Rochers de Liancourt

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Rochers de Liancourt
Pays Japon / Corée du Sud
Localisation Mer du Japon (coréen: Mer de l'Est)
Superficie 0,18 km²
Point culminant Île de l'Ouest
174 m
Population Pas d'habitant permanent

Les rochers de Liancourt, Takeshima (kanji:竹島 - "île de bambou") en japonais, et Dokdo (Hangul: 독도, Hanja: 獨島 — "île lointaine") en coréen, sont un petit groupe d'îlots situé en mer du Japon, possession sud-coréenne mais dont la souveraineté est contestée par le Japon.

Alors que les premières manifestations d'occupation par la Corée remontent au sixième siècle, l'île a été occupée par les Japonais de 1910 à 1945. Takeshima (Dokdo) est placée actuellement sous la souveraineté et la juridiction de la Corée du Sud et appartient administrativement à Ulleungdo dans la région du Gyeongsang du Nord. Une distance de 87 km sépare l'archipel de l'île Ulleung-do (울릉도). Le Japon, pour sa part, considère que ce groupe d'îles s'appelle Takeshima et fait toujours partie de son territoire, rattaché au village de Goka, ville de Okinoshima, dans le district d'Oki de la préfecture de Shimane.

Le nom occidental de Rochers de Liancourt fait référence au baleinier français Le Liancourt qui, parti du Havre, « découvrit » l'archipel le 27 janvier 1849.

Sommaire

[modifier] Géographie

Les rochers de Liancourt sont principalement constitués de 2 îlots rocheux et escarpés, distant de 150 mètres (Seodo et Dongdo en coréen, Nishi-jima et Higashi-jima en japonais, signifiants dans les deux langues île occidentale et île orientale). L'îlot occidental est le plus grand des deux. Ils sont entourés d'environs 90 îlots ou récifs, des rochers volcaniques datant du Cénozoïque. 37 de ces îlots sont considérés comme des terres permanentes.

La superficie totale est d'environ 187 450 m2 avec un hauteur maximale de 169 mètres sur l'îlot occidental. Ce dernier mesure environ 88 640 m2 pour seulement 73 300 m2 pour l'îlot oriental. Les rochers de Liancourt sont situés par 131°52′ de longitude est et 37°14′ de latitude nord. Ils se trouvent à 217 km de la Corée continentale et 250 km de l'archipel principal du Japon. Mais le territoire coréen le plus proche, l'île Ulleung-do, n'est situé qu'à 87 km (visible par temps clair) tandis que le territoire japonais le plus proche, les îles Oki, se trouvent à 157 km.

L'îlot occidental consiste en un pic unique et présente de nombreuses cavités le long de sa côte. L'îlot oriental possède des falaises de 10 à 20 mètres de haut. Il existe deux grandes grottes s'ouvrant sur la mer ainsi qu'un cratère. La végétation est presque inexistante.[1]

Du fait de leur position, éloignée de toute côte, et de leur petite taille, les rochers de Liancourt connaissent parfois de rudes conditions météorologiques. Le temps changeant rapidement dans la zone rend les accès difficiles et aléatoires. Souvent les navires ne peuvent accoster à cause de forts vents de nord-ouest en hiver. Sinon, le climat est chaud et humide, fortement influencé par les courants océaniques chauds de la zone. Les précipitations sont élevées tout au long de l'année (moyenne annuelle de 1324 mm), avec de rares chutes de neige. Le brouillard est fréquent. L'été, les vents du sud dominent. Les eaux alentour ont une température de 10 degrés Celsius au printemps, quand l'eau est la plus froide, et d'environ 25 degrés Celsius en août.

Les rochers de Liancourt étaient inhabités à l'exception d'une petite garnison de gardes-côtes coréens estimée à une trentaine d'hommes et de gardiens de phare.[1] Mais en 2006, un couple de civils coréens, un pêcheur et son épouse, largement aidé et subventionné par le ministère coréen des Affaires maritimes, est venu s'installer sur l'île occidentale.[2]

Au sommet de l'île occidentale se trouve un phare, un sémaphore avec radar et diverses antennes radios, les logements de la troupe et une plateforme pour hélicoptères. L'ensemble est protégé par quelques batteries militaires.[1] Les Coréens ont construit un quai entre cette île et des rochers avoisinant, à l'entrée du passage séparant les 2 îles principales, et permettant d'accueillir de petits navires par temps calme.[1]

[modifier] Un territoire contesté

[modifier] Les revendications japonaises datant du début de l'occupation de la Corée

En 1905, les Japonais préparent leur occupation de la Corée en prenant juridiquement le contrôle des îles Dokdo qu'ils rebaptisent Takeshima (竹島), c'est-à-dire "îles bambou" en japonais.

À la fin de la Seconde Guerre mondiale et la mise à disposition des colonies japonaises par les Alliés, une série d'instruments internationaux a été instituée, dont la Déclaration du Caire et le Traité de Paix entre les Alliés et le Japon. Lorsque les Alliés se sont penchés sur la détermination des frontières du Japon, ils ont ainsi définitivement rendu ses territoires, dont les Rochers de Liancourt, à la Corée.

L’indépendance de la Corée a été initialement promise par les trois grandes puissances, les États-Unis, le Royaume-Uni et la Chine, par la Déclaration du Caire du 27 novembre 1943.

