Luxation

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Luxation antérieure sous coracoïdienne de l'épaule gauche
Luxation antérieure sous coracoïdienne de l'épaule gauche

La luxation, est définie par une perte de contact totale des surfaces articulaires d'une articulation se produisant au décours d'un traumatisme. C'est une des urgences en chirurgie orthopédique dans le sens où l'intervention (par manœuvres ou par opération) doit intervenir rapidement. D'une part pour le risque de compression d'éléments nobles (vaisseaux, nerfs) mais aussi pour l'avenir de l'articulation (déformation articulaire, instabilité, arthrose). Elle peut être favorisée par une trop grande élasticité des ligaments appelée hyperlaxité. Dans le langage courant la luxation est appelée déboîtement. Lorsque la perte de contact n'est pas totale, on parle de sub-luxation, elle est souvent le fait d'instabilités articulaires chroniques. En ostéopathie, on évoque des luxations notamment au niveau vertébral mais c'est une expression pour décrire une douleur localisée sans qu'il y ait perte complète du contact articulaire.

Sommaire

[modifier] Mécanisme

Le mécanisme le plus fréquent est une chute à distance du foyer douloureux (luxation de l'épaule par chute sur la main), ou une sollicitation extérieure d'un membre comme une clef de bras (armlock). Le membre joue un rôle de levier qui amplifie l'effort sur l'articulation.

[modifier] Diagnostic

Luxation acromio-claviculaire (épaule gauche) : on note sur la photo que l'épaule est plus basse, et que la clavicule remonte en « touche de piano » ; la disjonction acromio-claviculaire est nettement visible sur la radio (1 cm) ; les vis et la cicatrice sont d'un traumatisme ancien sans rapport avec le cas présent
Luxation acromio-claviculaire (épaule gauche) : on note sur la photo que l'épaule est plus basse, et que la clavicule remonte en « touche de piano » ; la disjonction acromio-claviculaire est nettement visible sur la radio (1 cm) ; les vis et la cicatrice sont d'un traumatisme ancien sans rapport avec le cas présent

Les premiers éléments pouvant faire penser à une luxation sont :

  • le mécanisme : choc, chute ;
  • la douleur, apparue brusquement et localisée ;
  • l'impotence fonctionnelle : il est extrêmement douloureux ou impossible d'effectuer certains mouvements même aidé ;
  • la déformation : asymétrie des articulations souvent manifeste (l'articulation de gauche ne ressemble pas à celle de droite) ;
  • la perception par le patient d'un craquement qui témoigne de la déchirure des sangles ligamentaires (mais c'est valable aussi pour une entorse grave);
  • la perception par le patient lors du traumatisme d'un claquement voire d'un ressaut qui témoigne d'une sortie de l'os de son logement ;
  • antécédent de luxation : lorsqu'une articulation a été luxée, elle est affaiblie et donc l'apparition d'une autre luxation au même endroit est probable.

Ces signes ne sont pas spécifiques et peuvent aussi indiquer une entorse ou une fracture, mais un examen clinique attentif fera la différence. À l'inverse, certaines luxations présentent des symptômes atténués, par exemple dans le cas d'une personne ayant des articulations souples (enfant, récidive de luxation).

Le seul examen pouvant indiquer sans ambigüité s'il y a luxation ou non est la radiographie.

[modifier] Conséquences

La luxation est un déplacement ou un écartement de deux surfaces articulaires, accompagné d'une déchirure des ligaments, qui peut aller dans les cas extrêmes jusqu'à leur rupture ou à un arrachement osseux. Il y a donc une fragilisation de l'articulation. De même, la luxation peut entraîner une fracture osseuse (exemple : fracture de la glène dans la luxation scapulo-humérale) qui fragilisera aussi l'articulation.

En outre, le déplacement de l'articulation peut pincer un nerf ou un vaisseau sanguin, ce qui peut provoquer des problèmes neurologiques aux membres (notamment aux extrémités) et d'alimentation sanguine (ischémie). Pour les membres, on aura une indication de tels problèmes si la personne présente :

  • des troubles de la sensibilité (sensation de fourmillement, perte de sensibilité, sensation de décharge électrique) ou de la motricité des extrémités ;
  • un pouls distal (radial ou pédieux) dissymétrique, difficile à sentir d'un côté voire absent, des pâleurs et froideurs aux doigts ou orteils.

