Offa de Mercie

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Offa de Mercie
Roi de Mercie
Penny d'Offa

Règne

757 – juillet 796

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Prédécesseur Beornred
Successeur Ecgfrith
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Ministre(s)-président(s) {{{ministre-président}}}

Biographie
Nom de naissance {{{nom naissance}}}
Naissance {{{naissance}}}
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Décès juillet 796
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Maison royale {{{maison royale}}}
Père Thingfrith
Mère {{{mère}}}
Consort(s) {{{consort}}}
Conjoint(s) Cynethryth
Descendance Ælfflæd
Eadburh
Æthelburh
Æthelswith
Maîtresse(s) {{{maîtresse}}}
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Amant(s) {{{amant}}}
Favori(s) {{{favori}}}
Descendance
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Résidence(s) {{{résidence}}}
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Autres fonctions
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Rois de Mercie

Offa (mort en juillet 796) fut roi de Mercie de 757 à sa mort. Fils de Thingfrith et descendant d'Eowa, frère du roi Penda, qui avait régné un siècle plus tôt, Offa monta sur le trône après une période de guerre civile provoquée par l'assassinat d'Æthelbald, en triomphant de Beornred, un autre prétendant au trône. Il est probable qu'il passa les premières années de son règne à asseoir sa position sur les peuples des Midlands, comme les Hwicce et les Magonsæte. Après 762, il tira avantage de l'instabilité du Kent pour se proclamer son suzerain, et contrôlait le Sussex en 771, bien que son autorité ait été contestée dans les deux royaumes. Dans les années 780, il étendit son pouvoir sur la plus grande partie du sud de l'Angleterre, s'alliant avec Beorhtric de Wessex, qui épousa Eadburh, fille d'Offa, et reprit le contrôle du sud-est. Il devint également suzerain de l'Est-Anglie, et fit décapiter le roi Æthelberht II d'Est-Anglie en 794, peut-être parce qu'il s'était révolté contre lui.

Offa était un roi chrétien, mais il entra en conflit avec l'Église, notamment avec Jaenberht, l'archevêque de Cantorbéry. Offa parvint à persuader le pape Adrien Ier de diviser l'archidiocèse de Cantorbéry en deux, créant un nouvel archidiocèse à Lichfield. Cette réduction de la puissance de Cantorbéry était peut-être motivée par le désir d'Offa qu'un archevêque consacre roi son fils Ecgfrith, étant donné que Jaenberht refusa peut-être de participer à la cérémonie, qui se tint en 787.

Les pièces de monnaie du règne d'Offa montrent des représentations élégantes de sa personne, et la qualité artistique de ces images dépasse de loin celle des pièces franques contemporaines. Quelques-unes représentent sa femme Cynethryth, la seule reine anglo-saxonne à avoir été ainsi représentée. Seules trois pièces d'or d'Offa ont survécu ; l'une d'entre elles est une reproduction d'un dinar abbasside de 774, et porte du texte en arabe sur une face et l'inscription « Offa Rex » sur l'autre. Ces pièces d'or sont d'un usage incertain, et furent peut-être frappées pour servir d'aumônes ou de dons à Rome.

De nombreux historiens considèrent Offa comme le plus puissant monarque anglo-saxon avant Alfred le Grand. Sa domination ne s'étendit jamais sur la Northumbrie, bien qu'il ait marié une de ses filles, Ælfflæd, au roi northumbrien Æthelred Ier en 792. Son règne était autrefois considéré par les histoirens comme une étape du processus menant à une Angleterre unie, mais cette vision n'est désormais plus majoritaire. Pour reprendre les termes d'un historien récent, « Offa était guidé par le goût du pouvoir, non par une vision de l'unité anglaise ; et il laissa une réputation, non un héritage »[1]. Offa mourut en 796, et son fils Ecgfrith lui succéda. Il régna moins de cinq mois, puis Coenwulf devint roi.