La Déclaration de Potsdam du 26 juin 1945 a endossé la Déclaration du Caire en statuant ainsi que « les termes de la Déclaration du Caire seront respectés et la souveraineté japonaise sera limitée aux îles de Honshu, Hokkaido, Kyushu, Shikoku et d’autres petites îles que nous désignerons ». L’acceptation expresse du Japon de la Déclaration de Potsdam par un acte de soumission signé le 2 septembre 1945 légalise ces deux déclarations.

Les directives du Commandant suprême des Alliés (SCAP), intitulées « Mémorandum concernant les séparations gouvernementale et administrative de certaines zones du Japon » (SCAPIN No 677), datées du 29 janvier 1946, ont été envoyées au gouvernement japonais en application de l’acte de soumission. Le territoire du Japon a donc été délimité aux quatre îles principales de l'archipel et aux quelque 1 000 petites îles avoisinantes. Les îles Ullungdo, Liancourt et Quelpart (Jeju) ont été explicitement exclues du territoire japonais. Le territoire de Liancourt a donc été clairement restitué à la Corée dans le document SCAPIN No 677.

Plus tard, selon l’article 2 du Traité de Paix signé avec le Japon en 1951, ce dernier reconnaît et renonce à tous les droits, titres et revendications quant à la Corée. Cette renonciation inclut Quelpart, l’île Dagelet et Port Hamilton. C’est en s’appuyant sur l’omission de Rochers de Liancourt dans le Traité de Paix que le Japon revendique la souveraineté de l’île, arguant que ce traité représente la fixation définitive de son territoire. Cependant, une interprétation juste de cet article serait que les îles mentionnées dans le traité ne sont que des exemples et non une liste exhaustive en regard du grand nombre des îles entourant la péninsule coréenne. Il n’y a, de plus, aucune décision qui annule le document SCAPIN No 677 dans les autres instruments d’après-guerre. Donc, l’omission de la mention de l'île Dokdo en tant que territoire de la Corée dans le Traité ne signifie en aucun cas une cession des Rochers de Liancourt au Japon.

Peu après la fin de la guerre de Corée, en 1954, la Corée du Sud prend administrativement le contrôle des îles, en y installant un contingent permanent de gardes-côtes.[3]

[modifier] Des revendications plus pressantes

Depuis l'arrivée au pouvoir de Jun'ichiro Koizumi (小泉純一郎 note), les revendications japonaises sur les Rochers de Liancourt se sont faites plus publiques. En 2005, le Japon a ainsi décidé d'instaurer un jour "Takeshima" (du nom japonais des îles), tandis que les manuels scolaires japonais relaient la position gouvernementale en affirmant la souveraineté japonaise sur les rochers de Liancourt.[4]

Pour leur part, les Coréens ont fait des rochers de Liancourt un symbole de leur indépendance nationale vis-à-vis du Japon. En effet, les îles Dokdo ont été le premier territoire coréen à avoir été annexé par l'empire nippon en 1905. Comme l'observe James Brook :

« Une grande part de la colère de la Corée du Sud vient de la connaissance du fait que, en 1905, les Dokdo ont été la première parcelle du territoire coréen à avoir été annexée par le Japon. En cinq ans, le Japon avait colonisé l'ensemble de la péninsule. Les Dokdo "sont le premier territoire coréen à avoir été perdu au profit du Japon quand la nation a été dépouillée de sa souveraineté", a déclaré le Conseil national de sécurité coréen le mois dernier. "Ce n'est pas seulement une question territoriale, mais rien d'autre qu'un déni de l'histoire de notre libération nationale, de même qu'une justification de l'agression."[5] »

Au-delà du symbole politique, les îles représentent aussi désormais un enjeu économique et commercial de taille, source de litiges quant à la délimitation des zones économiques exclusives, déterminante pour la pêche et la prospection sous-marine.[6]

La Corée du Nord pour sa part considère que les îles appartiennent à la « Nation coréenne » et parle d'une demande « pirate » et « anachronique » du Japon.[7]

Le gouvernement des États-Unis refuse de prendre parti sur le légitime administrateur des îles.

[modifier] Une réserve naturelle

Inhabitées, à l'exception de la petite garnison, les rochers de Liancourt constituent une importante réserve naturelle, notamment pour les oiseaux migrateurs. Vingt-deux espèces d'oiseaux peuplent l'archipel, protégé en tant que "monument naturel" par la législation sud-coréenne depuis 1982.[8]

[modifier] Liens externes

[modifier] Références

  1. abcd France 3, magazine Thalassa, novembre 2007
  2. Korean Time, Dokdo Hosts First Civilians in a Decade
  3. Corey Richardson, South Korea must choose sides, sur le site "Asia Times on line", 9 septembre 2006
  4. "Japan history texts anger East Asia", BBC, 5 avril 2005
  5. James Brook, "A desolate rock - and a focus of Korean pride", The New York Times, vendredi 6 mai 2005
  6. On peut apprécier l'urgence de ces enjeux en observant une carte de la délimitation des différentes zones entre le Japon et la Corée, par exemple la carte figurant sur le site de la Documentation française. On constate notamment que les îles Dokdo/Liancourt/Takeshima se situent à la limite des zones économiques exclusives japonaise et sud-coréenne.
  7. KCNA, "Japan Urged to Behave with Discretion", 22 avril 2006
  8. Shin Yong-ha, professeur d'histoire sociale à l'Université nationale de Séoul, "History and Culture of Dokdo Islands", sur le site ClickKorea