women: a twin study, Arthritis Rheum 2002;47:275-9
  4. Le Clavier Dvorak permettrait d'être moins sensible à ces problèmes[réf. nécessaire]
  5. Ergonomie: poignets douloureux, 'syndrome du canal carpien' Actualité - Silicon.fr
  6. Report of the Quality Standards Subcommittee of the American Academy of Neurology, Practice parameter for carpal tunnel syndrome (summary statement), Neurology, 1993;43:2406-9