Sommaire

[modifier] Arrière-plan historique et sources

Les royaumes de l'île de Bretagne à l'époque d'Offa
Les royaumes de l'île de Bretagne à l'époque d'Offa

Durant la première moitié du VIIIe siècle, le plus puissant des monarques anglo-saxons était le roi Æthelbald de Mercie, qui était devenu le suzerain de toutes les provinces au sud du Humber en 731. Il était de ces forts monarques merciens qui régnèrent entre le milieu du VIIe siècle et le début du IXe. La puissance mercienne ne déclina pas avant l'époque d'Egbert de Wessex, au IXe siècle[2].

La puissance et le prestige d'Offa en firent l'un des monarques les plus notables des Îles britanniques durant le Haut Moyen Âge[3], bien qu'aucune biographie contemporaine de lui ne nous soit parvenue[2]. Une source majeure pour cette période est la Chronique anglo-saxonne, un ensemble d'annales en vieil anglais relatant l'histoire des Anglo-Saxons. Il s'agit toutefois d'un produit du Wessex, et on estime parfois qu'elle est biaisée en faveur de ce royaume, auquel cas elle ne rendrait pas précisément compte du pouvoir détenu par le Mercien Offa[4]. On peut voir ce pouvoir à l'œuvre dans les chartes datant du règne d'Offa. Ces chartes étaient des documents qui entérinaient la donation de terres à des partisans ou à des hommes d'église, et les rois qui avaient le pouvoir d'accorder ces terres étaient témoins de ces chartes[5],[6]. Une charte pouvait porter les noms d'un roi sujet et de son suzerain dans la liste des témoins annexée à la donation. Une telle liste de témoins apparaît sur l'Ismere Diploma, par exemple, où Æthelric, fils du roi Oshere des Hwicce, est décrit comme subregulus (ou sous-toi) d'Æthelbald[7],[8]. Bède le Vénérable, moine et chroniqueur du VIIIe siècle, rédigea une histoire de l'Église anglaise intitulée Historia ecclesiastica gentis Anglorum. Elle ne couvre que les événements s'étant déroulés jusqu'en 731, mais étant l'une des sources majeures de l'histoire anglo-saxonne, elle fournit d'importances informations concernant les bases du règne d'Offa[9].

L'Offa's Dyke, qui fut probablement construite en majeure partie sous son règne, témoigne des importantes ressources dont disposait Offa et de sa capacité à les organiser[10]. Parmi les autres sources d'époque, on trouve un document connu sous le nom de Tribal Hidage, qui fournit une preuve supplémentaire de l'étendue du pouvoir d'Offa, encore que l'attribution de ce document à son règne soit sujette à débat[11]. On trouve également un ensemble significatif de lettres, provenant notamment d'Alcuin, un diacre et érudit anglais qui passa plus d'une décennie à la cour de Charlemagne comme conseiller du roi et correspondit avec des rois, nobles et ecclésiastiques de toute l'Angleterre[12]. Ces lettres révèlent en particulier les relations d'Offa avec le continent, de même que ses monnaies, basées sur des exemples carolingiens[13].

[modifier] Ascendance et famille

L'ascendance d'Offa est donnée dans l'Anglian collection, un ensemble de généalogies qui retrace entre autres les ascendances de quatre rois de Mercie. Toutes ces lignées se rattachent à Pybba, qui régna sur la Mercie au début du VIIe siècle. Offa y est donné comme fils de Thingfrith, fils d'Eanwulf, fils d'Osmod, fils d'Eowa, fils de Pybba. Æthelbald, roi de Mercie durant la majeure partie des quarante années avant l'avènement d'Offa, descendait également d'Eowa d'après ces généalogies : le grand-père d'Offa, Eanwulf, était le cousin issu de germain d'Æthelbald[14]. Æthelbald accorda des terres à Eanwulf dans le territoire des Hwicce, et il est possible qu'Offa et Æthelbald aient été issus de la même branche de la famille. Dans une charte, Offa parle d'Æthelbald comme de son parent, et Heabert, le frère d'Æthelbald, continua à être témoin de chartes après l'avènement d'Offa[15],[16].