Dans certains cas, une luxation non détectée et donc non réduite aura pour conséquence, sur le long terme, une reconstruction articulaire : une nouvelle articulation va se créer sur la nouvelle zone de contact articulaire sous la forme d'un creusement osseux, une mobilité approximative est alors retrouvée. Ce type de réarrangement osseux est le plus souvent observé sur les luxations de l'épaule et de la hanche.

[modifier] Traitement

La luxation est un problème qui doit être traité par un médecin, c'est une urgence.

[modifier] En attendant les secours

Il faut conseiller à la victime de ne pas bouger, et interdire à toute personne de tenter de bouger la victime sauf urgence vitale (dégagement d'urgence). Si la personne tombe inconsciente, il faudra la tourner en position latérale de sécurité du côté blessé.

[modifier] Prompt secours

Le relevage et le transport (brancardage) doivent s'effectuer avec beaucoup de soin en évitant les à-coups.

Dans le cas d'une luxation de l'épaule, on posera une écharpe diagonale, ou on mettra un linge sous l'aisselle pour essayer de soutenir le poids du bras qui tire sur l'épaule. Dans les autres cas, l'immobilisation se fera avec le matelas immobilisateur à dépression.

[modifier] Traitement médical

Réduction, contention. Il est très important d'utiliser des radiographies afin de s'assurer que la luxation n'est pas accompagnée d'une fracture. Généralement, une luxation de l'épaule demande 5 semaines d'immobilisation de l'articulation par l'intermédiaire d'une attelle type écharpe ou gilet GCI. traitements de la luxation

  • sous anesthésie générale,
  • réduction de la luxation en faisant revenir doucement l'extrémité luxée dans son compartiment d'origine,
  • immobilisation de l'articulation en position de relâchement pendent 10 à 21 jours.

[modifier] Cas particuliers

Toutes les articulations peuvent être le siège d'une luxation, mais certaines localisations sont plus fréquentes

[modifier] Luxation de l'épaule

La luxation scapulo-humérale ou gléno-humérale, le plus souvent antérieure "pure" mais peut s'accompagner d'une fracture de la grande tubérosité (ou trochiter) dans ce cas la réduction est la même, mais il faudra fixer le fragment au reste de l'humérus. Quand il n'y a pas d'arrachement osseux, la réduction doit être rapidement réalisée, pas tant pour l'avenir de l'articulation mais plutôt pour la moindre difficulté de réalisation. En effet de nombreuses techniques ont été décrites, la plus connue est celle d'Hippocrate, consistant à tirer sur le bras dans l'axe en plaçant le pied de l'opérateur dans l'aisselle du patient. Actuellement cette technique se heurte à de nombreux échecs car source de douleurs importantes, hors la réussite d'une réduction dépend directement du relâchement musculaire du patient. Ceci explique la variabilité individuelle, certaines luxations de l'épaule se résolvant sans aucune anesthésie, ni sédation, simplement avec une analgésie légère, et d'autre se terminant au bloc opératoire sous anesthésie générale après plusieurs tentatives infructueuses (en particulier chez un sujet jeune et musclé pour lequel le relâchement musculaire n'a pas pu être obtenu). De toutes façons la réduction est un geste médico-chirurgical, les risques sont la blessure du nerf circonflexe qui détermine la sensibilité du galbe de l'épaule, il peut être abimé au moment du traumatisme comme lors du traitement et sa blessure doit être recherchée et consignée sur le dossier médical. Les autres blessures sont plus rares, signalons juste le risque de fracture de la tête humérale sur le bord de l'omoplate chez un patient âgé à os fragile. Tout ceci est valable pour la luxation en avant de l'omoplate mais il existe des luxations postérieures, donc en arrière de diagnostic plus difficile (pouvant être une lésion traumatique suivant une crise d'épilepsie), et des luxations inférieures "erecta", le bras restant levé vers le ciel sans possibilité d'abaissement. Le déplacement étant particulier, la réduction nécessite toujours une anesthésie générale. Les luxations répétées ou itératives ne guériront plus et nécessiteront une stabilisation chirurgicale pour éviter les récidives.

