Neuromarketing

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Schéma d'un stimulus sur l'hypothalamus.
Schéma d'un stimulus sur l'hypothalamus.

Le neuromarketing est l’utilisation des techniques de neuro-imagerie pour identifier les mécanismes cérébraux impliqués dans les comportements d’achat des consommateurs. L’un des objectifs du neuromarketing est de s’assurer qu’un produit activera les zones du cerveau responsables de la sécrétion d’hormones, qui prédisposeront le corps à être séduit par un produit.

Le neuromarketing désigne deux concepts étroitement liés :

Sommaire

[modifier] Fonctionnement

Lorsqu'un produit de consommation stimule l'hypothalamus par des techniques de neuromarketing, des hormones telles que la testostérone ou la dopamine mobilisent le corps à la réceptivité des stimulis que dégage le produit. L'hypothalamus activé influencera la région du cerveau impliquée dans la rationalité du sujet, et la pensée ainsi conduite renderait un produit plus attrayant, par la sécrétion d'hormones.

[modifier] Définitions et usages

Le neuromarketing fait appel à plusieurs techniques d'imagerie médicale pour enregistrer la réponse cérébrale d'un agent économique dans certaines situations, telles que le visionnage d'une publicité, le test de produits concurrents, l'acte d'achat en situation réelle, etc.. L'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) et l'électro-encéphalographie sont notamment mises à contribution pour cerner les mécanismes neurologiques liés à la décision d'achat et, si possible, l'influencer en adaptant les techniques marketing. Le neuromarketing consiste donc en une approche intégrée du marketing, que Droulers et Roulet [2006] qualifient de « neuroscience du consommateur »[1] : à la dimension rationnelle de la décision d'achat s'ajoute le rôle de l'inconscient et de la prédétermination comportementale.

Ces mêmes auteurs distinguent deux éclairages épistémologigues actuels du récent neuromarketing : cette discipline émergente peut être réduite à se applications mercantiles et ne constituer aux yeux de la communauté scientifique qu'un réinvestissement de techniques médicales, ou bien elle peut être envisagée comme une participation à « l'élargissement et à l'accumulation des connaissances relatives aux relations esprit-cerveau, tout en conservant parallèlement une finalité pratique dans la vie des affaires. »[1] Cette distinction met en lumière le débat sur l'éthique associée au neuromarketing. Droulers et Roullet [2006] estiment que « le fait d'observer (au niveau macroscopique) n'a jamais influé ou modifié le sujet d'observation. Affirmer que la découverte de certaines activations cérébrales sous certains stimuli commerciaux est le premier pas vers une manipulation pure et simple, relève de l'affabulation ou de l'ignorance. »[1] A contrario, plusieurs intellectuels et des associations de consommateurs ont exprimés leurs craintes ; ainsi, Marie Bénilde met en garde contre des publicitaires qui « aspirent à entrer dans les cerveaux de leurs cibles et pensent que la science le leur permet. »[2]

[modifier] Éléments historiques, études et perspectives

Le terme « neuromarketing » est apparu aux début des années 2000. Cette approche est née des recherches du docteur Read Montague, chercheur à l'université de Baylor (Texas). D'autres chercheurs, tant en économie qu'en gestion et marketing, avaient déjà tenté d'intégrer des données neuroscientifiques à leurs paradigmes théoriques [3]. L'expérimentation neurologique est souvent complexe, coûteuse et de facto réservée en priorité aux études pathologiques : les techniques les plus légères (électro-encéphalographie) sont dès lors les plus couramment utilisées[4]. Les biais introduits par les méthodologies expérimentales imposées par les appareils de mesure actuels limitent la pertinence des résultats obtenus, qui se limitent pour le moment à la mise en évidence de mécanismes décisionnels généraux et à la mesure de préférences spontanées.

En 1998, Dehaene et al. mettent en évidence[5] un effet facilitateur (temps de décision raccourci si deux stimuli successifs induisent la même décision au terme du second stimuli), aussi bien par IRMf qu'électro-encéphalographie. Dans un contexte de prise de décision économique, des stimulis bien choisis pourraient dès lors, peut-être, avoir une influence non négligeable. Ces perspectives sont à la base de l'intérêt des milieux marketing pour les études neuronales aux débuts des années 2000.