La femme d'Offa était Cynethryth, dont l'ascendance est inconnue. Ils eurent un fils, Ecgfrith, et quatre filles : Ælfflæd, Eadburh, Æthelburh et Æthelswith.[17]. On a supposé qu'Æthelburh, qui devint abbesse, était l'abbesse du même nom apparentée au roi Ealdred des Hwicce. Toutefois, d'autres femmes célèbres de l'époque portaient le nom d'Æthelburh[16].

[modifier] Débuts de règne : Mercie, Middlesex et Essex

Æthelbald, roi de Mercie depuis 716, fut assassiné en 757. D'après la continuation anonyme de l'Historia Ecclesiastica de Bède, rédigée après la mort de ce dernier, il fut « traîtreusement assassiné de nuit par ses propres gardes du corps », mais on ignore le mobile du crime. À Æthelbald succéda tout d'abord Beornred, au sujet duquel peu d'éléments sont connus. Le continuateur de Bède indique de Beornred « régna un court moment, et son règne fut malheureux », et ajoute que « la même année, Offa, ayant forcé Beornred à fuir, chercha à s'emparer dans le sang du royaume des Merciens »[18]. Il est toutefois possible qu'Offa n'ait pas commencé à régner avant 758, sachant qu'une charte de 789 indique qu'il s'agit de la trente-et-unième année du règne d'Offa[16].

Le conflit de succession suggère qu'Offa dut rétablir le contrôle sur les dépendances traditionnelles de la Mercie, dont les Hwicce et les Magonsæte. Des chartes datant des deux premières années du règne d'Offa montrent les rois des Hwicce comme reguli, ou roitelets, sous son autorité. Il est probable qu'il parvint également à contrôler les Magonsæte très tôt : on ne trouve pas trace d'un souverain indépendant pour ce peuple après 740[1],[16],[19]. Offa semble avoir également étendu rapidement son influence sur le royaume de Lindsey, la dynastie indépendante de Lindsey ayant disparu à cette époque[1],[20].

On ne sait pas grand-chose de l'histoire de l'Essex au VIIIe siècle, mais les éléments existants montrent que Londres et le Middlesex, qui avaient appartenu à l'Essex, entrèrent dans la sphère de domination mercienne sous le règne d'Æthelbald. Lui et Offa accordèrent des terres dans le Middlesex et à Londres comme bon leur semblait : en 767, une charte d'Offa disposait de terres à Harrow sans souverain local comme témoin[21]. Il est probable que Londres et le Middlesex furent rapidement contrôlées par Offa dès le début de son règne[22]. La maison royale de l'Essex survécut au VIIIe siècle, et il est donc probable que le royaume d'Essex ait conservé ses monarques locaux, mais ait été soumis à une forte influence mercienne, durant la majeure partie du reste du siècle[23].

Il est peu probable qu'Offa ait eu une influence significative au-delà des terres traditionnellement merciennes au début de son règne. La suzeraineté exercée par Æthelbald sur l'Angleterre du Sud semble s'être effondrée durant la lutte pour sa succession, et ce n'est pas avant 764, où l'on voit apparaître l'influence d'Offa dans le Kent, qu'on peut de nouveau voir la puissance mercienne en expansion[24].