[modifier] Luxation du coude

Réduction s'eefectue obligatoirement sous anesthésie générale avec immobilisation secondaire par plâtre ou résine. Le risque de déplacement secondaire sous plâtre est important, nécessitant une surveillance radiologique régulière.

[modifier] Pronation douloureuse

C'est une luxation de la tête du radius au niveau du coude suite à un mouvement en traction du bras. Elle se produit chez le petit enfant tenu par la main, tiré vers le haut, l'enfant se laissant tomber à terre. La réduction est souvent aisée quand l'enfant n'est pas trop craintif. Lorsqu'il est atteint, l'enfant présente une douleur du coude ou même simplement du poignet ou du pouce. Cette douleur est majorée lors des mouvement du coude raison pour laquelle l'enfant adopte une position antalgique caractéristique, bras fléchit à 90° en pronation et soutenu par l'autre main.

[modifier] Luxation des doigts

Au niveau des articulations entre les phalanges, elles sont assez fréquentes, et en général simples à réduire. Il faut se méfier des blessures tendineuses occasionnées (en particulier sur le tendon extenseur). Le plus gros risque est de vouloir réduire en force son doigt déformé sans comprendre exactement le déplacement, et d'engendrer une fracture. Au niveau des articulations entre phalanges et métacarpiens, elles sont plus rares et plus complexes, il arrive parfois qu'elles soient irréductibles par interposition de la plaque palmaire, fibrocartilage qui constitue le socle articulaire à la face palmaire des articulations des doigts.

[modifier] Luxation du pouce

La réduction n'est pas facile à obtenir, et le risque est au cours de la manœuvre d'intercaler un des 2 petits os sésamoïdes dans l'interligne articulaire rendant les mouvements impossibles et obligeant à opérer.

[modifier] Au niveau du poignet

Il n'existe pas réellement de luxation du poignet, car en général l'ensemble ligamentaire reste solidaire et c'est le plus souvent une fracture de l'extremité inférieure du radius, du cubitus qui se produit. Seul un osselet du carpe risque véritablement de se luxer, c'est le semi-lunaire, il faut toujours opérer pour le replacer. Les luxations entre le carpe et les métacarpiens sont peu fréquentes, difficiles à visualiser sur des radiographies (tableau de grosse main traumatique totalement impotente avec radiographies paraissant normales) et doivent être opérées.

[modifier] Luxation de la hanche

La luxation sur hanche saine est la conséquence d'un traumatisme à haute énergie cinétique, en général lors d'accidents de la route, elle est peu fréquente, souvent associée à une fracture du bassin, la réduction sous anesthésie générale est réellement urgente au risque d'entrainer une nécrose de la tête du fémur. La luxation sur prothèse de hanche est fréquente, bénigne (il n'y a pas de risque pour l'articulation puisque celle-ci a été remplacée par la prothèse), la réduction est simple mais nécessite quand même une anesthésie générale pour obtenir un bon relâchement musculaire.

[modifier] Luxation de la rotule

Elle se produit toujours dans le même sens, la rotule allant se loger en haut et dehors de la trochlée fémorale. La réduction est simple, pouvant être réalisée par le patient lui même en mettant la jambe en extension et en empaumant la rotule pour la ramener vers le bas et l'intérieur. Une contention souple aide à la cicatrisation d'un ligament (aileron rotulien) interne, c'est lui qui en se déchirant autorise le déplacement.

[modifier] Luxation du genou

Nécessite une anesthésie générale, elle peut se compliquer de contusion voire de rupture de l'artère poplitée qui passe derrière le genou. Aussi la première urgence est de traiter une ischémie post-traumatique du genou avant de s'occuper de l'articulation. La réduction obtenue, le genou doit être réévalué car il existe fréquemment des lésions des ménisques, des ligaments croisés, des ligaments latéraux et de la capsule articulaire, le genou se retrouvant en situation d'entorse grave.

