Rente

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Une rente est

  • pour un particulier, une somme fixée à l'avance reçue périodiquement (par exemple chaque mois ou chaque année), pour une durée déterminée ou, éventuellement, pour le reste de sa vie (rente viagère).
  • en économie, une notion centrale (liée à celle de profit) mais qui a de multiples définitions selon les auteurs. De façon approximative, c'est un bénéfice supplémentaire qu'un agent économique peut obtenir par rapport à ses concurrents, parce que ses coûts de production sont inférieurs pour un prix de vente identique, ou parce qu'il est en mesure d'obtenir un prix de vente supérieur.
  • en finance, un emprunt perpétuel (sans remboursement du capital, mais avec versement d'intérêts réguliers et fixes) émis par un état, constituant une source de rente pour un particulier.

Sommaire

[modifier] La rente en tant que revenu pour le rentier

Une rente peut être obtenue "à titre onéreux" (lorsqu'il a fallu verser une somme d'argent, par exemple en souscrivant un titre de rente émis par un état) ou "à titre gratuit".

La retraite (qu'elle soit par capitalisation ou par répartition), la rente viagère, les pensions d'invalidité ou les pensions alimentaire sont ainsi des formes particulières de rente ou assimilables à des rentes.

Le terme de rentier est en général réservé à un individu qui "vit de ses rentes", c'est à dire qui n'a pas d'"emploi" (même si par ailleurs la gestion de son patrimoine peut représenter un travail important) et qui dispose de revenus relativement fixes et sans risques (placement obligataires à base d'emprunts d'état ou garantis en or, revenus fonciers, contrats d'assurances ou de vente viagère, indemnités obtenues par voie judiciaire, etc.) et suffisants pour un train de vie moyen ou supérieur. Cela exclut les artisans ou professionnels libéraux, dont les revenus sont liés à leur travail même lorsque leur activité représente un capital important, ainsi éventuellement que les "capitalistes" dont l'investissement est lié à une activité relativement risquée. Cela exclut enfin, au moins dans l'esprit du public, les retraités : bien que que leurs revenus soient techniquement une rente, ce qui en fait de ce point de vue des rentiers, ils ont acquis cette rente par leur travail.

Les fortes périodes d'inflation liées aux deux guerres mondiales ont provoquées la "mort des rentiers", tandis que Keynes se félicitait de "l'euthanasie des rentiers" (façon de mettre au travail une frange de la population).

[modifier] La rente dans l’économie classique

La rente, en particulier la rente agricole, est au cœur de l’analyse économique tout au long du XVIIIe et du XIXe siècle. Entre autres, Ricardo (en particulier dans Des principes de l'économie politique et de l'impôt, Ch.II) ou Karl Marx décrivent longuement les liens entre le niveau de la rente et le niveau de la production. En lien avec la théorie de la valeur la rente est aux sources des débats sur la relation entre productivité, prix et profit.

[modifier] La rente dans l’économie néo-classique

Dans l’approche néo-classique, la rente n’est pas un prix mais un profit : en situation de concurrence pure et parfaite, les profits sont nuls mais toute distorsion se traduit par l’apparition de 'rentes' (voir aussi rente de situation).

La plus classique est la rente de monopole ; en situation de monopole une entreprise pratique un prix supérieur au prix de marché et, en dépit d’une production inférieure, profite de marges supérieures.

Dans cette logique, et de manière plus ponctuelle, la rente est liée à l’idée de niche sur un marché. Dés lors qu’elles existent, la recherche de niches à l’abri de la concurrence (qu’il s’agisse de différences dans les produits, de distance entre les lieux de commercialisation, d’entente entre producteurs, etc.) peut devenir un élément moteur pour certains acteurs. La théorie économique sur la dynamique des innovations technologiques repose d’ailleurs beaucoup sur cette notion de rente : selon que la protection liée à un brevet sera extensive ou non, l’inventeur bénéficiera ou non d’une niche (absence de concurrence) plus ou moins importante. Une protection importante ouvre la porte à des rentes de situations qui incitent fortement à l’innovation. Une protection faible rend celle-ci moins attractive car les copieurs pourront très rapidement venir concurrencer l’inventeur sans supporter les mêmes coûts initiaux de recherche-développement. En revanche, une protection très forte peut freiner l’innovation en décourageant tout concurrent éventuel. Cet équilibre entre protection des innovations et diffusion de la connaissance est au cœur de l’économie de l’innovation.