[modifier] Kent et Sussex

Offa semble avoir profité de la situation instable du Kent après 762[25]. Le Kent avait une longue tradition de royauté conjointe, avec l'ouest et l'est du pays gouvernés par deux rois, dont l'un dominait toutefois le plus souvent l'autre[26]. Avant 762, le royaume était gouverné par Æthelberht II et Eadberht Ier ; Eardwulf, le fils d'Eadberht, est également indiqué comme ayant régné. Æthelberht mourut en 762, et la dernière mention d'Eadberht et d'Eardwulf date de cette même année. Les chartes des deux années suivantes mentionnent d'autres rois de Kent, dont Sigered, Eanmund et Heahberht. En 764, Offa accorda des terres à Rochester en son nom propre, avec Heahberht, roi de Kent, comme témoin. Un autre roi de Kent, Egbert, apparaît sur une charte de 765 aux côtés d'Heahberht, charte qui fut confirmée par la suite par Offa[27]. L'influence d'Offa sur le Kent est alors claire, et on a suggéré que Heahberht ait été placé sur le trône du Kent par Offa comme roi client[25]. Les opinions des historiens divergent sur la possibilité d'une suzeraineté ultérieure d'Offa sur le Kent. On sait qu'il a révoqué une charte d'Egbert, en se basant sur le fait qu'« il était mauvais que son thegn ait osé donner une terre allouée à lui par son seigneur à un autre sans son témoignage », mais la date de la charte originale d'Egbert est inconnue, tout comme celle de sa révocation par Offa[28]. Il se peut qu'Offa ait effectivement été le suzerain du Kent de 764 jusqu'en 776 au moins. Les rares preuves de l'implication personnelle d'Offa dans les affaires du royaume entre 765 et 776 incluent deux chartes de 774 par lesquelles il concède des terres au Kent, mais leur authenticité est douteuse, et les interventions d'Offa au Kent avant 776 se limitèrent peut-être aux années 764-765[29].

La Chronique anglo-saxonne rapporte que « les Merciens et les habitants du Kent luttèrent à Otford » en 776, mais ne donne pas l'issue de la bataille. Elle est traditionnellement considérée comme une victoire mercienne, mais rien ne prouve la domination d'Offa sur le Kent avant 785 : une charte de 784 ne mentionne qu'un roi de Kent nommé Ealhmund, ce qui pourrait indiquer que les vaincus d'Otford furent peut-être en réalité les Merciens[30]. Les causes du conflit sont également inconnues : si Offa régnait sur le Kent avant 776, la bataille d'Otford était sans doute une révolte contre le joug mercien[1]. Cependant, Ealhmund ne réapparaît plus, et une suite de chartes d'Offa des années 785-789 montrent clairement son autorité. Durant ces années, il traita le Kent « comme une province ordinaire du royaume mercien »[31], et ses actions ont été considérées comme dépassant les relations classiques de suzeraineté, s'étendant jusqu'à l'annexion du Kent et l'élimination de la lignée royale locale. Après 785, comme le dit un historien, « Offa était le rival, non le suzerain, des rois de Kent »[32]. La domination mercienne dura au moins jusqu'en 796, année de la mort d'Offa, durant laquelle Eadberht Praen réussit brièvement à rendre son indépendance au Kent[33].

Ealhmund était probablement le père d'Egbert de Wessex, et il est possible que les interventions d'Offa au Kent vers le milieu des années 780 soient liées à l'exil ultérieur d'Egbert en Francie. La Chronique affirme que lorsque Egbert envahit le Kent, en 825, les hommes du sud-est se rallièrent à lui « parce qu'ils avaient été auparavant arrachés à tort à ses parents »[34]. Il s'agit vraisemblablement d'une allusion à Ealhmund, qui pourrait impliquer qu'Ealhmund était le suzerain local des royaumes du sud-est. Si tel est le cas, l'intervention d'Offa avait sans doute pour but de prendre le contrôle de cette relation et de dominer à son tour les royaumes associés[35].

Les preuves de l'implication d'Offa au royaume de Sussex proviennent de chartes, et comme dans le cas du Kent, les historiens ne sont pas d'accord sur le déroulement des événements. Les rares éléments qui subsistent concernant les rois du Sussex indiquent que plusieurs rois régnaient en même temps, et le Sussex ne forma peut-être jamais un royaume unique. On a prétendu que l'autorité d'Offa fut reconnue dès le début de son règne par les rois locaux de l'ouest du Sussex, mais que l'est (autour de Hastings) se soumit moins docilement à lui. Symeon de Durham, chroniqueur du douzième siècle, note qu'en 771, Offa vainquit « le peuple de Hastings », ce qui pourrait indiquer l'extension de la domination d'Offa au royaume entier[36]. Cependant, des doutes ont été émis sur l'authenticité des chartes qui appuient cette version des choses, et il est possible que l'implication directe d'Offa au Sussex se soit limitée à une courte période vers 770-771. Après 772, il n'y a plus rien qui prouve une implication de la Mercie dans les affaires du Sussex jusque vers 790, et il est possible qu'Offa ait pris le contrôle du Sussex à la fin des années 780, comme au Kent[37].