En 2004, McLure et al. conduisent une étude[6] aux résultats largement relayés dans les médias sur les préférences implicites et explicites de consommation entre deux marques de sodas (Pepsi et Coca-Cola). Par deux tests, le premier consistant en une dégustation de deux échantillons différents sans connaissance des deux marques, le second consistant en une dégustation de deux échantillons avec connaissance d'une des deux marques seulement (ce second test étant répété deux fois, pour les deux marques), les chercheurs mettent en évidence l'influence de la marque sur l'appréciation explicite du produit par les consommateurs. Sans connaissance des marques, ou en connaissance de la marque Pepsi, ils ne montraient statistiquement pas de préférence notable pour l'un ou l'autre des deux échantillons. Lorsqu'ils savaient être entrain de boire du Coca-Cola, une nette préférence pour ce soda était rexprimée. Dans le premier cas, c'est essentiellement le putamen qui était actif (valeurs gustatives, plaisir). Dans le second cas, en plus du cortex préfrontal ventromédian, l'hippocampe, le cortex préfrontal dorsolatéral, le tronc central étaient actifs, tandis que le putamen était nettement en retrait. Les deux types de réponses constituant des comportements objectifs au sens des réflexes neurologiques, cette étude mettait en évidence l'influence de la mémorisation et de la marque Coca-Cola.

Le neuromarketing est ainsi appelé à se développer comme banc d'essai, car il peut permettre de quantifier l'impact de dispositifs particuliers (design, conditionnement et packaging, etc.) et de dégager des tendances (qualitatives) de préférences spontanées des consommateurs. La détermination d'invariants décisionnels, même sur le moyen terme (préférences générationnelles par tranches d'âge, préférences sociales, par exemple), représente donc un angle d'étude possible. Moins aisée semble être l'utilisation des premiers résultats du neuromarketing pour le développement de techniques marketing liée aux réflexes inconscients et à la mémoire : si plusieurs études mettent en évidence le rôle important de la mémorisation, le lien entre préférences spontanées et mémoire est encore mystérieux. Un développement du neuromarketing est de donner des indications sur la manière d'influencer la mémorisation et donc les préférences spontanées, ce qui suppose de quantifier efficacement et de façon réaliste la mémorisation d'actes publicitaires ou commerciaux. Toutefois, « se souvenir » n'est pas « acheter » et pour les publicitaires, l'enjeu reste d'associer à une préférence conditionnée, une intention d'achat effective, ce qui paraît encore loin d'être réalisable. Pourtant, des cabinets de conseils en neuromarketing existent déjà (par exemple BrightHouse Neurostrategies aux États-Unis, Impact Mémoire en France…).

[modifier] Critiques

L'objectif recherché par les défendeurs du neuromarketing est d'augmenter la consommation citoyenne, en ne considérant plus sa capacité de jugement mais sa réceptivité à un stimulus, lui retirant ainsi la rationalité de ses besoins. Les détracteurs jugent que d'orienter la recherche neuronale dans le but d'influencer les choix des consommateurs est un manque d'éthique scientifique.

[modifier] Notes et Références

  1. abc O. Droulers et B. Roullet, Neuromarketing : cadre théorique et perspectives [pdf], in Actes du 22e congrès AFM, Nantes, 2006
  2. Marie Bénilde, Scanner les cerveaux pour mieux vendre — La publicité s'implique dans les neurosciences, Le Monde diplomatique de novembre 2007
  3. Neuromarketing : Is it coming to a lab near you ?, Frontline - PBS, 2004
  4. La large diffusion des machines IRM aux États-Unis et leur utilisation partagée entre services médicaux et organismes de recherche constitue une exception importante, du fait qu'une grande partie des études de neuromarketing sont réalisées aux États-Unis.
  5. S. Dehaene et al., Imaging unconscious semantic priming, Nature, n° 395, 1998
  6. S. McLure et al., Neural correlates of behavioral preferences for culturally familliar drinks [pdf], Neuron, vol. 44, 2004

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens externes