[modifier] Luxation d'un ménisque du genou

En "anse de sceau", elle sort un peu du cadre des luxations traumatiques dans le sens où elle peut être associée à d'autres lésions du genou, et constitue donc une entorse grave nécessitant un bilan diagnostic précis avant traitement adapté. Quand il existe une déchirure partielle d'un ménisque qui déborde vers le centre de l'articulation bloquant ainsi les mouvements, la réduction peut être obtenue en manipulant le genou pour faire "céder" (mais jamais en force) la partie coincée. En cas d'échec, ont peut soit différer de quelques jours le traitement, le fragment revenant à l'occasion d'un mouvement dans la position initiale, soit envisager une arthroscopie pour le libérer.

[modifier] Luxation de la cheville et du pied

La luxation "pure" de la cheville, c'est à dire tibio-astragalienne, est rare, le plus souvent il s'agit d'une fracture-luxation, c'est à dire fractures des extrémités inférieures du tibia ou du péroné autorisant le déplacement du pied en arrière, en avant ou sur les côtés. La réduction doit être obtenue rapidement, la stabilisation des fractures se faisant secondairement. La luxation peut se produire sous l'astragale et entraine fréquemment des séquelles. L'astragale peut être "énucléé" avec issue de l'os à travers la peau, exemple de luxation ouverte. Les luxations entre tarse et métatarsiens doivent être réduites au bloc et stabilisées. Les luxations métatarso-phalangiennes suivent les mêmes principes qu'à la main. Les luxations entre les phalanges d'orteils ne posent en général pas de problèmes.

[modifier] Les luxations de la colonne vertébrale

Elles sont peu fréquentes, la colonne subissant plus souvent des fractures et des tassements. Elles existent au niveau cervical avec un risque quand la luxation se produit en dessous de la 4ème vertèbre cervicale de tétraplégie, et un risque au dessus de la 4ème vertèbre cervicale de mort (le risque étant la compression ou rupture de la moelle épinière, et à ce niveau se trouve le centre d'innervation du diaphragme qui régule la respiration autonome). À l'étage lombaire ou thoracique on ne décrit pas de luxations simples. Au niveau sacro-coccygien, il peut exister des luxations mais elles sont difficiles d'interprétation sur des radiographies et le terme de luxation du coccyx est souvent utilisé abusivement pour décrire une blessure à ce niveau.

[modifier] Luxations de la clavicule

À son extrémité externe, ou disjonction acromio-claviculaire. C'est une lésion dont les conséquences diffèrent beaucoup selon les patients, d'une simple gêne esthétique par une bosse à une impotence quasi-complète de l'épaule. Elle passe souvent inaperçue dans les polytraumatismes, ou lorsque la radiographie est mal réalisée, on porte un diagnostic de contusion de l'épaule mais celle-ci ne s'améliore pas avec le temps. Dans les formes invalidantes une stabilisation chirurgicale peut être réalisée. À son extrémité interne, la clavicule peut se luxer en avant du sternum, en général on ne perçoit pas la saillie sous la peau, car il existe un volumineux hématome, ou en arrière pouvant réaliser théoriquement une compression des structures profondes du thorax.

[modifier] Luxation congénitale de la hanche

Elle touche les filles dans la proportion de six à huit pour un garçon. Elle affecte particulièrement les Lapons, les Amérindiens Navajos, les Kabyles, les Inuits et les Bigoudens.

Cette anomalie du positionnement de la tête du fémur dans le cotyle est handicapante si elle n'est pas diagnostiquée par une échographie à l'âge d'un mois par un pédiatre attentif puis traitée en maintenant les membres inférieurs du bébé fléchis, cuisses écartées, au moyen de langeage adapté et serré, ou d'un coussin de Becker ou d'un harnais.

Le portage peut régler le problème de luxation de la hanche chez l'enfant si la pathologie n'est pas trop sévère et que les parents d'enfants atteints prennent leur rôle de porteur au sérieux.

Icône de détail Article détaillé : Luxation congénitale de la hanche.

[modifier] Luxation de l'articulation temporo-mandibulaire (ATM)

Il existe 2 types de luxation de l'ATM :

  • la luxation discale, c'est une altération fonctionnelle des ATM, caractérisée par la dislocation du complexe disco-condylien.
  • la luxation condylienne ou luxation temporo-mandibulaire qui est une altération des rapports entre l'éminence temporale et le condyle mandibulaire.

La réduction se fait grâce à la manœuvre de Nélaton.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens externes