[modifier] Est-Anglie, Wessex et Northumbrie

En Est-Anglie, Beorna devint sans doute roi vers 758. Ses premières frappes datent d'avant celles d'Offa, ce qui implique l'indépendance vis-à-vis de la Mercie. L'histoire de l'Est-Anglie devient plus obscure par la suite, mais en 779, Æthelberht II devint roi, et fut indépendant suffisamment longtemps pour commander des frappes propres[38]. En 794, d'après la Chronique anglo-saxonne, « le Roi Offa ordonna que la tête du Roi Æthelberht fût tranchée ». Offa fit frapper des pennies en Est-Anglie au début des années 790, et il est donc probable qu'Æthelberht se soit révolté contre Offa et ait été décapité en conséquence[39]. Des récits de l'événement ont survécu selon lesquels Æthelberht mourut à cause des manigances de la femme d'Offa, Cynethryth, mais les plus anciens manuscrits où apparaît cette histoire, peut-être légendaire, datent des onzième et douzième siècles, et les historiens ne les considèrent pas comme dignes de confiance[40]. La légende affirme également qu'Æthelberht fut tué à Sutton St. Michael et enterré à six kilomètres au sud, à Hereford, où son culte prospéra, ne le cédant même à une époque qu'à Cantorbéry comme destination de pélerinage[41],[42].

Au sud de la Mercie, Cynewulf monta sur le trône du Wessex en 757 et reprit une grande partie du territoire frontalier qu'Æthelbald avait conquis. En 779, Offa remporta une victoire importante sur Cynewulf à Bensington (dans l'Oxfordshire), reconquérant une partie des terres le long de la Tamise[43]. Avant cette date, aucune charte dont l'authenticité soit certaine ne présente Cynewulf dans l'entourage d'Offa[35], et rien ne prouve qu'Offa ait jamais été le suzerain de Cynewulf[43]. En 786, après le meurtre Cynewulf, Offa intervint peut-être pour placer Beorhtric sur le trône du Wessex. Même si Offa ne le soutint pas, il semble plausible que Beorhtric ait reconnu Offa comme suzerain, jusqu'à un certain degré, peu après son avènement[43],[44]. La monnaie d'Offa était utilisée dans tout le Wessex, et Beorhtric ne frappa ses propres pièces qu'après la mort d'Offa[45]. En 789, il épousa Eadburh, une fille d'Offa[44] ; la Chronique note que les deux rois s'allièrent pour exiler Egbert en Francie pour « trois années », ajoutant que « Beorhtric aida Offa parce qu'il avait sa fille pour reine »[46]. Certains historiens pensent que « trois années » est une erreur, et qu'il faudrait plutôt lire « treize années », ce qui signifierait que l'exil d'Egbert aurait duré de 789 à 802, mais cette vision ne fait pas l'unanimité[47]. Eadburh est mentionnée par Asser, un ecclésiastique du neuvième siècle qui écrivit une biographie d'Alfred le Grand : il affirme qu'Eadburh avait « pouvoir sur presque tout le royaume », et qu'elle « commença à agir en tyran, à l'image de son père »[48]. Quel que soit le pouvoir dont elle disposait en Wessex, il était sans aucun doute lié à la suzeraineté de son père[49]. Egbert s'empara du trône du Wessex après la mort de Beorhtric, en 802.