[modifier] La rente foncière

Icône de détail Article détaillé : Économie urbaine.

Dans le prolongement direct des analyses sur la formation de la rente agricole, l’économie spatiale a renouvelé les débats autour de la rente foncière. Cela a progressivement conduit a l’émergence d’un champ scientifique spécifique, l’économie urbaine. Suite aux travaux de Von Thünen (1827), le lien entre productivité d’un sol et prix/rente de celui-ci s’est doublé d’une réflexion sur la taille des parcelles, leur prix et l’occupation du sol induite.

Appliqué à la croissance des villes, le modèle de rente lie a la production permise par un lieu ou un sol (que l'utilisation soit agricole, industrielle ou autre) permet de comprendre comment le sol à bâtir (plus cher) remplace progressivement le sol agricole en frontière des villes à mesure que la population urbaine croît et comment les différentes activités se localisent les unes par rapport aux autres au sein de la ville. Utilisé comme élément de compréhension et de modélisation des villes, la rente foncière se retrouve au cœur des modèles économiques permettant d'analyser les conséquences d'investissements particuliers ou de tarifications des transports sur la forme des villes.

Dans cette approche, la rente foncière s’apparente par beaucoup d’aspects au loyer du sol. L’adéquation entre les prix et loyers des bureaux, usines, commerces ou logements dépend alors des modes de régulation propres au marché immobilier et du droit associé.

[modifier] La "Rente" : l'emprunt perpétuel d'état

En France, la rente apparut sous l'ancien régime à partir de la première émission d'emprunt sous cette forme par François Ier, puis réapparut à partir de la stabilisation financière après la Révolution française et dura jusqu'à la troisième République. Des instruments identiques existaient dans les autres pays. Très tôt, il a existé un marché des rentes, puisqu'il était possible de vendre son titre de rente en échange d'un capital, ou inversement de se constituer une rente en achetant un titre.

La rente a un avantage politique, celui d'obliger le rentier à soutenir le gouvernement contre les alternatives qui menacent de supprimer les rentes, et c'est l'un des plus puissants motifs à l'introduction des pensions de retraite en Allemagne par Bismarck. Mais si le rentier perdait confiance, il vendait sa rente plutôt que de risquer de le perdre dans un soubresaut politique, et le prix baissait. C'était inquiétant pour les gouvernants et ils surveillaient cela comme le lait sur le feu : représentatif de la confiance accordée au gouvernement, au gré des événements économiques, politiques ou militaires, ce prix de la rente avait un impact direct sur les finances publiques. En effet, un bas prix obligeait les états, perpétuellement nécessiteux et par conséquent perpétuellement émetteurs de dettes, à donner plus de rente pour recueillir la même quantité d'argent, donc à gager plus de leur futurs recettes (fiscales).

La finance moderne, avec ses instruments beaucoup plus sophistiqués, et les évolutions de la pensée économique, ont conduit les états à remplacer la rente par des emprunts à très long terme (30 ou 50 ans par exemple) qui sont pratiquement équivalents, et permettent aux emprunteurs de se constituent des rentes. La différence essentielle, c'est que pour des raisons de maintien de la confiance, les états s'interdisent de racheter leur propre dette (ils ont trop de moyens de manipuler les cours, donc de spolier leurs créanciers : c'est sans doute rentable à cours terme, mais désastreux à long terme puisque cela fera fuir les bailleurs de fonds), et qu'une dette éternelle ne peut pas être très satisfaisante, alors qu'une dette à terme long mais fixé dans le temps est admissible.

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