Si Offa ne tira aucun avantage en Wessex avant de vaincre Cynewulf en 779, il se peut que ses victoires au sud du fleuves aient été une condition nécessaire pour intervenir au sud-est. Ainsi, la mort d'Egbert de Kent vers 784, suivie par celle de Cynewulf en 786, permirent à Offa de prendre le contrôle du Kent et de faire passer Beorhtric dans sa zone d'influence. Cette vision des choses suppose également qu'Offa ne contrôlait pas le Kent après 764-765, comme le pensent certains historiens[50].

La politique matrimoniale d'Offa s'étendit jusqu'à la Northumbrie : en 792, sa fille Ælfflæd épousa Æthelred Ier de Northumbrie à Catterick[51]. Cependant, rien n'indique que la Northumbrie fut jamais soumise à la Mercie sous le règne d'Offa[1].

[modifier] Le Pays de Galles et l'Offa's Dyke

Le long de l'Offa's Dyke, près de Knill, dans le Herefordshire
Le long de l'Offa's Dyke, près de Knill, dans le Herefordshire

Offa fut fréquemment en guerre contre les divers royaumes gallois. Il y eut une bataille entre Merciens et Gallois à Hereford en 760, et les Annales Cambriae du Xe siècle indiquent qu'Offa mena des campagnes contre les Gallois en 778, 784 et 796[52],[53].

L'héritage le plus fameux du règne d'Offa est l’Offa's Dyke, une grande barrière de terre qui suit approximativement la frontière anglo-galloise. Elle est mentionnée par le moine Asser dans sa biographie d'Alfred le Grand : « un certain roi vigoureux nommé Offa [...] fit bâtir une grande digue entre Galles et Mercie, de la mer à la mer »[54]. La digue n'a pas été datée par des moyens archéologiques, mais la plupart des historiens n'ont aucune raison de douter de l'attribution faite par Asser[55]. D'anciens noms pour cette digue, en anglais et en gallois, soutiennent également son attribution à Offa[56]. En dépit de l'indication par Asser qu'elle s'étendait « de la mer à la mer », on pense aujourd'hui que la structure originale ne couvrait qu'environ deux tiers de la frontière : au nord, elle s'achève près de Llanfynydd, à moins de 8 kilomètres de la côte, tandis qu'au sud, elle s'achève à Rushock Hill, près de Kington, dans le Herefordshire, à moins de 80 kilomètres du canal de Bristol. La longueur totale de ce segment est d'environ 103 kilomètres[55]. D'autres fortifications de terre existent le long de la frontière galloise, parmi lesquelles Wat's Dyke est l'une des plus grandes, mais il est impossible de les dater relativement : on ne sait donc pas si l'Offa's Dyke était une copie ou une source pour Wat's Dyke[57].

La construction de la digue suggère qu'elle avait pour but d'être une barrière efficace, et de fournir un poste d'observation sur les Galles, ce qui implique que les Merciens qui la bâtirent furent libres de choisir le meilleur emplacement possible[55]. Il existe des établissements à l'ouest de la digue dont les noms suggèrent qu'ils étaient anglais au neuvième siècle, et il est donc possible qu'en choisissant l'emplacement de leur fortification, les Merciens aient sciemment rendu des terrains aux Bretons[58]. Il est aussi possible que ces établissements aient déjà été reconquis par les Gallois, ce qui indiquerait un rôle plutôt défensif pour la digue[59]. Le travail et les dépenses que coûtèrent vraisemblablement la construction de la digue sont impressionnants, et suggèrent que son bâtisseur (Offa ou un autre) disposait de ressources considérables.

[modifier] Références

commons:Accueil

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  1. abcde Simon Keynes, « Offa », in Encyclopaedia of Anglo-Saxon England, p. 340.
  2. ab Simon Keynes, « Mercia », in Lapidge, Encyclopaedia of Anglo-Saxon England, p. 307.
  3. Richard Fletcher (Who's Who, p. 100) le décrit comme « de l'avis général, le monarque anglo-saxon le plus imposant avant Alfred ».
  4. Campbell, Anglo-Saxon State, p. 144.
  5. Hunter Blair, Roman Britain, pp. 14–15.
  6. Campbell, The Anglo-Saxons, pp. 95-98.
  7. Whitelock, English Historical Documents, 67, pp. 453-454.
  8. Pour une étude montrant comment l'emploi de ce genre de preuves permet de retracer la progression de la suzeraineté d'Offa sur les Hwicce afin de supprimer la dynastie régnante, et l'absorption ultérieure du royaume par la Mercie, voir Patrick Wormald, « The Age of Offa and Alcuin », in Campbell et al., The Anglo-Saxons, p. 123.
  9. Roger Ray, « Bede », in Lapidge et al., Blackwell Encyclopaedia of Anglo-Saxon England, pp. 57-59.
  10. Yorke, Kings and Kingdoms, p. 117.
  11. Peter Featherstone passe en revue quelques théories concernant les origines du Tribal Hidage dans « The Tribal Hidage and the Ealdormen of Mercia » in Brown & Farr, Mercia, p. 29.
  12. Michael Lapidge, « Alcuin of York », in Lapidge et al., Blackwell Encyclopaedia of Anglo-Saxon England, p. 24.
  13. Patrick Wormald, « The Age of Offa and Alcuin », in Campbell et al., eds., The Anglo-Saxons, pp. 110-118.
  14. Yorke, Kings and Kingdoms, pp.101-104.
  15. Yorke, Kings and Kingdoms, p. 112.
  16. abcd Kirby, Earliest English Kings, p. 163.
  17. Offa 7, PASE ; voir « personal relationships ».
  18. La « continuation de Bède » est d'un autre auteur, mais les toutes premières entrées sont peut-être de la main de Bède lui-même. Voir Bede's Ecclesiastical History of England: Christian Classic Ethereal Library. Consulté le 11 mars 2008
  19. Yorke, Kings and Kingdoms, p. 113.
  20. D'après les généalogies, le dernier roi du Lindsey avait pour nom Aldfrith, et l'identification de ce roi avec un autre Aldfrith, témoin d'une charte d'Offa en 787, put faire croire qu'Aldfrith régnait toujours à ce moment-là. Toutefois, on ne pense plus possible que les deux Aldfrith puissent être une seule et même personne. Yorke, Kings and Kingdoms, p. 113.
  21. Stenton, Anglo-Saxon England, pp. 204-205. La charte elle-même est traduite en anglais moderne dans Whitelock, English Historical Documents, 73, p. 461.
  22. Kirby, Earliest English Kings, p. 164.
  23. Yorke, Kings and Kingdoms, p. 50.
  24. Stenton, Anglo-Saxon England, p. 206.
  25. ab Kirby, Earliest English Kings, p. 165.
  26. Yorke, Kings and Kingdoms, p. 32.
  27. Stenton, Anglo-Saxon England, pp. 206-207.
  28. Cet événement est prouvé par une charte de Coenwulf de Mercie de 799, par laquelle il concède de nouveau la terre, citant les raisons de la révocation de la charte par Offa, sans donner de date. La charte est traduite en anglais moderne dans Whitelock, English Historical Documents, 80, p. 470.
  29. Kirby cite le commentaire de Stenton sur Egbert, « simple subordonné » d'Offa, et donne son opinion selon laquelle il n'y a « aucune preuve certaine » de ce fait. À l'opposé, Keynes s'accorde avec Stenton pour dire qu'Offa prit « le contrôle du Kent dans les années 760 ». Simon Keynes, « Offa », in Lapidge, Blackwell Encyclopaedia of Anglo-Saxon England, p. 340; Stenton, Anglo-Saxon England, p. 207; Kirby, Earliest English Kings, pp. 165-166.
  30. Stenton, Anglo-Saxon England, p. 207-208; Kirby, Earliest English Kings, p. 165.
  31. Kirby, Earliest English Kings, pp. 166-167; Stenton, Anglo-Saxon England, pp. 207-208.
  32. La citation est de Patrick Wormald, « Bede, the Bretwaldas, and the origin of the Gens Anglorum » in Wormald et al., Ideal and Reality, p. 113, cité dans Kirby, Earliest English Kings, p. 167.
  33. La Chronique n'indique pas clairement si Eadberht monta sur le trône après la mort d'Offa ou après celle d'Ecgfrith. Stenton suggère que la révolte au Kent débuta avant la mort d'Offa. Voir Swanton, Anglo-Saxon Chronicle, pp. 56-57 ; Stenton, Anglo-Saxon England, p. 225 ; Kirby, Earliest English Kings, p. 178.
  34. Swanton, Anglo-Saxon Chronicle, p. 60.
  35. ab Kirby, Earliest English Kings, p. 168.
  36. Stenton, Anglo-Saxon England, p. 208 ; Whitelock, English Historical Documents, p. 243.
  37. Kirby détaille le problème des chartes, et suggère aussi que la situation au Kent et au Sussex à ce moment-là peut être liée à l'entrée pour l'année 823 de la Chronique anglo-saxonne, qui affirme que les royaumes du sud-est furent « arrachés à tort » à la famille d'Egbert de Wessex, qui était le fils d'Ealhmund de Kent. Kirby, Earliest English Kings, pp. 167-168 ; voir aussi Swanton, Anglo-Saxon Chronicle, p. 60.
  38. Kirby, Earliest English Kings, pp. 164, 166.
  39. Yorke, Kings and Kingdoms, p. 64.
  40. Stenton, Anglo-Saxon England, p. 210 ; Kirby, Earliest English Kings, p. 177 ; voir aussi Zaluckyj & Zaluckyj, « The Age of Mercian Supremacy », in Zaluckyj et al., Mercia, pp. 152-153, qui détaille les plus anciennes versions de la légende.
  41. Blair, Church in Anglo-Saxon Society, p. 288.
  42. Zaluckyj & Zaluckyj, « The Age of Mercian Supremacy », in Zaluckyj et al., Mercia, p. 153.
  43. abc Stenton, Anglo-Saxon England, p. 209.
  44. ab Yorke, Kings and Kingdoms, p. 141.
  45. Blackburn & Grierson, Early Medieval Coinage, pp. 281-282.
  46. Swanton, Anglo-Saxon Chronicle, p. 62.
  47. Par exemple, Fletcher assume qu'Egbert passa l'essentiel du règne de Beorhtric en Francie ; voir Fletcher, Who's Who, p. 114. De la même façon, Swanton annote « 3 années » avec « en fait treize années [...] cette erreur est commune à tous les manuscrits ». Voir la note 12 dans Swanton, Anglo-Saxon Chronicle, pp. 62–63. En revanche, Stenton accepte le chiffre de trois années : voir Stenton, Anglo-Saxon England, p. 220. Il ajoute en note qu'il « est très dangereux de rejeter une lecture si bien attestée ».
  48. Keynes & Lapidge, Alfred the Great, p. 71.
  49. Yorke, Kings and Kingdoms, p. 147.
  50. Cette théorie est celle de Kirby ; voir Kirby, Earliest English Kings, p. 169.
  51. Kirby, Earliest English Kings, p. 154.
  52. Annales Cambriae, sub anno 760, 778 and 784.
  53. Stenton, Anglo-Saxon England, pp. 214-215.
  54. Asser, Alfred the Great, ch. 14, p. 71.
  55. abc Margaret Worthington, « Offa's Dyke », in Lapidge, Blackwell Encyclopaedia of Anglo-Saxon England, p. 341.
  56. Stenton, Anglo-Saxon England, p. 213.
  57. Margaret Worthington, « Wat's Dyke », in Lapidge et al., Blackwell Encyclopaedia of Anglo-Saxon England, p. 468.
  58. Stenton cite par exemple le village de « Burlingjobb », en Powys, non loin de l'extrémité sud de la digue, dont le nom ne pourrait guère avoir émergé aussi tard qu'au neuvième siècle. Stenton, Anglo-Saxon England, p. 214.
  59. Patrick Wormald, « Offa's Dyke », in James Campbell et al., The Anglo-Saxons, pp. 120-121.